Sécurité et société Édition 2021
L’Insee et le Service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI) du ministère de l’Intérieur, en collaboration avec le Service statistique ministériel de la Justice (SDSE), présentent dans cette édition inédite de la collection « Insee Références » intitulée Sécurité et société un panorama synthétique des connaissances sur les phénomènes de délinquance et leur traitement par la justice.
Conditions de travail des policiers et des gendarmes en 2016
Insee Références
Paru le :09/12/2021
Sur le plan physique, policiers et gendarmes exercent un métier relativement moins pénible que les autres agents de la fonction publique au contact du public : ils sont moins amenés à porter des charges lourdes, à effectuer des mouvements douloureux ou fatigants ou à travailler dans un environnement bruyant, mais restent toutefois aussi longtemps debout (figure 1). En revanche, leurs horaires sont souvent longs et atypiques : 29 % travaillent plus de 42 heures par semaine, 40 % au moins 20 dimanches par an et 20 % au moins 50 nuits, nettement plus que les autres agents publics en contact avec les usagers.
tableauFigure 1 – Conditions de travail des policiers et des gendarmes, en 2016
Policiers, gendarmes | Autres agents de la fonction publique en contact avec le public |
Ensemble des salariés (secteur public et privé) |
|
---|---|---|---|
Ambiance physique | |||
Porter des charges lourdes | 19 | 40 | 40 |
Effectuer des mouvements douloureux ou fatigants | 40 | 59 | 47 |
Rester longtemps debout | 34 | 33 | 34 |
Bruit élevé | 6 | 14 | 18 |
Horaires atypiques | |||
Durée hebdomadaire supérieure à 42 heures (salariés à temps plein) | 29 | 17 | 21 |
Au moins 20 dimanches par an | 40 | 13 | 10 |
Au moins 50 nuits par an | 20 | 6 | 6 |
Intensité du travail | |||
3 contraintes de rythme | 33 | 27 | 35 |
Travailler sous pression | 36 | 32 | 31 |
Devoir penser à trop de choses à la fois | 44 | 47 | 38 |
Recevoir des ordres contradictoires | 70 | 41 | 42 |
Autonomie | |||
Travail pas répétitif | 84 | 63 | 58 |
Développer ses compétences | 75 | 75 | 68 |
Apprendre des choses nouvelles | 85 | 87 | 81 |
Soutien social | |||
Aide du supérieur en cas de difficulté | 73 | 61 | 67 |
Aide des collègues | 94 | 88 | 81 |
Faire partie d'une équipe | 84 | 78 | 72 |
Conflits éthiques | |||
Devoir faire des choses que l'on désapprouve | 12 | 9 | 10 |
Ne pas avoir la formation suffisante pour faire correctement son travail | 52 | 43 | 34 |
Ne pas avoir le matériel suffisant pour faire correctement son travail | 50 | 32 | 20 |
Ne pas ressentir la satisfaction du travail bien fait | 38 | 28 | 27 |
Ne pas faire un travail utile aux autres | 26 | 14 | 28 |
Intensité émotionnelle | |||
Avoir peur dans son travail | 88 | 38 | 31 |
Devoir cacher ses émotions | 34 | 32 | 25 |
Ne pas pouvoir s'exprimer, donner son avis | 31 | 22 | 16 |
Devoir contraindre des personnes | 33 | 5 | 3 |
Avoir subi au moins une agression verbale du public (12 derniers mois) | 58 | 28 | 15 |
Avoir subi au moins une agression physique du public (12 derniers mois) | 28 | 3 | 1 |
Agressions des collègues ou des supérieurs | 16 | 12 | 11 |
Insécurité socio-économique | |||
Ne pas connaître les tâches du prochain mois | 74 | 43 | 52 |
Craindre pour son emploi dans l'année à venir | 7 | 19 | 24 |
Craindre une mutation forcée | 13 | 25 | 19 |
Santé | |||
Travail jugé mauvais pour la santé | 52 | 31 | 30 |
Santé altérée (moyenne, mauvaise ou très mauvaise) | 13 | 27 | 25 |
Symptôme dépressif (score WHO 5¹ inférieur ou égal à 8) | 6 | 11 | 10 |
Pensées suicidaires (12 derniers mois) | 8 | 6 | 5 |
Au moins 1 accident du travail (12 derniers mois) | 20 | 10 | 10 |
Absences maladie supérieure à 10 jours (12 derniers mois) | 18 | 16 | 15 |
- 1. Le score WHO 5 est un score de bien-être psychologique calculé à l'aide de 5 questions, qui prend des valeurs allant de 0 (très faible bien-être) à 25 (bien-être maximal). Un score inférieur ou égal à 8 indique un risque de symptôme dépressif.
- Lecture : en 2016, 19 % des policiers et des gendarmes portent des charges lourdes dans le cadre de leur travail, contre 40 % pour l'ensemble des salariés.
- Champ : France hors Mayotte, salariés.
- Sources : Dares, Drees, DGAFP, enquête Conditions de travail et risques psychosociaux 2016.
L’intensité de leur travail est proche de celle des autres agents publics en contact avec les usagers : 36 % d’entre eux disent travailler sous pression (contre 32 %). Seule différence concernant l’intensité du travail, ils indiquent nettement plus souvent recevoir des ordres contradictoires (70 % contre 41 %).
Leurs rapports avec leurs supérieurs et leurs collègues sont plutôt bons : ils reçoivent plus souvent que les autres agents publics du soutien en cas de difficulté dans le travail et se sentent plus souvent faire partie d’une équipe. Leur autonomie au travail est élevée, comme celle des autres agents publics : 75 % d’entre eux peuvent développer leurs compétences dans leur travail, 85 % apprendre des choses nouvelles. Ils bénéficient également d’une forte sécurité socio‑économique, du fait de leur statut de fonctionnaire mais aussi parce qu’ils craignent beaucoup moins que les autres agents publics d’être mutés sur un autre poste de travail contre leur volonté (13 % contre 25 % pour les autres agents publics en contact avec les usagers).
En revanche, leur exposition à d’autres risques psychosociaux, comme l’intensité émotionnelle ou les conflits éthiques, est très importante. La plupart d’entre eux (88 %, contre 38 % des autres agents publics en contact avec le public) disent avoir toujours ou souvent peur dans leur travail pour leur sécurité ou celle des autres ; 58 % (contre 28 %) ont subi une agression verbale de la part du public au cours des douze derniers mois et 28 % (contre 3 %) une agression physique. Du côté des conflits éthiques, 38 % disent n’éprouver que parfois ou jamais la satisfaction du travail bien fait, et la moitié d'entre eux estiment ne pas avoir la formation ou le matériel suffisants pour faire correctement leur travail, nettement plus que les autres agents publics en contact avec les usagers (respectivement 43 % et 32 %). Cela peut les amener à douter que leur travail soit utile aux autres (26 % disent parfois ou jamais contre 14 % des autres agents publics en contact avec les usagers).
Au vu de ces fortes expositions à certains risques psychosociaux et du fort taux d’accident du travail (20 % ont eu au moins un accident au cours des 12 mois précédant l’enquête, contre 10 % des autres agents publics en contact avec les usagers), 52 % des policiers et des gendarmes jugent leur travail mauvais pour leur santé (contre 31 %). Pourtant, ils se déclarent plutôt en meilleure santé : 13 % (contre 27 %) signalent une santé moyenne, mauvaise ou très mauvaise ; ils sont aussi deux fois moins nombreux que les autres agents publics en contact avec les usagers à présenter des symptômes dépressifs, avec toutefois une proportion légèrement plus élevée déclarant avoir eu des pensées suicidaires au cours des 12 derniers mois (8 % contre 6 %). L’exposition à la violence et à la peur, particulièrement néfaste dans d’autres professions, peut ne pas être vécue de façon aussi délétère par les policiers et les gendarmes, comme si elle faisait « partie du métier ».
Avertissement
L’étude porte sur les métiers de la filière « sécurité publique » au sens de la Dares (inspecteurs, agents police nationale, agents police municipale, gendarmes). 199 d’entre eux ont répondu à l’enquête Conditions de travail et risques psychosociaux 2016 menée par la Dares, la Drees et la DGAFP ; ils sont ici comparés aux autres agents des trois volets de la fonction publique qui travaillent en contact avec le public (6 411 enquêtés) et au reste des salariés des secteurs public et privé.