Le 9 juillet 2024, Ariane 6 décolle pour la première fois depuis le sol guyanais (figure 1). La réussite de ce lancement inaugural permet de rétablir l’accès indépendant de l’Europe à l’espace avec un nouveau lanceur lourd. Très attendu, ce lancement fournit aussi une multitude de données aux équipes opérationnelles de l’Agence spatiale européenne, d’ArianeGroup, du Centre national d’études spatiales (Cnes) et d’Arianespace. Il réalise en effet plusieurs prouesses technologiques comme le ré-allumage du moteur Vinci (moteur du deuxième étage de la fusée) et embarque des expériences menées en vol, indépendamment de la mission de mise en orbite des satellites.

Le comportement d’Ariane 6 au cours de ce vol inaugural conforte l’Europe dans les prévisions d’utilisation du nouveau lanceur qui compte déjà un important carnet de commandes (près de 30 lancements). Ariane 6 ambitionne d’emporter des charges utiles lourdes mais aussi des constellations de satellites.

Cette année souligne aussi le retour de la fusée Vega-C. Lors de son dernier décollage, en septembre, Vega place en orbite le satellite d’observation de la Terre Sentinel-2C puis cède sa place à la nouvelle génération Vega-C. Le lanceur léger européen réussit ainsi en décembre son retour en vol, depuis son échec de 2022. Il embarque à son bord : Sentinel-1C, issu du même programme Copernicus de l’Union européenne.

Finalement, en 2024, comme en 2023, seuls trois lancements ont été effectués depuis le Centre Spatial Guyanais de Kourou. Ces deux années marquent un creux dans l'activité spatiale en Guyane, lié à plusieurs facteurs. Il s’agit tout d’abord d’années charnières, situées entre la fin du programme Ariane 5 et les préparatifs pour la montée en puissance d’Ariane 6. Elles correspondent également à l’arrêt de la coopération européenne sur le programme Soyouz. Enfin, cette période voit le redémarrage progressif de Vega-C (figure 2).

En parallèle des lancements, le Centre spatial guyanais (CSG) poursuit ses travaux de modernisation et prépare son futur pour accueillir de nouveaux opérateurs.

Le Centre des opérations, dont le chantier démarre en 2024, transforme progressivement le CSG en une base plus flexible, avec des véhicules et des opérateurs multiples. C’est dans ce bâtiment, dont la livraison est prévue pour septembre 2026, que seront attendues les équipes opérationnelles en charge de la coordination des lancements.

Mis en sommeil depuis l’arrêt des activités en mars 2022, l’Ensemble de Lancement Soyouz (ELS) est rétrocédé à la France en 2024. Ce pas de tir est réaffecté à la start-up Maiaspace, retenue parmi celles ayant répondu à l’Appel à Manifestation d’Intérêt (AMI) lancé par le Cnes. Le premier lancement est prévu en 2027.

L’ancien pas de tir de Diamant poursuit sa transformation pour accueillir le démonstrateur de technologie réutilisable Callisto, ainsi que les zones de lancement des futurs mini-micro lanceurs. Le premier des chantiers de neutralité carbone sort de terre avec le champ photovoltaïque PV2. Il marque une étape importante dans ce programme d’investissement avec pour objectif de « décarboner » aussi bien la consommation énergétique du CSG que la production des carburants pour les lanceurs.

Par ses activités de lancement et la visite de ses installations, le CSG continue de jouer un rôle moteur dans le secteur du tourisme en Guyane. En 2024, l’activité touristique au CSG connaît une forte augmentation avec l’ouverture de Guyaspace Expérience, ancien Musée de l’Espace (figure 3).

Ce nouveau centre d’interprétation du CSG, cofinancé par l’Union européenne, l’Agence Spatiale Européenne et le Cnes, invite ses visiteurs dans les coulisses de la base spatiale sous une forme immersive. Ouvert en juillet et inauguré en octobre, Guyaspace Expérience accueille près de 14 000 visiteurs, en à peine six mois d’exploitation.

Accompagner l’éducation reste un engagement fort du Cnes. Le dispositif d’attribution des bourses fête son 40ᵉ anniversaire. Ainsi depuis 1984, le Cnes a financé en Guyane 203 dotations d’excellence, 89 dotations d’études et 34 dotations d’apprentissage, ces dernières ayant été introduites à partir de 2018. En 2024, 25 post-bacheliers de Guyane bénéficient de ces dotations boursières.

Dans le cadre de la semaine découverte des entreprises, 17 collégiens sont accueillis à Kourou dans les différents services et sites avant d’échanger en visioconférence multi site avec d’autres élèves présents dans les centres du Cnes à Paris et à Toulouse.

Durant l’année, la base spatiale accueille également 25 étudiants, majoritairement des Bac+5 en stage de fin d’études issus pour la plupart d’écoles d’ingénieurs.

Le Cnes continue d’apporter son expertise au travers du Fablab Station K à Kourou, qui accueille une nouvelle gouvernance en 2024.

Outre ses initiatives pédagogiques, le Cnes poursuit également son engagement financier vis-à-vis du territoire en signant plusieurs conventions avec des acteurs régionaux de vulgarisation scientifique : pour la jeunesse en particulier avec le Centre de culture scientifique, technique et industrielle (CCSTI) ou Canopée des Sciences, avec l’association Guyane Astronomie et le Club scientifique de Guyane, pour l’organisation du concours Act’In Space et l’accompagnement de porteurs de projets numériques (Guyane Développement Innovation), enfin pour les actions de coordination de l’ensemble des Maisons Familiales Rurales (MFR) de Guyane.