Les départements de Nouvelle-Aquitaine à l'épreuve de la crise sanitaire
De fortes créations d’emplois en Lot-et-Garonne malgré la crise sanitaire Les départements néo-aquitains à l’épreuve de la crise sanitaire
Claire Decondé (Insee)
En Lot-et-Garonne, l’épidémie de Covid-19 a engendré la surmortalité la plus importante de la Nouvelle-Aquitaine en 2020. L’activité économique a été affectée dans des proportions comparables à la moyenne nationale, et l’emploi renoue rapidement avec son dynamisme d’avant-crise. Les ménages ont été confrontés aux conséquences sociales de l’épidémie autant qu’au niveau national.
Cette étude fait partie d'une série de publications sur « Les départements de Nouvelle-Aquitaine à l'épreuve de la crise sanitaire ».
La plus forte surmortalité de la région en 2020
En 2020, le Lot-et-Garonne a été davantage touché par l’épidémie de Covid que les autres départements de la région. Toutes causes confondues, les décès augmentent de 6 %, trois fois plus qu’au niveau régional. Lors des deux derniers trimestres, la mortalité a progressé plus fortement que dans la région et qu’en France, avec une augmentation très importante de 28 % au 4e trimestre (figure 1).
tableauFigure 1 – Évolution de la mortalité en 2020 et 2021
Lot-et-Garonne | Nouvelle-Aquitaine | France | |
---|---|---|---|
T1 2020 | 94 | 97 | 101 |
T2 2020 | 99 | 98 | 112 |
T3 2020 | 107 | 103 | 103 |
T4 2020 | 128 | 111 | 120 |
T1 2021 | 92 | 103 | 108 |
T2 2021 | 109 | 105 | 108 |
T3 2021 | 102 | 106 | 106 |
T4 2021 | 119 | 111 | 109 |
- Note : l’année de référence prise est 2019. Les vagues sont déterminées en fonction de la courbe nationale des hospitalisations (Pour en savoir plus)
- Lecture : le nombre de décès est inférieur au 1er trimestre 2020 par rapport au 1er trimestre 2019 en Lot-et-Garonne et en Nouvelle-Aquitaine, contrairement à la France.
- Source : Insee, État civil 2019 à 2021. Les données 2021 sont provisoires.
graphiqueFigure 1 – Évolution de la mortalité en 2020 et 2021
Avec 4 250 décès, les conséquences du Covid restent visibles en 2021 (+ 5 % par rapport à 2019). Avec un surcroît de 9 % puis 19 % de décès aux 2e et 4e trimestres, la surmortalité dépasse à nouveau les niveaux national et régional.
Le déficit naturel se creuse par rapport à 2019, l’augmentation des décès se combinant à une baisse tendancielle des naissances.
Depuis mi-2021, l’activité économique retrouve son niveau d’avant-crise
En décembre 2021, l’activité économique du Lot-et-Garonne dépasse légèrement son niveau d’avant-crise, avec 1 % d’heures rémunérées de plus qu’en décembre 2019, comme la moyenne française (figure 2).
tableauFigure 2 – Contribution des secteurs à l’évolution de l’activité en 2020 et 2021
Secteur | Autres services principalement marchands | Construction | Hébergement et restauration | Industrie | Services principalement non marchands | Ensemble |
---|---|---|---|---|---|---|
Jan 2020 | 1,5 | 0,2 | 0,1 | 0,2 | 0 | 2 |
Fév 2020 | 1,4 | 0 | 0,1 | 0,4 | 0 | 1,9 |
Mars 2020 | -6,1 | -3,4 | -1,4 | -2,1 | -1 | -14 |
Avril 2020 | -15,7 | -4,6 | -3,2 | -5,6 | -2,6 | -31,7 |
Mai 2020 | -8,2 | -1,8 | -2,7 | -3,6 | -1,4 | -17,7 |
Juin 2020 | -2,4 | -0,5 | -1,3 | -2,3 | -0,5 | -7 |
Juil 2020 | -1,7 | -0,1 | -0,9 | -2 | -0,3 | -5 |
Août 2020 | -1,1 | 0 | -0,8 | -1 | -0,2 | -3,1 |
Sept 2020 | -1 | -0,3 | -0,5 | -1,6 | -0,1 | -3,5 |
Oct 2020 | -1 | -0,5 | -0,5 | -1,5 | 0 | -3,5 |
Nov 2020 | -4,2 | -0,1 | -2,1 | -1 | -0,2 | -7,6 |
Déc 2020 | -2 | -0,1 | -2,3 | -1,1 | 0,1 | -5,4 |
Jan 2021 | -0,1 | 0,7 | -1,9 | -0,9 | 0,1 | -2,1 |
Fév 2021 | -0,3 | 0,2 | -2 | -0,3 | 0,4 | -2 |
Mars 2021 | 0,1 | 0,5 | -2,1 | -0,3 | 0,4 | -1,4 |
Avril 2021 | -1,6 | 0,2 | -2,2 | -0,4 | 0,1 | -3,9 |
Mai 2021 | -1,2 | 0,2 | -1,5 | -0,3 | 0,3 | -2,5 |
Juin 2021 | 0,6 | 0,6 | -0,3 | -0,1 | 0,5 | 1,3 |
Juil 2021 | 0,3 | 0,4 | 0,2 | -0,6 | 0,4 | 0,7 |
Août 2021 | 0,6 | 0,1 | 0 | -0,2 | 0,3 | 0,8 |
Sept 2021 | 0,8 | 0,4 | 0,1 | -0,6 | 0,4 | 1,1 |
Oct 2021 | 1 | 0,3 | 0,2 | -0,2 | 0,3 | 1,6 |
Nov 2011 | 1,6 | 0,4 | 0,2 | 0,1 | 0,5 | 2,8 |
Déc 2021 | 0,8 | -0,1 | -0,1 | -0,1 | 0,3 | 0,8 |
- Note : la situation de référence est le même mois de l’année 2019.
- Lecture : en avril 2020, le nombre d’heure rémunérées se situe 32 % en dessous de son niveau d’avril 2019. Cette chute s’explique par la baisse dans les services principalement marchands (16 points), la construction (5), l’hébergement–restauration (3), l’industrie (6) et les services principalement non marchands (2).
- Source : Insee, Déclarations sociales nominatives – traitement provisoire.
graphiqueFigure 2 – Contribution des secteurs à l’évolution de l’activité en 2020 et 2021
Malgré un début d’année 2021 affecté par les restrictions sanitaires, l’activité lot-et-garonnaise résiste bien. Contrairement à la plupart des départements néo-aquitains, elle égale celle de 2019 en moyenne annuelle (contre - 2 points en moyenne nationale).
Les niveaux d’activité d’avant-crise sont rejoints ou dépassés dès juillet 2021, sauf dans l’industrie. Fin 2021, les secteurs de l’hébergement, de la restauration et de l’industrie retrouvent tout juste leur niveau d’avant-crise. Ceux des services marchands, et des services non marchands dans une moindre mesure, contribuent au dépassement du niveau global observé en 2019. Le secteur de la construction tire l’activité vers le haut tout au long de l’année 2021, mais se tasse en décembre.
Avec une baisse de 8 %, l’activité a diminué en 2020, ce qui place le Lot-et-Garonne dans la moyenne régionale, et légèrement en deçà de la moyenne nationale. Ce recul est surtout dû au confinement du printemps 2020, où l’activité a baissé de 32 % en avril dans le département (33 % en Nouvelle-Aquitaine ou en France). Seuls 14 % des Lot-et-Garonnais ont été placés en chômage partiel de façon intégrale pendant le premier confinement (deux points de moins qu’en France). À cette même période, ils sont, avec les Creusois, les Néo-Aquitains qui recourent le moins au télétravail, qu’il soit exclusif ou partiel.
Après une reprise progressive de l’activité pendant l’été, un deuxième confinement est intervenu à l’automne 2020. La baisse de l’activité a été nettement moindre (- 8 % en novembre). Les restrictions ont davantage ciblé les services, notamment l’hébergement-restauration et le commerce. Les activités de production se sont organisées pour s’adapter aux nouvelles conditions. Le Lot-et-Garonne se positionne comme la moyenne régionale, et un peu mieux que la moyenne nationale (- 10 %).
La consommation des ménages a diminué en 2020, notamment pendant les confinements. Par rapport au même mois de 2019, le montant de transactions par cartes bancaires CB était en repli de 35 % en avril 2020, et de 21 % en novembre. Ces baisses sont de moindre ampleur que la moyenne nationale. La consommation résiste davantage en 2021, malgré un nouveau trou d’air au printemps.
Les créations d’entreprises sont dynamiques en 2021 (3 800 entreprises créées, soit + 24 % par rapport à 2020) après une stabilité en 2020. Ce rebond dépasse la moyenne nationale (+ 17 %).
De fortes créations d’emplois, mais un chômage toujours élevé fin 2021
Malgré une première baisse fin 2019, l’emploi salarié progressait avant la crise. Sa contraction s’est accentuée dès le 1er trimestre 2020 (- 1,8 %, soit - 2 000 emplois), mais dans des proportions moindres que l’activité économique.
L’intérim, fortement touché au 1er trimestre 2020 (- 36 %), retrouve son niveau d’avant-crise dès fin 2020 et le dépasse de 13 % fin 2021.
Hors intérim, l’emploi industriel a peu souffert de la crise, puis progresse : fin 2021, il dépasse de 2 % son niveau de fin 2019. Le volume d’emploi a baissé en 2020 dans les services marchands, mais son rebond en 2021 le porte 3,5 % au-delà de son niveau d’avant-crise. Dans le tertiaire non marchand, la progression est la deuxième plus forte de la région derrière la Gironde (+ 4 % fin 2021). De même, la construction crée beaucoup d’emplois : + 12 % fin 2021 par rapport à l’avant-crise, plus forte progression régionale, deux fois supérieure au rythme national.
Fin 2021, l’emploi salarié lot-et-garonnais dépasse son niveau d’avant-crise de 4,6 %. C’est, derrière la Gironde, la deuxième croissance la plus forte en Nouvelle-Aquitaine.
Le chômage, qui baissait régulièrement depuis 2017, a moins progressé qu’ailleurs durant la crise. Il a atteint tout de même 8,8 % au 3e trimestre 2020. Puis, la reprise économique favorise sa baisse à 7,6 % fin 2021, restant néanmoins le taux de chômage le plus élevé en Nouvelle-Aquitaine (6,6 %).
Des conséquences sociales comparables à la moyenne nationale
Les dispositifs d’aide aux employeurs ont soutenu indirectement le pouvoir d’achat des actifs en protégeant les emplois. Le pouvoir d’achat a également été protégé par des mesures directes de maintien dans les dispositifs de protection comme le revenu de solidarité active (RSA) ou l’indemnisation chômage, ou des aides monétaires exceptionnelles accordées aux familles modestes courant 2020.
Durant le premier confinement, 22 % des Lot-et-Garonnais évoquent des difficultés financières, comme aux niveaux régional et national. Ce ressenti est d’autant plus fréquent que le revenu du ménage était modeste avant la crise. Les ménages du Lot-et-Garonne aux revenus les plus faibles sont ceux qui, derrière les Périgourdins, l’expriment le plus dans la région.
En 2020, le nombre des bénéficiaires du RSA a augmenté de 7 %, hausse égale aux niveaux régional et national. Après un pic atteint fin 2020, la reprise de l’activité économique et le desserrement des contraintes sanitaires, le nombre de bénéficiaires du RSA baisse en 2021 sous l’effet des retours à l’emploi. Il retrouve un niveau proche de celui d'avant le début de la crise, avec 9 800 allocataires en décembre 2021. Un pic de 25 800 bénéficiaires de la prime d’activité est atteint en décembre 2021, avec une hausse globale de 3 % par rapport à fin 2019.
Seuls 2 % des Lot-et-Garonnais déclarent ressentir une amélioration de leurs finances lors du premier confinement. Le patrimoine financier des Lot-et-Garonnais augmente pourtant en 2020-2021, deux fois plus vite qu’avant la crise. Le surplus d’épargne s’explique par la prudence des ménages face aux incertitudes, mais aussi par les restrictions qui ont limité leurs dépenses. Les encours des produits d’épargne (différents livrets) augmentent de 800 millions d’euros entre février 2020 et décembre 2021. Cette progression de 7 % en rythme annuel est proche de la moyenne régionale.
Pour en savoir plus
Génin G., « Une surmortalité marquée et un léger rebond des naissances en 2021 en Nouvelle-Aquitaine », Insee Flash Nouvelle-Aquitaine n° 74, mai 2022.
« Les départements de Nouvelle-Aquitaine à grands traits », Insee Analyses Nouvelle-Aquitaine n° 101 à 112, décembre 2021.
« En quatre vagues, l’épidémie de Covid-19 a causé 116 000 décès et lourdement affecté le système de soins », France, portrait social Édition 2021, novembre 2021.