France, portrait social Édition 2024
Cet ouvrage rassemble trois analyses des discriminations ressenties et vécues par différents groupes de personnes. Par ailleurs, deux dossiers analysent le niveau de vie des ménages en 2023, année encore marquée par une forte inflation. Enfin, une quarantaine de fiches synthétiques dressent le panorama social de la France.
Discriminations et violences à caractère discriminatoire : motifs des atteintes et caractéristiques des victimes
Valérie Bernardi, Valérie Carrasco, Sandra Zilloniz (SSMSI)
En France métropolitaine, Martinique, Guadeloupe ou à La Réunion, 1,9 % des personnes âgées de 18 ans ou plus déclarent avoir subi au cours de l’année 2021 au moins une fois des discriminations en raison de leurs couleurs de peau, origines, religion, orientation sexuelle, sexe, d’un handicap ou de tout autre critère reconnu par la loi. Plusieurs motifs peuvent être cités en même temps. Les plus souvent mentionnés sont les origines (48 %), la couleur de peau (29 %), puis la religion (25 %).
Interrogées par ailleurs sur les violences subies et leurs motifs, 2,7 % des personnes déclarent avoir été victimes, la même année, d’au moins un type de violences (physiques, verbales ou psychologiques) à caractère discriminatoire. 42 % des victimes de ces violences citent le sexe comme motif, 32 % l’apparence physique, 23 % l’âge et 21 % les origines.
À autres caractéristiques comparables, les jeunes, les personnes en situation de handicap et les minorités sexuelles déclarent davantage d’atteintes, que ce soit des discriminations ou des violences à caractère discriminatoire.
Six profils de victimes peuvent être distingués selon l’expérience subie, discrimination ou violence à caractère discriminatoire, et les motifs invoqués. Les trois premiers profils regroupent trois quarts des victimes. 37 % des victimes constituent un premier profil associé avant tout à des violences commises au motif du sexe, de l’apparence physique ou de l’âge de la victime. Un deuxième profil (21 % des victimes) regroupe uniquement des victimes de discriminations, essentiellement en lien avec les origines, la couleur de la peau ou la religion. Un troisième groupe (18 %) rassemble des victimes d’atteintes à la personne fondées sur les mêmes motifs, mais qui dans 80 % des cas sont uniquement des violences.
Insee Références
Paru le :21/11/2024
- Discriminations et violences à caractère discriminatoire
- Près de la moitié des personnes victimes de discriminations citent le motif des origines
- 40 % des personnes victimes de violences physiques, verbales ou psychologiques leur attribuent un motif discriminatoire
- 42 % des victimes de violences à caractère discriminatoire déclarent qu’elles les ont subies en raison de leur sexe
- Les discriminations et violences à caractère discriminatoire touchent davantage les jeunes, les personnes en situation de handicap et les minorités sexuelles
- Six profils‑types de victimes de discriminations ou de violences à caractère discriminatoire
- Une surreprésentation des femmes parmi les victimes de discriminations et de violences, en raison du sexe, de l’apparence ou de l’âge
- Plus d’immigrés et de descendants d’immigrés parmi les victimes de discriminations au motif des origines, de la couleur de la peau ou de la religion qu’en cas de violences
- Violences ou discriminations en raison de l’orientation sexuelle, d’un handicap ou de l’état de santé : le profil des victimes est lié au motif invoqué
- Des dommages psychologiques plus importants pour les personnes victimes en raison de leur état de santé ou d’un handicap
Discriminations et violences à caractère discriminatoire
L’enquête « Vécu et ressenti en matière de sécurité » de 2022 (source), interroge les personnes sur les discriminations, c’est‑à‑dire les traitements défavorables (par exemple le refus de se voir accorder un emploi, une promotion, un logement, un prêt ou tout autre bien ou service) qu’elles estiment avoir subies en raison de critères retenus par la loi (Ouvrir dans un nouvel ongletarticle 225‑1 du code pénal) (méthodes), notamment la couleur de peau, l’origine, la religion, l’orientation sexuelle, le sexe, l’état de santé, le handicap, les opinions politiques, l’activité syndicale, l’âge, l’état de grossesse ou le lieu de résidence. Cette enquête dite de « victimation » a par ailleurs pour objectif principal de recenser les violences subies, quelle que soit leur nature (violences sexuelles ou physiques, harcèlement, menaces, injures et insultes ou atteintes à la vie privée). Les motifs de ces violences sont recueillis, ce qui permet de caractériser une partie d’entre elles comme étant à caractère discriminatoire, quand elles mobilisent un critère prohibé. Les violences et les discriminations sont deux expériences distinctes, que les personnes décrivent séparément au cours de l’enquête.
Près de la moitié des personnes victimes de discriminations citent le motif des origines
D’après cette enquête, parmi les personnes âgées de 18 ans ou plus vivant en France métropolitaine, Martinique, Guadeloupe ou à La Réunion, 10,7 % déclarent avoir été victimes au moins une fois au cours de leur vie de traitements défavorables et 1,9 % en avoir subi en 2021 (figure 1). Ces discriminations interviennent le plus souvent lors d’une recherche d’emploi (21 %) ou dans le cadre du travail (18 %).
tableauFigure 1 - Part de personnes victimes de discriminations et de violences physiques, verbales ou psychologiques à caractère discriminatoire en 2021
Catégorie | Femmes | Hommes | Ensemble |
---|---|---|---|
Victimes d'au moins une discrimination | 2,0 | 1,8 | 1,9 |
Victimes d'au moins une violence physique, verbale ou psychologique, dont : | 6,4 | 7,0 | 6,7 |
Victimes de violence à caractère discriminatoire | 3,0 | 2,2 | 2,7 |
Victimes d'au moins une discrimination et d'au moins une violence à caractère discriminatoire | 0,4 | 0,3 | 0,4 |
- Note : Hors violences sexuelles et hors violences commises dans la sphère conjugale ou familiale.
- Lecture : 6,7 % des personnes déclarent avoir été victimes d'au moins une violence physique, verbale ou psychologique en 2021 ; 2,7 % estiment que ces violences sont à caractère discriminatoire.
- Champ : France métropolitaine, Martinique, Guadeloupe et La Réunion, personnes âgées de 18 ans ou plus vivant dans un logement ordinaire.
- Source : SSMSI, enquête Vécu et ressenti en matière de sécurité 2022 (questionnaire socle).
Près de la moitié (48 %) des personnes victimes de discriminations affirment avoir fait l’objet de ces traitements défavorables en raison de leurs origines, réelles ou supposées (figure 2). La couleur de peau est le deuxième motif le plus souvent cité (29 %), puis la religion, réelle ou supposée (25 %). Les personnes peuvent renseigner plusieurs motifs. Seules 38 % des victimes de discriminations citent un seul motif, dont 10 % les origines.
tableauFigure 2 - Motifs invoqués par les personnes victimes de discriminations ou de violences à caractère discriminatoire
Motif | Discriminations | Violences à caractère discriminatoire |
---|---|---|
Autre raison | 5 | nc |
Orientation ou identité sexuelle | 5 | 8 |
Appartenance ou opinions syndicales ou politiques | 5 | 11 |
Quartier ou lieu de résidence | 9 | 12 |
Handicap ou état de santé | 14 | 7 |
Âge | 16 | 23 |
Apparence physique ou corporelle | 20 | 32 |
Sexe | 21 | 42 |
Religion | 25 | 10 |
Couleur de peau | 29 | 16 |
Origines | 48 | 21 |
- Notes : Hors violences sexuelles et hors violences commises dans la sphère conjugale ou familiale. Les personnes peuvent citer plusieurs motifs. Les origines, la religion et l'orientation ou l'identité sexuelle sont réelles ou supposées.
- Lecture : 48 % des personnes victimes d’au moins une discrimination déclarent que la dernière était due à leurs origines (réelles ou supposées), tandis que 42 % des personnes victimes d’au moins une violence physique, verbale ou psychologique à caractère discriminatoire déclarent l'avoir subie en raison de leur sexe.
- Champ : France métropolitaine, Martinique, Guadeloupe et La Réunion, personnes âgées de 18 ans ou plus vivant dans un logement ordinaire.
- Source : SSMSI, enquête Vécu et ressenti en matière de sécurité 2022 (questionnaire socle, internet et téléphone).
graphiqueFigure 2 - Motifs invoqués par les personnes victimes de discriminations ou de violences à caractère discriminatoire
21 % des victimes de discriminations déclarent les avoir subies en raison de leur sexe (33 % des femmes victimes, et 7 % des hommes) et 20 % en raison de leur apparence physique. Les discriminations liées à l’âge sont citées par 16 % des victimes et concernent particulièrement les personnes âgées de 55 ans ou plus. 14 % des victimes affirment avoir été discriminées en raison d’un handicap ou de l’état de santé. Peu de personnes (2 %) citent simultanément les motifs « apparence physique » et « sexe » ou « handicap/état de santé » et « apparence physique ».
40 % des personnes victimes de violences physiques, verbales ou psychologiques leur attribuent un motif discriminatoire
En 2021, 6,7 % des personnes âgées de 18 ans ou plus vivant en France métropolitaine, Martinique, Guadeloupe ou à La Réunion déclarent avoir subi au moins une violence physique, verbale ou psychologique, à caractère non sexuel, en dehors de la sphère conjugale ou familiale (méthodes). 2,7 % de la population (3,0 % des femmes et 2,2 % des hommes), soit 40 % des victimes de violences, invoquent un motif discriminatoire. Les violences sexuelles, par nature toujours en lien avec le sexe de la victime, sont exclues de l’analyse.
Dans l’ensemble de la population, très peu de personnes se déclarent à la fois victimes de discriminations et de violences à caractère discriminatoire (0,4 %). Ainsi, parmi les personnes ayant déclaré avoir subi des discriminations en 2021, 18,5 % estiment également avoir été victimes de violences à caractère discriminatoire. Et parmi les victimes d’au moins une violence à caractère discriminatoire, 13,7 % ont aussi fait l’expérience de traitements défavorables.
42 % des victimes de violences à caractère discriminatoire déclarent qu’elles les ont subies en raison de leur sexe
Les victimes de violences physiques, verbales ou psychologiques à caractère discriminatoire invoquent deux fois plus souvent les avoir subies en raison de leur sexe que les victimes de discriminations (42 %, 65 % parmi les femmes et 13 % parmi les hommes). Seules 17 % de l’ensemble des victimes de violences à caractère discriminatoire ne citent que le sexe comme motif discriminatoire, mais cette proportion concerne 27 % des femmes, contre seulement 2 % des hommes. Dans le cas particulier des injures et insultes, cette part atteint même 35 % parmi les femmes qui en sont victimes. Après le sexe, les deux motifs les plus souvent cités par les personnes s’estimant victimes de violences à caractère discriminatoire sont l’apparence physique (32 %) et l’âge (23 %).
Les origines constituent un motif qui concerne quant à lui 21 % des victimes de violences à caractère discriminatoire, il est deux fois moins souvent cité que pour les victimes de discriminations. Les motifs relatifs à la couleur de peau et à la religion sont mentionnés par respectivement 16 % et 10 % des personnes s’estimant victimes de violences.
Les violences analysées dans cet éclairage revêtent plusieurs formes : les injures et insultes sont les plus fréquemment déclarées par les personnes victimes, puis le harcèlement moral, les menaces, les violences physiques et enfin les atteintes à la vie privée (diffusions d’images ou d’informations personnelles dans le but de nuire à la personne). C’est dans le cadre du harcèlement moral qu’un motif discriminatoire est le plus souvent invoqué : par 53 % des femmes qui en sont victimes et 43 % des hommes (figure 3). Pour les autres atteintes à la personne (insultes ou injures, menaces, violences physiques, diffusions d’images ou d’informations personnelles), de 25 à 43 % des victimes déclarent que cette violence a été commise en raison d’un motif discriminatoire. Les violences à caractère discriminatoire interviennent le plus souvent dans un contexte professionnel, mais de façon moins marquée que pour les discriminations ressenties.
tableauFigure 3 - Part de personnes victimes de violences physiques, verbales ou psychologiques dans la population, selon le type d'atteinte et le sexe
Type d'atteinte | Victimes dans la population | Victimes ayant invoqué un motif discriminatoire |
---|---|---|
Injures ou insultes | 3,2 | 43,2 |
Harcèlement moral | 3,0 | 52,7 |
Menaces | 1,1 | 36,2 |
Violences physiques | 0,6 | 38,3 |
Diffusions d'images ou d'informations personnelles | 0,3 | 35,1 |
Ensemble | 6,3 | 47,3 |
- Note : Hors atteintes à caractère sexuel et hors violences commises dans la sphère conjugale ou familiale.
- Lecture : En 2021, parmi les femmes âgées de 18 ans ou plus, 3,0 % ont subi du harcèlement moral, et 52,7 % d'entre elles déclarent que cette atteinte a été commise en raison d’un motif discriminatoire.
- Champ : France métropolitaine, Martinique, Guadeloupe et La Réunion, personnes âgées de 18 ans ou plus vivant dans un logement ordinaire.
- Source : SSMSI, enquête Vécu et ressenti en matière de sécurité 2022 (questionnaire socle, internet et téléphone).
graphiqueFigure 3 - Part de personnes victimes de violences physiques, verbales ou psychologiques dans la population, selon le type d'atteinte et le sexe
Les discriminations et violences à caractère discriminatoire touchent davantage les jeunes, les personnes en situation de handicap et les minorités sexuelles
Trois caractéristiques sont associées à des risques plus élevés de déclarer avoir subi des discriminations, comme des violences à caractère discriminatoire : la jeunesse, une orientation sexuelle différente de la majorité et des limitations dans les activités de la vie quotidienne.
À caractéristiques comparables (sexe, niveau de diplôme, situation d’emploi ou de famille, origine notamment), les personnes âgées de 18 à 24 ans ont, relativement aux personnes de 35 à 44 ans, 1,5 fois plus de risques d’avoir subi des discriminations, 2,2 fois plus des violences en raison du sexe et 2,0 fois plus des violences en raison d’un autre motif (figure 4). À l’inverse, les personnes plus âgées ont, à partir de 55 ans, des probabilités environ deux fois plus faibles. Le risque d’être victime de discriminations ou de violences à caractère discriminatoire varie aussi nettement en fonction de l’orientation sexuelle. Notamment, par rapport aux personnes hétérosexuelles, les personnes bisexuelles ont 2,3 fois plus de risques de déclarer avoir subi une discrimination, et les personnes homosexuelles 3,2 fois plus une violence à caractère discriminatoire pour un autre motif que le sexe. Enfin, par rapport aux personnes qui ne sont pas limitées dans leurs activités quotidiennes, les personnes en situation de handicap ont, à autres caractéristiques comparables, une probabilité plus élevée de rapporter des faits de discrimination (2,7 fois plus quand elles sont fortement limitées), de violences à caractère sexiste (2,1 fois plus) ou en raison d’un autre motif que le sexe (2,5 fois plus).
tableauFigure 4 – Risque de déclarer avoir subi des discriminations ou des violences à caractère discriminatoire
Caractéristiques | Discriminations | Violences à caractère discriminatoire en raison du sexe | Violences à caractère discriminatoire pour un autre motif que le sexe | Violences à caractère discriminatoire (tous motifs) |
---|---|---|---|---|
Rapports de probabilités | ||||
Sexe | ||||
Femme | Réf. | Réf. | Réf. | Réf. |
Homme | ns | 0,1*** | 1,9*** | 0,7*** |
Âge | ||||
De 18 à 24 ans | 1,5*** | 2,2*** | 2,0*** | 2,1*** |
De 25 à 34 ans | 1,1** | 1,6*** | 1,3*** | 1,4*** |
De 35 à 44 ans | Réf. | Réf. | Réf. | Réf. |
De 45 à 54 ans | 0,6*** | ns | ns | ns |
De 55 à 64 ans | 0,4*** | 0,5*** | 0,6*** | 0,6*** |
65 ans ou plus | 0,2*** | 0,2*** | 0,3*** | 0,3*** |
Lien à l'immigration | ||||
Immigré | 2,2*** | 0,5*** | 1,2* | ns |
Descendant d'immigrés | 1,9*** | ns | ns | ns |
Personne sans ascendance migratoire directe | Réf. | Réf. | Réf. | Réf. |
Non-réponse | 1,8*** | ns | ns | ns |
Religion | ||||
Sans religion | ns | 1,2** | ns | ns |
Chrétien | Réf. | Réf. | Réf. | Réf. |
Musulman | 2,6*** | ns | ns | ns |
Autre religion | 2,1*** | 1,7*** | 1,6*** | 1,6*** |
Non-réponse | 1,3*** | 0,7*** | ns | 0,8** |
Orientation sexuelle | ||||
Hétérosexuel | Réf. | Réf. | Réf. | Réf. |
Homosexuel | 2,0*** | 1,7*** | 3,2*** | 2,5*** |
Bisexuel | 2,3*** | 1,9*** | 2,0*** | 2,1*** |
Autre | ns | ns | 0,7* | ns |
Non-réponse | 0,7*** | 0,7** | 0,7*** | 0,7*** |
Limitation dans les activités habituelles | ||||
Fortement limité | 2,7*** | 2,1*** | 2,5*** | 2,3*** |
Limité mais pas fortement | 2,0*** | 1,6*** | 1,7*** | 1,7*** |
Pas limité | Réf. | Réf. | Réf. | Réf. |
Non-réponse | 1,2* | ns | ns | ns |
- ns : non significatif au seuil de 10 % ; Réf. : modalité de référence.
- Notes : Le tableau présente des rapports de probabilité, issus de modélisations logistiques : p/p0, où p0 est la probabilité d'occurrence de l'évènement pour une personne ayant les modalités de référence de toutes les caractéristiques retenues dans le modèle, et p la probabilité pour une personne ayant les mêmes caractéristiques de référence (sauf celle considérée). Le diplôme, la taille de l'unité urbaine, le type de ménage et la situation dans l'emploi, non présentées ici, font également partie des variables explicatives du modèle. En raison de leur faible effectif, les personnes de confession juive sont ajoutées avec celles déclarant une « autre religion ». Les rapports de probabilités sont significatifs à 1 % (***), 5 % (**) ou 10 % (*).
- Lecture : 2,6 % des personnes fortement limitées dans les activités habituelles déclarent avoir subi au moins une discrimination en 2021 ; à autres caractéristiques comparables, ces personnes ont une probabilité 2,7 fois plus élevée de déclarer avoir été victime de discrimination que les personnes sans limitation dans les activités habituelles.
- Champ : France métropolitaine, Martinique, Guadeloupe et La Réunion, personnes âgées de 18 ans ou plus vivant dans un logement ordinaire.
- Source : SSMSI, enquête Vécu et ressenti en matière de sécurité 2022 (questionnaire socle, internet et téléphone).
La probabilité de déclarer des violences varie fortement selon le sexe, avec des différences femmes-hommes très marquées quand les violences à caractère discriminatoire en raison du sexe sont distinguées des autres violences à caractère discriminatoire. À caractéristiques comparables, les femmes ont 8 fois plus de risques que les hommes de se déclarer victimes de violences à caractère discriminatoire en raison du sexe, tandis que les hommes ont, à l’inverse, 1,9 fois plus de risques de se déclarer victimes de violences discriminatoires en raison d’un motif autre que le sexe. En revanche, à caractéristiques identiques, les femmes et les hommes déclarent être victimes de discriminations dans des proportions similaires.
Par ailleurs, le risque de déclarer des discriminations varie fortement selon le lien à l’immigration, les origines étant le motif le plus souvent cité par les victimes. Par rapport aux personnes sans ascendance migratoire, les immigrés et les descendants d’immigrés, toutes origines confondues, déclarent, à autres caractéristiques identiques, respectivement 2,2 et 1,9 fois plus avoir été victimes de discriminations en 2021. Les immigrés ont, quant à eux, 1,2 fois plus de risques de subir des violences en raison d’un motif discriminatoire autre que le sexe que les personnes sans ascendance migratoire. À l’inverse, ils en ont deux fois moins pour les violences commises en raison du sexe. Les descendants d’immigrés ont, quant à eux, des risques d’avoir fait l’expérience de violences à caractère discriminatoire qui sont similaires à ceux des personnes sans ascendance migratoire, quels que soient les motifs de ces violences et toutes origines confondues.
Quant à la religion, se déclarer de confession musulmane plutôt que chrétienne multiplie par 2,6 le risque d’être victime de discriminations. C’est aussi le cas des personnes déclarant avoir une appartenance religieuse différente de la religion chrétienne et musulmane, pour lesquelles cette probabilité est multipliée par 2,1. Ces résultats corroborent ceux de Lê et al., (2022) et Rouhban et al. (2024). En revanche, les risques de subir des violences à caractère discriminatoire ne sont pas plus élevés pour les personnes se déclarant musulmanes que pour les personnes se déclarant chrétiennes, à autres caractéristiques identiques, qu’il s’agisse de violences à caractère sexiste ou pour un autre motif ; mais le risque est 1,6 fois plus élevé pour les personnes se déclarant d’une autre religion.
Six profils‑types de victimes de discriminations ou de violences à caractère discriminatoire
Une typologie a été effectuée à partir du type d’atteinte et des motifs invoqués, permettant de dégager six groupes de victimes (méthodes) : deux groupes de personnes avant tout victimes de violences à caractère discriminatoire, soit en raison du sexe, de l’apparence ou de l’âge (37 % des victimes), soit en raison des origines, de la couleur de peau ou de la religion (18 % des victimes) ; deux groupes de personnes victimes de discriminations mais rarement de violences, l’un pour des motifs liés aux origines, à la couleur de peau ou à la religion (21 % des victimes), l’autre pour des motifs liés au sexe, à l’apparence ou à l’âge (11 % des victimes) ; puis deux groupes, nettement moins nombreux, rassemblant des victimes d’une part, de violences ou de discriminations en raison de l’orientation sexuelle (6 % des victimes), d’autre part, de violences ou de discriminations en raison d’un handicap ou de l’état de santé (7 % des victimes) (figure 5).
tableauFigure 5 – Type d'atteinte et motifs surreprésentés de discriminations ou de violences à caractère discriminatoire, selon les groupes de personnes victimes
Catégorie | Part dans l'ensemble des victimes (en %) | Personnes ayant subi des discriminations (en %) | Motifs de discrimination les plus représentés | Personnes ayant subi une violence à caractère discriminatoire (en %) | Type de violences les plus représentés | Motifs de violence les plus représentés | |
---|---|---|---|---|---|---|---|
Groupes de personnes victimes de violences discriminatoires en raison | du sexe, de l’apparence ou de l’âge | 37 | 0 | /// | 100 | Harcèlement moral, menaces, insultes ou injures | Sexe, apparence physique, (âge) |
des origines, de la couleur de peau ou de la religion | 18 | 20 | (Origines) | 100 | Harcèlement moral, menaces, insultes ou injures | Couleur de peau, origines, religion, (sexe, âge) | |
Groupes de personnes victimes de discriminations en raison | des origines, de la couleur de peau ou de la religion | 21 | 100 | Couleur de peau, origines, religion, (lieu de résidence) | 2 | /// | /// |
du sexe, de l'apparence ou de l'âge | 11 | 100 | Sexe, âge, apparence physique | 20 | (Insultes ou injures) | (Sexe) | |
Groupes de personnes victimes de violences ou de discriminations en raison | de l'orientation sexuelle | 6 | 37 | Orientation sexuelle | 84 | Harcèlement moral, menaces, insultes ou injures, (diffusion d’images ou d’informations personnelles) | Orientation sexuelle, sexe, apparence physique, (âge, handicap ou état de santé) |
d'un handicap ou de l'état de santé | 7 | 68 | Handicap ou état de santé | 43 | Harcèlement moral, insultes ou injures | Handicap ou état de santé |
- /// : groupe non concerné (les types de violences ne concernent pas les groupes de victimes de discrimination et inversement).
- Note : Les critères figurant entre parenthèses sont également surreprésentés dans les groupes mais concernent un effectif compris entre 15 % et moins de 30 % des victimes.
- Lecture : 37 % des personnes victimes de discriminations ou de violences à caractère discriminatoire appartiennent au groupe de personnes victimes de « violence discriminatoire en raison du sexe, de l'apparence ou de l'âge ». 100 % des personnes de ce groupe ont subi une violence à caractère discriminatoire, avec une surreprésentation des personnes victimes de harcèlement moral, de menaces et d'insultes ou injures.
- Champ : France métropolitaine, Martinique, Guadeloupe et La Réunion, personnes âgées de 18 ans ou plus vivant dans un logement ordinaire.
- Source : SSMSI, enquête Vécu et ressenti en matière de sécurité 2022 (questionnaire socle, internet et téléphone).
Une surreprésentation des femmes parmi les victimes de discriminations et de violences, en raison du sexe, de l’apparence ou de l’âge
Le groupe « violence discriminatoire en raison du sexe, de l’apparence ou de l’âge » rassemble 37 % de l’ensemble des victimes, soit le plus grand nombre d’entre elles. Il s’agit uniquement de personnes victimes d’une violence à caractère discriminatoire, aucune n’ayant déclaré être victime de discriminations. Près de la moitié d’entre elles ont subi du harcèlement moral (44 %) et des insultes ou injures (45 %) ; 15 % ont été victimes de menaces. Ce groupe se caractérise par la prédominance de trois motifs discriminatoires : le sexe (54 %), l’apparence physique (35 %) et l’âge (27 %). Les femmes y sont largement surreprésentées (71 %, contre 59 % pour l’ensemble des victimes), ainsi que les personnes sans ascendance migratoire directe (88 % contre 69 %), et de façon moindre, les personnes âgées de 18 à 24 ans (30 % contre 26 %) ainsi que les personnes sans religion (52 % contre 41 %) (figure 6).
tableauFigure 6 – Caractéristiques des groupes de personnes victimes de discriminations ou de violences à caractère discriminatoire
Caractéristiques | Groupes de personnes victimes de violences discriminatoires en raison | Groupes de personnes victimes de discriminations en raison | Groupes de personnes victimes de violences ou de discriminations en raison | Ensemble | |||
---|---|---|---|---|---|---|---|
du sexe, de l’apparence ou de l’âge | des origines, de la couleur de peau ou de la religion | des origines, de la couleur de peau ou de la religion | du sexe, de l'apparence ou de l'âge | de l'orientation sexuelle | d'un handicap ou de l'état de santé | ||
Part dans l'ensemble des victimes | 37 | 18 | 21 | 11 | 6 | 7 | 100 |
Femmes | 71 | 40 | 49 | 78 | 45 | 55 | 59 |
Personnes âgées de 18 à 24 ans | 30 | 21 | 21 | 27 | 38 | 20 | 26 |
Personnes de confession musulmane | 4 | 16 | 44 | sd | sd | sd | 16 |
Immigrés ou descendants d'immigrés | 12 | 41 | 67 | 12 | 19 | sd | 31 |
Personnes homosexuelles ou bisexuelles | 5 | sd | sd | 10 | 58 | sd | 9 |
Personnes avec des limitations d'activités | 22 | 22 | 19 | 24 | 28 | 67 | 27 |
- sd : sous le seuil de diffusion
- Lecture : 78 % de femmes composent le groupe de personnes victimes de « discriminations en raison du sexe, de l'apparence ou de l'âge ».
- Champ : France métropolitaine, Martinique, Guadeloupe et La Réunion, personnes âgées de 18 ans ou plus vivant dans un logement ordinaire.
- Source : SSMSI, enquête Vécu et ressenti en matière de sécurité 2022 (questionnaire socle, internet et téléphone).
graphiqueFigure 6 – Caractéristiques des groupes de personnes victimes de discriminations ou de violences à caractère discriminatoire
Le groupe constitué des victimes de « discrimination en raison du sexe, de l’apparence ou de l’âge » rassemble quant à lui 11 % des victimes. Toutes disent avoir vécu une discrimination en raison d’au moins un de ces trois motifs, 52 % en raison de leur sexe, 32 % de leur âge et 31 % de leur apparence physique. Ces personnes ont également subi une violence à caractère discriminatoire dans 20 % des cas, en particulier des injures ou des insultes notamment en raison de leur sexe. Les femmes y sont encore plus fortement représentées que dans le groupe précédent (78 % des victimes du groupe). Le contexte de travail est souvent cité (27 %, contre 17 % de l’ensemble des victimes de discriminations), de même que celui de la recherche d’un emploi (24 % contre 18 %). Dans ce groupe, comme dans celui des victimes de violences fondées sur ces mêmes motifs, les immigrés ou descendants d’immigrés, ainsi que les personnes se déclarant de confession musulmane, sont sous‑représentés.
Plus d’immigrés et de descendants d’immigrés parmi les victimes de discriminations au motif des origines, de la couleur de la peau ou de la religion qu’en cas de violences
Les deux groupes de victimes de comportements discriminatoires en raison de la couleur de la peau, des origines ou de la religion sont d’effectifs équivalents, regroupant 21 % des victimes lorsque l’atteinte est une discrimination et 18 % des victimes lorsqu’il s’agit d’une violence. Les violences consistent le plus souvent en des insultes ou des injures (51 % des personnes du premier groupe), du harcèlement moral (45 %), ou encore des menaces (23 %). Si le groupe des victimes de discriminations ne déclare aucune violence à caractère discriminatoire, 20 % des victimes de violences ont aussi subi une discrimination (80 % n’ont subi que des violences). Qu’il s’agisse de violences ou de discriminations, le motif le plus souvent invoqué est celui des origines de la personne (74 % des victimes de violences et 81 % des victimes de discriminations), puis la couleur de peau (respectivement 55 % et 47 %) et enfin la religion (respectivement 33 % et 43 %).
Les immigrés et les descendants d’immigrés sont nettement plus nombreux parmi ces deux groupes, en particulier dans le cas de discriminations plutôt que de violences ; ils représentent 67 % des victimes de discriminations (39 % sont immigrés et 28 % des descendants d’immigrés) et 41 % des victimes de violences (23 % d’immigrés et 18 % de descendants d’immigrés). Les personnes se déclarant de confession musulmane sont aussi surreprésentés dans le groupe des victimes de discriminations (44 %) mais pas dans celui des victimes de violences. Les victimes de ces deux groupes sont plus souvent des hommes, mais ces derniers sont nettement plus nombreux parmi les victimes de violences que de discriminations (respectivement 60 % et 51 %, contre 41 % pour l’ensemble des victimes).
Violences ou discriminations en raison de l’orientation sexuelle, d’un handicap ou de l’état de santé : le profil des victimes est lié au motif invoqué
Les deux derniers groupes sont minoritaires et regroupent à la fois des victimes de violences ou de discriminations, autour de deux types de motifs : l’orientation sexuelle d’une part (6 % des victimes), et le handicap ou la santé d’autre part (7 % des victimes).
Le groupe de victimes de « violences ou discriminations en raison de l’orientation sexuelle » se compose en grande majorité de personnes ayant vécu une discrimination ou une autre atteinte (harcèlement moral, menaces, injures ou insultes notamment) en raison de leur orientation sexuelle (discriminations pour 32 % d’entre elles, violences pour 68 %), mais aussi très souvent des violences en raison de leur apparence physique (37 %) ou de leur sexe (36 %), d’un handicap ou de leur état de santé (17 %). Les minorités sexuelles y sont fortement surreprésentées, surtout les homosexuels et de façon moindre les bisexuels (respectivement 41 % et 17 % des victimes de ce groupe). 55 % des victimes sont des hommes.
Par ailleurs, les victimes du groupe « violences ou discriminations en raison d’un handicap ou de l’état de santé » ont plus souvent subi une discrimination qu’une violence pour l’un de ces motifs (respectivement 68 % et 40 % des victimes). Elles se caractérisent en premier lieu par une forte proportion de personnes présentant des limitations dans les activités habituelles (67 %) et un mauvais ou très mauvais état de santé général (39 %). Enfin, un tiers des victimes de ce groupe sont inactives sans être retraitées ni étudiantes, contre 8 % à 14 % dans les autres groupes.
Des dommages psychologiques plus importants pour les personnes victimes en raison de leur état de santé ou d’un handicap
Quel que soit le groupe de victimes, le comportement discriminatoire subi leur a causé des dommages psychologiques plutôt ou très importants ; c’est particulièrement le cas des victimes de violences ou discriminations en raison d’un handicap ou de l’état de santé (69 %), et des victimes de discriminations en raison des origines, de la couleur de la peau et de la religion (56 %) (figure 7). Dans les autres groupes, moins de la moitié des victimes (entre 38 % et 48 %) estiment que les conséquences psychologiques de l’atteinte subie sont plutôt ou très importantes.
tableauFigure 7 - Dommages psychologiques des personnes victimes de discrimination ou de violence à caractère discriminatoire, selon leur importance
Niveau de gravité | Groupes de personnes victimes de violences discriminatoires en raison | Groupes de personnes victimes de discriminations en raison | Groupes de personnes victimes de violences ou de discriminations en raison | Ensemble | |||
---|---|---|---|---|---|---|---|
Du sexe, de l’apparence ou de l’âge | Des origines, de la couleur de peau ou de la religion | Du sexe, de l'apparence ou de l'âge | Des origines, de la couleur de peau ou de la religion | De l'orientation sexuelle | D'un handicap ou de l'état de santé | ||
Non-réponse | 8 | 6 | sd | 7 | sd | sd | 5 |
Pas importants | 24 | 26 | 20 | 13 | 25 | sd | 15 |
Peu importants | 31 | 26 | 29 | 24 | 28 | 21 | 25 |
Plutôt importants | 27 | 30 | 35 | 33 | 23 | 42 | 33 |
Très importants | 11 | 12 | 13 | 23 | 19 | 27 | 22 |
- sd : sous le seuil de diffusion
- Lecture : 27 % des personnes du groupe de victimes de « violences ou discriminations en raison d'un handicap ou de l'état de santé » déclarent avoir eu des dommages psychologiques très importants à la suite des faits subis.
- Champ : France métropolitaine, Martinique, Guadeloupe et La Réunion, personnes âgées de 18 ans ou plus vivant dans un logement ordinaire.
- Source : SSMSI, enquête Vécu et ressenti en matière de sécurité 2022 (questionnaire socle, internet et téléphone).
graphiqueFigure 7 - Dommages psychologiques des personnes victimes de discrimination ou de violence à caractère discriminatoire, selon leur importance
Les victimes du groupe « violences ou discriminations en raison de l’orientation sexuelle » et celles du groupe « violences en raison des origines, de la couleur de peau ou de la religion » se sentent plus souvent en insécurité dans leur quartier ou leur village (respectivement 48 % et 44 %) (figure 8) que celles des autres groupes (entre 33 % et 38 %) et encore davantage par rapport à l’ensemble de la population (18 %). Globalement, aux questions sur la crainte d’être volé ou « racketté », injurié, menacé ou agressé physiquement, les victimes de violences à caractère discriminatoire répondent plus souvent être inquiètes que les victimes de discriminations, et nettement plus que l’ensemble de la population.
tableauFigure 8 - Sentiment d'insécurité et préoccupations sécuritaires selon les groupes de personnes victimes
Catégorie | Ensemble de la population | Groupes de victimes de violences | Groupes de victimes de discriminations | Groupes de victimes de violences ou de discriminations | |||
---|---|---|---|---|---|---|---|
en raison du sexe, de l’apparence ou de l’âge | en raison des origines, la couleur de peau ou la religion | en raison des origines, de la couleur de peau ou de la religion | en raison du sexe, de l'apparence ou de l'âge | en raison de l'orientation sexuelle | en raison d'un handicap ou de l'état de santé | ||
Sentiment d’insécurité dans le quartier ou dans le village | 18 | 38 | 44 | 33 | 36 | 48 | 34 |
Inquiétudes à l'idée d'être volé ou « racketté » | 38 | 56 | 60 | 47 | 52 | 57 | 50 |
Inquiétudes à l'idée d'être injurié | 24 | 56 | 58 | 44 | 47 | 62 | 45 |
Inquiétudes à l'idée d'être menacé | 30 | 60 | 62 | 44 | 53 | 67 | 48 |
Inquiétudes à l'idée d'être agressé physiquement | 39 | 68 | 69 | 52 | 64 | 71 | 60 |
Personnes ayant cité le racisme et la discrimination parmi les trois problèmes les plus préoccupants dans la société française | 27 | 32 | 44 | 64 | 45 | 50 | 33 |
- Note : Les différents types d'inquiétudes sont mesurés à travers des questions ayant pour modalités de réponses « oui » ou « non ».
- Lecture :38 % des personnes du groupe « violences discriminatoires en raison du sexe, de l'apparence ou de l'âge » déclarent se sentir souvent ou de temps en temps en insécurité dans leur quartier ou leur village ; 32 % ont cité le racisme et la discrimination parmi les trois problèmes les plus préoccupants dans la société française actuelle.
- Champ : France métropolitaine, Martinique, Guadeloupe et La Réunion, personnes âgées de 18 ans ou plus vivant dans un logement ordinaire.
- Source : SSMSI, enquête Vécu et ressenti en matière de sécurité 2022 (questionnaire socle, internet et téléphone).
Les victimes du groupe « discrimination en raison des origines, de la couleur de peau ou de la religion » citent le plus souvent le racisme et la discrimination comme faisant partie des trois problèmes les plus préoccupants dans la société française (64 %, contre 27 % dans l’ensemble de la population), devant toutes les autres victimes, y compris celles du groupe « violences discriminatoires en raison des origines, la couleur de peau ou la religion » (44 %).
Sources
L’enquête statistique nationale Ouvrir dans un nouvel ongletVécu et ressenti en matière de sécurité (VRS), conduite par le Service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI), interroge un large échantillon de personnes âgées de 18 ans ou plus vivant en France métropolitaine, Martinique, Guadeloupe ou à La Réunion. Enquête annuelle dite de « victimation », elle succède à partir de 2022 à l’enquête Cadre de vie et sécurité (CVS), en poursuivant le même objectif : mesurer l’insécurité ressentie, les opinions vis‑à‑vis de l’action des forces de sécurité et les faits de délinquance dont les personnes ont pu être victimes au cours de leur vie, qu’elles aient ou non porté plainte auprès des services de police ou de gendarmerie.
En lien avec l’Insee, le SSMSI a conçu un protocole multimode en deux phases. La première phase, composée d’un questionnaire socle, sur laquelle reposent les résultats présentés dans cette étude, a été menée entre février et mai 2022 et a permis de collecter les réponses de 104 000 personnes. La seconde phase vise à approfondir chaque année un thème en réinterrogeant un échantillon de répondants à la première phase de l’enquête.
Méthodes
Les deux indicateurs de discriminations et de violences à caractère discriminatoire proposés à partir de l’édition 2022 de l’enquête de victimation VRS
Le premier indicateur relève des discriminations ressenties. Une question est posée en fin de questionnaire sur les expériences de discriminations au cours de la vie, entendues comme le fait d’avoir vécu un traitement défavorable. Sur le format papier du questionnaire, la question est posée de la manière suivante : « Au cours de votre vie, avez-vous déjà subi des traitements défavorables en raison de votre couleur de peau, votre origine, votre religion, votre orientation sexuelle, votre sexe, d’un handicap ou de tout autre critère ? ». Par internet et téléphone, la question est précédée d’une introduction donnant des exemples de situations et de motifs, en cohérence avec la définition du code pénal : « Nous allons maintenant évoquer les discriminations, c’est à-dire les traitements défavorables, comme le refus de vous accorder un emploi, un logement, un prêt ou tout autre bien ou service que vous avez pu personnellement subir en raison, par exemple, de votre couleur de peau, de votre origine, de votre religion, de votre orientation sexuelle, de votre sexe, de votre handicap ou de tout autre critère. Au cours de votre vie, avez-vous déjà subi ce type de traitements défavorables ? ». La réponse permet de dater la ou les expériences de discriminations : en 2022 (jusqu’à la date de collecte de l’enquête), en 2021, en 2020 ou avant. Si les personnes ont subi une discrimination en 2021 ou en 2022, des informations complémentaires sont collectées sur le fait le plus récent (motif de la discrimination, contexte, déclaration à la police ou la gendarmerie, conséquences psychologiques, etc.). Dans cette étude, la part des personnes victimes de discriminations (globales ou selon les caractéristiques de la victime) porte sur les faits subis au cours de l’année 2021. Les éléments ayant trait au motif de la discrimination, son contexte et ses conséquences décrivent le fait subi le plus récent, en 2022 ou en 2021. La formulation de cette question, la période de temps à laquelle les personnes se réfèrent (une année civile précise ou une période plus large), son positionnement dans le questionnaire, diffèrent d’autres enquêtes comme Trajectoires et Origines, qui permettent aussi une mesure des discriminations ressenties. Ces choix méthodologiques propres à chaque enquête, liés à leurs thématiques et leur architecture, entraînent des écarts de mesure [Le Minez, Raynaud, 2024].
Le second indicateur est construit à partir des atteintes à la personne que les gens déclarent avoir subies, quand le motif de ces atteintes est à caractère discriminatoire et qu’elles ont été commises en dehors de la sphère familiale. La majeure partie du questionnaire de l’enquête VRS porte sur ces atteintes, qui sont décrites de façon détaillée avant que soit posée la question sur les discriminations. Les atteintes retenues dans cette étude sont : les violences physiques non sexuelles, les propos ou actes répétés sans caractère sexuel ayant pour but de nuire (« harcèlement moral »), les menaces « de coups ou de mort, de s’en prendre à vos biens ou de faire des révélations », les injures ou insultes et la diffusion de photos, de vidéos ou d’informations personnelles dans le but de nuire. Les violences intrafamiliales et les violences sexuelles sont ainsi exclues du champ de l’étude.
L’Ouvrir dans un nouvel ongletarticle 225‑1 du code pénal encadre précisément ce qui constitue une discrimination. Pour chaque type d’atteinte, comme pour les discriminations, 11 motifs sont proposés, parmi ceux retenus par la loi comme fondement possible d’une discrimination, en réponse à la question « Vous diriez que la ou les raisons pour lesquelles vous avez subi ces faits étaient » :
- votre couleur de peau,
- vos origines (ou origines supposées),
- votre religion (ou religion supposée),
- votre orientation ou identité sexuelle (ou votre orientation sexuelle supposée),
- votre sexe,
- votre classe d’âge (junior/senior),
- votre quartier ou votre lieu de résidence,
- votre handicap ou votre état de santé,
- votre apparence physique/corporelle,
- votre appartenance ou vos opinions syndicales ou politiques,
- votre état de grossesse (proposé seulement aux femmes).
Tous ces motifs présentent un caractère discriminatoire. Les personnes peuvent citer plusieurs raisons et donner également une autre raison au fait subi, à formuler librement, ou choisir de ne pas en donner : celles relevant de critères prohibés par la loi sont alors retenues dans les analyses.
Discriminations et violences à caractère discriminatoire : analyse des facteurs explicatifs et réalisation d’une typologie de victimes
Pour étudier le lien entre les différentes expériences de discriminations ou de violences à caractère discriminatoire, une analyse des correspondances multiples puis une classification ascendante hiérarchique ont été réalisées sur le champ des personnes ayant déclaré avoir subi soit un traitement défavorable, soit une violence physique, verbale ou psychologique à caractère discriminatoire en 2021 ou en 2022 (4 300 personnes, soit 4,6 % de l’ensemble de la population).
Des régressions « toutes choses égales par ailleurs » ont également été réalisées pour mettre en évidence les effets propres des différentes caractéristiques des personnes sur la probabilité de se déclarer victime de discriminations, de violences commises en raison du sexe ou de violences commises en raison d’un autre motif discriminatoire. Les rapports de probabilités sont présentés dans l’étude. Les variables explicatives choisies pour les différentes régressions sont le sexe, l’âge, le lien à l’immigration, la religion, l’orientation sexuelle, les limitations de santé, le diplôme, la taille de l’unité urbaine, le type de ménage et la situation dans l’emploi. Dans ces régressions, à la différence de la classification, les violences à caractère discriminatoire en raison du sexe ont été distinguées des autres violences, afin de mieux identifier les facteurs, autres que le sexe, liés à des expériences plus fréquentes de violence subie.
Les questions sur l’orientation sexuelle et sur la religion sont posées après les questions de discriminations et sont précédées d’une mention précisant que ces questions sont importantes pour étudier les questions de discriminations qui ont été abordées et qu’elles sont facultatives. Elles sont formulées de la manière suivante : « Actuellement, vous vous diriez : hétérosexuel(le) ; homosexuel(le) ; bisexuel(le) ; d’une autre orientation sexuelle ? », « Actuellement, vous vous diriez : sans religion ; catholique ; musulman(e), protestant(e), juif(ve) ; chrétien(ne) orthodoxe ; d’une autre religion ? ».
Définitions
Un immigré est une personne née étrangère à l’étranger et résidant en France. L’origine d’un immigré est déterminée par son pays de naissance. Certains immigrés ont pu devenir Français, les autres restant étrangers. Un individu continue à être immigré même s’il acquiert la nationalité française.
Un descendant d’immigrés de deuxième génération est une personne née en France ayant au moins un parent immigré.
Pour en savoir plus
Retrouvez plus de données en téléchargement.
Baradji E., Filatriau O., « Ouvrir dans un nouvel ongletLes personnes handicapées sont plus souvent victimes de violences physiques, sexuelles et verbales », Interstats Analyse n° 29, SSMSI, Drees, juillet 2020.
Bernardi V., « Ouvrir dans un nouvel ongletLes atteintes à caractère raciste, xénophobe ou antireligieux en 2023 », Info Rapide no 34, SSMSI, mars 2024.
Guedj H., « Ouvrir dans un nouvel ongletLes atteintes à caractère raciste, xénophobe ou antireligieux en 2018 – Analyse d’un phénomène peu déclaré aux forces de sécurité », Interstats Analyse n° 20, SSMSI, avril 2019.
Lê J., Rouhban O., Tanneau P., Beauchemin C., Ichou M., Simon P., « En dix ans, le sentiment de discrimination augmente, porté par les femmes et le motif sexiste », Insee Première no 1911, juillet 2022.
Le Minez S., Raynaud E., « Pensez-vous avoir été victime de discrimination ? Ce que vous en dites dans les enquêtes de la statistique publique », Le blog de l’Insee, novembre 2024.
Razafindranovona T., Zilloniz S., « Ouvrir dans un nouvel ongletRapport d'enquête 2023 – Vécu et ressenti en matière de sécurité », Interstats Références, SSMSI, novembre 2024.
Rouhban O., Tanneau P., Simon P., « Le sentiment de discrimination persiste à la deuxième génération », in France portrait social, coll. « Insee Références », édition 2024.
SSMSI, « Ouvrir dans un nouvel ongletRapport d’enquête 2022 – Vécu et ressenti en matière de sécurité », décembre 2023.
Tir D., « Ouvrir dans un nouvel ongletEn 2023, hausse de 13 % des infractions anti‑LGBT+ enregistrées par les services de sécurité », Info Rapide no 38, SSMSI, mai 2024.
Au sens du General activity limitation index (Gali).
Au sens du General activity limitation index (Gali), c’est‑à‑dire les personnes « fortement limitées depuis au moins six mois, à cause d’un problème de santé dans les activités que les gens font habituellement ».
Les personnes de confession juive ont été ajoutées à la catégorie « autre religion » en raison de leur faible effectif dans l’enquête.
Au sens du General activity limitation index (Gali).
Au sens du General activity limitation index (Gali), c’est‑à‑dire les personnes « fortement limitées depuis au moins six mois, à cause d’un problème de santé dans les activités que les gens font habituellement ».
Les personnes de confession juive ont été ajoutées à la catégorie « autre religion » en raison de leur faible effectif dans l’enquête.