Les entreprises en France Espace thématique

Une vue structurelle complète du système productif en France

Insee Références
Paru le :Paru le06/02/2025
Raphaël Lafrogne-Joussier (Insee), Lionel Fontagné (Banque de France), Gabriel Baratte (École des Ponts)
Les entreprises en France- Février 2025
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Entre 2018 et 2020, les entreprises relocalisent plutôt des activités peu qualifiées, et délocalisent des activités qualifiées

Raphaël Lafrogne-Joussier (Insee), Lionel Fontagné (Banque de France), Gabriel Baratte (École des Ponts)

Entre janvier 2018 et décembre 2020, 2,8 % des entreprises de plus de 50 employés en France ont réorganisé une partie de leur chaîne de valeur : 1,7 % ont délocalisé au moins une activité et 1,2 % ont relocalisé.

L’entreprise type qui réorganise sa chaîne de valeur mondiale est une multinationale de l’industrie manufacturière, qui emploie beaucoup de travail qualifié. Les activités délocalisées tendent à être intensives en travail qualifié, contrairement aux activités relocalisées, intensives en travail peu qualifié.

Lorsqu’une entreprise délocalise, plus elle est productive, plus elle privilégie la sous-traitance ; toutefois, si ses activités sont intensives en capital incorporel, riches en savoir-faire, elle les transfère dans des filiales à l’étranger.

Les délocalisations se dirigent principalement vers les pays européens, et pour les activités intensives en travail qualifié, vers l’Inde.

2,8 % des entreprises ont réorganisé leur chaîne de valeur mondiale entre 2018 et 2020

Les peuvent décider de réorganiser leurs chaînes de production quand elles font face à des catastrophes naturelles, à une évolution des coûts de production ou à des tensions sur les chaînes d’approvisionnement. Lorsque ces réorganisations ont une dimension internationale, on dit que c’est la des entreprises qui s’adapte, à travers des et des . Identifier ces réorganisations demande de bien mesurer les centres de décision des entreprises (sources). Sur la période de janvier 2018 à décembre 2020, ces événements restent rares : 2,8 % des entreprises de plus de 50 employés en France ont réorganisé leur chaîne de valeur mondiale : 1,7 % ont délocalisé tout ou partie d’une activité, 1,2 % ont relocalisé, et parmi elles, 0,1 % ont à la fois délocalisé et relocalisé (figure 1). Il est encore trop tôt pour mesurer si ce mouvement s’est accéléré depuis la crise sanitaire, même si des exemples existent. Ainsi, au printemps 2024, Yamaha a inauguré dans les Hauts‑de‑France une nouvelle chaîne d’assemblage de moteurs électriques pour vélo, auparavant fabriqués au Japon ; à l’inverse, Stellantis prévoit de délocaliser un atelier d’outillage à l’automne 2024.

Figure 1 − Part des entreprises ayant délocalisé ou relocalisé entre janvier 2018 et décembre 2020

en %
Figure 1 − Part des entreprises ayant délocalisé ou relocalisé entre janvier 2018 et décembre 2020 (en %) - Lecture : En moyenne, 1,7 % des entreprises ont délocalisé au moins une activité entre janvier 2018 et décembre 2020.
Type de réorganisation déclaré Part
Délocalisation (pas de relocalisation) 1,6
Relocalisation (pas de délocalisation) 1,1
Les deux (délocalisation et relocalisation) 0,1
Ensemble des réorganisations 2,8
  • Note : La part d’entreprises qui réorganisent leur chaîne de valeur mondiale est pondérée par le poids de l’enquête.
  • Lecture : En moyenne, 1,7 % des entreprises ont délocalisé au moins une activité entre janvier 2018 et décembre 2020.
  • Champ : Entreprises de l’enquête Chaînes d’activité mondiales 2020, hors secteur de la construction, ayant un chiffre d’affaires, une valeur ajoutée, et un nombre d’employés positifs en 2017.
  • Source : Insee, enquête Chaînes d’activité mondiales 2020.

Figure 1 − Part des entreprises ayant délocalisé ou relocalisé entre janvier 2018 et décembre 2020

  • Note : La part d’entreprises qui réorganisent leur chaîne de valeur mondiale est pondérée par le poids de l’enquête.
  • Lecture : En moyenne, 1,7 % des entreprises ont délocalisé au moins une activité entre janvier 2018 et décembre 2020.
  • Champ : Entreprises de l’enquête Chaînes d’activité mondiales 2020, hors secteur de la construction, ayant un chiffre d’affaires, une valeur ajoutée, et un nombre d’employés positifs en 2017.
  • Source : Insee, enquête Chaînes d’activité mondiales 2020.

Les multinationales et les entreprises intensives en travail qualifié se réorganisent davantage

Les entreprises présentes en France ayant réorganisé leur chaîne de valeur (sources) entre janvier 2018 et décembre 2020 ne sont pas plus productives que les autres, mais elles emploient davantage de travailleurs qualifiés : à une part du travail qualifié plus élevée d’un point de pourcentage correspond une probabilité de réorganiser la chaîne de valeur mondiale de 1,27 point plus élevée durant la période considérée de trois ans (figure 2). Réorganiser les chaînes de valeur de l’entreprise représente en effet une charge managériale supplémentaire, qui requiert plutôt des travailleurs qualifiés. C’est d’ailleurs deux fois plus le cas pour une délocalisation que pour une relocalisation : en effet, un transfert d’activité de la France vers l’étranger, où l’entreprise maîtrise moins l’environnement, peut s’avérer plus complexe à mener qu’un transfert vers la France. Les entreprises multinationales étrangères implantées en France sont également plus enclines à se réorganiser que les entreprises implantées uniquement en France, en particulier lorsqu’il s’agit de délocalisation. Ceci peut refléter une meilleure connaissance des pays où elles délocalisent, ou une forme de coût d’entrée dans le pays déjà payé. Les entreprises de l’industrie manufacturière ont plus tendance aux réorganisations que celles des autres secteurs d’activité, ce qui pourrait suggérer que l’industrie est plus exposée à des chocs qui poussent à la réorganisation.

Figure 2 − Probabilité de réorganiser sa chaîne de valeur selon certaines caractéristiques de l’entreprise

Effet moyen sur la probabilité de réorganiser, en %
Figure 2 − Probabilité de réorganiser sa chaîne de valeur selon certaines caractéristiques de l’entreprise (Effet moyen sur la probabilité de réorganiser, en %) - Lecture : Une part de travailleurs qualifiés d’un pour cent plus élevée est associée à une probabilité de réorganiser 1,27 % plus élevée.
Caractéristiques Délocalisations Relocalisations Réorganisations
Coefficient Intervalle de confiance à 95 % Coefficient Intervalle de confiance à 95 % Coefficient Intervalle de confiance à 95 %
Productivité apparente du travail 0,00 -0,26 0,26 0,06 -0,32 0,43 -0,01 -0,22 0,21
Part des travailleurs qualifiés 1,66 0,88 2,44 0,73 -0,35 1,80 1,27 0,64 1,90
Multinationale étrangère 1,40 0,95 1,85 0,90 0,40 1,40 1,16 0,82 1,50
Multinationale française 0,90 0,46 1,35 0,60 0,11 1,08 0,76 0,43 1,09
Industrie 0,75 0,38 1,12 1,06 0,62 1,51 0,87 0,58 1,16
Observations            5 597            5 597            5 597
  • Notes : Résultats de la régression du choix de réorganiser (délocaliser, relocaliser) selon différentes caractéristiques des entreprises. L’estimation est issue d’un modèle économétrique de type logit. Le modèle compare les entreprises qui déclarent avoir réorganisé leurs chaînes de valeur mondiales à celles qui déclarent ne pas l’avoir fait et contrôle, pour le secteur d’activité de l’entreprise, la productivité par travailleur, la part de travailleurs qualifiés, le statut de multinationale et le statut d’importatrice de biens et d’importatrice de services. Les estimations reportées sont les effets marginaux moyens rapportés à la moyenne de la variable expliquée. Les coefficients s’interprètent comme l‘effet moyen, en pourcentage, sur la probabilité moyenne de réorganiser au moins une activité associée à l’augmentation, toutes choses égales par ailleurs, d’un point de la valeur ajoutée par travailleur ou de la part de travailleurs qualifiés ; au statut de multinationale étrangère ou française par rapport aux entreprises uniquement implantées en France ; aux entreprises de l’industrie manufacturière par rapport aux autres secteurs d’activité
  • Lecture : Une part de travailleurs qualifiés d’un pour cent plus élevée est associée à une probabilité de réorganiser 1,27 % plus élevée.
  • Champ : Entreprises de l’enquête Chaînes d’activité mondiales 2020, hors secteur de la construction, ayant un chiffre d’affaires, une valeur ajoutée, et un nombre d’employés positifs en 2017.
  • Source : Insee, enquête Chaînes d’activité mondiales 2020, Base Tous Salariés, FARE, Contour des Entreprises Profilées, calcul des auteurs.

Figure 2 − Probabilité de réorganiser sa chaîne de valeur selon certaines caractéristiques de l’entreprise

  • Notes : Résultats de la régression du choix de réorganiser (délocaliser, relocaliser) selon différentes caractéristiques des entreprises. L’estimation est issue d’un modèle économétrique de type logit. Le modèle compare les entreprises qui déclarent avoir réorganisé leurs chaînes de valeur mondiales à celles qui déclarent ne pas l’avoir fait et contrôle, pour le secteur d’activité de l’entreprise, la productivité par travailleur, la part de travailleurs qualifiés, le statut de multinationale et le statut d’importatrice de biens et d’importatrice de services. Les estimations reportées sont les effets marginaux moyens rapportés à la moyenne de la variable expliquée. Les coefficients s’interprètent comme l‘effet moyen, en pourcentage, sur la probabilité moyenne de réorganiser au moins une activité associée à l’augmentation, toutes choses égales par ailleurs, d’un point de la valeur ajoutée par travailleur ou de la part de travailleurs qualifiés ; au statut de multinationale étrangère ou française par rapport aux entreprises uniquement implantées en France ; aux entreprises de l’industrie manufacturière par rapport aux autres secteurs d’activité.
  • Lecture : Une part de travailleurs qualifiés d’un pour cent plus élevée est associée à une probabilité de réorganiser 1,27 % plus élevée.
  • Champ : Entreprises de l’enquête Chaînes d’activité mondiales 2020, hors secteur de la construction, ayant un chiffre d’affaires, une valeur ajoutée, et un nombre d’employés positifs en 2017.
  • Source : Insee, enquête Chaînes d’activité mondiales 2020, Base Tous Salariés, FARE, Contour des Entreprises Profilées, calcul des auteurs.

Les délocalisations touchent des activités intensives en travail qualifié, au contraire des relocalisations

Lorsqu’une entreprise réorganise sa chaîne de valeur, elle le fait sur un ou plusieurs segments, dits aussi , mais rarement sur tous. Entre 2018 et 2020, au sein d’une entreprise qui réorganise, entre une et deux activités sont réorganisées en moyenne. Parmi celles qui délocalisent, deux tiers ne délocalisent qu’une activité ; parmi celles qui relocalisent, un cinquième relocalise plus de deux activités. Il s’agit d’une décision stratégique pour l’entreprise. Au sein des entreprises qui délocalisent, ce sont avant tout les activités intensives en travail qualifié qui sont concernées (figure 3).

Figure 3 − Probabilité de réorganiser une activité selon certaines de ses caractéristiques

Effet moyen sur la probabilité de réorganiser l'activité, en %
Figure 3 − Probabilité de réorganiser une activité selon certaines de ses caractéristiques (Effet moyen sur la probabilité de réorganiser l'activité, en %) - Lecture : Une part de travailleurs qualifiés dans l’activité d’un pour cent plus élevée est associée à une probabilité de délocaliser 1,19 % plus élevée.
Caractéristiques Délocalisations Relocalisations Réorganisations
Coefficient Intervalle de confiance à 95 % Coefficient Intervalle de confiance à 95 % Coefficient Intervalle de confiance à 95 %
Part de travailleurs qualifiés 1,19 0,31 2,07 -1,92 -3,19 -0,64 0,15 -0,56 0,86
Indice de routine 3,36 2,33 4,39 1,82 0,64 3,01 2,76 1,97 3,55
Observations            44 776            40 592            44 776
  • Notes : Résultats de la régression du choix de réorganiser (délocaliser, relocaliser) une activité selon différentes caractéristiques de l’activité. L’estimation est issue d’un modèle économétrique de type logit. Le modèle compare les activités réorganisées aux activités non réorganisées et contrôle pour la part des travailleurs qualifiés dans cette activité et pour son indice de tâches routinières, la productivité par travailleur, la part de travailleurs qualifiés, le statut de multinationale et le statut d’importatrice de biens et d’importatrice de services. L’indice de tâches routinières reflète l’intensité en tâches codifiables, celles concernant le rangement et la manipulation simple d’informations. Les estimations reportées sont les effets marginaux moyens rapportés à la moyenne de la variable expliquée. Les coefficients s’interprètent comme l‘effet moyen, en pourcentage, sur la probabilité de réorganiser, associé à l’augmentation, toutes choses égales par ailleurs, d’un point de la part de travailleurs qualifiés ou de l’indice de routine.
  • Lecture : Une part de travailleurs qualifiés dans l’activité d’un pour cent plus élevée est associée à une probabilité de délocaliser 1,19 % plus élevée.
  • Champ : Entreprises de l’enquête Chaînes d’activité mondiales 2020, hors secteur de la construction, ayant un chiffre d’affaires, une valeur ajoutée, et un nombre d’employés positifs en 2017.
  • Source : Insee, enquête Chaînes d’activité mondiales 2020, Base Tous Salariés, FARE, Contour des Entreprises Profilées, calcul des auteurs.

Figure 3 − Probabilité de réorganiser une activité selon certaines de ses caractéristiques

  • Notes : Résultats de la régression du choix de réorganiser (délocaliser, relocaliser) une activité selon différentes caractéristiques de l’activité. L’estimation est issue d’un modèle économétrique de type logit. Le modèle compare les activités réorganisées aux activités non réorganisées et contrôle pour la part des travailleurs qualifiés dans cette activité et pour son indice de tâches routinières, la productivité par travailleur, la part de travailleurs qualifiés, le statut de multinationale et le statut d’importatrice de biens et d’importatrice de services. L’indice de tâches routinières reflète l’intensité en tâches codifiables, celles concernant le rangement et la manipulation simple d’informations. Les estimations reportées sont les effets marginaux moyens rapportés à la moyenne de la variable expliquée. Les coefficients s’interprètent comme l‘effet moyen, en pourcentage, sur la probabilité de réorganiser, associé à l’augmentation, toutes choses égales par ailleurs, d’un point de la part de travailleurs qualifiés ou de l’indice de routine.
  • Lecture : Une part de travailleurs qualifiés dans l’activité d’un pour cent plus élevée est associée à une probabilité de délocaliser 1,19 % plus élevée.
  • Champ : Entreprises de l’enquête Chaînes d’activité mondiales 2020, hors secteur de la construction, ayant un chiffre d’affaires, une valeur ajoutée, et un nombre d’employés positifs en 2017.
  • Source : Insee, enquête Chaînes d’activité mondiales 2020, Base Tous Salariés, FARE, Contour des Entreprises Profilées, calcul des auteurs.

Alors que les délocalisations industrielles des années 1990 et 2000 ont été majoritairement intensives en travail peu qualifié [Ouvrir dans un nouvel ongletBiscourp, Kramarz, 2007  ; Ouvrir dans un nouvel ongletCarluccio et al., 2019 ], entre 2018 et 2020, ce sont avant tout les activités intensives en travail qualifié qui sont concernées. À l’inverse, les activités relocalisées en France sont plutôt peu qualifiées, ce qui peut refléter le rapatriement en France d’activités préalablement délocalisées.

Les activités réorganisées sont intensives en dites routinières, ou codifiables, comme celles concernant le rangement et la manipulation simple d’informations – comme, par exemple, la comptabilité. Le caractère routinier d’une tâche est distinct du niveau de qualification qu’elle requiert : une tâche peut être routinière et nécessiter de la qualification, et inversement. Le caractère plus ou moins routinier des tâches contenues dans les activités joue donc un rôle primordial dans la réorganisation de la chaîne de valeur : plus une tâche est routinière, plus il est simple pour un manager de la piloter à distance, et donc, de la délocaliser [Ouvrir dans un nouvel ongletAcemoglu, Autor, 2011 ]. Par conséquent, les relocalisations effectuées entre 2018 et 2020, qui incluent en partie des activités précédemment délocalisées, concernent probablement davantage des activités intensives en tâches routinières. À un indice de routine d’un point plus élevé est associée une probabilité de réorganiser l’activité de 2,8 % plus élevée, avec un effet près de deux fois plus fort sur les délocalisations que sur les relocalisations.

Les entreprises les plus productives délocalisent davantage chez un sous-traitant

Lorsqu’une entreprise délocalise ou relocalise une partie de sa chaîne de valeur, elle peut exécuter elle-même les tâches concernées, au sein d’une filiale, ou les confier à un sous-traitant. Lors d’une délocalisation, recourir à la sous-traitance peut s’avérer plus coûteux que d’utiliser une filiale, en raison des frais associés à la recherche du sous-traitant, à l’établissement des cahiers des charges et des contrats, ainsi qu’au contrôle de qualité. Les entreprises les plus productives privilégient donc plus souvent que les autres la sous-traitance quand elles délocalisent (figure 4). En revanche, lors d’une relocalisation, la décision de réaliser l'activité en interne ou de la sous‑traiter n’est pas liée au niveau de productivité d'une entreprise. En effet, il peut être plus facile de trouver un sous-traitant en France qu’à l’étranger.

Figure 4 − Probabilité de réorganiser une activité vers une filiale selon certaines de ses caractéristiques et celles de l’entreprise qui la réorganise

Effet moyen sur la probabilité que l'activité soit réorganisée en interne plutôt que chez un sous-traitant, en %
Figure 4 − Probabilité de réorganiser une activité vers une filiale selon certaines de ses caractéristiques et celles de l’entreprise qui la réorganise (Effet moyen sur la probabilité que l'activité soit réorganisée en interne plutôt que chez un sous-traitant, en %) - Lecture : Une part du capital incorporel dans le stock de capital total au sein l’activité d’un pour cent plus élevée est associée à une probabilité de délocaliser vers une filiale plutôt qu’un sous-traitant 5,38 % plus élevée.
Caractéristiques Délocalisations Relocalisations Réorganisations
Coefficient Intervalle de confiance à 95 % Coefficient Intervalle de confiance à 95 % Coefficient Intervalle de confiance à 95 %
Productivité apparente du travail -0,82 -1,32 -0,33 0,13 -0,43 0,70 0,15 -0,40 0,70
Part du capital incorporel 5,38 2,55 8,21 2,06 -1,61 5,72 2,54 -0,89 5,96
Observations            1 096            840            840
  • Notes : Résultats de la régression du choix de réorganiser (délocaliser, relocaliser) une activité en interne par rapport à la confier à un sous-traitant selon différentes caractéristiques de l’entreprise qui réorganise et de l’activité. L’estimation est issue d’un modèle économétrique de type logit. Parmi les activités réorganisées par les entreprises, le modèle compare celles qui le sont au sein des entreprises à celles qui le sont en-dehors du périmètre des entreprises. En plus des variables du modèle de la figure 2, le modèle contrôle l’intensité en biens matériels, en capital, en capital incorporel, et en travailleurs qualifiés de l’activité. Les estimations reportées sont les effets marginaux moyens rapportés à la moyenne de la variable expliquée. Les coefficients s’interprètent comme l‘effet moyen, en pourcentage, sur la probabilité de réorganiser en interne associé à l’augmentation d’un point de la valeur ajoutée par travailleur ou de la part du capital incorporel dans le stock de capital total, toutes choses égales par ailleurs.
  • Lecture : Une part du capital incorporel dans le stock de capital total au sein l’activité d’un pour cent plus élevée est associée à une probabilité de délocaliser vers une filiale plutôt qu’un sous-traitant 5,38 % plus élevée.
  • Champ : Entreprises de l’enquête Chaînes d’activité mondiales 2020, hors secteur de la construction, ayant un chiffre d’affaires, une valeur ajoutée, et un nombre d’employés positifs en 2017.
  • Source : Insee, enquête Chaînes d’activité mondiales 2020, Base Tous Salariés, FARE, Contour des Entreprises Profilées, calcul des auteurs.

Figure 4 − Probabilité de réorganiser une activité vers une filiale selon certaines de ses caractéristiques et celles de l’entreprise qui la réorganise

  • Notes : Résultats de la régression du choix de réorganiser (délocaliser, relocaliser) une activité en interne par rapport à la confier à un sous-traitant selon différentes caractéristiques de l’entreprise qui réorganise et de l’activité. L’estimation est issue d’un modèle économétrique de type logit. Parmi les activités réorganisées par les entreprises, le modèle compare celles qui le sont au sein des entreprises à celles qui le sont en-dehors du périmètre des entreprises. En plus des variables du modèle de la figure 2, le modèle contrôle l’intensité en biens matériels, en capital, en capital incorporel, et en travailleurs qualifiés de l’activité. Les estimations reportées sont les effets marginaux moyens rapportés à la moyenne de la variable expliquée. Les coefficients s’interprètent comme l‘effet moyen, en pourcentage, sur la probabilité de réorganiser en interne associé à l’augmentation d’un point de la valeur ajoutée par travailleur ou de la part du capital incorporel dans le stock de capital total, toutes choses égales par ailleurs.
  • Lecture : Une part du capital incorporel dans le stock de capital total au sein l’activité d’un pour cent plus élevée est associée à une probabilité de délocaliser vers une filiale plutôt qu’un sous-traitant 5,38 % plus élevée.
  • Champ : Entreprises de l’enquête Chaînes d’activité mondiales 2020, hors secteur de la construction, ayant un chiffre d’affaires, une valeur ajoutée, et un nombre d’employés positifs en 2017.
  • Source : Insee, enquête Chaînes d’activité mondiales 2020, Base Tous Salariés, FARE, Contour des Entreprises Profilées, calcul des auteurs.

Quand une activité requiert l’utilisation de , l’entreprise la délocalise plus souvent vers une filiale à l’étranger qu’en la confiant à un sous-traitant. Ce capital incorporel peut en particulier refléter l’activité de recherche et développement d’une entreprise, ses brevets et son savoir-faire. Ainsi, intégrer une activité plutôt que la déléguer à un sous‑traitant peut constituer une stratégie pour protéger la propriété intellectuelle, en particulier lorsque le sous‑traitant est à l’étranger.

Les entreprises délocalisent en majorité vers l’Union européenne, très peu vers la Chine

La probabilité de délocalisation vers une région du monde diminue avec la distance. De fait, les destinations les plus attractives sont les pays de l’Union européenne, tandis que la Chine figure parmi les régions les moins prisées (figure 5). Les destinations plus lointaines impliquent des coûts de délocalisation plus élevés, notamment en matière de coordination ou de contrôle. Les biens ou services doivent également transiter le long de la chaîne de valeur, avec des décalages horaires raisonnables. Une exception toutefois : les activités intensives en travail qualifié et en recherche et développement (R&D) sont délocalisées majoritairement en Inde, où l’abondance de travail qualifié, à un coût relativement inférieur à celui de la France ou de l’Europe, en fait une destination privilégiée.

Figure 5 − Probabilité de délocaliser une activité selon les régions du monde

Différence de probabilité avec celle de délocaliser dans le reste du monde, en points de pourcentage
Figure 5 − Probabilité de délocaliser une activité selon les régions du monde (Différence de probabilité avec celle de délocaliser dans le reste du monde, en points de pourcentage) - Lecture : Pour une entreprise donnée, la probabilité de délocaliser une activité donnée en Inde est 0,15 point plus élevée que celle de délocaliser dans un pays autre que ceux représentés dans le graphique.
Régions Délocalisations
Coefficient Intervalle de confiance à 95 %
UE 14 0,33 0,25 0,41
UE 13 0,26 0,18 0,34
Inde 0,15 0,06 0,23
Reste de l'Europe 0,13 0,05 0,22
Maghreb 0,13 0,05 0,22
Royaume-Uni 0,11 0,02 0,2
Autres pays d'Asie 0,08 -0,01 0,18
Etats-Unis et Canada 0,08 -0,01 0,18
Chine 0,04 -0,06 0,13
Observations                           2250
  • Notes : Résultats de la régression du choix de destination de la délocalisation d’une activité dans une région du monde plutôt que dans une autre. La probabilité est comprise entre 0 et 1. L’estimation est issue d’un modèle économétrique de type logit. Le modèle compare les destinations qui accueillent les délocalisations à celles qui ne les accueillent pas, pour chaque activité délocalisée par chaque entreprise, et utilise des effets fixes dans les dimensions entreprise, activité, et destination, qui sont représentés sur la figure. Les estimations reportées sont les effets marginaux moyens rapportés à la moyenne de la variable expliquée. Les coefficients reportés sur cette figure s’interprètent comme la différence entre la probabilité de délocaliser dans une destination et celle de délocaliser dans un pays qui n’est pas représenté dans le graphique (le reste du monde). L’UE 14 désigne les membres de l’Union européenne avant 2004, hors Royaume-Uni et France ; l’UE 13 désigne les membres ayant intégré l’UE depuis 2004.
  • Lecture : Pour une entreprise donnée, la probabilité de délocaliser une activité donnée en Inde est 0,15 point plus élevée que celle de délocaliser dans un pays autre que ceux représentés dans le graphique.
  • Champ : Entreprises de l’enquête Chaînes d’activité mondiales 2020, hors secteur de la construction, ayant un chiffre d’affaires, une valeur ajoutée, et un nombre d’employés positifs en 2017.
  • Source : Insee, enquête Chaînes d’activité mondiales 2020, Base Tous Salariés, FARE, Contour des Entreprises Profilées, calcul des auteurs.

Figure 5 − Probabilité de délocaliser une activité selon les régions du monde

  • Notes : Résultats de la régression du choix de destination de la délocalisation d’une activité dans une région du monde plutôt que dans une autre. La probabilité est comprise entre 0 et 1. L’estimation est issue d’un modèle économétrique de type logit. Le modèle compare les destinations qui accueillent les délocalisations à celles qui ne les accueillent pas, pour chaque activité délocalisée par chaque entreprise, et utilise des effets fixes dans les dimensions entreprise, activité, et destination, qui sont représentés sur la figure. Les estimations reportées sont les effets marginaux moyens rapportés à la moyenne de la variable expliquée. Les coefficients reportés sur cette figure s’interprètent comme la différence entre la probabilité de délocaliser dans une destination et celle de délocaliser dans un pays qui n’est pas représenté dans le graphique (le reste du monde). L’UE 14 désigne les membres de l’Union européenne avant 2004, hors Royaume-Uni et France ; l’UE 13 désigne les membres ayant intégré l’UE depuis 2004.
  • Lecture : Pour une entreprise donnée, la probabilité de délocaliser une activité donnée en Inde est 0,15 point plus élevée que celle de délocaliser dans un pays autre que ceux représentés dans le graphique.
  • Champ : Entreprises de l’enquête Chaînes d’activité mondiales 2020, hors secteur de la construction, ayant un chiffre d’affaires, une valeur ajoutée, et un nombre d’employés positifs en 2017.
  • Source : Insee, enquête Chaînes d’activité mondiales 2020, Base Tous Salariés, FARE, Contour des Entreprises Profilées, calcul des auteurs.

Sources

Cette étude mobilise l’enquête de l’Insee sur les Chaînes d’activité mondiales 2020 (CAM), dont la collecte a eu lieu en 2021. Cette enquête permet d'améliorer les connaissances en matière de stratégie d'internationalisation des sociétés : elle permet d'étudier la fragmentation des processus de production mis en œuvre par les entreprises, qui les conduit à externaliser en France ou à délocaliser à l’étranger des travaux réalisés jusque-là en interne, voire à relocaliser en France des activités réalisées à l’étranger. Cette enquête est triennale. En 2020, la collecte a eu lieu au niveau de la tête de groupe et non plus de l’unité légale, ce qui est plus pertinent pour analyser les prises de décision stratégique. En outre, ces données sont enrichies par des informations issues des données administratives 2017 : DGFiP/Insee Fare qui fournit les principales données comptables, la base Tous salariés (Insee) 2017 qui fournit les données d’emploi, agrégées à l’aide du contour des entreprises profilées et le répertoire Sirus (Insee) pour les années 2017 et 2020. L’indice de tâches routinières est tiré de Ouvrir dans un nouvel ongletLe Barbanchon, Rizotti (2020). La distance et le PIB par habitant des destinations des délocalisations sont issus de la base Gravity diffusée par le Centre d’études prospectives et d’informations internationales (CEPII).

Les analyses sont effectuées au niveau de l’entreprise. Le champ de l’étude est composé des entreprises implantées en France de plus de 50 employés, hors secteurs de la construction et des activités financières et d’assurance.

Définitions

Une entreprise est la plus petite combinaison d'unités légales qui constitue une unité organisationnelle de production de biens et de services jouissant d'une certaine autonomie de décision, notamment pour l'affectation de ses ressources courantes.

On désigne par chaînes de valeur mondiales les processus de production dont les étapes se situent dans au moins deux pays différents.

Est considérée comme une délocalisation tout transfert d’activité de la France vers l’étranger, réalisé par l’entreprise ou un sous-traitant. La délocalisation doit avoir entraîné la réduction de l’activité en France. De fait, une activité créée à l’étranger sans transfert de postes (de la France vers l’étranger) n’est pas considérée comme une délocalisation.

Est considérée comme une relocalisation tout transfert d’activité de l’étranger vers la France. Les relocalisations concernent non seulement les multinationales mais aussi les entreprises uniquement implantées en France qui cessent de faire appel à un sous-traitant étranger pour rapatrier l’activité en France.

Une activité est une fonction dans le processus de production. L’enquête Chaînes d’activité mondiales (sources) distingue huit activités : manufacturière ; transport et logistique ; services commerciaux (commerce, marketing, services après-vente) ; services informatiques et technologies de l’information ; services administratifs et financiers ; ingénierie et services techniques/conception ; recherche et développement ; autres. Sont exclues les activités de construction et de génie civil. Une activité est elle-même constituée de différentes tâches.

Est considéré comme capital incorporel le capital qui n’est ni matériel, ni financier. Ce peut être des brevets, des licences de logiciels ou des frais de recherche et développement.

Pour en savoir plus

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Le Clainche L., Lézec F., « 65 % des entreprises de 50 salariés ou plus ont connu des difficultés dans leurs chaînes d’activité en 2020 », Insee Première no 1942, Insee, avril 2023.

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