Emploi, chômage, revenus du travail Édition 2021

L’Insee et la Dares présentent dans cet ouvrage un ensemble d’analyses et d’indicateurs portant sur le marché du travail.

Insee Références
Paru le :Paru le29/06/2021
Marie-Pierre de Bellefon, Thomas Morin (Insee)
Emploi, chômage, revenus du travail- Juin 2021
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Les cadres sont plus présents dans les grandes aires d’attraction des villes et leurs salaires y sont plus élevés

Marie-Pierre de Bellefon, Thomas Morin (Insee)

Le zonage en aires d’attraction des villes identifie, au sein du territoire, les pôles les plus importants en matière de population et d’emploi, ainsi que les communes qui leur sont liées.

Les salaires moyens dans le secteur privé sont plus élevés dans les grandes aires d’attraction des villes. Cela s’explique notamment par la forte part de cadres, mieux rémunérés. De plus, quel que soit le secteur d’activité, les salaires des cadres sont en moyenne supérieurs dans les grandes aires. Dans certaines aires moyennement peuplées qui concentrent des activités industrielles, les niveaux de rémunération sont relativement élevés.

Sur la période 2006 - 2012, qui tient compte de la dynamique avant la crise de 2008 et de ses effets parfois retardés, la progression des salaires est particulièrement ralentie dans l’aire de Paris. Dans les aires moyennement peuplées, les activités au service de la population, moins soumises à la conjoncture économique, ont parfois atténué les effets de la crise. Après 2012, la croissance des salaires a été plus rapide dans les grandes aires.

Les disparités salariales augmentent globalement avec la population de l’aire, notamment du fait d’une plus grande diversité des types d’emplois et d’activités économiques. Déjà plus fortes au sein des très grandes aires en 2006, les disparités de salaire y ont en général progressé depuis alors qu’elles ont diminué dans la majorité des plus petites aires.

Insee Références

Paru le :29/06/2021

Les salaires sont plus élevés dans les aires d’attraction des villes qu’en dehors

En 2018, en France, un salarié du secteur privé gagne en moyenne 2 370 euros nets [Sanchez Gonzalez et Sueur, 2020]. La situation est contrastée selon les territoires. En particulier, les salaires moyens sont souvent plus élevés dans les grandes métropoles et plus faibles dans les espaces peu denses et éloignés des pôles d’emploi. Pour analyser ces disparités géographiques, le zonage en aires d’attraction des villes (encadré) fournit un découpage pertinent qui reflète la concentration de l’emploi et les déplacements entre le lieu de domicile et le lieu de travail [Audenaert, de Bellefon, Pégaz‑Blanc, 2020].

En 2018, 93 % de la population vit dans une ville ou son aire d’attraction et 97 % des emplois du secteur privé y sont regroupés. Le salaire y est en moyenne de 2 380 euros par mois, contre 1 910 euros hors des aires d’attraction des villes.

Les salaires sont plus élevés dans les grandes aires d’attraction des villes

D’une aire à l’autre, les différences de salaire sont importantes. Ainsi, le salaire mensuel moyen dans le secteur privé est inférieur à 1 810 euros dans les 10 % d’aires présentant les rémunérations les plus basses ; il est supérieur à 2 230 euros dans les 10 % d’aires aux rémunérations les plus élevées.

La population des aires est un premier élément d’explication à ces disparités de salaires (figure 1). Le salaire moyen du secteur privé est de 1 980 euros par mois dans les aires de moins de 50 000 habitants, soit un montant à peine supérieur à celui des communes hors attraction des villes (figure 2). À l’opposé, le salaire mensuel moyen atteint 3 010 euros dans l’aire de Paris et 2 340 euros dans les autres aires de 700 000 habitants ou plus (figure 3). Dans la suite de cette étude, les et celles dont le ne sont pas prises en compte.

Figure 1Salaire mensuel net moyen en équivalent temps plein en 2018 et population des aires d’attraction des villes

Salaire mensuel net moyen en équivalent temps plein en 2018 et population des aires d’attraction des villes
Les données détaillées de cette figure sont disponibles dans le fichier à télécharger.

Figure 1Salaire mensuel net moyen en équivalent temps plein en 2018 et population des aires d’attraction des villes

  • Lecture : un salarié du secteur privé gagne en moyenne 2 010 euros nets par mois en équivalent temps plein dans l’aire d’attraction de Bastia (109 000 habitants).
  • Champ : France hors Mayotte, salariés du secteur privé, aires d'attraction des villes de 50 000 habitants ou plus dont le pôle est en France.
  • Source : Insee, base Tous salariés 2018, recensement de la population 2017.

Travailler près d’un grand centre économique offre davantage d’opportunités professionnelles et permet d’espérer un salaire plus élevé. Les salariés les plus qualifiés sont d’ailleurs surreprésentés dans les grandes aires [Bernert, 2021]. Le lien entre la concentration de l’activité et le salaire constitue un sujet d’analyse ancien en science économique. La réduction des coûts de déplacements et la proximité géographique favorisent l’adéquation des emplois aux compétences, l’accès aux biens intermédiaires et l’écoulement des marchandises, et enfin le partage des idées et l’émergence des innovations [Ouvrir dans un nouvel ongletMarshall, 1890]. Il existe des gains de productivité associés à la densité d’emplois [Ouvrir dans un nouvel ongletCombes et al. , 2012 (a)]. Outre la plus grande qualification des salariés, les salaires plus élevés observés dans les grandes aires reflètent également cette productivité accrue [Ouvrir dans un nouvel ongletCombes et al. , 2012 (b)]. Les nuisances associées à la concentration de l’activité (pollution, congestion des transports) et les prix du foncier plus élevés dans les grandes agglomérations peuvent toutefois pousser les entreprises et les actifs à s’installer dans des espaces moins denses.

Figure 2Salaire mensuel net moyen en équivalent temps plein en 2018 selon le nombre d’habitants des aires d’attraction des villes

Salaire mensuel net moyen en équivalent temps plein en 2018 selon le nombre d’habitants des aires d’attraction des villes - Lecture : les 46 aires de 200 000 à moins de 700 000 habitants accueillent 23,3 % de la population. Un salarié du secteur privé y gagne en moyenne 2 140 euros nets par mois en équivalent temps plein.
Salaire moyen (en euros) Part de la population (en %) Nombre d’aires
Aire de Paris 3 010 19,6 1
700 000 habitants ou plus (hors Paris) 2 340 19,7 13
200 000 à moins de 700 000 habitants 2 140 23,3 46
50 000 à moins de 200 000 habitants 2 040 18,5 126
Moins de
50 000 habitants
1 980 12,2 512
Communes hors attraction des villes 1 910 6,7 ///
Ensemble 2 370 100 698
  • /// : absence de résultat due à la nature des choses.
  • Lecture : les 46 aires de 200 000 à moins de 700 000 habitants accueillent 23,3 % de la population. Un salarié du secteur privé y gagne en moyenne 2 140 euros nets par mois en équivalent temps plein.
  • Champ : France hors Mayotte, salariés du secteur privé.
  • Source : Insee, base Tous salariés 2018, recensement de la population 2017.

Ainsi, le nombre d’habitants des aires d’attraction des villes ne suffit pas à lui seul à expliquer les différences de salaire dans le secteur privé. Notamment, les rémunérations peuvent être élevées dans de petites aires disposant de spécialisations sectorielles industrielles, comme celle d’Épernay qui représente un des principaux centres de production de champagne (57 000 habitants ; 2 370 euros par mois en moyenne pour les salariés du secteur privé) ou celle de Belfort, spécialisée dans la production automobile et ferroviaire (134 000 habitants ; 2 310 euros). À l’opposé, le salaire moyen dans le secteur privé est relativement bas dans certaines aires plus peuplées comme celles de Lens ‑ Liévin (321 000 habitants ; 1 940 euros) ou de Perpignan (410 000 habitants ; 1 930 euros).

Figure 3Salaire mensuel net moyen en équivalent temps plein en 2018 et population des aires d’attraction des villes

Salaire mensuel net moyen en équivalent temps plein en 2018 et population des aires d’attraction des villes
Les données détaillées de cette figure sont disponibles dans le fichier à télécharger.

Figure 3Salaire mensuel net moyen en équivalent temps plein en 2018 selon la population des aires d'attraction des villes

  • Note : lissage avec une régression par ajustement local (courbe grise).
  • Lecture : un salarié du secteur privé gagne en moyenne 2 540 euros nets par mois en équivalent temps plein dans l’aire d’attraction de Grenoble (713 000 habitants). Ce niveau est supérieur à la tendance moyenne pour une aire de cette taille.
  • Champ : France hors Mayotte, salariés du secteur privé, aires d'attraction des villes de 50 000 habitants ou plus dont le pôle est en France.
  • Source : Insee, base Tous salariés 2018, recensement de la population 2017.

Dans les aires d’attraction des villes des régions d’outre‑mer, le salaire moyen des salariés du secteur privé est plutôt élevé. C’est le cas notamment de Fort‑de‑France en Martinique (358 000 habitants ; 2 210 euros), des Abymes en Guadeloupe (317 000 habitants ; 2 240 euros), de Saint‑Denis de La Réunion (307 000 habitants ; 2 130 euros) et de Cayenne en Guyane (139 000 habitants ; 2 190 euros). Cette observation est toutefois à mettre en perspective avec le fait que le taux d’emploi y est plus faible qu’en France métropolitaine.

Les cadres sont plus présents dans les grandes aires et leurs salaires y sont plus élevés

Les catégories socioprofessionnelles les mieux rémunérées sont davantage présentes dans les grandes aires d’attraction des villes. Ainsi, plus d’un tiers des emplois salariés dans l’aire de Paris sont des emplois de cadres ; cette part reste importante dans les autres aires de 700 000 habitants ou plus (plus d’un emploi sur cinq) mais se réduit au fur et à mesure que la taille de la population diminue (figure 4). Les cadres représentent moins d’un emploi salarié sur huit dans les aires de 50 000 à 200 000 habitants. De façon symétrique, la part des emplois salariés occupés par des ouvriers augmente quand le nombre d'habitants de l’aire diminue.

Figure 4Catégories socioprofessionnelles selon le nombre d’habitants des aires d'attraction des villes

en %
Catégories socioprofessionnelles selon le nombre d’habitants des aires d'attraction des villes (en %) - Lecture : dans les aires d’attraction des villes de 50 000 à moins de 200 000 habitants, 11,8 % des emplois en équivalent temps plein sont occupés par des cadres.
50 000 à 200 000 habitants 200 000 à 700 000 habitants 700 000 habitants ou plus (hors Paris) Aire de Paris
Cadres 11,8 14,6 23,2 35,0
Professions intermédiaires 19,8 21,5 22,5 18,4
Employés 29,9 31,2 28,0 26,9
Ouvriers 38,6 32,7 26,3 19,7
Ensemble 100,0 100,0 100,0 100,0
  • Lecture : dans les aires d’attraction des villes de 50 000 à moins de 200 000 habitants, 11,8 % des emplois en équivalent temps plein sont occupés par des cadres.
  • Champ : France hors Mayotte, salariés du secteur privé, aires d'attraction des villes de 50 000 habitants ou plus dont le pôle est en France.
  • Source : Insee, base Tous salariés 2018, recensement de la population 2017.

Figure 4Catégories socioprofessionnelles selon le nombre d’habitants des aires d'attraction des villes

  • Lecture : dans les aires d’attraction des villes de 50 000 à moins de 200 000 habitants, 11,8 % des emplois en équivalent temps plein sont occupés par des cadres.
  • Champ : France hors Mayotte, salariés du secteur privé, aires d'attraction des villes de 50 000 habitants ou plus dont le pôle est en France.
  • Source : Insee, base Tous salariés 2018, recensement de la population 2017.

La composition de l’emploi apporte un éclairage sur les disparités de salaire entre les très grandes aires d’attraction des villes. Ainsi, dans les aires de Grenoble ou de Toulouse, plus d’un quart des emplois sont des emplois de cadres. Cette part importante d’emplois qualifiés s’accompagne d’un salaire moyen supérieur à celui d’aires pourtant davantage peuplées, comme Lille, Marseille ‑ Aix‑en‑Provence, ou encore Lyon (figure 5).

Figure 5Salaire mensuel net moyen en équivalent temps plein et part des cadres en 2018 dans les aires de 700 000 habitants ou plus

Salaire mensuel net moyen en équivalent temps plein et part des cadres en 2018 dans les aires de 700 000 habitants ou plus - Lecture : dans l’aire d’attraction de Marseille - Aix-en-Provence (1 852 000 habitants), un salarié du secteur privé gagne en moyenne 2 360 euros nets par mois en équivalent temps plein et 21,6 % des emplois en équivalent temps plein sont occupés par des cadres.
Libellé géographique de l'aire d'attraction des villes 2020 Salaire mensuel moyen (en euros) Population Part des cadres (en %)
Paris 3 010 13 024 518 35,0
Lyon 2 450 2 238 656 24,8
Marseille - Aix-en-Provence 2 360 1 851 736 21,6
Lille (partie française) 2 280 1 498 143 22,9
Toulouse 2 450 1 414 936 28,5
Bordeaux 2 240 1 323 402 20,2
Nantes 2 260 983 310 22,9
Strasbourg (partie française) 2 250 838 566 18,8
Montpellier 2 170 775 862 20,1
Rennes 2 210 739 974 20,8
Grenoble 2 540 713 291 27,4
  • Lecture : dans l’aire d’attraction de Marseille - Aix-en-Provence (1 852 000 habitants), un salarié du secteur privé gagne en moyenne 2 360 euros nets par mois en équivalent temps plein et 21,6 % des emplois en équivalent temps plein sont occupés par des cadres.
  • Champ : France hors Mayotte, salariés du secteur privé, aires d'attraction des villes de 700 000 habitants ou plus dont le pôle est en France.
  • Source : Insee, base Tous salariés 2018, recensement de la population 2017.

Figure 5Salaire mensuel net moyen en équivalent temps plein et part des cadres en 2018 dans les aires de 700 000 habitants ou plus

  • Note : aires classées par population décroissante.
  • Lecture : dans l’aire d’attraction de Marseille - Aix-en-Provence (1 852 000 habitants), un salarié du secteur privé gagne en moyenne 2 360 euros nets par mois en équivalent temps plein et 21,6 % des emplois en équivalent temps plein sont occupés par des cadres.
  • Champ : France hors Mayotte, salariés du secteur privé, aires d'attraction des villes de 700 000 habitants ou plus dont le pôle est en France.
  • Source : Insee, base Tous salariés 2018, recensement de la population 2017.

Certaines aires où la proportion d’emplois qualifiés est particulièrement élevée présentent des rémunérations supérieures aux autres aires de taille similaire, voire aux aires plus grandes. C’est par exemple le cas de l’aire de Cannes - Antibes, qui accueille la technopole de Sophia‑Antipolis. Dans cette aire de 392 000 habitants, la part de cadres est importante (27 %) et le niveau de salaire dans le secteur privé élevé (2 490 euros nets mensuels en moyenne).

À l’opposé, les deux aires de 50 000 habitants ou plus où les salaires moyens sont les plus faibles comptent plus de 48 % d’employés (pour une moyenne nationale à 30 %).
Il s’agit d’Agde (54 000 habitants ; 1 810 euros) et de Royan (72 000 habitants ; 1 760 euros).

Non seulement les catégories socioprofessionnelles les mieux rémunérées sont plus présentes dans les grandes aires, mais pour une catégorie donnée parmi les cadres, les professions intermédiaires et les employés, la rémunération moyenne augmente avec le nombre d’habitants de l’aire (figure 6). C’est notamment le cas pour les cadres : ils perçoivent en moyenne un salaire mensuel de 4 810 euros dans l’aire de Paris contre 3 640 euros dans les aires de 50 000 à 200 000 habitants (figure 7). Pour les ouvriers, en revanche, le salaire dépend peu du nombre d’habitants de l’aire, même s’il reste légèrement plus élevé dans l’aire de Paris.

Figure 6Salaire mensuel net moyen en équivalent temps plein en 2018 selon la population des aires d’attraction des villes et la catégorie socioprofessionnelle

en euros
Salaire mensuel net moyen en équivalent temps plein en 2018 selon la population des aires d’attraction des villes et la catégorie socioprofessionnelle (en euros) - Lecture : dans les aires d’attraction des villes de 50 000 à moins de 200 000 habitants, un employé du secteur privé gagne en moyenne 1 620 euros nets par mois en équivalent temps plein.
50 000 à moins de 200 000 habitants 200 000 à moins de 700 000 habitants 700 000 habitants ou plus (hors Paris) Aire de Paris
Cadres 3 640 3 740 3 800 4 810
Professions intermédiaires 2 250 2 290 2 320 2 560
Employés 1 620 1 660 1 680 1 830
Ouvriers 1 750 1 770 1 780 1 820
Ensemble 2 040 2 140 2 340 3 010
  • Lecture : dans les aires d’attraction des villes de 50 000 à moins de 200 000 habitants, un employé du secteur privé gagne en moyenne 1 620 euros nets par mois en équivalent temps plein.
  • Champ : France hors Mayotte, salariés du secteur privé, aires d'attraction des villes de 50 000 habitants ou plus dont le pôle est en France.
  • Source : Insee, base Tous salariés 2018, recensement de la population 2017.

Figure 6Salaire mensuel net moyen en équivalent temps plein en 2018 selon la population des aires d’attraction des villes et la catégorie socioprofessionnelle

  • Note : lissage avec une régression par ajustement local.
  • Lecture : en tendance, le salaire mensuel net moyen en équivalent temps plein des professions intermédiaires est de 2 300 euros dans une aire d’attraction des villes de 700 000 habitants.
  • Champ : France hors Mayotte, salariés du secteur privé, aires d'attraction des villes de 50 000 habitants ou plus dont le pôle est en France.
  • Source : Insee, base Tous salariés 2018, recensement de la population 2017.

Figure 7Salaire mensuel net moyen en équivalent temps plein des cadres en 2018 et population des aires d’attraction des villes

Salaire mensuel net moyen en équivalent temps plein des cadres en 2018 et population des aires d’attraction des villes
Les données détaillées de cette figure sont disponibles dans le fichier à télécharger.

Figure 7Salaire mensuel net moyen en équivalent temps plein des cadres en 2018 et population des aires d’attraction des villes

  • Lecture : un cadre du secteur privé gagne en moyenne 4 080 euros nets par mois dans l’aire d’attraction de Cannes - Antibes (392 000 habitants).
  • Champ : France hors Mayotte, salariés du secteur privé, aires d'attraction des villes de 50 000 habitants ou plus dont le pôle est en France.
  • Source : Insee, base Tous salariés 2018, recensement de la population 2017.

Les activités tertiaires à haut niveau de rémunération sont plus présentes dans les grandes aires

La plus forte proportion de cadres dans les grandes aires s’explique notamment par l’implantation des sièges des entreprises et par la présence accrue de secteurs d’activité où ceux‑ci sont très représentés, comme l’information‑communication ou les services financiers et d’assurance. Ces secteurs sont peu présents dans les plus petites aires, même si l’aire de Niort fait figure d’exception, avec l’implantation au début du XXe siècle du siège de mutuelles et une spécialisation encore très forte aujourd’hui dans les assurances et le secteur bancaire (25 % des emplois). En conséquence le salaire moyen dans le secteur privé y est relativement élevé pour une aire de ce nombre d’habitants (177 000 habitants ; 2 350 euros).

Les activités tertiaires comme le commerce, les services de transport et l’hébergement‑restauration, où la part de cadres est plus réduite, se répartissent de façon plus homogène sur l’ensemble du territoire. En moyenne, malgré d’importantes disparités d’une aire à l’autre, les emplois dans l’industrie, eux, sont d’autant plus présents que la taille de l’aire diminue (figure 8).

Figure 8Répartition des emplois par secteur d'activité selon le nombre d’habitants des aires d’attraction des villes

en %
Répartition des emplois par secteur d'activité selon le nombre d’habitants des aires d’attraction des villes (en %) - Lecture : dans les aires d’attraction de 50 000 à 200 000 habitants, l’industrie représente en moyenne 22,5 % des emplois en équivalent temps plein.
50 000 à 200 000 habitants 200 000 à 700 000 habitants 700 000 habitants ou plus (hors Paris) Aire de Paris
Industrie 22,5 17,4 15,2 9,8
Construction 8,2 8,3 7,5 6,4
Commerce, transport, hébergement et restauration 30,2 31,2 29 29,8
Information et communication 1,4 2,5 5,9 9,1
Activités financières et d'assurance 3,8 4,6 4,8 7,1
Autres activités de services 33,9 36,1 37,7 37,8
Ensemble 100,0 100,0 100,0 100,0
  • Lecture : dans les aires d’attraction de 50 000 à 200 000 habitants, l’industrie représente en moyenne 22,5 % des emplois en équivalent temps plein.
  • Champ : France hors Mayotte, salariés du secteur privé, aires d'attraction des villes de 50 000 habitants ou plus dont le pôle est en France.
  • Source : Insee, base Tous salariés 2018, recensement de la population 2017.

Figure 8Répartition des emplois par secteur d'activité selon le nombre d’habitants des aires d’attraction des villes

  • Lecture : dans les aires d’attraction de 50 000 à 200 000 habitants, l’industrie représente en moyenne 22,5 % des emplois en équivalent temps plein.
  • Champ : France hors Mayotte, salariés du secteur privé, aires d'attraction des villes de 50 000 habitants ou plus dont le pôle est en France.
  • Source : Insee, base Tous salariés 2018, recensement de la population 2017.

Quel que soit le secteur, la proportion d’emplois de cadres et leurs salaires sont en moyenne supérieurs dans les grandes aires (figure 9). L’écart est particulièrement marqué entre Paris et les autres aires.

Figure 9Salaire mensuel net moyen en équivalent temps plein et part des cadres en 2018 selon le nombre d’habitants des aires d’attraction des villes et le secteur d’activité

salaires en euros, part en %
Salaire mensuel net moyen en équivalent temps plein et part des cadres en 2018 selon le nombre d’habitants des aires d’attraction des villes et le secteur d’activité (salaires en euros, part en %) - Lecture : dans les aires de 700 000 habitants ou plus hors Paris, les cadres représentent 37,7 % des emplois du secteur des activités financières et d’assurance et gagnent en moyenne 4 320 euros nets par mois en équivalent temps plein dans ce secteur d'activité.
Aire de Paris 700 000 habitants ou plus (hors Paris) 200 000 à 700 000 habitants 50 000 à 200 000 habitants
Salaire des cadres Part des cadres Salaire des cadres Part des cadres Salaire des cadres Part des cadres Salaire des cadres Part des cadres
Industrie 5 110 39,6 4 540 27,0 4 290 17,1 4 160 14,2
Construction 4 140 21,2 3 620 15,8 3 470 10,9 3 300 8,6
Commerce, transport, hébergement et restauration 4 580 21,6 3 760 15,0 3 500 10,6 3 320 9,2
Information et communication 4 340 75,7 3 280 69,0 3 440 58,1 3 240 47,5
Activités financières et d'assurance 5 940 62,6 4 320 37,7 4 120 33,0 4 110 29,9
Autres activités de services 4 770 31,7 3 610 20,4 3 570 12,4 3 420 9,7
  • Lecture : dans les aires de 700 000 habitants ou plus hors Paris, les cadres représentent 37,7 % des emplois du secteur des activités financières et d’assurance et gagnent en moyenne 4 320 euros nets par mois en équivalent temps plein dans ce secteur d'activité.
  • Champ : France hors Mayotte, salariés du secteur privé, aires d'attraction des villes de 50 000 habitants ou plus dont le pôle est en France.
  • Source : Insee, base Tous salariés 2018, recensement de la population 2017.

Dans certaines aires moyennement peuplées qui concentrent des activités industrielles, les niveaux de rémunération sont relativement élevés

Dans les aires d’attraction des villes de 50 000 à 200 000 habitants, la part des emplois dans l’industrie est très variable, allant de moins de 10 % à plus de 40 %. Les salaires sont en général plus élevés dans l’industrie que dans la construction ou le secteur tertiaire, en particulier dans certaines spécialités comme l’aéronautique ou l’industrie pharmaceutique [Sanchez Gonzalez, Sueur, 2020]. La concentration d’emplois industriels dans des aires moyennement peuplées est souvent associée à un haut niveau de rémunération dans le secteur privé. Par exemple, compte tenu de la taille de leur population, les salaires sont relativement élevés dans l’aire d’Oyonnax spécialisée dans la plasturgie (54 000 habitants ; 2 170 euros) et dans celle de Châtellerault (81 000 habitants ; 2 120 euros) avec une forte présence d’industries automobile et aéronautique. Les salaires du secteur privé sont encore supérieurs dans l’aire de Louviers spécialisée dans l’industrie pharmaceutique (65 000 habitants ; 2 300 euros) ainsi que dans celle de Cluses (55 000 habitants ; 2 420 euros), héritière d’une tradition manufacturière dans l’horlogerie et aujourd’hui en pointe dans la fabrication de pièces de précision.

Les exemples ci‑dessus montrent que dans des aires de plus petite taille, des spécialisations historiques et/ou des reconversions réussies de l’activité peuvent favoriser le dynamisme de l’économie [Ouvrir dans un nouvel ongletBouba‑Olga et al. , 2017].

Les aires de 50 000 à 200 000 habitants avec peu d’emplois dans l’industrie présentent souvent des salaires moyens plus faibles, comme dans l’aire de Gap (81 000 habitants ; 1 910 euros), dont l’économie est aussi pénalisée par une situation d’enclavement. Dans certaines aires, le secteur industriel est faiblement représenté, mais les rémunérations relativement élevées peuvent s’expliquer notamment par le dynamisme de l’économie présentielle, comme dans l’aire de Fréjus (122 000 habitants ; 1 980 euros) ou dans celle d’Ajaccio (114 000 habitants ; 2 100 euros).

La crise économique de 2008 ‑ 2009 a pesé sur les salaires, notamment dans l’aire de Paris et dans les régions d’outre‑mer

La crise économique et financière de 2008 ‑ 2009 a pesé sur le niveau des rémunérations dans le secteur privé. Si la progression des salaires a fléchi dans tous les territoires, certaines aires d’attraction des villes ont été davantage touchées.

Sur l’ensemble de la période 2006 ‑ 2012, qui tient compte de la dynamique avant la crise et de ses effets parfois retardés, le salaire moyen a diminué en euros constants dans la majorité des aires des départements et régions d’outre‑mer et en Corse (figure 10), ainsi que dans certaines aires qui ont subi la contraction de la demande internationale (par exemple Montbéliard ou Châtellerault avec une orientation industrielle marquée ou Cannes ‑ Antibes avec des restructurations dans la technopole de Sophia-Antipolis).

Figure 10Évolution du salaire mensuel net moyen en équivalent temps plein entre 2006 et 2012 et population des aires d’attraction des villes

Évolution du salaire mensuel net moyen en équivalent temps plein entre 2006 et 2012 et population des aires d’attraction des villes
Les données détaillées de cette figure sont disponibles dans le fichier à télécharger.

Figure 10Évolution du salaire mensuel net moyen en équivalent temps plein entre 2006 et 2012 et population des aires d’attraction des villes

  • Lecture : dans l’aire d’attraction de Bayonne (270 000 habitants), le salaire mensuel net moyen en équivalent temps plein a augmenté de 1,2 % en euros constants entre 2006 et 2012.
  • Champ : France hors Mayotte, salariés du secteur privé, aires d'attraction des villes de 50 000 habitants ou plus dont le pôle est en France.
  • Source : Insee, bases Tous salariés, recensement de la population 2017.

La progression du salaire moyen a également été affectée dans l’aire de Paris, avec une croissance de 1,0 % seulement en euros constants entre 2006 et 2012 (figure 11). Cela peut s’expliquer par le poids important des secteurs les plus fortement touchés par la crise, telles les activités financières et d’assurance, ainsi que par la présence de salariés à haut revenu, dont la partie variable de la rémunération est plus importante [Ouvrir dans un nouvel ongletAskenazy, Bozio, García‑Peñalosa, 2013].

Figure 11Évolution du salaire mensuel net moyen en équivalent temps plein entre 2006 et 2018 selon le nombre d’habitants des aires d'attraction des villes

base 100 en 2008, en euros constants
Évolution du salaire mensuel net moyen en équivalent temps plein entre 2006 et 2018 selon le nombre d’habitants des aires d'attraction des villes (base 100 en 2008, en euros constants) - Lecture : entre 2006 et 2012, le salaire mensuel moyen en équivalent temps plein a progressé de 2,1 % en euros constants dans les aires d’attraction des villes de 700 000 habitants ou plus hors Paris.
50 000 à 200 000 habitants 200 000 à 700 000 habitants 700 000 habitants ou plus (hors Paris) Aire de Paris
2006 100,0 100,0 100,0 100,0
2009 101,9 101,6 101,8 100,0
2012 101,6 101,4 102,1 101,0
2015 103,1 103,1 103,8 102,7
2018 104,8 104,9 106,3 105,3
  • Lecture : entre 2006 et 2012, le salaire mensuel moyen en équivalent temps plein a progressé de 2,1 % en euros constants dans les aires d’attraction des villes de 700 000 habitants ou plus hors Paris.
  • Champ : France hors Mayotte, salariés du secteur privé, aires d'attraction des villes de 50 000 habitants ou plus dont le pôle est en France.
  • Source : Insee, bases Tous salariés, recensement de la population 2017.

Figure 11Évolution du salaire mensuel net moyen en équivalent temps plein entre 2006 et 2018 selon le nombre d’habitants des aires d'attraction des villes

  • Lecture : entre 2006 et 2012, le salaire mensuel moyen en équivalent temps plein a progressé de 2,1 % en euros constants dans les aires d’attraction des villes de 700 000 habitants ou plus hors Paris.
  • Champ : France hors Mayotte, salariés du secteur privé, aires d'attraction des villes de 50 000 habitants ou plus dont le pôle est en France.
  • Source : Insee, bases Tous salariés, recensement de la population 2017.

La progression des salaires a moins ralenti dans les autres aires de 700 000 habitants ou plus (+ 2,1 % entre 2006 et 2012), mais les disparités y sont importantes (de + 0,7 % dans celle de Montpellier à + 4,8 % dans celle de Lille). Sur cette même période, les salaires moyens ont progressé de 1,4 % dans les aires de 200 000 à 700 000 habitants et de 1,5 % dans celles de 50 000 à 200 000 habitants. Les effets de la crise économique ont parfois été atténués ou retardés par la plus forte présence d’activités au service de la population, moins soumises à la conjoncture économique [Bouvet, 2014].

Dans l’industrie, les pertes d’emplois consécutives à la crise de 2008 ‑ 2009 ont été importantes et ont touché surtout des salariés peu qualifiés et faiblement rémunérés. Cette dégradation a pu conduire à une hausse du salaire moyen, car les personnes ayant conservé leur emploi avaient des rémunérations supérieures [Kerjosse, Pinel, 2013]. Ce phénomène invite à nuancer la hausse des salaires entre 2006 et 2012 dans certaines petites et moyennes aires où l’industrie représente une part relativement importante de l’activité, comme dans celles de Fougères ou Cluses, avec une hausse du salaire moyen supérieure à 5 % entre 2006 et 2012.

Après 2012, le salaire moyen a progressé plus vite dans les grandes aires d’attraction des villes que dans les plus petites

Après le choc de la crise, le salaire moyen a plus fortement augmenté dans les grandes aires d’attraction des villes. Entre 2012 et 2018, il a progressé de 4,2 % dans l’aire de Paris en euros constants et de 4,1 % en moyenne dans les autres aires de 700 000 habitants ou plus, contre 3,5 % dans les aires de 200 000 à 700 000 habitants et 3,2 % dans celles de 50 000 à 200 000 habitants.

Certaines aires d’attractions des villes ont bénéficié d’une progression des rémunérations nettement supérieure à la moyenne des aires de leur taille entre 2012 et 2018. C’est notamment le cas de Grenoble (+ 5,7 %), d’Épernay (+ 6,0 %) ou de Niort (+ 6,1 %). Cela va souvent de pair avec des spécialisations sur des activités en croissance, comme à Cognac avec la production d’eau‑de‑vie (+ 7,2 %), ou encore dans l’aire de Pau (+ 5,4 %), spécialisée dans la chimie et la fabrication de matériaux composites et tournée vers les énergies renouvelables. Les salaires dans le secteur privé ont aussi nettement progressé dans les régions d’Outre‑mer (figure 12), en particulier dans l’aire de Fort‑de‑France en Martinique (+ 5,9 %) et dans celle des Abymes en Guadeloupe (+ 5,3 %), compensant la diminution dans la période précédente.

Figure 12Évolution du salaire mensuel net moyen en équivalent temps plein entre 2012 et 2018 et population des aires d’attraction des villes

Évolution du salaire mensuel net moyen en équivalent temps plein entre 2012 et 2018 et population des aires d’attraction des villes
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Figure 12Évolution du salaire mensuel net moyen en équivalent temps plein entre 2012 et 2018 et population des aires d’attraction des villes

  • Lecture : dans l’aire d’attraction de Perpignan (410 000 habitants), le salaire mensuel net moyen en EQTP a augmenté de 2,8 % en euros constants entre 2012 et 2018.
  • Champ : France hors Mayotte, salariés du secteur privé, aires d'attraction des villes de 50 000 habitants ou plus dont le pôle est en France.
  • Source : Insee, bases Tous salariés, recensement de la population 2017.

Les disparités salariales augmentent avec la population de l’aire

En 2018, sur l’ensemble de la France, un salarié du secteur privé sur dix gagne moins de 1 280 euros nets par mois (1er ), tandis qu’un sur dix gagne plus de 3 780 euros (9e décile). Le salaire médian est de 1 870 euros.

Au sein des aires d’attraction des villes, les disparités de salaires sont très variables. En 2018, pour les aires de 50 000 habitants ou plus, le varie de 1,93 à Royan, à 3,88 à Paris. L’indice de Gini (méthode), qui donne une vision synthétique des disparités sur l’ensemble de la distribution des salaires, est également minimal à Royan (0,17) et maximal à Paris (0,36) (figure 13). Entre ces cas extrêmes, les disparités de salaires augmentent avec la population de l’aire, quel que soit l’indicateur considéré (figure 14).

Figure 13Indice de Gini des salaires mensuels nets moyens en équivalent temps plein en 2018 et population des aires d’attraction des villes

Indice de Gini des salaires mensuels nets moyens en équivalent temps plein en 2018 et population des aires d’attraction des villes
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Figure 13Indice de Gini des salaires mensuels nets moyens en équivalent temps plein en 2018 et population des aires d’attraction des villes

  • Lecture : dans l’aire de Toulouse (1 415 000 habitants), l’indice de Gini des salaires mensuels nets vaut 0,29.
  • Champ : France hors Mayotte, salariés du secteur privé, aires d'attraction des villes de 50 000 habitants ou plus dont le pôle est en France.
  • Source : Insee, base Tous salariés 2018, recensement de la population 2017.

Figure 14Rapports interdéciles des salaires mensuels nets moyens en équivalent temps plein en 2018 selon la population des aires d’attraction des villes

Rapports interdéciles des salaires mensuels nets moyens en équivalent temps plein en 2018 selon la population des aires d’attraction des villes - Lecture : dans les aires de 200 000 à moins de 700 000 habitants, le rapport entre le 9e décile et le 1er décile de salaire mensuel moyen en EQTP est égal à 2,57.
50 000 à 200 000 habitants 200 000 à 700 000 habitants 700 000 habitants ou plus (hors Paris) Aire de Paris
D9/D1 2,40 2,57 2,90 3,88
D9/D5 1,75 1,82 1,95 2,26
D5/D1 1,37 1,41 1,48 1,72
  • Note : le 1er décile (D1) est le salaire au-dessous duquel se situent 10 % des salaires ; le 9e  décile (D9) est le salaire au-dessous duquel se situent 90 % des salaires.
  • Lecture : dans les aires de 200 000 à moins de 700 000 habitants, le rapport entre le 9e décile et le 1er décile de salaire mensuel moyen en EQTP est égal à 2,57.
  • Champ : France hors Mayotte, salariés du secteur privé, aires d'attraction des villes de 50 000 habitants ou plus dont le pôle est en France.
  • Source : Insee, base Tous salariés 2018, recensement de la population 2017.

Figure 14Rapports interdéciles des salaires mensuels nets moyens en équivalent temps plein en 2018 selon la population des aires d’attraction des villes

  • Note : le 1er décile (D1) est le salaire au-dessous duquel se situent 10 % des salaires ; le 9e  décile (D9) est le salaire au-dessous duquel se situent 90 % des salaires.
  • Lecture : en tendance, dans les aires de 200 000 habitants, le rapport entre le 9e décile (D9) et le 1er décile (D1) de salaire mensuel moyen en EQTP est égal à 2,4.
  • Champ : France hors Mayotte, salariés du secteur privé, aires d'attraction des villes de 50 000 habitants ou plus dont le pôle est en France.
  • Source : Insee, base Tous salariés 2018, recensement de la population 2017.

Quelques aires se distinguent par des disparités salariales particulièrement fortes compte tenu de leur taille. Ainsi, en 2018, après Paris, les trois aires où l’indice de Gini est le plus élevé sont Cannes - Antibes (0,30), Grenoble et Toulouse (0,29). Il s’agit également des aires où le niveau du 9e décile des salaires est le plus haut après Paris : 4 160 euros à Cannes - Antibes, 4 110 euros à Grenoble et 4 010 euros à Toulouse. Cela s’explique notamment par la forte part de cadres dans ces aires et la présence d’entreprises du secteur aérospatial ou de pôles technologiques. Lannion (85 000 habitants) est l’aire où le rapport entre le 9e décile et la (D9/D5) est le plus élevé (2,26). Le 9e décile des salaires y est particulièrement élevé (3 910 euros), tandis que la médiane des salaires (1 730 euros) est proche de celle des aires de sa taille et donc inférieure à la médiane nationale.

Parmi les dix aires où les indicateurs d’inégalités sont les plus faibles, seules deux comptent plus de 100 000 habitants : Saint‑Omer (118 000 habitants) où le rapport D9/D5 vaut 1,6, ce qui s’explique notamment par un 9e décile des salaires relativement bas (2 820 euros), et Carcassonne (123 000 habitants) où le rapport D5/D1 vaut 1,3, en lien avec un salaire médian relativement faible (1 610 euros).

Ouvrir dans un nouvel ongletBaum‑Snow et Pavan (2013) indiquent que le lien entre taille de l’aire et disparités salariales est dû notamment au fait que les plus diplômés sont plus présents dans les grandes aires, et que – à niveau de diplôme égal – la rémunération des plus diplômés est elle‑même plus élevée dans les grandes aires. Un des facteurs explicatifs est la plus forte concurrence entre entreprises et entre salariés dans les grandes aires, où se concentrent les entreprises qui emploient les salariés les plus qualifiés. Les compétences des salariés, au‑delà de leur simple niveau de diplôme (expérience, qualités de communication, engagement personnel, etc.), sont donc particulièrement valorisées dans les grandes aires. Cet effet se cumule avec la plus grande diversité des types d’emploi et d’activités économiques dans les grandes aires.

Depuis 2006, les disparités de salaire se sont accrues dans la plupart des très grandes aires, alors qu’elles ont diminué dans la majorité des petites

Dans la grande majorité des aires, les disparités de salaires ont eu tendance à diminuer entre 2006 et 2012, puis à augmenter entre 2012 et 2018. Cela rejoint le constat fait précédemment d’une moindre croissance des salaires dans les grandes aires que dans les petites aires entre 2006 et 2012. La crise économique de 2008 ‑ 2009 a affecté les salaires les plus élevés [Bichler, Kerjosse, 2011]. De plus, une partie des emplois faiblement rémunérés ont été touchés par le chômage et sont sortis du salariat [Kerjosse, Pinel, 2013]. Ces deux effets ont contribué à réduire les disparités de salaire au sein de la distribution.

Sur l’ensemble de la période 2006 ‑ 2018, les inégalités de salaire se sont en général accentuées dans les très grandes aires d’attraction des villes et réduites dans les plus petites, même si ces évolutions sont de faible ampleur (figure 15). L’indice de Gini a diminué dans 64 % des aires de 50 000 à 200 000 habitants et a stagné dans 8 % d'entre elles (variation comprise entre – 0,001 et + 0,001). Dans les aires de 200 000 à 700 000 habitants, l’indice de Gini a diminué pour 42 % d’entre elles et s’est stabilisé pour 9 % d’entre elles. Si l’indice de Gini s’est stabilisé à Rennes et a légèrement baissé à Nantes, il a augmenté dans les neuf autres aires de 700 000 habitants ou plus, en particulier à Grenoble (+ 0,017) et à Paris (+ 0,015).

Figure 15Indice de Gini des salaires mensuels nets moyens en équivalent temps plein en 2018 et population des aires d’attraction des villes

Indice de Gini des salaires mensuels nets moyens en équivalent temps plein en 2018 et population des aires d’attraction des villes
Les données détaillées de cette figure sont disponibles dans le fichier à télécharger.

Figure 15Évolution de l’indice de Gini des salaires mensuels nets en équivalent temps plein entre 2006 et 2018 et population des aires d’attraction des villes

  • Lecture : à Paris, l’indice de Gini du salaire mensuel net en EQTP a augmenté de 0,015 entre 2006 et 2018, signe d’une augmentation des inégalités de salaire sur la période.
  • Champ : France hors Mayotte, salariés du secteur privé, aires d'attraction des villes de 50 000 habitants ou plus dont le pôle est en France.
  • Source : Insee, bases Tous salariés, recensement de la population 2017.

Encadré - Zonage en aires d’attraction des villes

L’aire d’attraction d’une ville définit l’étendue de son influence sur les communes environnantes. Une aire est composée d’un pôle, défini à partir de critères de densité de population, de population et d’emploi, et d’une couronne, constituée des communes dont au moins 15 % des actifs occupés travaillent dans le pôle.

Contrairement aux zones d’emploi, qui découpent l’ensemble de la France en espaces où la plupart des actifs habitent et travaillent, le zonage en aires d’attraction des villes permet d’identifier, au sein du territoire, les polarités les plus importantes et les communes qui leur sont liées. Construit à partir des déplacements domicile‑travail, le zonage en aires d’attraction des villes délimite un espace économiquement intégré : les chocs économiques qui affectent le pôle ont également un impact sur son aire d’attraction. Ce zonage permet de distinguer les aires suivant leur nombre d’habitants, à partir d’une méthode de constitution basée sur des critères statistiques et non administratifs. Il est particulièrement adapté à l’étude des effets de l’agglomération des personnes et des emplois sur l’activité économique (figure).

FigureAires d’attraction des villes selon la population

Aires d’attraction des villes selon la population
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FigureAires d’attraction des villes selon la population

  • Lecture : la population de l’aire d’attraction de Limoges est de 325 000 habitants en 2017.
  • Champ : France hors Mayotte, aires d'attraction des villes de 50 000 habitants ou plus dont le pôle est en France.
  • Source : Insee, recensement de la population 2017, zonage en aires d'attraction des villes.
Sommaire
  1. Méthode
  2. Sources

Méthode

L’indice de Gini est un indicateur synthétique d’inégalités, utilisé ici pour étudier la distribution des salaires. Il varie entre 0 (égalité parfaite, tous les salaires sont égaux) et 1 (situation la plus inégalitaire, celle où tous les salaires sauf un seraient nuls). L’inégalité est d’autant plus forte que l’indice de Gini est élevé. L’indice de Gini se calcule à partir d’une courbe de Lorenz qui associe à chaque part de la population ordonnée selon le salaire, la part du total des salaires que celle‑ci détient. L’indice de Gini se définit alors comme le double de l’aire entre cette courbe de Lorenz qui représente la concentration de la distribution des salaires et celle obtenue en cas d’égalité parfaite. Cet indicateur prend donc en compte toute la distribution des salaires – contrairement au rapport D9/D1 qui ne repose que sur deux points de la distribution – et est peu sensible aux valeurs extrêmes [Charnoz, Coudin, Gaini, 2013]. De plus, l’indice de Gini est invariant d’échelle : l’indice de Gini est donc robuste à une augmentation générale du niveau des salaires. L’indice de Gini augmente toujours quand un salaire dans le bas de la distribution diminue et qu’un salaire dans le haut de la distribution augmente d’autant [Ouvrir dans un nouvel ongletGlaeser et al., 2009].

Sources

L’étude utilise les données pour le secteur privé des bases Tous salariés jusqu’en 2018. Ces bases permettent un suivi annuel des salaires au niveau individuel. Elles mobilisent plusieurs sources construites à partir des déclarations sociales ou des données administratives. Les informations relatives au secteur privé sont principalement issues des déclarations annuelles de données sociales (DADS), progressivement remplacées par les déclarations sociales nominatives (DSN) depuis 2017.

La mesure du salaire net est construite à partir du salaire net fiscal tel qu’il est déclaré dans les sources administratives. Elle ne couvre pas les montants d’épargne salariale placés sur un plan d’épargne d’entreprise qui ne sont pas soumis à l’impôt sur le revenu. Depuis 2013, elle couvre, en tant qu’avantage en nature, les cotisations pour complémentaire santé obligatoire payées par l’employeur (année à partir de laquelle celles‑ci sont devenues imposables et ont donc été intégrées dans le salaire net fiscal).

L’unité considérée dans les bases Tous salariés est le poste de travail, chaque poste correspondant au cumul sur un an des périodes d’emploi d’un même salarié dans un même établissement. Si un salarié occupe plusieurs postes, chacun de ses postes est pris en considération au prorata de sa durée.

Dans cette étude, le champ retenu pour les salaires est celui des salariés du privé et des entreprises publiques, y compris bénéficiaires de contrats aidés et de contrats de professionnalisation ; hors apprentis, stagiaires, salariés agricoles et salariés des particuliers-employeurs.

Définitions

Le salaire en équivalent temps plein (EQTP) est un salaire converti à un temps plein pendant toute l’année, quel que soit le volume de travail effectif. Par exemple, pour un agent ayant occupé un poste de travail pendant six mois à 80 % et ayant perçu un total de 10 000 euros, le salaire en EQTP est de 10 000/(0,5*0,8) = 25 000 euros par an. Pour calculer le salaire moyen en EQTP ou sa distribution, tous les postes y compris les postes à temps partiel sont pris en compte au prorata de leur volume de travail effectif (soit 0,5*0,8 = 0,4 EQTP dans l’exemple précédent).

Lorsque l’on ordonne une population par ordre croissant de salaire, les déciles sont les valeurs qui partagent l’ensemble de ces observations en dix classes de taille égale. Ainsi, le 1er décile (noté généralement D1) est le salaire au‑dessous duquel se situent 10 % des salaires observés ; le 9e décile (noté généralement D9) est le salaire au‑dessous duquel se situent 90 % des salaires. Le rapport interdécile D9/D1 met donc en évidence l’écart entre le haut et le bas de la distribution des salaires dans la population ; cet indicateur permet de rendre compte du degré d’inégalité ou de disparité de cette distribution. Les rapports D9/D5 et D5/D1 donnent pour leur part des informations sur les inégalités situées respectivement en haut et en bas de la distribution. Dans le cas des salaires en équivalent temps plein, le 1er décile de salaire est la borne supérieure des salaires des postes les moins bien rémunérés représentant 10 % de l’emploi en EQTP.

La médiane (D5) est la valeur qui partage les observations en deux parties égales, soit le salaire au‑dessous duquel se situent 50 % des salaires et au‑dessus duquel se situent 50 % des salariés.

Askenazy P., Bozio A., García‑Peñalosa C., «Ouvrir dans un nouvel onglet Dynamique des salaires par temps de crise », Notes du conseil d’analyse économique 2013/5.

Audenaert D., de Bellefon M.‑P., Pégaz‑Blanc P., « Aires d’attraction des villes : plus de 15‑29 ans et de cadres dans les pôles et dans les grandes aires », Insee Première n° 1827, novembre 2020.

Baum‑Snow B., Pavan R., "Ouvrir dans un nouvel onglet Inequality and city size ", Review of Economics and Statistics, 2013.

Bernert É., « Les fonctions de décision, de conception et de gestion plus présentes dans les grandes métropoles régionales », Insee Première n° 1856, avril 2021.

Bichler G., Kerjosse, R., « En 2009, les salaires progressent de 1,2 % en euros constants », Insee Première n° 1384, décembre 2011.

Bouba‑Olga O., Chauchefoin P., Chiron H., Ferru M., Guimond B., Nadaud E., «Ouvrir dans un nouvel onglet Dynamiques territoriales : éloge de la diversité », Atlantique, éditions de l’Actualité scientifique Nouvelle‑Aquitaine, 2017.

Bouvet S., « Les activités au service de la population, facteur de résistance à la crise », Insee Analyses Auvergne n° 2, octobre 2014.

Charnoz P., Coudin É., Gaini M., « Une diminution des disparités salariales en France entre 1967 et 2009 », in Emploi et Salaires, coll. « Insee Références », édition 2013.

Combes P.‑P., Duranton G., Gobillon L., Roux S., "Ouvrir dans un nouvel onglet Sorting and local wage and skill distributions in France ", Regional Science and Urban Economics, vol. 42(6), 2012 (b).

Combes P.‑P., Duranton G., Gobillon L., Roux S., "Ouvrir dans un nouvel onglet The Productivity Advantages of Large Cities: Distinguishing Agglomeration from Firm Selection ", Econometrica, 2012, vol. 80, no 6, p. 2543‑2594 (a).

Glaeser E., Resseger M., Tobio K., "Ouvrir dans un nouvel onglet Inequality in Cities ", Journal of Regional Science 49, 2009.

Kerjosse R., Pinel C., « Secteur privé et entreprises publiques ‑ En 2011, les salaires ralentissent de nouveau en euros constants », Insee Première n° 1471, octobre 2013.

Krugman P., "Ouvrir dans un nouvel onglet Increasing Returns and Economic Geography ", Journal of Political Economy, University of Chicago Press, vol. 99(3), juin 1991.

Marshall A., "Ouvrir dans un nouvel onglet Principles of Economics, Palgrave Classics in Economics ", 1890.

Reynard R., Vallès V., « Les emplois se concentrent très progressivement sur le territoire, les déplacements domicile‑travail augmentent », Insee Première n° 1771, septembre 2019.

Sanchez Gonzalez J., Sueur É., « En 2018, le salaire net moyen dans le secteur privé augmente de 0,4 % en euros constants », Insee Première n° 1828, décembre 2020.

Dans la suite de ce dossier, le terme "salaire" désigne le salaire net en équivalent temps plein (EQTP).

Les aires de moins de 50 000 habitants présentent une forte hétérogénéité. Certaines sont peu denses et caractérisées par des salaires moyens faibles (comme Lodève, Le Blanc, Prades ou Carnac), d’autres, moins nombreuses, abritent des activités à forte valeur ajoutée (comme Fessenheim, Flamanville ou Kourou), associées à de fortes rémunérations.

Le salaire moyen dans les aires dont le pôle est à l’étranger (comme celles de Genève ou de Monaco) pourrait être sous‑estimé car les informations disponibles portent uniquement sur les emplois salariés dans des communes de la couronne.

???

Dans la suite de ce dossier, le terme "salaire" désigne le salaire net en équivalent temps plein (EQTP).

Les aires de moins de 50 000 habitants présentent une forte hétérogénéité. Certaines sont peu denses et caractérisées par des salaires moyens faibles (comme Lodève, Le Blanc, Prades ou Carnac), d’autres, moins nombreuses, abritent des activités à forte valeur ajoutée (comme Fessenheim, Flamanville ou Kourou), associées à de fortes rémunérations.

Le salaire moyen dans les aires dont le pôle est à l’étranger (comme celles de Genève ou de Monaco) pourrait être sous‑estimé car les informations disponibles portent uniquement sur les emplois salariés dans des communes de la couronne.

???