France, portrait social Édition 2019

Une édition avec des éclairages consacrés à l’évolution de la société française depuis 40 ans : démographie, évolution du temps de travail, mobilité sociale, inégalités de niveau de vie et redistribution, opinions et préoccupations des Français.

Insee Références
Paru le :Paru le19/11/2019
Hicham Abbas (Insee) ; Bertrand Garbinti (Banque de France Crest)
France, portrait social- Novembre 2019
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Sommaire

De la rupture conjugale à une éventuelle remise en couple : l’évolution des niveaux de vie des familles monoparentales entre 2010 et 2015

Hicham Abbas (Insee) ; Bertrand Garbinti (Banque de France Crest)

En France, 210 000 familles sont devenues monoparentales en 2011 à la suite de séparations de couples ayant au moins un enfant mineur, dont la moitié après une rupture d’union libre. Ces ruptures ont des conséquences importantes sur les niveaux de vie des familles. Ainsi, la moitié des femmes qui ont rompu une union en 2011 et ont la garde de leurs enfants connaissent une baisse de leur niveau de vie au moins égale à 20 % l’année de leur séparation, un chiffre qui varie peu selon leur statut conjugal d’origine (mariage, Pacs ou union libre). Pour la moitié des pères de familles monoparentales, cette baisse de niveau de vie est au moins supérieure à 10 % l’année de la séparation, et ce, quel que soit le statut conjugal initial. Ces évolutions de niveau de vie consécutives aux ruptures sont semblables quelle que soit l’année de séparation entre 2011 et 2014.

Si les ruptures d’unions se traduisent par une baisse sensible des niveaux de vie, celle-ci se résorbe quelques années après la rupture. Ainsi, quatre ans après la séparation, la baisse de niveau de vie des femmes n’est plus que de 7 % à 11 % en médiane selon le type d’union d’origine. Pour les hommes, la baisse initiale de niveau de vie se résorbe totalement en médiane au bout de quatre ans.

Les remises en couple ultérieures ainsi que, pour les femmes, les retours sur le marché du travail à la suite des séparations, expliquent en partie l’évolution favorable des niveaux de vie dans les années qui suivent la rupture.

Insee Références

Paru le :19/11/2019

La perte de niveau de vie après une rupture conjugale : une situation transitoire ?

Entre 1990 et 2016, le nombre de a fortement augmenté en France [Daguet, 2017 ; Insee, 2019]. Alors qu’elles représentaient 12 % de l’ensemble des familles comprenant au moins un enfant mineur en 1990, elles en représentent 23 % en 2016. Les femmes résidant seules avec des enfants mineurs constituent 84 % de ces familles.

La pauvreté est élevée parmi les familles monoparentales [Insee, 2018]. De fait, les ruptures d’unions sont le plus souvent associées à une perte de [Bonnet et al., 2015 ; Costemalle, 2017]. Mais vivre en famille monoparentale est souvent une situation transitoire dans le parcours conjugal et familial : après la chute qui suit la séparation, le niveau de vie des femmes se rétablit en partie dans les années qui suivent [Costemalle, 2017]. Ce « rétablissement » est plus rapide pour les femmes qui étaient en union libre avant la rupture que pour celles qui étaient mariées, vraisemblablement parce qu’elles reforment un couple plus rapidement et plus fréquemment que les autres.

En mobilisant l’échantillon démographique permanent (EDP ; sources), il est possible de répondre aux questions suivantes : comment évoluent les niveaux de vie des familles avec enfants mineurs à la suite d’une rupture conjugale, l’année suivant la rupture, mais aussi au cours des quatre années qui la suivent ? Que se passe-t-il en cas de remise en couple ultérieure ? Ces évolutions de niveau de vie et de revenus sont-elles les mêmes pour les hommes et pour les femmes ? Sont-elles différentes selon le type d’union rompue ou reformée après la séparation ? Dans quelle mesure varient-elles selon le mode de résidence des enfants, en mode alterné ou exclusif ? Combien de familles basculent dans la pauvreté après une séparation ?

Par rapport aux travaux antérieurs sur ces sujets, ce dossier s’intéresse plus spécifiquement aux familles devenues monoparentales en 2011 à la suite d’une séparation et permet de distinguer les parents selon le mode de résidence des enfants mineurs, en garde exclusive ou en garde alternée. Seule la situation des parents qui résident principalement ou la moitié du temps avec leurs enfants est ici étudiée. Les données fiscales mobilisés à partir de l'EDP n'apportent pas d'information sur les parents qui ont un droit de visite et d'hébergement (dont les enfants résident de façon exclusive chez leur autre parent). Ces situations n'entrent donc pas dans le champ du dossier. Mobilisant les six années de données fiscales désormais disponibles dans l’échantillon démographique permanent, ce dossier permet de suivre sur une plus longue période l’évolution du niveau de vie de ces familles. Fait nouveau, il aborde aussi la question du risque de pauvreté survenant à la suite d’une séparation ; c’est une question d’importance pour les familles monoparentales, qui sont très fortement exposées à la pauvreté (plus d’un tiers sont pauvres [Insee, 2018]).

Plus de 200 000 familles devenues monoparentales en 2011 après la séparation d’un couple avec enfants mineurs

La moitié des séparations d’unions intervenues en 2011 ont concerné des couples ayant au moins un enfant mineur. Ainsi 210 000 nouvelles familles sont devenues monoparentales après une séparation : la moitié (53 %) à la suite d’une rupture d’union libre (couples ni mariés, ni pacsés) et 41 % après un divorce. Les Pacs étant relativement récents (créés à la fin de l’année 1999), seules 6 % des nouvelles familles monoparentales sont issues d’une rupture de Pacs.

Les caractéristiques socio-démographiques des personnes séparées et déclarant la résidence (exclusive ou alternée) d’au moins un enfant mineur diffèrent selon le type d’union rompue et selon qu’il s’agit d’hommes ou de femmes (figure 1). Les pères des familles devenues monoparentales en 2011 sont, comme les hommes en couple, plus âgés que les mères : ils ont en moyenne 40 ans, soit trois ans de plus qu’elles. Comme pour les femmes, ceux qui étaient initialement mariés sont sensiblement plus âgés que ceux qui ont rompu un Pacs ou une union libre (quatre à six ans d’écart en moyenne). Les enfants des familles dont les parents étaient mariés sont également plus âgés et plus nombreux que ceux dont les parents étaient soit pacsés soit en union libre. Ainsi, plus de 40 % des familles monoparentales dont les parents étaient mariés comportent 2 enfants et 16 % d’entre elles ont au moins 3 enfants. À l’inverse, les autres familles devenues monoparentales sont très majoritairement des familles ne comportant qu’un seul enfant : 60 % des familles monoparentales issues de la rupture d’un Pacs ne comportent qu’un seul enfant, et 59 % de celles issues de la rupture d’une union libre.

À l’image de l’ensemble de la société française, les pères des familles devenues monoparentales en 2011 ont des niveaux de diplôme inférieurs en moyenne à ceux des mères se retrouvant dans la même situation. Les mères de familles monoparentales sont également souvent employées, alors que les ouvriers sont surreprésentés parmi les pères, sauf lorsqu’ils étaient pacsés. Les parents qui étaient pacsés ont généralement des niveaux de diplôme plus élevés que ceux qui étaient mariés ou en union libre.

Figure 1 - Caractéristiques des familles devenues monoparentales en 2011 après une séparation selon le type d'union rompue

en %
Figure 1 - Caractéristiques des familles devenues monoparentales en 2011 après une séparation selon le type d'union rompue (en %) - Lecture : 17 % des mères de familles devenues monoparentales en 2011, c’est-à-dire qui étaient en couple en 2010 et qui ne vivent pas en couple en 2011 après une rupture de Pacs, sont cadres.
Mères en couple en 2010 et séparées en 2011 Mères en couple en 2010, séparées ou non en 2011 Pères en couple en 2010 et séparés en 2011 Pères en couple en 2010, séparés ou non en 2011
Type d'union avant la séparation Type d'union avant la séparation
Mariage Pacs Union libre Ensemble Mariage Pacs Union libre Ensemble
Âge moyen (en années) 39 35 35 37 40 43 38 37 40 42
Diplôme
Sans diplôme 9 3 15 13 10 10 3 16 14 12
CAP, BEP ou moins 25 21 33 31 29 33 29 40 39 38
Baccalauréat ou équivalent 22 20 23 22 22 19 21 22 21 19
Diplôme du supérieur 44 56 29 34 39 38 47 22 26 31
Catégorie socioprofessionnelle
Agriculteur 0 0 0 0 1 2 9 1 2 2
Artisan ou commerçant 3 4 3 3 3 8 28 9 9 10
Cadre 12 17 8 9 12 22 28 11 12 20
Profession intermédiaire 28 33 20 24 27 25 13 18 22 23
Employé 43 37 46 45 38 11 20 13 12 11
Ouvrier 6 4 9 9 6 31 2 45 41 32
Autres 8 5 14 10 13 1 0 3 2 2
Nombre d'enfants mineurs
1 41 57 58 50 43 46 61 61 54 42
2 41 36 31 37 40 40 33 29 34 40
3 ou plus 18 7 11 13 17 14 6 10 12 18
Âge moyen des enfants (en années) 10 6 8 8 10 10 6 8 8 10
Enfants en résidence alternée 18 48 7 15 1 43 11 46 42 1
  • Lecture : 17 % des mères de familles devenues monoparentales en 2011, c’est-à-dire qui étaient en couple en 2010 et qui ne vivent pas en couple en 2011 après une rupture de Pacs, sont cadres.
  • Champ : France métropolitaine, personnes en couple en 2010 qui déclarent au moins un enfant mineur au domicile en 2011.
  • Source : Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-CCMSA, échantillon démographique permanent 2016.

Après la séparation, la baisse de niveau de vie est plus forte pour les mères que pour les pères,

En 2010, c’est-à-dire un an avant leur séparation, les niveaux de vie médians des hommes et des femmes en couple ayant au moins un enfant mineur diffèrent selon le statut conjugal : le niveau de vie médian des couples mariés est de 20 000 euros, celui des couples pacsés est de 22 200 euros et celui des couples en union libre de 17 500 euros. Dans la grande majorité des cas, l’année de leur séparation, les adultes des familles devenues monoparentales en 2011 disposent d’un niveau de vie plus faible que celui de l’année qui précède leur rupture. La baisse de niveau de vie est plus marquée pour les mères que pour les pères. Ainsi, tous statuts conjugaux antérieurs confondus, la moitié des mères ont en 2011 un niveau de vie au moins inférieur de 24 % à leur niveau de vie de 2010, alors que la baisse de niveau de vie des pères atteint 12 % (figure 2). La baisse médiane de niveau de vie observée à la suite des séparations varie peu selon le type d’union d’origine : elle atteint 25 % pour les mères de familles divorcées et 22 % pour celles qui ont rompu une union libre ; pour les pères, elle est de 10 % pour les divorcés et de 13 % pour ceux qui vivaient précédemment en union libre. Les effectifs de mères et de pères rompant un Pacs ne sont pas suffisamment nombreux pour reconstituer de manière fiable les évolutions de leurs niveaux de vie.

Si les ruptures se traduisent majoritairement par une baisse de niveau de vie, certaines familles bénéficient d’une hausse de leur niveau de vie l’année de leur séparation. Ainsi, 20 % des mères et 33 % des pères de familles monoparentales voient leur niveau de vie augmenter après leur séparation. Comme précédemment, ces proportions varient peu en fonction du statut conjugal initial.

Le nombre d’enfants joue peu sur les variations de niveau de vie des familles monoparentales après une séparation, aussi bien pour les pères que pour les mères. Dans le cas des mères, Bonnet et al. [2015] montrent, en effet, que la baisse de niveau de vie devant résulter d’un nombre plus élevé d’enfants est fortement atténuée par la redistribution socio-fiscale (principalement par les prestations sociales) et, dans une moindre mesure, par les pensions alimentaires.

La baisse du niveau de vie consécutive aux séparations, plus importante pour les mères que pour les pères, s’explique par plusieurs raisons. Tout d’abord, la répartition des ressources au sein des couples est rarement égalitaire, les femmes ayant souvent des revenus inférieurs à ceux de leur conjoint [Bonnet et al., 2015 et 2016 ; Costemalle, 2017]. La séparation conduit alors à la perte du revenu principal du couple. De plus, les mères de familles devenues monoparentales en 2011 résident plus souvent avec leurs enfants en garde exclusive que les pères, qui ont davantage leurs enfants en résidence alternée [Cretin, 2015] : 42 % des pères ont au moins un enfant en résidence alternée, contre 15 % des mères (figure 1). En conséquence, le niveau de vie des mères s’avère davantage affecté que celui des pères, car elles ont plus souvent à leur charge leurs enfants la plus grande partie du temps (rappelons que, par convention, dans les données fiscales, le nombre d’ d’un enfant en résidence alternée représente la moitié de celui d’un enfant en résidence exclusive). Au total, des ressources plus faibles et un nombre d’unités de consommation plus élevé se cumulent pour expliquer des niveaux de vie nettement plus faibles pour les femmes que pour les hommes.

Figure 2a - Évolution médiane du niveau de vie des mères selon qu'elles ont rompu ou non leur union

en %
Figure 2a - Évolution médiane du niveau de vie des mères selon qu'elles ont rompu ou non leur union (en %) - Lecture : la moitié des mères entrées en famille monoparentale en 2011 après un divorce ont perdu au moins 25 % du niveau de vie qu'elles avaient en 2010, quand elles vivaient en couple.
Mariage rompu Union libre rompue Mariage
non rompu
Union libre
non rompue
2010 0,0 0,0 0,0 0,0
2011 - 24,8 - 22,2 0,9 0,1
2012 - 16,9 - 12,8 1,1 0,0
2013 - 13,7 - 10,2 2,2 0,3
2014 - 11,9 - 8,1 3,6 0,8
2015 - 11,1 - 6,6 4,7 1,5
  • Lecture : la moitié des mères entrées en famille monoparentale en 2011 après un divorce ont perdu au moins 25 % du niveau de vie qu'elles avaient en 2010, quand elles vivaient en couple.
  • Champ : France métropolitaine, personnes en couple en 2010, mariées ou en union libre, qui ne vivent pas en couple en 2011 et déclarent au moins un enfant mineur au domicile en 2011 (union rompue) ou qui vivent toujours en couple en 2015 (union non rompue).
  • Source : Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-CCMSA, échantillon démographique permanent 2016.

Figure 2a - Évolution médiane du niveau de vie des mères selon qu'elles ont rompu ou non leur union

  • Lecture : la moitié des mères entrées en famille monoparentale en 2011 après un divorce ont perdu au moins 25 % du niveau de vie qu'elles avaient en 2010, quand elles vivaient en couple.
  • Champ : France métropolitaine, personnes en couple en 2010, mariées ou en union libre, qui ne vivent pas en couple en 2011 et déclarent au moins un enfant mineur au domicile en 2011 (union rompue) ou qui vivent toujours en couple en 2015 (union non rompue).
  • Source : Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-CCMSA, échantillon démographique permanent 2016.

Après une baisse initiale l’année de la rupture, le niveau de vie des pères de familles monoparentales se redresse rapidement contrairement à celui des mères

De manière générale, dès l’année qui suit la rupture, le niveau de vie des familles devenues monoparentales en 2011 remonte. Les hausses successives de niveau de vie au cours des années qui suivent la rupture ont pour conséquence de réduire un peu plus chaque année en médiane l’écart par rapport au niveau de vie qui la précède. La première année suivant la rupture, le niveau de vie remonte plus rapidement pour les mères que pour les pères, mais après avoir connu une baisse plus marquée l’année de la rupture. Quatre ans après la séparation, la majorité des mères n’ont cependant toujours pas retrouvé leur niveau de vie initial, alors que les pères l’ont souvent retrouvé, voire dépassé. Quelle que soit l’année observée, la perte médiane de niveau de vie demeure plus modérée pour les mères qui étaient auparavant en union libre que pour celles qui étaient mariées.

L’impact de la séparation sur les niveaux de vie futurs peut être questionné de la façon suivante : quelles auraient été les évolutions des niveaux de vie des individus séparés s’ils n’avaient pas subi de rupture conjugale ? La comparaison des variations de niveaux de vie des personnes séparées avec celles des personnes restées en couple et d’âges comparables (25-55 ans en 2010) apporte quelques éléments de réponse.

Quatre années après la rupture, l’évolution des niveaux de vie des pères séparés en 2011 résidant seuls avec des enfants mineurs est à peu près égale à celle des hommes restés en couple (figure 2). Pourtant, l’année qui suit la séparation, le niveau de vie baisse d’au moins 10 % pour la moitié des pères divorcés, tandis qu’il augmente d’au moins 1 % pour la moitié des pères toujours mariés, soit un écart de 11 points entre les deux évolutions médianes. Cet écart est encore plus important (14 points) dans le cas des unions libres. En 2015, soit quatre ans après la séparation, les évolutions médianes de niveau de vie par rapport à 2010 sont proches : les écarts se sont fortement atténués et ne sont plus que de 3 points à l'avantage des hommes restés en couple dans le cas des mariages, alors que, dans le cas des unions libres, les pères de familles devenues monoparentales disposent en médiane d’un niveau de vie avec une progression supérieure de 2 points à celui des pères restés en couple.

Pour les femmes, la comparaison avec les mères qui sont restées en couple est encore plus saillante, notamment pour celles qui ont divorcé (figure 2). Quatre ans après leur divorce, la moitié d’entre elles gardent un niveau de vie inférieur de plus de 11 % à ce qu’il était avant la séparation, alors que le niveau de vie des femmes toujours mariées a, lui, augmenté de 5 % en médiane entre 2010 et 2015. L’écart des évolutions de niveau de vie médian est donc de près de 16 points. Il est deux fois moindre (8 points) pour les femmes ayant rompu une union libre, dont la moitié garde un niveau de vie inférieur de 7 % à ce qu’il était avant la séparation. L’écart par rapport aux mères restées en couple demeure donc élevé, même s’il a fortement diminué par rapport à ce qu’il était l’année suivant le divorce (26 points) ou la rupture de l’union libre (22 points).

Les remises en couple : un déterminant majeur de la convergence des niveaux de vie vers leurs niveaux d’origine

La dynamique des au cours des années suivant la séparation n’explique que marginalement le rattrapage des évolutions des niveaux de vie des pères restés en couple par celles des pères de familles monoparentales (figure 3). En effet, les variations des sont relativement proches de celles des hommes qui sont restés en couple. Les écarts entre les évolutions médianes restent compris entre + 0,1 et – 1,6 point de pourcentage au bout de quatre ans. Il n’y a donc pas de différences notables entre les évolutions respectives des revenus individuels des pères séparés et des pères qui vivent en couple. En revanche, les remises en couple ont un fort impact sur les niveaux de vie des pères de familles monoparentales. La moitié des pères qui se remettent en couple un an après leur séparation retrouvent cette année-là leur niveau de vie antérieur à la séparation, voire le dépassent (figure 4). Ceux qui ne se remettent pas en couple continuent généralement d’avoir un niveau de vie inférieur pendant plusieurs années avant de retrouver leur niveau de vie initial. On observe les mêmes évolutions favorables de niveaux de vie pour les pères qui se remettent en couple deux ans, trois ans ou quatre ans après leur rupture.

Figure 3 - Évolution médiane des revenus individuels des mères et des pères selon qu'ils ont rompu ou non leur union

en %
Figure 3 - Évolution médiane des revenus individuels des mères et des pères selon qu'ils ont rompu ou non leur union (en %)
2011 2012 2013 2014 2015
Mères
Mariage rompu 3,5 7,5 10,7 12,4 15,6
Union libre rompue 2,0 7,4 10,6 13,9 15,5
Mariage non rompu 1,9 4,1 7,4 10,0 12,9
Union libre non rompue 1,5 3,4 5,9 8,2 10,9
Pères
Mariage rompu 1,4 2,7 4,3 6,2 7,3
Union libre rompue 1,7 3,4 6,0 6,8 9,4
Mariage non rompu 1,7 3,2 6,0 7,3 8,9
Union libre non rompue 2,0 3,5 6,1 7,8 9,3
  • Champ : France métropolitaine, personnes en couple en 2010, mariées ou en union libre, qui ne vivent pas en couple en 2011 et déclarent au moins un enfant mineur au domicile en 2011 (union rompue) ou qui vivent toujours en couple en 2015 (union non rompue). Les personnes ayant un revenu individuel annuel nul ou très faible (inférieur à un mois de Smic) ont été exclues du calcul.
  • Source : Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-CCMSA, échantillon démographique permanent 2016.

Figure 4a - Évolution médiane du niveau de vie des mères de familles monoparentales formées en 2011 selon qu'elles vivent ou non de nouveau en couple en 2012

en %
Figure 4a - Évolution médiane du niveau de vie des mères de familles monoparentales formées en 2011 selon qu'elles vivent ou non de nouveau en couple en 2012 (en %) - Lecture : la moitié des mères entrées en famille monoparentale en 2011 après un divorce et qui sont de nouveau en couple en 2012 ont un niveau de vie supérieur d'au moins 2,5 % en 2012 par rapport à celui qu'elles avaient en 2010 dans leur union précédente.
Mariage rompu.
Pas de nouvelle union en 2012
Union libre rompue.
Pas de nouvelle union en 2012
Mariage rompu.
Nouvelle union en 2012
Union libre rompue.
Nouvelle union en 2012
2010 0,0 0,0 0,0 0,0
2011 - 24,5 - 20,7 - 16,9 - 21,4
2012 - 19,2 - 15 2,5 2,4
2013 - 18,3 - 14,3 1,0 1,2
2014 - 17,8 - 13,4 - 1,5 0,6
2015 - 16,2 - 13,7 - 0,7 - 1,2
  • Lecture : la moitié des mères entrées en famille monoparentale en 2011 après un divorce et qui sont de nouveau en couple en 2012 ont un niveau de vie supérieur d'au moins 2,5 % en 2012 par rapport à celui qu'elles avaient en 2010 dans leur union précédente.
  • Champ : France métropolitaine, personnes en couple en 2010, mariées ou en union libre, qui ne vivent pas en couple en 2011 et déclarent au moins un enfant mineur au domicile en 2011 (union rompue) ou qui vivent toujours en couple en 2015 (union non rompue).
  • Source : Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-CCMSA, échantillon démographique permanent 2016.

Figure 4a - Évolution médiane du niveau de vie des mères de familles monoparentales formées en 2011 selon qu'elles vivent ou non de nouveau en couple en 2012

  • Lecture : la moitié des mères entrées en famille monoparentale en 2011 après un divorce et qui sont de nouveau en couple en 2012 ont un niveau de vie supérieur d'au moins 2,5 % en 2012 par rapport à celui qu'elles avaient en 2010 dans leur union précédente.
  • Champ : France métropolitaine, personnes en couple en 2010, mariées ou en union libre, qui ne vivent pas en couple en 2011 et déclarent au moins un enfant mineur au domicile en 2011 (union rompue) ou qui vivent toujours en couple en 2015 (union non rompue).
  • Source : Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-CCMSA, échantillon démographique permanent 2016.

Pour les mères des nouvelles familles monoparentales, l’évolution des revenus individuels contribue bien plus souvent à expliquer l’évolution favorable des niveaux de vie après le recul l’année de la séparation : d’une part, celles qui travaillaient avant la rupture et avaient déclaré des revenus en 2010 bénéficient d’une augmentation plus forte de leurs revenus individuels que celles qui sont restées en couple, ce qui peut s’expliquer notamment par une hausse de la quotité de travail ; d’autre part, certaines femmes font leur entrée ou leur retour sur le marché du travail après la séparation. Ainsi, 37 % des femmes qui se sont séparées en 2011 et se retrouvent seules avec leurs enfants ne travaillaient pas en 2010 (contre 12 % des hommes). Parmi elles, 74 % travaillent en 2015, soit quatre ans après leur rupture, alors que c’est le cas de seulement 21 % des femmes qui ne travaillaient pas en 2010 et sont restées en couple tout au long de la période 2010-2015. Ces résultats corroborent des résultats antérieurs, à savoir les reprises d’activité de femmes après une séparation qui, lorsqu’elles étaient en couple, s’étaient retirées du marché du travail ou n’y participaient pas [Bonnet et al., 2016].

De même que pour les pères, les remises en couple des mères de familles monoparentales vont de pair avec une augmentation de leur niveau de vie, qui leur permet de rattraper, voire dans certains cas de dépasser, le niveau de vie dont elles disposaient avant la séparation. Ainsi, la moitié des mères qui retrouvent un conjoint un an après la séparation ont, cette année-là, un niveau de vie plus élevé d’au moins 2,5 % par rapport à celui d’avant la séparation. Celles qui se remettent en couple au bout de deux ans bénéficient d’un gain médian de 5 % à 6 %.

Or, 40 % des parents des familles devenues monoparentales en 2011 vivent de nouveau en couple dans les quatre ans qui suivent la rupture (figure 5). Les remises en couple sont rapides : la moitié d’entre elles se produisent un an après la séparation, le quart d’entre elles deux ans après la rupture. Former une nouvelle union est plus fréquent après la rupture d’une union libre qu’après un divorce. Ainsi, 45 % des individus initialement en union libre ont formé une nouvelle union dans les quatre années qui ont suivi la rupture, contre 36 % des individus divorcés.

Les remises en couple concernent un peu plus les hommes que les femmes : 44 % des hommes séparés en 2011 et résidant au moins une partie du temps avec leurs enfants se remettent en couple au cours de l’une des quatre années suivantes, contre 39 % seulement des mères (encadré).

Figure 5 - Remises en couple des mères et pères de familles monoparentales selon le type d'union rompue en 2011

en %
Figure 5 - Remises en couple des mères et pères de familles monoparentales selon le type d'union rompue en 2011 (en %) - Lecture : 15 % des pères de familles devenues monoparentales en 2011 après un divorce étaient de nouveau en couple en 2012, soit un an après la séparation.
Année de remise en couple
2012 2013 2014 2015 Ensemble
Ensemble 18 10 7 5 40
Mariage rompu 15 9 7 5 36
Union libre rompue 21 11 8 5 45
Mères 17 10 7 5 39
Mariage rompu 15 9 7 4 35
Union libre rompue 18 11 8 5 42
Pères 20 10 8 6 44
Mariage rompu 15 10 7 6 38
Union libre rompue 26 10 9 5 50
  • Lecture : 15 % des pères de familles devenues monoparentales en 2011 après un divorce étaient de nouveau en couple en 2012, soit un an après la séparation.
  • Champ : France métropolitaine, personnes en couple en 2010, qui ne vivent pas en couple en 2011 et déclarent au moins un enfant mineur au domicile en 2011.
  • Source : Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-CCMSA, échantillon démographique permanent 2016.

Encadré - Une remise en couple plus fréquente pour les parents de familles monoparentales les plus jeunes

Comprendre les remises en couple est une étape importante pour mieux appréhender les variations de niveau de vie des familles monoparentales dans les années qui suivent la séparation.

Les parents qui se remettent en couple sont souvent plus jeunes que ceux qui ne forment pas de nouvelle union. Les mères ayant formé une nouvelle union dans les quatre années qui suivent la rupture avaient en moyenne 35 ans en 2011, contre 38 ans pour celles qui sont restées à la tête de familles monoparentales. De même, les hommes qui vivent de nouveau en couple avaient 37 ans en moyenne, contre 41 ans pour ceux restés seuls avec leurs enfants.

Dans près de 73 % des cas, les remises en couple se traduisent en 2015 par une union libre plutôt que par un Pacs (17 % des cas) ou un mariage (10 % des cas). La prédominance des unions libres reflète à la fois le fait que les secondes unions sont moins souvent contractualisées que les premières [Ouvrir dans un nouvel ongletCostemalle, 2019] et que la remise en couple est observée ici dans un délai assez court, dans les quatre années suivant la séparation. Une partie des nouvelles unions seront contractualisées ultérieurement.

Afin de mieux étudier les déterminants des remises en couple, on met en œuvre une régression logistique expliquant la probabilité de remise en couple des individus séparés et vivant au moins une partie du temps avec leurs enfants. On choisit d’expliquer cette probabilité à l’horizon d’un an après la rupture (figure), du fait que 50 % des remises en couple observées se produisent à cette date. Les résultats sont semblables lorsqu’on considère d’autres horizons ou l’ensemble des remises en couple intervenues au bout de quatre ans.

« Toutes choses égales par ailleurs », l’âge des pères séparés agit négativement sur la propension à former de nouvelles unions : chaque année supplémentaire se traduit ainsi par une baisse de 0,5 % environ de la probabilité de se remettre en couple plutôt que de rester séparé. Le nombre d’enfants dans le ménage ne pèse pas significativement sur la probabilité de se remettre en couple au bout d’un an pour les pères, mais le fait d’avoir des enfants en résidence alternée plutôt qu’en résidence exclusive est associé à des chances plus faibles de remise en couple.

Contrairement aux pères, les mères de familles monoparentales se remettent moins souvent en couple lorsqu’elles ont plusieurs enfants plutôt qu’un seul, et forment plus souvent une nouvelle union lorsqu’elles ont des enfants en résidence alternée plutôt qu’en garde exclusive. Une différence notable entre les pères et les mères de familles monoparentales est la propension à se remettre en couple des plus qualifiés d’entre eux : en effet, si, « toutes choses égales par ailleurs », les hommes cadres sont parmi ceux, avec les artisans-commerçants, qui ont les probabilités les plus importantes de reformer une union, ce n’est pas du tout le cas, au contraire, des femmes cadres. Si les non-diplômés ont une plus faible probabilité de se remettre en couple, aussi bien pour les femmes que pour les hommes, l’effet du diplôme sur les remises en couple n’est pas pour autant linéaire. S’agissant des hommes, la probabilité de se remettre en couple est maximale pour les titulaires au plus du baccalauréat général, technologique ou professionnel, et minimale pour les non-diplômés.

Influence de certains facteurs sur la probabilité de remise en couple un an après la séparation (odds ratios)

Influence de certains facteurs sur la probabilité de remise en couple un an après la séparation (odds ratios) - Lecture : toutes choses égales par ailleurs, le risque relatif (odds ratio) d’avoir formé une nouvelle union un an après la séparation est de 0,889 pour les mères cadres quand il est de 1 pour les mères employées (situation de référence) : le risque est donc de 11 % inférieur pour les cadres que pour les employées.
Mères Pères
Âge 1,013 0,953 ***
Âge au carré 0,999 *** 1,000
Diplôme
Sans diplôme 0,782 ** 0,737 ***
CAP, BEP ou moins Réf. Réf.
Baccalauréat ou équivalent 0,931 *** 1,133 ***
Diplôme du supérieur 0,860 *** 0,995
Catégorie socioprofessionnelle
Agriculteur 0,818 0,983 ***
Artisan ou commerçant 1,067 1,703 ***
Cadre 0,889 *** 1,248 ***
Profession intermédiaires 0,974 1,148 ***
Employé Réf. Réf.
Ouvrier 1,117 *** 1,157 ***
Autres 1,064 0,818 **
Nombre d'enfants mineurs
1 Réf. Réf.
2 0,981 1,000
3 ou plus 0,815 *** 0,967
Enfants en résidence alternée
Aucun Réf. Réf.
Au moins un 1,288 *** 0,682 ***
  • Réf. : situation de référence ; *** significatif au seuil de 0,1 % ; ** significatif au seuil de 1 %; * significatif au seuil de 5 %.
  • Lecture : toutes choses égales par ailleurs, le risque relatif (odds ratio) d’avoir formé une nouvelle union un an après la séparation est de 0,889 pour les mères cadres quand il est de 1 pour les mères employées (situation de référence) : le risque est donc de 11 % inférieur pour les cadres que pour les employées.
  • Champ : France métropolitaine, personnes en couple en 2010, qui ne vivent pas en couple en 2011 et déclarent au moins un enfant mineur au domicile en 2011.
  • Source : Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-CCMSA, échantillon démographique permanent 2016.

22 % des familles dont le niveau de vie est supérieur au seuil de pauvreté en 2010 basculent dans la pauvreté en 2011, l’année de la séparation

En 2010, l’année précédant leur séparation, 14 % des parents des familles devenues monoparentales en 2011 avaient un niveau de vie inférieur au , une proportion semblable à celle de l’ensemble des Français. En 2011, l’année de leur séparation, ils sont 30 % dans ce cas (figure 6).

Les séparations affectent les niveaux de vie des familles, y compris de celles dont le niveau de vie est supérieur au seuil de pauvreté avant la séparation. Ainsi, 22 % des familles dont le niveau de vie était supérieur au seuil de pauvreté ont basculé dans la pauvreté en 2011 à la suite de la séparation. Mais ce basculement n’est pas nécessairement durable. En effet, 45 % des familles dont le niveau de vie est passé sous le seuil de pauvreté ne sont plus pauvres un an après la séparation. Au bout de quatre ans, toutes ces familles n’ont toutefois pas réussi à sortir de la pauvreté et il reste encore 13 % des familles ayant basculé dans la pauvreté après la séparation qui ont un niveau de vie inférieur au seuil de pauvreté. Inversement, 30 % des parents qui étaient pauvres en 2010, et qui se sont retrouvés parents isolés en 2011, à la suite de la rupture de leur union, ne sont plus pauvres en 2011.

À titre de comparaison, 9 % des familles restées en couple tout au long de la période 2010-2015 sont pauvres en 2010. Parmi ces familles qui n’ont subi aucune séparation entre 2010 et 2015, 2 % de celles qui ont un niveau de vie supérieur au seuil de pauvreté en 2010 basculent sous le seuil de pauvreté en 2011, soit environ dix fois moins que les familles devenues monoparentales en 2011. À l’inverse, 30 % de celles qui sont pauvres en 2010 ne le sont plus en 2011, la même proportion que pour les familles devenues monoparentales en 2011.

De manière générale, chaque année entre 2012 et 2015, environ un tiers des familles devenues monoparentales en 2011 et vivant sous le seuil de pauvreté une année donnée sortent de la pauvreté l’année suivante. Ces sorties de la pauvreté s’expliquent par deux facteurs. D’abord, les revenus individuels des adultes des familles monoparentales qui sortent de la pauvreté augmentent sensiblement d’une année sur l’autre. Ainsi, ceux-ci ont augmenté en médiane de 16 % pour la cohorte des familles sorties de la pauvreté en 2012. Ensuite, une partie des sorties de la pauvreté sont liées à des remises en couple, que celles-ci aient lieu l’année de la sortie de la pauvreté ou les années précédant cette sortie. Ainsi, les sorties de la pauvreté une année après la rupture sont associées à une remise en couple la même année dans 25 % des cas. Pour les familles qui sortent de la pauvreté quatre ans après la rupture, une remise en couple est intervenue dans 38 % des cas l’année même de la sortie de la pauvreté ou une année précédente.

Figure 6 - Caractéristiques des familles devenues monoparentales en 2011 après une séparation selon qu'elles sont pauvres ou non en 2010 et 2011

en %
Figure 6 - Caractéristiques des familles devenues monoparentales en 2011 après une séparation selon qu'elles sont pauvres ou non en 2010 et 2011 (en %) - Lecture : parmi les adultes des familles devenues monoparentales en 2011 après une séparation et ayant un niveau de vie inférieur au seuil de pauvreté (60 % du niveau de vie médian) en 2011, 21 % sont sans diplôme.
Pauvres en 2010 Non pauvres en 2010 Ensemble
Pauvres en 2011 Non pauvres en 2011 Pauvres en 2011 Non pauvres en 2011 Pauvres en 2011 Non pauvres en 2011
Répartition au sein de l'ensemble 10 4 19 67 30 70
Répartition au sein de chaque catégorie, pauvres et non pauvres en 2010 70 30 22 78
Âge moyen (en années) 37 37 37 38 37 38
Type d'union avant la séparation
Mariage 43 49 52 52 48 52
Pacs 2 4 4 8 3 7
Union libre 55 47 44 40 49 41
Diplôme
Sans diplôme 30 19 17 5 21 6
CAP, BEP ou moins 45 43 50 30 49 31
Baccalauréat ou équivalent 17 20 18 25 18 25
Diplôme du supérieur 8 18 15 40 12 38
Catégorie sociale
Agriculteur 2 3 1 1 1 1
Artisan ou commerçant 6 8 7 5 7 5
Cadre 2 5 2 16 2 15
Profession intermédiaire 9 15 14 31 13 30
Employé 35 29 41 28 39 29
Ouvrier 23 28 22 17 22 17
Autres 23 12 13 2 16 3
Nombre d'enfants mineurs
1 41 56 44 55 43 55
2 33 31 37 36 35 36
3 ou plus 26 13 19 9 22 9
  • Lecture : parmi les adultes des familles devenues monoparentales en 2011 après une séparation et ayant un niveau de vie inférieur au seuil de pauvreté (60 % du niveau de vie médian) en 2011, 21 % sont sans diplôme.
  • Champ : France métropolitaine, personnes en couple en 2010, qui ne vivent pas en couple en 2011 et déclarent au moins un enfant mineur au domicile en 2011.
  • Source : Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-CCMSA, échantillon démographique permanent 2016.

Les parents de familles monoparentales qui basculent dans la pauvreté disposaient souvent de faibles ressources avant la séparation

Avant la séparation, la distribution des niveaux de vie des familles qui basculent l’année suivante dans la pauvreté se concentre entre le seuil de pauvreté et le niveau de vie médian des Français. Ainsi, 83 % de ces familles avaient un niveau de vie inférieur au niveau de vie médian l’année qui précède la séparation. Les revenus individuels des adultes se retrouvant seuls avec leurs enfants après la séparation étaient également relativement faibles : 14 % d’entre eux ne disposaient d’aucun revenu individuel et 89 % d’entre eux percevaient des revenus inférieurs au salaire net médian des Français en 2010 (environ 1 700 euros nets par mois).

Les unions contractuelles étaient un peu moins fréquentes parmi les familles monoparentales qui basculent dans la pauvreté que dans celles dont les niveaux de vie demeurent au-dessus du seuil de pauvreté après la séparation. Ainsi, 56 % des nouvelles familles monoparentales pauvres étaient initialement mariées ou pacsées, contre 60 % pour celles qui ne basculent pas dans la pauvreté après une séparation. Ces nouvelles familles pauvres sont surtout moins diplômées que les autres, 85 % des adultes de ces familles ayant un diplôme inférieur ou équivalent au baccalauréat, contre 60 % seulement des adultes dont le niveau de vie demeure supérieur au seuil de pauvreté après la séparation. De même, seuls 2 % des adultes des familles qui basculent dans la pauvreté sont cadres, contre 16 % pour les familles dont le niveau de vie ne bascule pas sous ce seuil. En revanche, 63 % des adultes de ces familles appartiennent aux catégories socioprofessionnelles des employés et des ouvriers, contre 45 % seulement pour les familles dont les niveaux de vie sont supérieurs au seuil de pauvreté en 2011 comme en 2010. Enfin, les familles nombreuses sont surreprésentées parmi celles qui deviennent pauvres : 19 % d’entre elles comprennent trois enfants ou plus, contre 9 % seulement pour les autres familles.

La probabilité de disposer d’un niveau de vie inférieur au seuil de pauvreté après une séparation, alors que ce n’était pas le cas juste auparavant, dépend de nombreux facteurs. Les montrent que, pour les pères comme pour les mères, appartenir à la catégorie socioprofessionnelle des cadres ou être titulaire d’un diplôme de l’enseignement supérieur sont associés à un risque bien plus réduit de basculer dans la pauvreté à la suite d’une rupture conjugale : il est divisé par deux pour les mères cadres par rapport aux mères employées et baisse d’un quart pour les pères cadres par rapport aux pères employés ; le risque de basculer sous le seuil de pauvreté est respectivement réduit de 59 % et de 24 % pour les mères et pères diplômés de l’enseignement supérieur par rapport aux titulaires d’un BEP, d’un CAP ou d’un diplôme moins élevé (figure 7). Avoir des ressources propres pendant la vie en couple réduit fortement le risque de pauvreté des parents après la séparation, ce qui explique que l’évolution des niveaux de vie après séparation soit plus défavorable aux mères qu'aux pères : une part importante des mères n’avaient pas de revenus du travail quand elles vivaient en couple et se retrouvent en difficulté après la séparation [Bonnet et al., 2015].

Figure 7 - Influence de certains facteurs sur la probabilité de basculer dans la pauvreté après la séparation en 2011 (odds ratios)

Figure 7 - Influence de certains facteurs sur la probabilité de basculer dans la pauvreté après la séparation en 2011 (odds ratios) - Lecture : « toutes choses égales par ailleurs », le risque relatif (odds ratio) de tomber dans la pauvreté pour les mères de familles devenues monoparentales en 2011 et qui n'étaient pas pauvres en 2010 lorsqu'elles vivaient encore en couple est de 0,511 pour les femmes cadres quand il est de 1 pour les employées (situation de référence) : le risque de tomber dans la pauvreté est donc deux fois moindre pour les mères cadres que pour les mères employées.
Mères Pères
Âge 1,056 *** 1,081 ***
Âge au carré 1,000 * 1,000 ***
Revenus individuels en 2010
1er quartile Réf. Réf.
2e quartile 0,265 *** 0,337 ***
3e quartile 0,054 *** 0,110 ***
4e quartile 0,025 *** 0,014 ***
Diplôme
Sans diplôme 1,167 *** 1,525 ***
CAP, BEP ou moins Réf. Réf.
Baccalauréat ou équivalent 0,480 *** 0,711 ***
Diplôme du supérieur 0,406 *** 0,757 ***
Catégorie socioprofessionnelle
Agriculteur 9,571 *** 0,737 **
Artisan ou commerçant 2,150 *** 1,880 ***
Cadre 0,511 *** 0,736 ***
Profession intermédiaire 0,976 0,857 ***
Employé Réf. Réf.
Ouvrier 0,873 *** 1,144 ***
Autres 1,187 *** 4,400 ***
Nombre d'enfants mineurs
1 Réf. Réf.
2 1,343 *** 2,157 ***
3 ou plus 1,785 *** 6,750 ***
Enfants en résidence alternée
Aucun Réf. Réf.
Au moins un 0,389 *** 0,238 ***
  • Réf. situation de référence ; *** significatif au seuil de 0,1 % ; ** significatif au seuil de 1 % ; * significatif au seuil de 5 %.
  • Lecture : « toutes choses égales par ailleurs », le risque relatif (odds ratio) de tomber dans la pauvreté pour les mères de familles devenues monoparentales en 2011 et qui n'étaient pas pauvres en 2010 lorsqu'elles vivaient encore en couple est de 0,511 pour les femmes cadres quand il est de 1 pour les employées (situation de référence) : le risque de tomber dans la pauvreté est donc deux fois moindre pour les mères cadres que pour les mères employées.
  • Champ : France métropolitaine, personnes en couple en 2010, qui n'étaient pas pauvres en 2010, et qui en 2011 ne vivent pas en couple et déclarent au moins un enfant mineur au domicile.
  • Source : Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-CCMSA, échantillon démographique permanent 2016.

À l'inverse, le risque de voir son niveau de vie passer sous le seuil de pauvreté à la suite d’une rupture augmente avec l’âge. Parmi les facteurs augmentant le risque de basculer dans la pauvreté, le nombre d’enfants à charge est le plus discriminant : avoir deux enfants à charge augmente de 34 % le risque des mères de tomber dans la pauvreté par rapport aux mères qui n’ont la charge que d’un seul enfant ; le fait de vivre avec trois enfants ou plus augmente, quant à lui, ce risque de 79 %. L’effet est encore plus marqué pour les pères des familles monoparentales : avoir deux enfants à charge multiplie par deux leur risque de tomber dans la pauvreté par rapport à ceux n’ayant la garde que d’un seul enfant. Lorsque les enfants sont en résidence alternée plutôt qu’à la charge exclusive du parent en famille monoparentale, le risque à . De manière générale, la pauvreté est limitée pour l’ensemble des enfants alternant en familles monoparentales, alors qu’elle est forte globalement au sein de l'ensemble des familles monoparentales : seuls 12 % des enfants en résidence alternée en 2016 vivaient dans des ménages pauvres, contre 39 % de l’ensemble des enfants en familles monoparentales [Algava et al., 2019].

Définitions

Une famille monoparentale est, dans ce dossier, constituée par un père ou une mère qui ne vit pas en couple et réside avec des enfants mineurs, qu’ils soient à sa charge exclusive ou en résidence alternée. Les parents séparés qui ont un droit de visite et d'hébergement (dont les enfants résident de façon exclusive chez leur autre parent) ne constituent pas une famille monoparentale au sens de cette définition et n'entrent donc pas dans le champ de l'étude. On s’intéresse dans ce dossier aux familles devenues monoparentales après la rupture d’une union.

La médiane partage la population en deux parts égales. Pour la moitié des parents de familles monoparentales, l’évolution de leur niveau de vie est supérieure à la médiane des évolutions des niveaux de vie, pour l’autre moitié elle est inférieure à la médiane.

Le niveau de vie est défini comme le revenu disponible du ménage rapporté au nombre d’unités de consommation (UC). Le revenu disponible est constitué des revenus individuels déclarés, des revenus non individualisés (pensions alimentaires perçues ou versées par exemple) et des prestations sociales, desquels sont déduits l’impôt sur le revenu et la taxe d’habitation. Les unités de consommation du ménage sont calculées selon l’échelle dite de « l’OCDE modifiée » qui attribue une unité de consommation au premier adulte du ménage, 0,5 unité aux autres personnes de 14 ans ou plus et 0,3 unité aux enfants de moins de 14 ans. Le nombre d’UC est ici calculé à partir des informations sur les personnes déclarant des revenus et sur les personnes fiscalement rattachées à ces déclarations. Par convention avec les sources fiscales, le nombre d’UC est divisé par deux pour les enfants en garde alternée. Le niveau de vie est le même pour toutes les personnes d’un même ménage. Il est exprimé en euros 2015.

Les revenus individuels correspondent aux revenus d’activité (salaires perçus, bénéfices industriels et commerciaux, bénéfices non commerciaux, bénéfices agricoles), aux allocations chômage et aux pensions de retraite. Ce sont les revenus nets imposables déclarés aux impôts. Les pensions alimentaires qui visent à compenser partiellement des dépenses pour les enfants ne font pas partie des revenus individuels (mais sont prises en compte dans le niveau de vie). Ces revenus sont exprimés en euros 2015.

Le seuil de pauvreté est égal à 60 % du niveau de vie médian de l’ensemble des individus. Les personnes pauvres sont celles dont le niveau de vie est inférieur à ce seuil.

Sources

L’échantillon démographique permanent (EDP) est un panel créé par l’Insee en 1967 autour d’un échantillon d’individus, dits « individus EDP », qui concerne actuellement 4 % de la population française. Il comprend en particulier des données socio-démographiques issues des recensements puis, depuis 2004, des enquêtes annuelles de recensement (EAR, qui interrogent chaque année environ 14 % de la population), ainsi que des données socio-fiscales issues des déclarations annuelles de revenus des individus depuis 2011 (revenus de 2010) et de la taxe d’habitation.

Les données socio-fiscales fournissent de 2010 à 2015 des informations relatives aux revenus et au niveau de vie des individus EDP, ainsi que de l’ensemble des personnes fiscalement rattachées à leur logement. L’EDP permet ainsi de suivre sur plusieurs années l’évolution des revenus et du niveau de vie d’un échantillon de familles qui deviennent monoparentales entre 2011 et 2015.

Les EAR ne couvrent qu’une partie de la population chaque année. Ainsi les caractéristiques socio-démographiques (autres que celles présentes dans les données fiscales, c’est-à-dire l’âge, le type d’union et le niveau de vie) ne sont pas toujours disponibles. Cependant, il a été possible de retrouver un diplôme et une catégorie socio­professionnelle pour près de 80 % des individus EDP qui ont formé une famille monoparentale en 2011. L’information retenue est alors la dernière connue dans les enquêtes annuelles de recensement.

Comment repérer et suivre les familles monoparentales dans l’EDP ?

L’étude s’intéresse aux individus EDP qui vivent en couple en 2010 (mariés, pacsés ou en union libre) et déclarent au moins un enfant mineur vivant avec eux, puis qui, en 2011, sont séparés et continuent de vivre avec au moins un enfant mineur, que cet enfant soit à leur charge exclusive ou en résidence alternée. Cette cohorte d’individus est suivie jusqu’en 2015, soit durant les quatre années suivant la séparation. L’étude retient les séparations comme seul mode d’entrée dans la monoparentalité, ce qui exclut les personnes veuves, ainsi que les personnes seules qui ont un enfant sans avoir vécu en couple.

Avec l’imposition commune des couples mariés et pacsés, la source fiscale permet d’identifier facilement les individus EDP qui ont été mariés ou pacsés avant de se séparer. L’identification des individus en union libre, qui restent « célibataires » dans les déclarations fiscales, passe en revanche par une évaluation statistique du type de famille menée à partir des données fiscales. Cette estimation converge particulièrement bien avec les données des enquêtes annuelles de recensement sur le champ des familles où vivent au moins un enfant mineur, qui correspond au champ du présent dossier.

Concepts statistiques et méthode retenue

Ce dossier s’arrête à la cohorte des familles devenues monoparentales en 2011, car elle est celle dont l’EDP permet d’observer l’évolution des niveaux de vie et les comportements de remise en couple le plus longtemps possible après les ruptures. Cependant, les résultats établis pour cette cohorte sont valables sur la période observable pour les familles devenues monoparentales entre 2012 et 2015.

Bien que l’étude s’intéresse à toutes les formes d’union (mariage, Pacs et union libre), les effectifs de familles monoparentales issues de ruptures de Pacs sont faibles, si bien que les évolutions de niveaux de vie de ces familles ne sont pas robustes et ne peuvent être présentées.

Les niveaux de vie sont calculés d’après les données issues des fichiers fiscaux et sociaux, qui se basent sur la situation conjugale et familiale des individus au 31 décembre de l’année des revenus déclarés. Ils ne tiennent donc pas compte du fait que la rupture a pu intervenir en début d’année (auquel cas, le niveau de vie disponible dans l’EDP reflète fidèlement le niveau de vie réel de la famille monoparentale) ou en fin d’année (ne sont alors comptés que les revenus de l’année et les unités de consommation de la famille monoparentale sans tenir compte des revenus du conjoint qui ont pu modifier le niveau de vie de la famille pendant une partie significative de l’année). Il en est de même, à l’inverse, dans les cas de remise en couple au cours des quatre années qui suivent la rupture. Pour la même raison, l’approche retenue ne permet pas de conserver dans le champ de ce dossier les familles devenues monoparentales une année donnée (par exemple en début d’année), mais qui en sont sorties la même année (par exemple en fin d’année).

La résidence alternée est repérée dans les déclarations fiscales (case spécifique à cocher), car donnant droit à la moitié des parts fiscales afférentes aux enfants concernés.

Enfin, l’indicateur statistique privilégié dans l’étude est la médiane (et non la moyenne), car celle-ci est la grandeur statistique la plus robuste aux observations extrêmes qui peuvent perturber l’analyse des moyennes et est, de ce fait, l’indicateur le plus souvent utilisé dans les études relatives aux évolutions des revenus et des niveaux de vie.

Algava É., Penant S., Yankan L., « En 2016, 400 000 enfants alternent entre les deux domiciles de leurs parents séparés », Insee Première n° 1728, janvier 2019.

Bonnet C., Garbinti B., Solaz A., "Gender inequality after divorce: the flip side of marital specialization, evidence from a French administrative database", Document de travail n° G2016/03, Insee, mars 2016.

Bonnet C., Garbinti B., Solaz A., « Les variations de niveau de vie des hommes et des femmes à la suite d’un divorce ou d’une rupture de Pacs », in Couples et familles, coll. « Insee Références », édition 2015.

Costemalle V., « Ouvrir dans un nouvel ongletVivre en couple pour la deuxième fois », in Population n° 74(1), Ined, 2019.

Costemalle V., « Formations et ruptures d’unions : quelles sont les spécificités des unions libres ? », in France, portrait social, coll. « Insee Références », édition 2017.

Costemalle V., « Parcours conjugaux et familiaux des hommes et des femmes selon les générations et les milieux sociaux », in Couples et familles, coll. « Insee Références », édition 2015.

Cretin L., « Résidence et pension alimentaire des enfants de parents séparés : décisions initiales et évolutions », in Couples et familles, coll. « Insee Références », édition 2015.

Daguet F., « Des ménages toujours plus nombreux, toujours plus petits », Insee Première n° 1663, août 2017.

Insee, « Structure des familles avec enfants mineurs en 2016 : données annuelles de 1990 à 2016 », Chiffres-clés, juin 2019.

Insee, Les revenus et le patrimoine des ménages , coll. « Insee Références », édition 2018.

88 % des pères de familles monoparentales séparés en 2011 travaillaient en 2010. Dans ce dossier, on considère qu’une personne travaille dès lors qu’elle perçoit des revenus individuels annuels supérieurs à un Smic mensuel et qu’elle ne travaille pas si ses revenus sont inférieurs à ce seuil.

Les résultats d’une telle analyse tentent de contrôler les effets d’un maximum de variables sur la probabilité de basculer sous le seuil de pauvreté après une séparation (revenu individuel, catégorie socioprofessionnelle, diplôme, âge, nombre d’enfants), mais ne peuvent tenir compte de variables inobservables qui pourraient avoir un effet sur cette probabilité.

Ce résultat se vérifie notamment à niveaux de revenus individuels avant séparation et catégories socioprofessionnelles égaux. D’autres caractéristiques, inobservables dans les données à disposition, peuvent toutefois aussi avoir un lien à la fois avec la situation de résidence alternée des enfants et le risque de pauvreté. Le mode de calcul des UC en cas de résidence alternée peut également avoir une influence sur ce résultat.

88 % des pères de familles monoparentales séparés en 2011 travaillaient en 2010. Dans ce dossier, on considère qu’une personne travaille dès lors qu’elle perçoit des revenus individuels annuels supérieurs à un Smic mensuel et qu’elle ne travaille pas si ses revenus sont inférieurs à ce seuil.

Les résultats d’une telle analyse tentent de contrôler les effets d’un maximum de variables sur la probabilité de basculer sous le seuil de pauvreté après une séparation (revenu individuel, catégorie socioprofessionnelle, diplôme, âge, nombre d’enfants), mais ne peuvent tenir compte de variables inobservables qui pourraient avoir un effet sur cette probabilité.

Ce résultat se vérifie notamment à niveaux de revenus individuels avant séparation et catégories socioprofessionnelles égaux. D’autres caractéristiques, inobservables dans les données à disposition, peuvent toutefois aussi avoir un lien à la fois avec la situation de résidence alternée des enfants et le risque de pauvreté. Le mode de calcul des UC en cas de résidence alternée peut également avoir une influence sur ce résultat.

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