Les départements de Nouvelle-Aquitaine à l'épreuve de la crise sanitaire

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Paru le :Paru le29/11/2022
Laurent Zambon (Insee)
- Novembre 2022
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En Dordogne, une forte augmentation des décès, un marché du travail redynamisé après la crise Les départements néo-aquitains à l’épreuve de la crise sanitaire

Laurent Zambon (Insee)

Plutôt préservée en 2020, la Dordogne a été davantage affectée par l’épidémie de Covid-19 en 2021, provoquant une surmortalité qui accentue la baisse de la population périgourdine. L’activité économique évolue dans des proportions comparables à la moyenne nationale et retrouve son niveau d’avant-crise à la fin de l’année 2021. L’emploi repart plus fort qu’avant la crise dès début 2021. Les conséquences sociales de la crise ont touché les ménages avec une intensité comparable à la moyenne nationale.

Insee Flash Nouvelle-Aquitaine

No 86

Paru le :29/11/2022

Cette étude fait partie d'une série de publications sur « Les départements de Nouvelle-Aquitaine à l'épreuve de la crise sanitaire ».

La Dordogne à l’épreuve de la crise sanitaire

Une surmortalité très marquée en 2021

En 2020, la Dordogne a été relativement préservée de l’épidémie de Covid. Malgré un pic au 4e trimestre, les décès restent stables entre 2019 et 2020, contrairement à presque tous les départements français. La mortalité augmente de 9 % en France, et de 2 % dans la région néo-aquitaine (figure 1).

Figure 1Évolution de la mortalité en 2020 et 2021

(base 100 en 2019)
Évolution de la mortalité en 2020 et 2021 ((base 100 en 2019)) - Lecture : le nombre de décès est inférieur au 2e trimestre 2020 par rapport au 2e trimestre 2019 en Dordogne et Nouvelle-Aquitaine, contrairement à la France.
Période Dordogne Nouvelle-Aquitaine France
T1 2020 100 97 101
T2 2020 88 98 112
T3 2020 103 103 103
T4 2020 111 111 120
T1 2021 108 103 108
T2 2021 106 105 108
T3 2021 119 106 106
T4 2021 115 111 109
  • Note : l’année de référence prise est 2019. Les vagues sont déterminées en fonction de la courbe nationale des hospitalisations (Pour en savoir plus).
  • Lecture : le nombre de décès est inférieur au 2e trimestre 2020 par rapport au 2e trimestre 2019 en Dordogne et Nouvelle-Aquitaine, contrairement à la France.
  • Source : Insee, État civil 2019 à 2021. Les données 2021 sont provisoires.

Figure 1Évolution de la mortalité en 2020 et 2021

  • Note : l’année de référence prise est 2019. Les vagues sont déterminées en fonction de la courbe nationale des hospitalisations (Pour en savoir plus).
  • Lecture : le nombre de décès est inférieur au 2e trimestre 2020 par rapport au 2e trimestre 2019 en Dordogne et Nouvelle-Aquitaine, contrairement à la France.
  • Source : Insee, État civil 2019 à 2021. Les données 2021 sont provisoires.

En revanche, les conséquences du Covid sont plus nettes en 2021. Toutes causes confondues, 6 230 décès sont enregistrés, soit une hausse de 12 % par rapport à l’année 2019. Dans la région, seules les Deux-Sèvres ont un niveau de mortalité plus élevé (+ 13 %). Avec un surcroît de 19 % puis 15 % de décès aux 3e et 4e trimestres, l’augmentation est nettement plus forte qu’aux niveaux national et régional.

En dépit de naissances en très légère hausse par rapport à 2019, l’augmentation notable des décès provoque, en Dordogne, une aggravation du déficit naturel (excès des décès sur les naissances) qui atteint 3 000 individus en 2021.

Un repli de l’activité dans la moyenne, en dépit d’un faible recours au télétravail

En décembre 2021, l’activité économique périgourdine retrouve des couleurs, avec un nombre d’heures rémunérées supérieur à celui de décembre 2019 (+ 1 %), dans la moyenne nationale (figure 2).

Figure 2Contribution des secteurs à l’évolution de l’activité en 2020 et 2021

(en points)
Contribution des secteurs à l’évolution de l’activité en 2020 et 2021 ((en points)) - Lecture : en avril 2020, le nombre d’heures rémunérées se situe 35 % en-dessous de son niveau d’avril 2019. Cette chute s’explique par la baisse dans les services principalement marchands (15 points), la construction (6), l’hébergement-restauration (5), l’industrie (6) et les services principalement non marchands (3).
Période Autres services principalement marchands Construction Hébergement-restauration Industrie Services principalement non marchands Ensemble
Jan 2020 0,8 0,2 0,2 -0,6 0,8 1,4
Fév 2020 0,8 0,2 0,3 -0,6 0,3 1,0
Mars 2020 -6,3 -4,4 -2,1 -2,4 -0,9 -16,1
Avril 2020 -15,3 -6,2 -5,2 -5,8 -2,6 -35,1
Mai 2020 -8,5 -1,8 -5,2 -4,1 -1,3 -20,9
Juin 2020 -3,3 -0,6 -2,8 -2,3 -0,1 -9,1
Juil 2020 -2,4 -0,5 -1,4 -1,6 0,1 -5,8
Août 2020 -1,7 -0,4 -1,1 -1,1 0,2 -4,1
Sept 2020 -1,4 -0,4 -0,9 -1,1 0,0 -3,8
Oct 2020 -1,1 -0,5 -0,9 -1,1 0,1 -3,5
Nov 2020 -4,6 -0,3 -3,2 -1,1 -0,1 -9,3
Déc 2020 -1,9 -0,5 -3,2 -1,0 0,2 -6,4
Jan 2021 -1,2 0,8 -2,3 -1,0 0,1 -3,6
Fév 2021 -1,2 0,1 -2,8 -0,8 0,6 -4,1
Mars 2021 -1,4 0,5 -3,1 -0,6 0,7 -3,9
Avril 2021 -3,2 0,2 -4,0 -1,0 0,4 -7,6
Mai 2021 -1,9 0,2 -3,0 -1,0 0,4 -5,3
Juin 2021 0,1 0,6 -0,7 -0,4 0,7 0,3
Juil 2021 0,1 0,3 0,2 -0,6 0,5 0,5
Août 2021 0,3 -0,2 0,1 -0,4 0,5 0,3
Sept 2021 0,4 0,4 0,0 -0,3 0,5 1,0
Oct 2021 0,7 0,4 0,2 0,0 0,4 1,7
Nov 2021 1,4 0,4 0,2 0,4 0,6 3,0
Déc 2021 0,8 -0,3 0,0 0,3 0,5 1,3
  • Note : la situation de référence est le même mois de l’année 2019.
  • Lecture : en avril 2020, le nombre d’heures rémunérées se situe 35 % en-dessous de son niveau d’avril 2019. Cette chute s’explique par la baisse dans les services principalement marchands (15 points), la construction (6), l’hébergement-restauration (5), l’industrie (6) et les services principalement non marchands (3).
  • Source : Insee, Déclarations sociales nominatives – traitement provisoire.

Figure 2Contribution des secteurs à l’évolution de l’activité en 2020 et 2021

  • Note : la situation de référence est le même mois de l’année 2019.
  • Lecture : en avril 2020, le nombre d’heures rémunérées se situe 35 % en-dessous de son niveau d’avril 2019. Cette chute s’explique par la baisse dans les services principalement marchands (15 points), la construction (4), l’hébergement-restauration (5), l’industrie (6) et les services principalement non marchands (3).
  • Source : Insee, Déclarations sociales nominatives – traitement provisoire.

En Dordogne, les secteurs retrouvent leurs niveaux d’activité d’avant-crise à partir de juillet 2021, à l’exception de l’industrie qui achève son rebond en fin d’année. La construction, secteur important dans le département, retrouve son état d’avant-crise dès janvier 2021. Les services marchands, et dans une moindre mesure non marchands, contribuent au dépassement du niveau observé en 2019. Le début d’année 2021 étant affecté par les mesures sanitaires, l’activité baisse en moyenne en 2021 de 1 %, un point de mieux que la moyenne française, grâce à une meilleure résistance de l’industrie.

L’activité a davantage diminué en 2020 (- 9 % en moyenne annuelle), ce qui place la Dordogne dans la moyenne nationale. Cette baisse, importante à l’échelle de la Nouvelle-Aquitaine, est surtout due au confinement du printemps 2020, où l’activité a reculé de 35 % dans le département (33 % en Nouvelle-Aquitaine ou en France). En effet, si l’utilisation du chômage partiel n’a pas été plus importante dans le département (17 % des Périgourdins ont bénéficié de ce dispositif de manière intégrale pendant le premier confinement), le télétravail a été moins fréquent, compte tenu des spécificités sectorielles de l’économie locale (13 % de télétravail exclusif, contre 28 % en moyenne nationale).

Après une reprise progressive de l’activité pendant l’été, un deuxième confinement est intervenu à l’automne 2020. La baisse de l’activité a été nettement moindre (- 9 % en novembre). Les restrictions ont davantage ciblé les services, notamment l’hébergement-restauration et le commerce. Les activités de production ont pu s’organiser pour s’adapter aux nouvelles conditions.

Grâce à une forte fréquentation estivale, la consommation des ménages a bien résisté en 2020, même si elle a chuté pendant les confinements : par rapport au même mois de 2019, les montants de transactions par cartes bancaires CB ont baissé de 38 % au mois d’avril 2020, et de 20 % en novembre. En 2021, la consommation rebondit même si elle reste en deçà de sa tendance d’avant-crise .

Par ailleurs, les créations d’entreprises sont dynamiques en 2021 (5 000 entreprises créées, soit + 17 % par rapport à 2020) après une moindre progression en 2020 (+ 2 % par rapport à 2019). Le rebond de 2021 en Dordogne est toutefois inférieur à la moyenne régionale (+ 21 %).

La construction ne connaît pas la crise, le marché du travail retrouve une dynamique

L’emploi salarié est stable avant la crise sanitaire. Sa baisse aux deux premiers trimestres 2020 est la plus forte de la région (- 3 %, soit - 3 800 emplois), mais reste plus limitée que la contraction de l’activité économique.

L’intérim en Dordogne, plus fortement touché qu’en Nouvelle-Aquitaine au 1er trimestre 2020 (- 43 %), retrouve son niveau d’avant-crise dès fin 2020 et le dépasse de 18 % fin 2021.

Hors intérim, l’emploi industriel a mieux résisté qu’ailleurs : resté stable en 2020, il est, fin 2021, supérieur de 2 % à son niveau de 2019.

L’emploi a baissé en 2020 dans les services marchands mais repart en 2021 et finit par dépasser de 5 % son niveau d’avant-crise. Dans le tertiaire non marchand, il croît légèrement. À l’image de la région, la construction, important secteur pourvoyeur d’emplois en Dordogne, a plus que résisté. L’emploi y a augmenté au cours de l’année 2020, hausse prolongée en 2021 pour s’établir à 8 % au-dessus de sa situation en 2019. L’évolution de l’emploi depuis la crise (+ 3,8 %) est comparable à celle de la région, et supérieure à la moyenne française (+ 2,5 %).

Le chômage, en baisse régulière depuis 2017, a fortement progressé durant la crise pour atteindre 9 % au 3e trimestre 2020, le plus haut niveau de chômage néo-aquitain derrière la Charente-Maritime. La reprise économique a ensuite permis sa baisse à 7,2 % fin 2021, mais il reste supérieur à celui de Nouvelle-Aquitaine (6,6 %).

Une hausse des bénéficiaires du RSA et de l’épargne, comme en Nouvelle-Aquitaine

Les dispositifs d’aide aux employeurs ont soutenu indirectement le pouvoir d’achat des actifs en protégeant les emplois. Le pouvoir d’achat a également été soutenu par des mesures directes de maintien dans les dispositifs de protection comme le revenu de solidarité activé (RSA) ou l’indemnisation chômage, ou des aides monétaires exceptionnelles accordées aux familles modestes courant 2020.

Durant le premier confinement, 23 % des Périgourdins déclarent avoir rencontré des difficultés financières, soit un niveau comparable aux moyennes nationale et régionale.

En 2020, le nombre des bénéficiaires du RSA augmente de 7 % en Dordogne, hausse similaire à celles de la région et de la France. Après la reprise de l’activité économique et le desserrement des contraintes sanitaires, le nombre de bénéficiaires du RSA baisse en 2021. Sous l’effet des retours à l’emploi, il atteint un niveau inférieur à celui observé avant la crise (10 600 allocataires en décembre 2021).

Le nombre de bénéficiaires de la prime d’activité a très légèrement baissé, à l’inverse des tendances régionale ou nationale. En fin d’année 2021, concernant 31 500 bénéficiaires, il évolue peu comparé à 2019.

Seuls 2 % des ménages déclarent une amélioration de leurs finances lors du premier confinement. Le patrimoine financier des habitants de la Dordogne augmente pourtant en 2020-2021, plus rapidement qu’avant la crise sanitaire. Le surplus d’épargne s’explique par la prudence des ménages face aux incertitudes et par les restrictions qui ont limité leurs dépenses. Les encours des produits d’épargne (différents livrets) augmentent de 1,1 milliard d’euros entre février 2020 et décembre 2021. Cette progression de 8 % en rythme annuel, contre 3 % avant la crise, est équivalente aux moyennes régionale et nationale.

Pour en savoir plus

Génin G., « Une surmortalité marquée et un léger rebond des naissances en 2021 en Nouvelle-Aquitaine », Insee Flash Nouvelle-Aquitaine n° 74, mai 2022.

« Les départements de Nouvelle-Aquitaine à grands traits », Insee Analyses Nouvelle-Aquitaine n° 101 à 112, décembre 2021.

« En quatre vagues, l’épidémie de Covid-19 a causé 116 000 décès et lourdement affecté le système de soins », France, portrait social Édition 2021, novembre 2021.