L’activité suspendue à un regain de confiance Note de conjoncture - décembre 2024

 

Note de conjoncture
Paru le :Paru le17/12/2024
Note de conjoncture- Décembre 2024
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Vue d'ensemble

 

Note de conjoncture

Paru le :17/12/2024

Au troisième trimestre, la zone euro a connu une croissance en trompe-l’œil (+0,4 % après +0,2 %). Si la vigueur de l’économie espagnole ne se dément pas, l’activité est restée à l’arrêt en Italie et en Allemagne, tandis qu’elle a accéléré en France sous le seul effet des Jeux Olympiques et Paralympiques. Sur le continent européen, la reprise qui s’esquissait depuis le début de l’année 2024 s’essouffle déjà et la convalescence se prolonge : les investissements sont plombés par des conditions de crédit restrictives tandis que les consommateurs, qui ont pourtant bénéficié d’importants gains de pouvoir d’achat à la faveur de la désinflation, hésitent encore à consommer et continuent de gonfler leur épargne. Quant aux exportateurs européens, ils continuent de pâtir d’un prix de l’énergie élevé et affrontent par ailleurs une concurrence chinoise intransigeante : pénalisés par une demande intérieure atone, les industriels chinois cassent leurs prix et gagnent constamment des parts de marché. Le contraste est frappant entre la morosité du Vieux Continent et l’insolente santé de l’économie américaine, où la croissance se maintient à un rythme élevé (+0,7 % à l’été après +0,7 % au printemps) : en sus d’une démographie plus allante, les consommateurs y épargnent peu et les investissements y sont dynamiques.

En France, aux déterminants européens communs s’ajoute, depuis cet été, le facteur politique. Les réponses des entreprises, collectées jusqu’en novembre et avant la censure du Gouvernement, dessinent un paysage maussade : le climat des affaires a chuté à l’été, une fois connue la dissolution, et il se maintient en deçà de sa moyenne de long terme depuis. Quelques rares secteurs tirent toutefois leur épingle du jeu : l’aéronautique et les secteurs liés de l’électronique et de la réparation profitent d’une position concurrentielle favorable et butent encore principalement sur des contraintes d’offre ; l’hôtellerie et la restauration bénéficient d’une affluence assez solide. Côté demande, l’année 2024 reste singulière : si la croissance française a bien résisté (+1,1 % comme en 2023), elle le doit à la forte expansion de ses dépenses publiques et à une contribution record du commerce extérieur, liée au recul des importations. À l’inverse, l’investissement se replierait sur l’ensemble de l’année (-1,6 % en 2024 après +0,7 % en 2023) et la consommation n’accélèrerait pas (+0,9 % après +0,9 %), alors même que les ménages ont connu de nets gains de pouvoir d’achat (+2,1 % après +0,9 %). D’ici mi-2025, les deux moteurs de 2024 s’éteindraient : le commerce extérieur se normaliserait, tandis que la reconduction à l’identique du budget de l’année précédente se traduirait par un coup de frein sur les dépenses publiques. La demande privée prendrait faiblement le relais. L’investissement bénéficierait, certes, des premiers effets des assouplissements monétaires mais resterait bridé par l’incertitude et, au final, seul le consommateur porterait un peu la croissance française. Il bénéficierait des gains de pouvoir d’achat passés et d’un nouveau recul de l’inflation : tombée à +1,3 % sur un an novembre, elle se tasserait encore à +1,0 % en juin 2025. Confrontées à une demande atone, les entreprises limiteraient leurs hausses de prix et l’inflation sous-jacente se stabiliserait autour de +1,5 %. Par ailleurs, en l’absence de nouvelles mesures, les prix du tabac n’augmenteraient plus et ceux de l’électricité reculeraient en février. Au final, l’activité marquerait le pas au quatrième trimestre 2024 (0,0 %) par contrecoup des Jeux Olympiques et Paralympiques, puis croîtrait faiblement au premier semestre (+0,2 % par trimestre). L’acquis de croissance pour 2025 à mi-année serait modeste à +0,5 %.

Sur le marché du travail, l’emploi salarié a connu un regain inattendu cet été (+0,2 %), notamment du fait de sa composante publique. Dans le secteur privé, il est en net ralentissement : sur un an, la hausse y est de +0,2 %, contre +0,5 % fin 2023 et +1,5 % fin 2022. D’ici mi-2025, le secteur privé commencerait à détruire des postes salariés, en particulier d’apprentis, et l’emploi devrait freiner nettement dans le secteur public : au total, l’économie française créerait 40 000 emplois en trois trimestres, essentiellement non-salariés. Ce rythme serait insuffisant pour absorber la hausse de la population active, soutenue notamment par la montée en charge de la réforme des retraites, et le taux de chômage poursuivrait sa lente remontée pour atteindre 7,6 % mi-2025.

Plusieurs aléas entourent cette prévision. Au premier chef, la situation politique et ses conséquences budgétaires restent une source d’inconnues. Cette Note fait l’hypothèse de la reconduction en 2025 des impôts selon les barèmes en vigueur côté recettes, et des services votés en 2024 côté dépenses. Mais l’orientation de la politique budgétaire pourrait s’avérer plus restrictive une fois l’incertitude politique levée, freinant encore davantage la demande intérieure. La réaction des agents économiques à cette incertitude inédite reste en outre très incertaine : un supplément d’attentisme ne peut être exclu. À l’inverse, un rétablissement rapide de la confiance pourrait débloquer les comportements, d’autant plus que le taux d’épargne des ménages est élevé. Sur le plan international, les conséquences de l’élection du nouveau président américain restent encore floues : en particulier, la mise en place rapide de mesures douanières pourrait freiner le commerce mondial mais, à l’inverse, une expansion budgétaire accrue le stimulerait.