France, portrait social Édition 2021
Cet ouvrage apporte un éclairage sur plus d’un an de crise sanitaire, aux conséquences économiques et sociales inédites : Comment ont évolué la mortalité et la santé de la population au cours des différentes vagues ? Quel a été le niveau d’adoption des mesures de prévention ? Comment le système de soin a-t-il été impacté ? Quels territoires ont été les plus touchés par la baisse des naissances observée neuf mois après le premier confinement ? Quelles sont les conséquences de la crise sur les revenus des ménages et sur le marché de l’emploi ? Comment les jeunes ont-ils vécu cette crise ?
Neuf mois après le premier confinement, une baisse plus marquée des naissances dans les territoires fortement touchés par l'épidémie
Sandra Brée (CNRS, LARHRA), Didier Breton (Université de Strasbourg, Ined), Thomas Ducharne (Insee), Sophie Villaume (Insee)
De décembre 2020 à février 2021, neuf mois après le premier confinement décidé à la suite de la première vague de l’épidémie de Covid-19 en France, le nombre de naissances a fortement baissé par rapport aux trois hivers précédents. Les inquiétudes liées au contexte sanitaire et économique ou encore l’accès difficile voire impossible aux centres de procréation médicalement assistée ont pu conduire un certain nombre de personnes à reporter ou abandonner leur projet de parentalité.
Le recul de la natalité a été plus marqué dans les départements particulièrement touchés par la première vague de l’épidémie, pour la plupart situés dans le nord et l’est de la France. L’importance de ce recul semble en revanche moins liée à l’ampleur de la dégradation de la situation économique. Les ménages vivant en zone urbaine ou dans les communes les plus touchées par la pauvreté ont davantage reporté ou ajourné leur projet de parentalité.
Au printemps 2021, le nombre de naissances repart à la hausse, mais sans combler la baisse de l’hiver. La baisse de la natalité s’est poursuivie dans un quart des départements. Dans les autres, le déficit est rarement comblé, surtout dans les départements où la baisse a été la plus forte en hiver.
La baisse du nombre de naissances a été plus forte chez les femmes les plus jeunes (moins de 30 ans) et les plus âgées (40 ans ou plus). Au printemps, la natalité des premières a continué d’être inférieure à celle des années précédentes, tandis qu’elle a rebondi pour leurs aînées.
Insee Références
Paru le :25/11/2021
- Forte baisse des naissances à l'hiver 2020-2021
- Une baisse de la natalité très forte à l’hiver 2020-2021, suivie d’une reprise au printemps
- Le nombre de naissances a davantage baissé dans les départements les plus touchés par la première vague de Covid-19
- Les effets économiques de la crise sanitaire ont peu pesé sur la natalité au niveau départemental
- Dans les départements où les effets économiques et sanitaires se cumulent, la baisse des naissances est souvent plus forte
- Les habitants des zones urbaines ont davantage reporté ou annulé leurs projets de naissance lors du premier confinement
- Les projets de parentalité davantage bouleversés dans les communes les plus touchées par la pauvreté
- Une baisse des naissances particulièrement forte avant 30 ans et après 40 ans
- Un rattrapage très partiel des naissances au printemps 2021
- Dans un quart des départements, la natalité a continué de reculer au printemps
- Encadré 1 - Le confinement affecte les naissances dans les DOM malgré une première vague épidémique parfois plus tardive
- Encadré 2 - Les grandes épidémies de grippe du 20ᵉ siècle ont eu moins d’effet sur la natalité que celle du Covid-19
Forte baisse des naissances à l'hiver 2020-2021
En France, face à l’explosion du nombre d’hospitalisations [Costemalle et al., 2021], le gouvernement décide de confiner une première fois la population de l’ensemble du territoire du 17 mars au 11 mai 2020 (sauf à Mayotte où cela est prolongé). Un déconfinement progressif et différencié selon les régions suit. Ce contexte sanitaire a suscité de fortes inquiétudes au sein de la population, auxquelles se sont ajoutées des incertitudes quant aux conséquences économiques et sociales de cette crise. L’accès aux soins, dont ceux liés à la procréation, a aussi été plus difficile pendant cette période. Dans ce contexte, un certain nombre de femmes et de couples ont reporté ou abandonné leur projet d’avoir un enfant. Ainsi, le nombre de naissances a particulièrement diminué à l’hiver 2020-2021 par rapport aux hivers précédents : c’est la plus forte baisse depuis la fin du baby-boom [Papon, 2021a]. À partir de mars 2021, soit un peu plus de neuf mois après la sortie du premier confinement, la natalité a repris.
En s’appuyant sur les données d’état-civil (sources), cet éclairage s’intéresse à l’évolution des naissances depuis le début de la crise sanitaire et aux disparités selon les territoires et les caractéristiques de la population.
Une baisse de la natalité très forte à l’hiver 2020-2021, suivie d’une reprise au printemps
Le nombre de naissances diminue chaque année depuis six ans [Papon et Beaumel, 2021]. Lors des onze premiers mois de l’année 2020, correspondant à une conception antérieure au premier confinement, la natalité baisse encore de 3 % par rapport à la moyenne des trois années précédentes sur la même période. Cependant, en fin d’année, le recul s’accentue : − 8 % en décembre 2020, − 14 % en janvier 2021 et − 5 % en février 2021 (figure 1). Ainsi, neuf mois après le premier confinement, le nombre moyen de naissances quotidiennes diminue fortement par rapport à la même période les trois années précédentes (− 9 % pour la période de décembre 2020 à février 2021). Cette décroissance est bien plus marquée que la baisse tendancielle des naissances, si celle-ci s’était poursuivie en l’absence dépidémie . À partir de mars 2021, neuf mois après le déconfinement, les naissances repartent à la hausse et cette tendance s’accentue en avril sans compenser totalement la chute des mois précédents.
tableauFigure 1 - Nombre moyen de naissances quotidien selon le mois et l’année
2017-2018 | 2018-2019 | 2019-2020 | 2020-2021 | |
---|---|---|---|---|
Octobre (Janvier) | 2 173 | 2 157 | 2 125 | 2 066 |
Novembre (Février) | 2 135 | 2 101 | 2 062 | 1 972 |
Décembre (Mars) | 2 070 | 2 037 | 2 032 | 1 884 |
Janvier (Avril) | 2 031 | 2 038 | 2 006 | 1 740 |
Février (Mai) | 1 990 | 1 960 | 1 952 | 1 863 |
Mars (Juin) | 1 927 | 1 936 | 1 962 | 1 979 |
Avril (Juillet) | 1 961 | 1 971 | 1 923 | 2 010 |
Mai (Août) | 2 085 | 2 053 | 2 006 | 1 971 |
Juin (Septembre) | 2 116 | 2 098 | 2 056 | 2 022 |
- Note : données provisoires pour 2020 et 2021. Le mois de conception correspondant est indiqué entre parenthèses.
- Lecture : en janvier 2021, 1 740 bébés sont nés en moyenne chaque jour.
- Champ : France.
- Source : Insee, statistiques de l’état civil, données extraites fin juillet 2021.
graphiqueFigure 1 - Nombre moyen de naissances quotidiennes selon le mois et l’année
Pendant l’hiver 2020-2021, la baisse de la natalité (mesurée au lieu de domicile de la mère) culmine dans l’Aisne et les Deux-Sèvres (– 18 % chacun entre décembre 2020 et février 2021) et est globalement plus marquée dans le nord et l’est de la France métropolitaine (figure 2a), notamment en Île-de-France, dans le Grand Est, les Hauts-de-France et en Bourgogne-Franche-Comté . Aucune région n’est cependant complètement épargnée. La baisse du nombre de naissances est également importante dans les départements d’outre-mer, alors que la première vague épidémique était de moindre ampleur dans certains d’entre eux (encadré 1). Les Landes, la Creuse et la Lozère sont les trois seuls départements dans lesquels le nombre de naissances progresse pendant cette période . La reprise des naissances au printemps, entre mars et mai 2021, concerne une majorité de départements (figure 2b), mais ne compense pas la baisse des naissances pendant l’hiver, sauf dans quelques rares départements (figure 2c).
tableauFigure 2a - Évolution du nombre de naissances quotidiennes durant l’hiver 2020-2021 par rapport aux trois années précédentes
Ain | – 2,25 |
---|---|
Aisne | – 18,13 |
Allier | – 4,94 |
Alpes-de-Haute-Provence | – 2,21 |
Hautes-Alpes | – 4,56 |
Alpes-Maritimes | – 8,15 |
Ardèche | – 2,61 |
Ardennes | – 4,61 |
Ariège | – 13,13 |
Aube | – 2,60 |
Aude | – 15,43 |
Aveyron | – 9,23 |
Bouches-du-Rhône | – 10,91 |
Calvados | – 7,32 |
Cantal | – 9,47 |
Charente | – 4,94 |
Charente-Maritime | – 1,22 |
Cher | – 7,84 |
Corrèze | – 4,53 |
Côte-d’Or | – 10,12 |
Côtes-d’Armor | – 1,41 |
Creuse | 4,54 |
Dordogne | – 0,30 |
Doubs | – 13,85 |
Drôme | – 13,37 |
Eure | – 6,83 |
Eure-et-Loir | – 8,79 |
Finistère | – 6,01 |
Corse-du-Sud | – 13,01 |
Haute-Corse | – 2,79 |
Gard | – 8,73 |
Haute-Garonne | – 5,87 |
Gers | – 2,45 |
Gironde | – 3,08 |
Hérault | – 10,59 |
Ille-et-Vilaine | – 5,10 |
Indre | – 9,07 |
Indre-et-Loire | – 7,15 |
Isère | – 9,76 |
Jura | – 16,47 |
Landes | 3,28 |
Loir-et-Cher | – 6,58 |
Loire | – 4,72 |
Haute-Loire | – 6,34 |
Loire-Atlantique | – 10,27 |
Loiret | – 12,71 |
Lot | – 3,62 |
Lot-et-Garonne | – 11,66 |
Lozère | 6,15 |
Maine-et-Loire | – 5,46 |
Manche | – 4,59 |
Marne | – 11,02 |
Haute-Marne | – 6,35 |
Mayenne | – 3,33 |
Meurthe-et-Moselle | – 11,37 |
Meuse | – 7,21 |
Morbihan | – 4,99 |
Moselle | – 9,50 |
Nièvre | – 5,92 |
Nord | – 8,57 |
Oise | – 11,14 |
Orne | – 12,06 |
Pas-de-Calais | – 12,48 |
Puy-de-Dôme | – 8,32 |
Pyrénées-Atlantiques | – 4,59 |
Hautes-Pyrénées | – 0,55 |
Pyrénées-Orientales | – 8,91 |
Bas-Rhin | – 10,79 |
Haut-Rhin | – 10,11 |
Rhône | – 12,10 |
Haute-Saône | – 11,43 |
Saône-et-Loire | – 14,99 |
Sarthe | – 9,70 |
Savoie | – 11,21 |
Haute-Savoie | – 5,64 |
Paris | – 12,95 |
Seine-Maritime | – 8,49 |
Seine-et-Marne | – 6,37 |
Yvelines | – 8,46 |
Deux-Sèvres | – 17,73 |
Somme | – 8,20 |
Tarn | – 10,26 |
Tarn-et-Garonne | – 3,42 |
Var | – 4,16 |
Vaucluse | – 11,74 |
Vendée | – 9,15 |
Vienne | – 7,49 |
Haute-Vienne | – 13,83 |
Vosges | – 7,43 |
Yonne | – 11,29 |
Territoire de Belfort | – 10,83 |
Essonne | – 10,02 |
Hauts-de-Seine | – 14,28 |
Seine-Saint-Denis | – 14,84 |
Val-de-Marne | – 12,28 |
Val-d’Oise | – 11,14 |
Guadeloupe | – 11,06 |
Martinique | – 10,16 |
Guyane | – 6,23 |
La Réunion | – 8,01 |
Mayotte | – 6,68 |
- Lecture : pendant l'hiver 2020-2021, les naissances dans l'Aisne ont baissé de 18,1 % par rapport à la moyenne des trois hivers précédents ; ce département appartient au quart des départements ayant connu les plus fortes baisses.
- Champ : France.
- Source : Insee, statistiques de l’état civil, données extraites fin juin 2021.
graphiqueFigure 2a - Évolution du nombre de naissances quotidiennes durant l’hiver 2020-2021 par rapport aux trois années précédentes
Le nombre de naissances a davantage baissé dans les départements les plus touchés par la première vague de Covid-19
Contrairement à d’autres épidémies de grippe du 20ᵉ siècle (encadré 2),
la pandémie de Covid-19, et tout particulièrement la première vague, a principalement
touché des personnes âgées de 70 ans ou plus [Le Minez et Roux, 2021]. Si la plupart des personnes en âge d’avoir des enfants n’ont pas contracté de forme
sévère de la maladie, elles ont cependant pu être affectées par le contexte anxiogène
lié à la situation sanitaire et aux mesures fortes adoptées pour y faire face. À l’issue
du premier confinement, 13,5 % des personnes âgées de 15 ans ou plus présentaient
un syndrome dépressif en France hors Guyane et Mayotte, en hausse de 2,5 points par
rapport à 2019 [Ouvrir dans un nouvel ongletHazo et Costemalle, 2021]. De plus, les conséquences du virus sur les grossesses étaient encore mal connues
aux mois de mars et avril 2020 et certaines personnes ont pu choisir de retarder un
projet de parentalité par crainte de conséquences néfastes pour l’enfant à naître.
La dégradation de la situation sanitaire dans les départements en mars et avril 2020 est mesurée ici à travers le niveau de surmortalité (excédent de décès par rapport à la même période en 2019) et la tension hospitalière induite par l’épidémie dans les services de réanimation. Ces deux éléments sont synthétisés par un indicateur unique, qui permet de classer les départements en quatre groupes égaux, des moins touchés aux plus touchés sur le plan sanitaire (méthode).
La géographie du recul des naissances entre décembre 2020 et février 2021 présente
une certaine similitude avec celle de l’épidémie pendant la première vague [Le Minez et Roux, 2021] : dans les deux cas, les départements de la façade atlantique ont été globalement
peu touchés tandis que ceux du quart nord-est de la métropole l’ont été plus fortement.
Ainsi, dans les trois quarts des départements les plus durement affectés d’un point
de vue sanitaire (soit 18 sur 24), le nombre de naissances baisse fortement ou très
fortement (figure 3). Plusieurs départements d’Île-de-France, comme
la Seine-Saint-Denis et les Hauts-de-Seine, sont emblématiques de cette situation.
Dans le Haut-Rhin, particulièrement touché lors de la première vague épidémique, le
nombre de naissances chute de plus de 10 % à l’hiver 2020-2021.
À l’inverse, la natalité a généralement moins reculé dans les départements les moins éprouvés durant la première vague épidémique. Ainsi, les naissances à l’hiver 2020-2021 baissent fortement ou très fortement dans un quart seulement des départements où la situation sanitaire était la moins dégradée (6 sur 24).
tableauFigure 3 - Répartition des départements selon l’évolution des naissances à l’hiver 2020-2021 par rapport aux trois hivers précédents et selon les effets de l’épidémie
Évolution des naissances | |||||
---|---|---|---|---|---|
Peu ou pas de baisse (– 4,9 % ou moins) | Baisse limitée (– 4,9 % à – 8,5 %) | Baisse forte (– 8,5 % à – 11,1 %) | Baisse très forte (plus de – 11,1 %) | Ensemble | |
Effet sanitaire 1 | |||||
25 % les moins touchés | 54,2 | 20,8 | 8,3 | 16,7 | 100,0 |
2e quart | 20,8 | 37,5 | 29,2 | 12,5 | 100,0 |
3e quart | 20,8 | 25,0 | 20,8 | 33,3 | 100,0 |
25 % les plus touchés | 4,2 | 20,8 | 29,2 | 45,8 | 100,0 |
Effet économique 2 | |||||
25 % les moins touchés | 33,3 | 29,2 | 16,7 | 20,8 | 100,0 |
2e quart | 16,7 | 41,7 | 16,7 | 25,0 | 100,0 |
3e quart | 25,0 | 16,7 | 37,5 | 20,8 | 100,0 |
25 % les plus touchés | 25,0 | 16,7 | 16,7 | 41,7 | 100,0 |
Effets croisés | |||||
Moins touchés sur les deux plans | 32,1 | 35,7 | 14,3 | 17,9 | 100,0 |
Plus touchés sur le plan économique seulement | 43,5 | 21,7 | 21,7 | 13,0 | 100,0 |
Plus touchés sur le plan sanitaire seulement | 12,5 | 29,2 | 25,0 | 33,3 | 100,0 |
Plus touchés sur les deux plans | 9,5 | 14,3 | 28,6 | 47,6 | 100,0 |
Ensemble | 25,0 | 26,0 | 21,9 | 27,1 | 100,0 |
- 1. Mesuré à partir du niveau de surmortalité en mars-avril 2020 par rapport à la même période en 2019 et de la tension hospitalière en réanimation (nombre de jours « rouges » entre le 18 mars et le 30 avril, c’est-à-dire avec plus de 60 % des lits occupés).
- 2. Mesuré à partir de la part des personnes de 15 ans ou plus (hors retraités) qui ont ressenti une dégradation de leur situation financière au cours du premier confinement, de la part de personnes de 15 ans ou plus en emploi passées totalement au chômage partiel lors du premier confinement et de la part des femmes de moins de 45 ans et de leurs conjoints qui travaillent dans un secteur particulièrement affecté par la crise.
- Lecture : parmi les 24 départements métropolitains les plus affectés par la crise sanitaire au moment du premier confinement, 46 % appartiennent au quart des départements où le recul des naissances a été le plus accentué entre décembre 2020 et février 2021 (baisse supérieure à 11,1 %).
- Champ : France métropolitaine.
- Sources : Insee, statistiques de l’état civil extraites fin juin 2021, recensement de la population 2017 ; Inserm-Drees, enquête EpiCov, vague 1 ; ministère des Solidarités et de la Santé.
graphiqueFigure 3 - Répartition des départements selon l’évolution des naissances à l’hiver 2020-2021 par rapport aux trois hivers précédents et selon les effets de l’épidémie
Les effets économiques de la crise sanitaire ont peu pesé sur la natalité au niveau départemental
La pandémie a pu également assombrir les perspectives professionnelles, notamment pour les personnes au chômage, en contrat précaire ou travaillant dans des secteurs particulièrement affectés par les mesures de confinement [Marquis, 2020]. La crainte d’une baisse de niveau de vie ou de difficultés pour trouver un emploi dans un contexte économique très perturbé a pu les conduire à repousser ou abandonner leur projet de naissance.
Les effets économiques de la crise sanitaire au niveau des territoires de la France métropolitaine sont mesurés ici à travers un indicateur unique, synthétisant trois variables : la part des personnes de 15 ans ou plus faisant état d’une dégradation de leur situation financière au cours du premier confinement, la part des personnes en emploi totalement au chômage partiel pendant cette période, ainsi que la proportion de ceux qui travaillent dans un secteur d’activité particulièrement affecté par la crise, parmi les couples comptant au moins une femme de moins de 45 ans (méthode). Selon cet indicateur, les conséquences économiques de la pandémie ont été les plus importantes dans de nombreux départements touristiques situés aux abords des littoraux ou au sein de massifs montagneux, dans la plupart des départements urbains, tels que ceux d’Île-de-France, le Rhône, les Bouches-du-Rhône, la Loire-Atlantique ou les départements alsaciens, ainsi que dans le nord de la France métropolitaine, au sein de départements déjà confrontés à une situation économique et sociale moins favorable que la moyenne.
Si la dégradation de la situation économique a pu influencer les décisions individuelles, à l’échelle des départements cet impact est nettement plus faible que celui de la situation sanitaire. Parmi les départements les plus durement affectés d’un point de vue économique, 60 % (soit 14 sur 24) ont connu une baisse forte ou très forte du nombre de naissances. Toutefois, cette proportion atteint aussi près de 40 % (9 sur 24) des départements les moins touchés sur ce plan (figure 3). À l’inverse, les naissances diminuent peu dans plusieurs départements très affectés par les effets économiques de la crise sanitaire, tels que le Var ou les Pyrénées-Atlantiques.
Dans les départements où les effets économiques et sanitaires se cumulent, la baisse des naissances est souvent plus forte
Les conséquences économiques de la crise sanitaire semblent toutefois avoir accentué la baisse de la natalité là où elle s’est conjuguée à une forte dégradation de la situation sanitaire. Ainsi, parmi les 21 départements métropolitains où la crise a eu le plus fort impact à la fois sanitaire et économique, 48 % (soit 10) font partie du quart des départements où les naissances reculent le plus fortement, alors que ce n’est le cas que de 33 % (8) des 24 départements les plus touchés sur le plan sanitaire seulement (figure 3). Ces départements les plus affectés sur les deux plans se situent pour la plupart en Île-de-France, dans les Hauts-de-France, en Alsace et au nord des Alpes (figure 4.)
tableauFigure 4 - Situation des départements lors du premier confinement et évolution des naissances à l’hiver 2020-2021 par rapport aux trois hivers précédents
Département | Type d'impact | Évolution des naissances |
---|---|---|
Ain | Plus touchés sur le plan sanitaire seulement | Peu ou pas de baisse (– 4,9 % ou moins) |
Aisne | Plus touchés sur les deux plans | Baisse très forte (Plus de – 11,1 %) |
Allier | Moins touchés sur les deux plans | Baisse limitée (– 4,9 % à – 8,5 %) |
Alpes-de-Haute-Provence | Moins touchés sur les deux plans | Peu ou pas de baisse (– 4,9 % ou moins) |
Hautes-Alpes | Plus touchés sur le plan économique seulement | Peu ou pas de baisse (– 4,9 % ou moins) |
Alpes-Maritimes | Plus touchés sur le plan économique seulement | Baisse limitée (– 4,9 % à – 8,5 %) |
Ardèche | Plus touchés sur le plan sanitaire seulement | Peu ou pas de baisse (– 4,9 % ou moins) |
Ardennes | Plus touchés sur les deux plans | Peu ou pas de baisse (– 4,9 % ou moins) |
Ariège | Moins touchés sur les deux plans | Baisse très forte (Plus de – 11,1 %) |
Aube | Plus touchés sur le plan sanitaire seulement | Peu ou pas de baisse (– 4,9 % ou moins) |
Aude | Plus touchés sur le plan économique seulement | Baisse très forte (Plus de – 11,1 %) |
Aveyron | Moins touchés sur les deux plans | Baisse forte (– 8,5 % à – 11,1 %) |
Bouches-du-Rhône | Plus touchés sur les deux plans | Baisse forte (– 8,5 % à – 11,1 %) |
Calvados | Plus touchés sur le plan économique seulement | Baisse limitée (– 4,9 % à – 8,5 %) |
Cantal | Moins touchés sur les deux plans | Baisse forte (– 8,5 % à – 11,1 %) |
Charente | Moins touchés sur les deux plans | Baisse limitée (– 4,9 % à – 8,5 %) |
Charente-Maritime | Plus touchés sur le plan économique seulement | Peu ou pas de baisse (– 4,9 % ou moins) |
Cher | Plus touchés sur le plan sanitaire seulement | Baisse limitée (– 4,9 % à – 8,5 %) |
Corrèze | Plus touchés sur le plan économique seulement | Peu ou pas de baisse (– 4,9 % ou moins) |
Côte-d’Or | Plus touchés sur le plan sanitaire seulement | Baisse forte (– 8,5 % à – 11,1 %) |
Côtes-d’Armor | Moins touchés sur les deux plans | Peu ou pas de baisse (– 4,9 % ou moins) |
Creuse | Moins touchés sur les deux plans | Peu ou pas de baisse (– 4,9 % ou moins) |
Dordogne | Plus touchés sur le plan économique seulement | Peu ou pas de baisse (– 4,9 % ou moins) |
Doubs | Plus touchés sur le plan sanitaire seulement | Baisse très forte (Plus de – 11,1 %) |
Drôme | Plus touchés sur le plan sanitaire seulement | Baisse très forte (Plus de – 11,1 %) |
Eure | Moins touchés sur les deux plans | Baisse limitée (– 4,9 % à – 8,5 %) |
Eure-et-Loir | Plus touchés sur le plan sanitaire seulement | Baisse forte (– 8,5 % à – 11,1 %) |
Finistère | Moins touchés sur les deux plans | Baisse limitée (– 4,9 % à – 8,5 %) |
Corse-du-Sud | Plus touchés sur les deux plans | Baisse très forte (Plus de – 11,1 %) |
Haute-Corse | Plus touchés sur le plan économique seulement | Peu ou pas de baisse (– 4,9 % ou moins) |
Gard | Plus touchés sur le plan économique seulement | Baisse forte (– 8,5 % à – 11,1 %) |
Haute-Garonne | Plus touchés sur le plan économique seulement | Baisse limitée (– 4,9 % à – 8,5 %) |
Gers | Moins touchés sur les deux plans | Peu ou pas de baisse (– 4,9 % ou moins) |
Gironde | Plus touchés sur le plan économique seulement | Peu ou pas de baisse (– 4,9 % ou moins) |
Hérault | Plus touchés sur le plan économique seulement | Baisse forte (– 8,5 % à – 11,1 %) |
Ille-et-Vilaine | Moins touchés sur les deux plans | Baisse limitée (– 4,9 % à – 8,5 %) |
Indre | Plus touchés sur le plan sanitaire seulement | Baisse forte (– 8,5 % à – 11,1 %) |
Indre-et-Loire | Plus touchés sur le plan économique seulement | Baisse limitée (– 4,9 % à – 8,5 %) |
Isère | Plus touchés sur les deux plans | Baisse forte (– 8,5 % à – 11,1 %) |
Jura | Plus touchés sur le plan sanitaire seulement | Baisse très forte (Plus de – 11,1 %) |
Landes | Plus touchés sur le plan économique seulement | Peu ou pas de baisse (– 4,9 % ou moins) |
Loir-et-Cher | Plus touchés sur le plan sanitaire seulement | Baisse limitée (– 4,9 % à – 8,5 %) |
Loire | Plus touchés sur les deux plans | Peu ou pas de baisse (– 4,9 % ou moins) |
Haute-Loire | Moins touchés sur les deux plans | Baisse limitée (– 4,9 % à – 8,5 %) |
Loire-Atlantique | Plus touchés sur le plan économique seulement | Baisse forte (– 8,5 % à – 11,1 %) |
Loiret | Moins touchés sur les deux plans | Baisse très forte (Plus de – 11,1 %) |
Lot | Moins touchés sur les deux plans | Peu ou pas de baisse (– 4,9 % ou moins) |
Lot-et-Garonne | Moins touchés sur les deux plans | Baisse très forte (Plus de – 11,1 %) |
Lozère | Moins touchés sur les deux plans | Peu ou pas de baisse (– 4,9 % ou moins) |
Maine-et-Loire | Moins touchés sur les deux plans | Baisse limitée (– 4,9 % à – 8,5 %) |
Manche | Moins touchés sur les deux plans | Peu ou pas de baisse (– 4,9 % ou moins) |
Marne | Plus touchés sur le plan sanitaire seulement | Baisse forte (– 8,5 % à – 11,1 %) |
Haute-Marne | Plus touchés sur le plan sanitaire seulement | Baisse limitée (– 4,9 % à – 8,5 %) |
Mayenne | Moins touchés sur les deux plans | Peu ou pas de baisse (– 4,9 % ou moins) |
Meurthe-et-Moselle | Plus touchés sur le plan sanitaire seulement | Baisse très forte (Plus de – 11,1 %) |
Meuse | Plus touchés sur les deux plans | Baisse limitée (– 4,9 % à – 8,5 %) |
Morbihan | Moins touchés sur les deux plans | Baisse limitée (– 4,9 % à – 8,5 %) |
Moselle | Plus touchés sur le plan sanitaire seulement | Baisse forte (– 8,5 % à – 11,1 %) |
Nièvre | Plus touchés sur le plan sanitaire seulement | Baisse limitée (– 4,9 % à – 8,5 %) |
Nord | Plus touchés sur les deux plans | Baisse forte (– 8,5 % à – 11,1 %) |
Oise | Plus touchés sur les deux plans | Baisse très forte (Plus de – 11,1 %) |
Orne | Moins touchés sur les deux plans | Baisse très forte (Plus de – 11,1 %) |
Pas-de-Calais | Plus touchés sur les deux plans | Baisse très forte (Plus de – 11,1 %) |
Puy-de-Dôme | Moins touchés sur les deux plans | Baisse limitée (– 4,9 % à – 8,5 %) |
Pyrénées-Atlantiques | Plus touchés sur le plan économique seulement | Peu ou pas de baisse (– 4,9 % ou moins) |
Hautes-Pyrénées | Moins touchés sur les deux plans | Peu ou pas de baisse (– 4,9 % ou moins) |
Pyrénées-Orientales | Plus touchés sur le plan économique seulement | Baisse forte (– 8,5 % à – 11,1 %) |
Bas-Rhin | Plus touchés sur les deux plans | Baisse forte (– 8,5 % à – 11,1 %) |
Haut-Rhin | Plus touchés sur les deux plans | Baisse forte (– 8,5 % à – 11,1 %) |
Rhône | Plus touchés sur le plan sanitaire seulement | Baisse très forte (Plus de – 11,1 %) |
Haute-Saône | Plus touchés sur le plan sanitaire seulement | Baisse très forte (Plus de – 11,1 %) |
Saône-et-Loire | Plus touchés sur le plan sanitaire seulement | Baisse très forte (Plus de – 11,1 %) |
Sarthe | Moins touchés sur les deux plans | Baisse forte (– 8,5 % à – 11,1 %) |
Savoie | Plus touchés sur les deux plans | Baisse très forte (Plus de – 11,1 %) |
Haute-Savoie | Plus touchés sur les deux plans | Baisse limitée (– 4,9 % à – 8,5 %) |
Paris | Plus touchés sur les deux plans | Baisse très forte (Plus de – 11,1 %) |
Seine-Maritime | Plus touchés sur le plan économique seulement | Baisse limitée (– 4,9 % à – 8,5 %) |
Seine-et-Marne | Plus touchés sur les deux plans | Baisse limitée (– 4,9 % à – 8,5 %) |
Yvelines | Plus touchés sur le plan sanitaire seulement | Baisse limitée (– 4,9 % à – 8,5 %) |
Deux-Sèvres | Moins touchés sur les deux plans | Baisse très forte (Plus de – 11,1 %) |
Somme | Plus touchés sur le plan sanitaire seulement | Baisse limitée (– 4,9 % à – 8,5 %) |
Tarn | Moins touchés sur les deux plans | Baisse forte (– 8,5 % à – 11,1 %) |
Tarn-et-Garonne | Plus touchés sur le plan économique seulement | Peu ou pas de baisse (– 4,9 % ou moins) |
Var | Plus touchés sur le plan économique seulement | Peu ou pas de baisse (– 4,9 % ou moins) |
Vaucluse | Plus touchés sur le plan économique seulement | Baisse très forte (Plus de – 11,1 %) |
Vendée | Plus touchés sur le plan économique seulement | Baisse forte (– 8,5 % à – 11,1 %) |
Vienne | Moins touchés sur les deux plans | Baisse limitée (– 4,9 % à – 8,5 %) |
Haute-Vienne | Plus touchés sur le plan économique seulement | Baisse très forte (Plus de – 11,1 %) |
Vosges | Plus touchés sur le plan sanitaire seulement | Baisse limitée (– 4,9 % à – 8,5 %) |
Yonne | Plus touchés sur les deux plans | Baisse très forte (Plus de – 11,1 %) |
Territoire de Belfort | Plus touchés sur le plan sanitaire seulement | Baisse forte (– 8,5 % à – 11,1 %) |
Essonne | Plus touchés sur les deux plans | Baisse forte (– 8,5 % à – 11,1 %) |
Hauts-de-Seine | Plus touchés sur le plan sanitaire seulement | Baisse très forte (Plus de – 11,1 %) |
Seine-Saint-Denis | Plus touchés sur les deux plans | Baisse très forte (Plus de – 11,1 %) |
Val-de-Marne | Plus touchés sur les deux plans | Baisse très forte (Plus de – 11,1 %) |
Val-d’Oise | Plus touchés sur les deux plans | Baisse très forte (Plus de – 11,1 %) |
- Lecture : dans le Pas-de-Calais, la baisse des naissances entre l’hiver 2020-2021 (décembre à février) et les trois hivers précédents est supérieure à 11,1 % ; ce département est l’un de ceux où les effets sanitaires et économiques de la crise ont été plus marqués que la moyenne lors du premier confinement.
- Champ : France métropolitaine.
- Sources : Insee, statistiques de l’état civil extraites fin juin 2021, recensement de la population 2017 ; Inserm-Drees, enquête EpiCov, vague 1 ; ministère des Solidarités et de la Santé.
graphiqueFigure 4 - Situation des départements lors du premier confinement et évolution des naissances à l’hiver 2020-2021 par rapport aux trois hivers précédents
Des exceptions existent : dans les Ardennes comme dans la Loire, les effets sanitaires et économiques de la crise ont été durement ressentis sans pour autant se traduire par un fort recul des naissances (– 5 % dans ces deux départements, contre – 9 % à l’échelle nationale). Dans la Loire, les ménages aux revenus modestes sont relativement peu nombreux parmi les couples en âge de procréer, ces derniers peuvent donc avoir moins subi les conséquences économiques de la crise. Dans les Ardennes, la progression des naissances s’interrompt avec la crise. À l’inverse, dans les Deux-Sèvres, l’Ariège, l’Orne et le Lot-et-Garonne, la natalité a chuté très fortement (avec un recul d’au moins 12 %), alors que ces départements n’ont pas été parmi les plus exposés, que ce soit sur le plan sanitaire ou économique. Le nombre limité de naissances ou les profils de fécondité relativement précoces ou tardifs de ces départements expliquent sans doute en partie ces évolutions atypiques. Dans le Loiret, le nombre de naissances a également fortement baissé, de 13 %, alors que ce département a aussi été relativement épargné par la crise sanitaire. Toutefois, nombre des actifs de ce département travaillent dans les départements voisins, en particulier ceux d’Île-de-France, où la situation sanitaire était plus dégradée.
Les habitants des zones urbaines ont davantage reporté ou annulé leurs projets de naissance lors du premier confinement
La baisse des naissances a été nettement plus forte dans les communes urbaines que dans les communes rurales (– 10 % contre – 6 %), en Île-de-France comme dans les autres régions. De plus, quel que soit le contexte de dégradation de la situation sanitaire et économique du département, les naissances diminuent davantage dans les zones urbaines les plus denses (entre – 10 % et – 12 %) (figure 5). Le risque d’exposition au virus a peut être été ressenti plus fortement dans ces zones par définition plus densément peuplées et où l’usage des transports en commun est plus fréquent. Les conditions de confinement expliquent probablement aussi une partie de ces écarts : d’une part, les familles habitant en ville sont restées confinées dans des logements plus petits en moyenne que celles résidant dans les territoires moins denses, et disposent moins souvent d’un espace extérieur, ce qui a pu peser sur le climat conjugal et familial [Barhoumi et al ., 2021] et diminuer le nombre de conceptions. D’autre part, il est possible que le confinement ait rendu difficile certaines rencontres et des naissances, plus rares, issues de couples non cohabitants ou de relations occasionnelles ou non stables. Par ailleurs, certains déménagements nécessaires avant l’arrivée du nouvel enfant ont dû être reportés. Enfin, le type d’emploi diffère suivant les territoires [D’Alessandro et al ., 2021] et il est possible que les habitants des zones urbaines aient été plus confrontés à des risques de pertes d’emploi ou de fortes baisses d’activité que ceux des zones rurales. Dans ces dernières en revanche, la baisse de natalité a été plus marquée lorsque le contexte sanitaire était particulièrement dégradé.
tableauFigure 5 - Évolution du nombre de naissances quotidiennes entre l’hiver 2020-2021 (décembre à février) et les trois hivers précédents, selon le type de commune et la situation du département lors du premier confinement
Rural | Urbain de densité intermédiaire | Urbain dense | Ensemble | |
---|---|---|---|---|
Moins touchés sur les deux plans | -4,91 | -8,15 | -11,10 | -6,91 |
Plus touchés sur le plan économique seulement | -4,02 | -7,16 | -9,65 | -7,14 |
Plus touchés sur le plan sanitaire seulement | -7,87 | -10,41 | -11,93 | -10,43 |
Plus touchés sur les deux plans | -6,77 | -9,68 | -12,07 | -10,75 |
Ensemble | -5,71 | -8,90 | -11,52 | -9,26 |
- Lecture : dans les communes rurales des départements plus touchés que la moyenne sur le plan sanitaire seulement, le nombre de naissances a baissé en moyenne de 7,9 % à l’hiver 2020-2021 par rapport aux trois hivers précédents.
- Champ : France métropolitaine.
- Sources : Insee, statistiques de l’état civil extraites fin juin 2021, recensement de la population 2017 ; Inserm-Drees, enquête EpiCov, vague 1 ; ministère des Solidarités et de la Santé.
graphiqueFigure 5 - Évolution du nombre de naissances quotidiennes entre l’hiver 2020-2021 (décembre à février) et les trois hivers précédents, selon le type de commune et la situation du département lors du premier confinement
Au sein des aires d’attraction des villes, le nombre de naissances recule davantage dans les pôles que dans les couronnes (– 12 % contre – 6 %). La baisse est également plus limitée dans les communes situées hors attraction des villes (– 5 %). Le repli est de même ampleur quelle que soit la taille de l’aire, mais il est souvent plus marqué dans les pôles situés dans des départements plus touchés que la moyenne par la première vague épidémique. Ainsi, le nombre de naissances recule de plus de 12 % dans les pôles de Strasbourg, Lyon, Paris et Mulhouse, mais de moins de 7 % dans ceux de Rennes et Angers et il reste quasi stable dans celui de Bordeaux.
Les projets de parentalité davantage bouleversés dans les communes les plus touchées par la pauvreté
Les ménages les plus pauvres ont été davantage touchés par la crise sanitaire : ils vivent plus souvent dans des communes denses et dans des logements surpeuplés, avec plus de risques d’être exposés au virus [Barhoumi et al ., 2020 ; Ouvrir dans un nouvel ongletWarszawski et al ., 2020]. Lors du premier confinement, leur situation économique s’est plus souvent dégradée [Firlej et Pawlowski, 2021]. Au sein des départements, la part de personnes pauvres peut fortement varier selon le type de commune. Elle est ainsi particulièrement élevée dans les grandes agglomérations, où se trouvent notamment les quartiers prioritaires de la politique de la ville [Sicsic, 2021].
Le nombre de naissances dans une commune a d’autant plus diminué que la part de personnes pauvres y est importante. Entre l’hiver 2020 2021 et les trois précédents, la baisse atteint 14 % dans les communes comptant 25 % ou plus de personnes vivant sous le seuil de pauvreté contre 4 % dans les communes où cette proportion est la plus faible (moins de 5 %).
Dans les communes les plus pauvres, les naissances ont fortement reculé quel que soit le contexte sanitaire et économique, tandis que dans les communes plus aisées, la baisse a été plus marquée dans les départements les plus touchés d’un point de vue sanitaire.
Une baisse des naissances particulièrement forte avant 30 ans et après 40 ans
Si le nombre de naissances a baissé quel que soit l’âge à l’hiver 2020-2021, le recul a été particulièrement fort pour les femmes les plus jeunes (– 14 % pour les moins de 25 ans, – 11 % pour les 25-29 ans) et les plus âgées (– 12 % pour les 40 ans ou plus) (figure 6). Les femmes les plus proches de l’âge moyen à la maternité en France (30,8 ans en 2020) ont donc le moins reporté leur projet de parentalité pendant la première vague épidémique. La baisse de la natalité des femmes de 30 à 34 ans a été certes plus limitée (– 6 %), mais ces âges étant ceux où il est le plus fréquent d’avoir un enfant, elle contribue à 22 % de la baisse totale du nombre de naissances.
tableauFigure 6 - Évolution du nombre de naissances quotidiennes par rapport aux mêmes périodes des trois années précédentes selon l’âge de la mère
Hiver 2020-2021 (décembre à février) |
Printemps 2021 (mars à mai) |
Ensemble (décembre 2020 à mai 2021) |
Taux de fécondité en 2018 | |
---|---|---|---|---|
Moins de 25 ans | -14 | -8 | -11 | 2,3 |
25-29 ans | -11 | -4 | -8 | 11 |
30-34 ans | -6 | 4 | -1 | 12,7 |
35-39 ans | -8 | 4 | -2 | 6,9 |
40 ans ou plus | -12 | 12 | 0 | 0,9 |
- Lecture : à l’hiver 2020-2021, la natalité a chuté de 14 % pour les femmes de moins de 25 ans par rapport à la moyenne des trois hivers précédents. En 2018, le taux de fécondité pour cette classe d’âge est de 2,3 enfants pour 100 femmes.
- Champ : France.
- Source : Insee, statistiques de l’état civil extraites fin juin 2021 et estimations de population.
graphiqueFigure 6 - Évolution du nombre de naissances quotidiennes par rapport aux mêmes périodes des trois années précédentes selon l’âge de la mère
Les raisons de non-conception durant le premier confinement sont probablement différentes entre les plus jeunes et les plus âgés. Près de 70 % des naissances de femmes de moins de 25 ans correspondent à leur premier enfant [Ouvrir dans un nouvel ongletBreton, 2010]. Les plus jeunes ont pu préférer différer leur entrée en parentalité dans une période d’incertitude économique ou de conditions de vie difficiles liées au confinement, attendant de disposer d’une certaine stabilité professionnelle et matérielle [Ouvrir dans un nouvel ongletRegnier Loilier et Solaz, 2010]. Les jeunes de moins de 30 ans sont parmi les plus touchés par la contraction du marché du travail liée à la pandémie. Ils semblent d’ailleurs avoir plus souvent différé leurs projets de parentalité dans les départements affectés sur le plan économique uniquement que dans ceux relativement peu touchés par les effets de l’épidémie, ce qui n’est pas le cas pour les autres classes d’âge (figure 7). Les plus jeunes peuvent aussi avoir plus de facilités à reporter une grossesse de quelques mois que des femmes plus âgées confrontées à une baisse de fertilité.
tableauFigure 7 - Évolution du nombre de naissances quotidiennes entre l’hiver 2020-2021 (décembre à février) et les trois hivers précédents selon l’âge de la mère et la situation du département lors du premier confinement
Moins de 30 ans | 30-34 ans | 35 ans ou plus | Ensemble | |
---|---|---|---|---|
Moins touchés sur les deux plans | -8,39 | -4,72 | -7,17 | -6,91 |
Plus touchés sur le plan économique seulement | -10,35 | -4,52 | -5,14 | -7,14 |
Plus touchés sur le plan sanitaire seulement | -14,21 | -6,87 | -9,14 | -10,43 |
Plus touchés sur les deux plans | -13,76 | -6,84 | -11,02 | -10,75 |
Ensemble | -12,17 | -5,99 | -8,75 | -9,26 |
- Lecture : dans les départements moins touchés que la moyenne sur les deux plans sanitaire et économique, le nombre de naissances issues d’une mère de moins de 30 ans a baissé en moyenne de 8,4 % à l’hiver 2020-2021 par rapport aux trois hivers précédents.
- Champ : France métropolitaine.
- Sources : Insee, statistiques de l’état civil extraites fin juin 2021, recensement de la population 2017 ; Inserm-Drees, enquête EpiCov, vague 1 ; ministère des Solidarités et de la Santé.
graphiqueFigure 7 - Évolution du nombre de naissances quotidiennes entre l’hiver 2020-2021 (décembre à février) et les trois hivers précédents selon l’âge de la mère et la situation du département lors du premier confinement
Pour les femmes plus âgées, les conditions de confinement, et notamment la présence d’enfants au domicile, ont pu compliquer le quotidien et influer sur les projets de grossesse. Par ailleurs, l’accès aux parcours de procréation médicalement assistée (PMA) a été plus difficile pendant la pandémie [Ouvrir dans un nouvel ongletThe ESHRE Covid-19 Working Group, 2020]. En France, un peu plus de 3 % des enfants nés en 2018 sont issus d’une PMA [Ouvrir dans un nouvel ongletde La Rochebrochard, 2018], mais les femmes plus âgées sont surreprésentées parmi celles qui y recourent. D’après les données de l’agence de biomédecine, 31 % des femmes ayant eu recours à la fécondation in vitro en 2018 étaient âgées de 35 à 39 ans au moment de l’intervention (contre 20 % des mères ayant donné naissance à un enfant en 2019) et 14 % avaient au moins 40 ans (contre 6 %).
Inversement, le nombre d’interruptions volontaires de grossesse (IVG) a baissé en 2020 durant les mois de mai et juin, et dans une moindre mesure en juillet, en lien avec la baisse des conceptions issues de couples stables ou de relations moins stables, rendues difficiles en période de confinement. La crise sanitaire n’a pas allongé l’âge gestationnel des IVG pratiquées en milieu hospitalier, ce qui suggère que le recul du nombre d’IVG n’est pas lié à des difficultés d’accès augmentant la durée des parcours [Ouvrir dans un nouvel ongletVilain, 2021].
Un rattrapage très partiel des naissances au printemps 2021
Dans les mois qui ont suivi la fin du premier confinement, le recul temporaire de l’épidémie a (re)lancé pour certains les projets de parentalité, tandis que d’autres les ont différés encore, voire les ont abandonnés totalement.
Au premier semestre 2021, le rattrapage n’a duré que deux mois, en mars et avril. Sur ces deux mois, le nombre de naissances cumulées n’a été supérieur que de 2 900 à la moyenne des trois années précédentes. Or, entre décembre 2020 et février 2021, 164 200 bébés sont nés en France, soit 16 600 de moins qu’en moyenne au cours des mêmes mois les trois années précédentes. Moins d’une naissance sur cinq a donc été rattrapée (17 %) par rapport au déficit de l’hiver. Ce rattrapage reste partiel, même en tenant compte de la baisse tendancielle du nombre de naissances observée ces dernières années. En mai, les naissances diminuent à nouveau (− 2 400), annulant presque entièrement la hausse de mars et avril. Toutefois, la baisse en mai 2021 comparée à mai 2020 est du même ordre que celle observée avant la pandémie.
L’essentiel du déficit des naissances de l’hiver 2020 2021 n’a donc pas été compensé à court terme. Les perspectives économiques et sanitaires relativement incertaines au sortir du premier confinement l’expliquent sans doute en partie. De nombreux mariages prévus au printemps et à l’été 2020 ont également été différés ou annulés [Papon et Beaumel, 2021], ce qui a également pu conduire certains couples à reporter leur projet de parentalité.
Quels qu’en soient les motifs, les reports ont surtout persisté chez les plus jeunes : au printemps, la natalité des femmes de moins de 30 ans a continué d’être inférieure à celle des années précédentes et aucun rattrapage ne s’est amorcé en mars ou en avril. Au contraire, chez les femmes de 30 ans ou plus, plus de 60 % de la baisse des naissances de l’hiver a été rattrapée en mars et avril 2021. Au total, sur l’ensemble des mois de décembre 2020 à mai 2021, la natalité des femmes de moins de 30 ans a baissé de 9 % tandis que celle des femmes de 30 à 34 ans et celle de 35 ans ou plus n’a diminué que de 1 %. Les parcours de PMA, de nouveau accessibles après le premier confinement, ont pu contribuer au rattrapage.
Dans un quart des départements, la natalité a continué de reculer au printemps
Au printemps 2021, les naissances évoluent différemment d’un département à l’autre et s’inscrivent globalement dans la continuité de la situation observée en hiver : elles ont souvent augmenté dans les départements où elles avaient relativement bien résisté au cours de l’hiver et baissé dans ceux où elles avaient déjà reculé fortement. Ainsi, dans un quart des départements, la natalité continue de reculer au printemps. La plupart d’entre eux sont situés dans le nord et l’est de la France métropolitaine, en Auvergne Rhône Alpes et en Corse (figure 2b). Dans les autres départements, la hausse des naissances au printemps comble rarement la baisse survenue au cours de l’hiver. Parmi ceux où le recul a été fort ou très fort en hiver, ce déficit de naissances est entièrement compensé seulement dans l’Indre et les Pyrénées Orientales. Quelques autres départements comme la Vendée, le Tarn et l’Eure et Loir le comblent en grande partie. Sur les 21 départements particulièrement touchés à la fois sur les plans sanitaires et économiques, le nombre de naissances augmente au printemps dans seulement 5 d’entre eux, et aucun ne rattrape plus de la moitié de la baisse de l’hiver.
Sur l’ensemble des mois de décembre 2020 à mai 2021, les naissances ne progressent par rapport à la moyenne des trois dernières années que dans une minorité de départements, principalement situés au Sud Ouest et à l’Ouest (figure 2c). Elles reculent au contraire fortement dans la plupart de ceux situés au Nord et à l’Est, dans la petite couronne francilienne ainsi qu’en Corse. La baisse est la plus forte dans le Territoire de Belfort (– 12 % sur le semestre), devant la Martinique, le Lot et Garonne et la Seine-Saint-Denis (– 11 %) ou encore la Guadeloupe (– 10 %).
Encadré 1 - Le confinement affecte les naissances dans les DOM malgré une première vague épidémique parfois plus tardive
Le premier confinement et les mesures sanitaires adoptées pour faire face à la première vague épidémique en France métropolitaine ont concerné au même moment les départements d’outre-mer (DOM), malgré une présence du virus relativement limitée à cette période dans certains de ces territoires. Neuf mois plus tard, entre décembre 2020 et février 2021, la natalité diminue en outre-mer dans des proportions variables, mais proches de celles observées en métropole : la baisse est la plus importante en Guadeloupe et en Martinique (− 11 % et − 10 % par rapport aux trois années précédentes) et un peu moindre à La Réunion, à Mayotte et en Guyane (respectivement − 8 %, − 7 % et − 6 %). Les écarts avec la France métropolitaine apparaissent surtout avec les naissances survenues entre mars et mai 2021, pour une conception entre juin et août 2020. En Guyane, où la première vague de forte ampleur s’est produite durant l’été 2020, les naissances continuent de chuter entre mars et mai 2021 (− 9 % par rapport à la moyenne des mêmes mois les trois années précédentes). En Martinique et en Guadeloupe, la natalité est restée à un faible niveau (respectivement – 12 % et – 9 %), malgré une accalmie de l’épidémie durant l’été, comme en métropole. À La Réunion, où le virus a été faiblement présent à l’été 2020 comme en métropole, le rattrapage des naissances reste limité au printemps 2021 (+ 1 %). À l’inverse, à Mayotte, où la première vague de Covid-19 en mai-juin 2020 a entraîné la prolongation du confinement, le nombre de naissances augmente fortement par rapport aux années précédentes entre mars et mai 2021 (+ 11 %). Certaines données n’étant pas disponibles pour les DOM, les indicateurs de contexte sanitaire et économique n’ont pas pu être calculés. Toutefois, l’importance du tourisme et la plus forte exposition de la population aux situations de pauvreté en font des territoires particulièrement vulnérables à la crise.
Encadré 2 - Les grandes épidémies de grippe du 20ᵉ siècle ont eu moins d’effet sur la natalité que celle du Covid-19
Dès 1890, Jacques Bertillon fait état d’une forte diminution des naissances à Paris neuf mois après l’épidémie de grippe ayant touché l’Europe entre novembre 1889 et janvier 1890. Cet effet démographique se manifeste également, avec des niveaux variables, lors des trois grandes pandémies grippales qui frappent l’Europe au 20ᵉ siècle, mais il est moins marqué que pendant l’épidémie de Covid-19. L’effet des différentes épidémies de grippe sur la natalité est restreint, et même souvent invisible à l’échelle annuelle, car les naissances sont rattrapées rapidement. Il dépend notamment de l’âge des personnes touchées par la maladie. La population adapte ses comportements de fécondité comme lors d’autres crises [Ouvrir dans un nouvel ongletBrée et al ., 2016], notamment sanitaires : prudence pendant les périodes défavorables souvent suivie d’une reprise.
Le nombre de morts lié à la grippe dite « espagnole » est estimé à plus de 400 000 en France entre avril 1918 et mai 1919, avec une vague particulièrement forte entre septembre et novembre 1918 [Ouvrir dans un nouvel ongletMeslé, 2010]. Les décès ont concerné en premier lieu les jeunes adultes de 15 à 35 ans, les plus féconds, ce qui aurait pu affecter le nombre des naissances. D’autant que, si la population est au départ assez mal informée de l’ampleur de l’épidémie dans le contexte de guerre, des mesures sanitaires (lavage des mains, port du masque, quarantaine) sont finalement mises en place à l’automne 1918. La guerre provoque déjà un déficit des naissances important, qui ne s’est pas encore résorbé au moment de la vague la plus importante de l’automne 1918. Cependant, les naissances baissent légèrement en juillet et août 1919, correspondant à des conceptions d’octobre et novembre 1918, au cœur de l’épidémie. Ce creux pourrait être venu perturber un début de rattrapage des naissances post-conflit en France, comme dans de nombreux pays européens, au début des années 1920. En France, l’effet de cette pandémie sur la natalité n’apparaît cependant pas aussi clairement que dans d’autres pays tels que le Portugal [Ouvrir dans un nouvel ongletVinet, 2018], la Finlande [Ouvrir dans un nouvel ongletSardon, 2007] ou la Norvège [Ouvrir dans un nouvel ongletMamelund, 2004].
Lors de la pandémie de grippe dite « asiatique » de 1957-1958, la France est touchée à partir du mois de septembre 1957 et la surmortalité est importante d’octobre à décembre 1957. Ouvrir dans un nouvel ongletHenry et Pressat (1959) estiment que la grippe aurait provoqué 11 900 morts en 1957, Ouvrir dans un nouvel ongletMeslé (2010) plus de 20 000 morts. La surmortalité touche fortement les enfants et les jeunes adultes. En 1957, la mortalité à 20-25 ans est multipliée par plus de 10 comparée aux années sans épidémie. Un creux des naissances est observé en juillet et août 1958 (figure A), de 5 % par rapport à la même période les trois années précédentes, correspondant à des conceptions d’octobre et novembre 1958, au plus fort de l’épidémie. La surmortalité des jeunes adultes a probablement un effet sur la natalité [Ouvrir dans un nouvel ongletSardon, 2005]. La hantise de la grippe espagnole est toujours là, mais les antibiotiques viennent d’être mis au point, et l’assurance du corps médical sur la possibilité de lutter contre cette grippe a pu modérer les craintes sanitaires [Bourdelais, 2003]. Enfin, les conséquences économiques de cette pandémie sont assez réduites, notamment en France. D’ailleurs, un rattrapage des naissances a lieu dès l’automne.
tableauFigure A - Nombre de naissances vivantes par mois entre 1955 et 1959
1955 | 1956 | 1957 | 1958 | 1959 | |
---|---|---|---|---|---|
Janv. | 69 253 | 68 254 | 71 369 | 70 099 | 72 025 |
Fév. | 63 330 | 66 290 | 65 515 | 64 465 | 65 815 |
Mars | 71 800 | 71 586 | 71 804 | 71 624 | 72 821 |
Avril | 70 245 | 68 117 | 68 475 | 67 376 | 71 319 |
Mai | 72 035 | 72 508 | 70 838 | 72 090 | 73 465 |
Juin | 67 817 | 66 428 | 66 762 | 67 490 | 67 763 |
Juillet | 70 238 | 70 485 | 67 841 | 66 214 | 71 150 |
Août | 67 434 | 67 844 | 68 944 | 64 077 | 69 936 |
Sept. | 63 842 | 65 080 | 67 702 | 65 906 | 67 738 |
Oct. | 64 480 | 63 857 | 67 028 | 68 382 | 67 418 |
Nov. | 60 667 | 61 108 | 63 662 | 65 673 | 63 852 |
Déc. | 64 776 | 65 359 | 66 527 | 68 819 | 65 947 |
- Lecture : en août 1958, neuf mois après l’épisode de grippe dite « asiatique », 64 100 bébés sont nés en France métropolitaine, contre 68 900 en août 1957.
- Champ : France métropolitaine.
- Source : Insee, statistiques de l’état civil.
graphiqueFigure A - Nombre de naissances vivantes par mois entre 1955 et 1959
La troisième pandémie du 20ᵉ siècle s’est déclarée à Hong Kong en 1968. Malgré ses 31 000 morts en France, avec une surmortalité très nette en décembre 1969 et moindre en janvier 1970, elle passe relativement inaperçue, sans mention dans la presse ni mobilisation hospitalière [Bourdelais, 2003]. Les adultes âgés de 40 à 60 ans sont les plus atteints [Ouvrir dans un nouvel ongletPison et Meslé, 2021]. L’effet sur la natalité est visible avec un creux de 4 % en septembre 1970 (par rapport au même mois les trois ans précédents) qui est suivi, lui aussi, par un rattrapage en novembre et décembre 1970 et janvier 1971 (figure B).
tableauFigure B - Nombre de naissances vivantes par mois entre 1967 et 1971
1967 | 1968 | 1969 | 1970 | 1971 | |
---|---|---|---|---|---|
Janv. | 70 023 | 70 409 | 70 318 | 69 153 | 73 928 |
Fév. | 65 089 | 67 077 | 66 375 | 64 082 | 67 670 |
Mars | 72 445 | 73 703 | 74 871 | 73 471 | 76 069 |
Avril | 73 777 | 71 719 | 72 018 | 73 170 | 77 515 |
Mai | 77 684 | 75 317 | 76 896 | 77 009 | 81 159 |
Juin | 71 045 | 70 355 | 70 852 | 73 159 | 74 870 |
Juillet | 72 277 | 71 544 | 72 358 | 74 267 | 76 073 |
Août | 70 013 | 69 027 | 67 686 | 68 980 | 72 280 |
Sept. | 68 689 | 69 193 | 68 587 | 66 217 | 71 927 |
Oct. | 68 208 | 67 673 | 68 777 | 67 915 | 71 304 |
Nov. | 63 712 | 63 496 | 64 710 | 68 842 | 67 738 |
Déc. | 67 606 | 66 283 | 68 797 | 74 116 | 70 751 |
- Lecture : en septembre 1970, neuf mois après l’épisode de grippe de Hong-Kong, 66 200 bébés sont nés en France métropolitaine, contre 68 600 en septembre 1969.
- Champ : France métropolitaine.
- Source : Insee, statistiques de l’état civil.
graphiqueFigure B - Nombre de naissances vivantes par mois entre 1967 et 1971
Méthodes
L’analyse en composantes principales (ACP) est une méthode statistique qui permet de synthétiser l’information issue d’une multitude de variables, liées ou non entre elles, en un nombre réduit de nouvelles variables indépendantes, appelées « composantes principales » ou « axes ».
Deux ACP ont été réalisées afin d’obtenir des indicateurs synthétiques départementaux des effets de la crise liée à la Covid-19.
La première vise à créer un indicateur départemental de la dégradation du contexte sanitaire en mars avril 2020 en synthétisant l’information issue de deux variables :
l’évolution du nombre de décès dans le département au cours de ces deux mois par rapport à la même période en 2019, toutes causes de décès confondues, qui varie de – 34 % en Guyane à + 124 % en Seine-Saint-Denis ;
la tension hospitalière induite par l’épidémie dans les services de réanimation du département entre le 18 mars et le 30 avril 2020, mesurée par le nombre de jours « rouges » au cours de cette période (nombre de jours où la proportion de patients atteints de Covid-19 en réanimation, en soins intensifs ou en unité de surveillance continue dépasse 60 % du nombre de lits en capacité initiale), ce nombre variant de 4 à 42 jours en métropole, le maximum étant atteint dans les départements du Grand Est.
Le premier axe de cette ACP résume 78 % de l’information contenue dans ces deux variables, dont chacune contribue pour moitié à la construction de l’axe. Les coordonnées des départements sur cet axe constituent l’indicateur synthétique de la situation sanitaire en mars avril 2020 utilisé dans l’étude.
Les départements de France métropolitaine sont classés en quatre catégories de taille égale (24 par groupe), selon la valeur prise par cet indicateur (des moins aux plus touchés du point de vue sanitaire).
Une deuxième ACP vise à créer un indicateur des effets économiques de la crise, à partir de trois variables :
- la part des personnes de 15 ans ou plus (hors retraités) faisant état d’une dégradation de leur situation financière au cours du premier confinement [Firlej et Pawlowski, 2021], qui varie de 22 % en Ille et Vilaine et dans l’Orne à 38 % en Seine-Saint-Denis ;
- la part des actifs de 15 ans ou plus en emploi se déclarant au chômage partiel sur l’ensemble de la période allant de mi mars à mai 2020 [Firlej et Pawlowski, 2021], qui varie de 9 % dans les Alpes de Haute Provence à 22 % en Seine-Saint-Denis ;
- la proportion de personnes qui travaillent dans un secteur d’activité particulièrement affecté par la crise [Marquis, 2020], parmi les femmes de moins de 45 ans vivant en couple et leurs conjoints, d’après le recensement 2017, proportion qui varie de 6 % en Mayenne et en Haute Loire à 19 % en Seine-Saint-Denis.
Le premier axe de cette ACP résume 66 % de l’information contenue dans ces trois variables, qui contribuent à sa construction à hauteur respectivement de 36 %, 32 % et 32 %. Les coordonnées des départements sur cet axe constituent l’indicateur synthétique des effets économiques de la crise utilisé dans l’étude.
Les départements de France métropolitaine sont classés en quatre catégories de taille égale (24 par groupe), selon la valeur prise par cet indicateur (des moins aux plus touchés du point de vue économique).
Les départements sont enfin classés à partir de ces deux indicateurs croisés, en quatre catégories aussi :
- les moins touchés sur les deux plans, sanitaire comme économique (les deux indicateurs étant inférieurs à la moyenne) : 28 départements ;
- les plus touchés sur le plan économique seulement (l’indicateur sanitaire étant inférieur à la moyenne et l’indicateur économique supérieur) : 23 départements ;
- les plus touchés sur le plan sanitaire seulement (l’indicateur sanitaire étant supérieur à la moyenne et l’indicateur économique inférieur) : 24 départements ;
- les plus touchés sur les deux plans (les deux indicateurs étant supérieurs à la moyenne) : 21 départements.
Sources
Les statistiques d’état civil sur les naissances et les décès (pour l’étude de la surmortalité en mars-avril 2020) sont issues d’une exploitation des informations transmises par les mairies à l’Insee. Les naissances sont localisées au lieu de résidence de la mère. Les données sont provisoires. Pour les données historiques, le nombre de naissances par mois est fourni par l’Insee depuis 1946. Pour les données mensuelles antérieures, voir Ouvrir dans un nouvel ongletBunle (1954).
La tension hospitalière sur la capacité en réanimation est l’un des indicateurs de suivi de l’épidémie de Covid-19 diffusés par le ministère des Solidarités et de la Santé.
L’enquête Épidémiologie et conditions de vie (EpiCov) a été mise en place par la Drees, l’Inserm, Santé publique France et l’Insee dans le contexte de la pandémie de Covid-19. Son objectif est double : estimer la dynamique de l’épidémie à un niveau national et départemental et étudier l’effet du confinement et de l’épidémie sur les conditions de vie. La première vague de l’enquête s’est déroulée entre le 2 mai et le 2 juin 2020, à cheval entre le premier confinement de la population et le début de son déconfinement. 135 000 personnes âgées de 15 ans ou plus au 1er janvier 2020 résidant en ménage ordinaire (hors Ehpad, maisons de retraite, prisons, etc.) en France métropolitaine, en Martinique, en Guadeloupe ou à La Réunion ont été interrogées. Cette enquête permet d’analyser les conséquences, notamment financières, de ce premier confinement. Elle comprend également des questions détaillées sur la situation vis-à-vis de l’emploi, notamment sur l’activité partielle.
Le Fichier localisé social et fiscal (Filosofi) permet de disposer d’indicateurs de niveau de vie, d’inégalités et de pauvreté à un niveau local. Il est issu du rapprochement des données fiscales de la direction générale des Finances publiques (déclaration de revenus, taxe d’habitation et fichier d’imposition) et des données sur les prestations sociales (Cnaf, Cnav, CCMSA). Le champ est celui des ménages fiscaux vivant en logement ordinaire dont le revenu disponible est positif ou nul.
Le recensement de la population fournit des statistiques sur le nombre d’habitants et sur leurs caractéristiques : répartition par sexe et âge, professions exercées, conditions de logement, modes de transport, déplacements domicile travail ou domicile études, etc.
Le recensement de la population sert de base aux estimations annuelles de population. Il en fixe les niveaux de référence pour les années où il est disponible. Pour les années 2019 et suivantes, les estimations de population sont provisoires.
Définitions
Le chômage partiel ou technique est un dispositif qui permet à un employeur en difficulté de réduire l’activité de ses salariés et de faire prendre en charge par l’État tout ou partie de leur indemnisation. Pour réduire les conséquences économiques liées à la crise sanitaire, le décret n° 2020 325 du 25 mars 2020 relatif à l’activité partielle a largement étendu la possibilité de recours à ce dispositif, réduit le délai d’acceptation et augmenté l’allocation compensatrice versée aux entreprises. Pendant la période de confinement, un salarié en activité partielle percevait au minimum 70 % de sa rémunération brute (environ 84 % du salaire net), sans que ce montant puisse être inférieur au Smic.
Les communes rurales désignent l’ensemble des communes peu denses ou très peu denses d’après la grille communale de densité. Les communes denses ou de densité intermédiaire sont dites urbaines.
L’aire d’attraction d’une ville définit l’étendue de son influence sur les communes environnantes. Une aire est un ensemble de communes, d’un seul tenant et sans enclave, constitué d’un pôle de population et d’emploi, et d’une couronne qui regroupe les communes dont au moins 15 % des actifs travaillent dans le pôle. La commune la plus peuplée du pôle est appelée commune centre. Les pôles sont déterminés principalement à partir de critères de densité et de population totale, suivant une méthodologie cohérente avec celle de la grille communale de densité. Un seuil d’emplois est ajouté de façon à éviter que des communes essentiellement résidentielles, comportant peu d’emplois, soient considérées comme des pôles. Si un pôle envoie au moins 15 % de ses actifs travailler dans un autre pôle de même niveau, les deux pôles sont associés et forment ensemble le cœur d’une aire d’attraction. Les communes qui envoient au moins 15 % de leurs actifs travailler dans le pôle constituent la couronne de l’aire d’attraction du pôle.
Une personne est considérée comme pauvre lorsqu’elle vit dans un ménage dont le niveau de vie est inférieur au seuil de pauvreté, qui correspond à 60 % du niveau de vie médian de l’ensemble des ménages de France métropolitaine.
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Les naissances quotidiennes ont baissé de moins de 1 % entre les hivers 2019-2020 et 2018-2019, de même qu’entre les hivers 2018-2019 et 2017-2018.
Dans un département, la baisse de la natalité entraînée par l’épidémie de Covid-19 dépend en partie de la structure par âge de sa population. Cependant, le nombre de naissances et l’indicateur conjoncturel de fécondité calculé sur trois mois (qui correspond au nombre d’enfants qu’aurait une femme en moyenne si les taux de fécondité par âge tout au long de sa vie étaient ceux de ces trois mois, neutralisant ainsi les effets de la structure par âge) évoluent de manière très proche durant l’hiver 2020-2021 par rapport aux trois hivers précédents (mois de décembre à février). Pour permettre de mener l’analyse au niveau communal, cette étude abordera la question sous l’angle de la natalité.
Ces évolutions doivent être prises avec précaution du fait d’un nombre très faible de naissances dans ces départements, tout particulièrement dans la Creuse et la Lozère.
Cet effet a également été documenté pour la peste [Ouvrir dans un nouvel ongletBiraben, 1975] ou le choléra [Ouvrir dans un nouvel ongletPetillon, 2006], et encore récemment pendant l’épidémie de chikungunya à La Réunion [Ouvrir dans un nouvel ongletBreton et al. , 2008].
L’analyse se restreint aux départements de métropole, du fait de la spécificité des DOM et de la non disponibilité de certaines données (encadré 1).
Parmi les ménages dont le référent fiscal a moins de 50 ans, hors Guadeloupe, Guyane et Mayotte (données Filosofi non disponibles).
La structure par âge des femmes en âge de procréer varie selon les départements. L’impact différencié de la crise sanitaire selon l’âge contribue donc à expliquer certains écarts entre départements de l’évolution de la natalité pendant l’hiver 2020 2021. Cet effet est toutefois de second ordre.
Les secteurs les plus affectés par la crise sont ceux identifiés dans la Note de conjoncture de l’Insee d’octobre 2020 comme accusant en septembre 2020 une perte d’activité supérieure à 15 % par rapport à leur niveau d’avant-crise (4e trimestre 2019).
Les naissances quotidiennes ont baissé de moins de 1 % entre les hivers 2019-2020 et 2018-2019, de même qu’entre les hivers 2018-2019 et 2017-2018.
Dans un département, la baisse de la natalité entraînée par l’épidémie de Covid-19 dépend en partie de la structure par âge de sa population. Cependant, le nombre de naissances et l’indicateur conjoncturel de fécondité calculé sur trois mois (qui correspond au nombre d’enfants qu’aurait une femme en moyenne si les taux de fécondité par âge tout au long de sa vie étaient ceux de ces trois mois, neutralisant ainsi les effets de la structure par âge) évoluent de manière très proche durant l’hiver 2020-2021 par rapport aux trois hivers précédents (mois de décembre à février). Pour permettre de mener l’analyse au niveau communal, cette étude abordera la question sous l’angle de la natalité.
Ces évolutions doivent être prises avec précaution du fait d’un nombre très faible de naissances dans ces départements, tout particulièrement dans la Creuse et la Lozère.
Cet effet a également été documenté pour la peste [Ouvrir dans un nouvel ongletBiraben, 1975] ou le choléra [Ouvrir dans un nouvel ongletPetillon, 2006], et encore récemment pendant l’épidémie de chikungunya à La Réunion [Ouvrir dans un nouvel ongletBreton et al. , 2008].
L’analyse se restreint aux départements de métropole, du fait de la spécificité des DOM et de la non disponibilité de certaines données (encadré 1).
Parmi les ménages dont le référent fiscal a moins de 50 ans, hors Guadeloupe, Guyane et Mayotte (données Filosofi non disponibles).
La structure par âge des femmes en âge de procréer varie selon les départements. L’impact différencié de la crise sanitaire selon l’âge contribue donc à expliquer certains écarts entre départements de l’évolution de la natalité pendant l’hiver 2020 2021. Cet effet est toutefois de second ordre.
Les secteurs les plus affectés par la crise sont ceux identifiés dans la Note de conjoncture de l’Insee d’octobre 2020 comme accusant en septembre 2020 une perte d’activité supérieure à 15 % par rapport à leur niveau d’avant-crise (4e trimestre 2019).