La reprise se fait attendre Note de conjoncture - mars 2024

 

Note de conjoncture
Paru le :Paru le14/03/2024
Note de conjoncture- Mars 2024
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Vue d'ensemble

Note de conjoncture

Paru le :14/03/2024

Début 2024, la zone euro à la traîne de l’économie mondiale

En 2023, les économies mondiales ont évolué en ordre dispersé. La croissance américaine a ainsi atteint +2,5 % contre +0,5 % dans la zone euro, où l’activité est globalement étale depuis la fin 2022. L’Europe est restée exposée à des prix énergétiques élevés, bien qu’en repli, et pâtit des effets du resserrement monétaire. L’économie américaine y a été moins sensible, bénéficiant de puissants soutiens publics. En Chine, passé le rebond consécutif à la réouverture de l’économie, la croissance s’est stabilisée à un rythme sensiblement inférieur à celui de la décennie 2010, pénalisée notamment par la contraction du secteur immobilier. Le ralentissement chinois, toutefois, a un effet global ambigu pour l’économie française : s’il freine l’activité via les canaux commerciaux, il contribue en revanche à la détente des prix des matières premières et constitue ainsi un facteur de soutien.

Ces divergences conjoncturelles se prolongeraient début 2024. Partout, la hausse des taux passée pénalise l’investissement, aussi bien des ménages que des entreprises mais, aux États-Unis, la politique budgétaire expansionniste continuerait de contrebalancer ce frein. C’est moins le cas dans la zone euro même si le plan de relance européen soutient l’investissement en construction dans les pays d’Europe du Sud. Au sein de la zone, l’activité reste en particulier dégradée en Allemagne où les industriels perdent des parts de marché à l’exportation. L’affaiblissement de l’inflation apporterait toutefois un peu d’air au pouvoir d’achat des ménages européens autorisant un timide redémarrage de la consommation : la demande mondiale adressée à la France se redresserait ainsi un peu au premier semestre 2024.

Désinflation confirmée

En France, l’épisode inflationniste s’estompe : l’inflation, au sens de l’indice des prix à la consommation, est tombée à +2,9 % sur un an en février 2024 (selon l’estimation provisoire) contre +6,3 % un an plus tôt et ce reflux se poursuivrait à +2,6 % en juin. La composition de l’inflation a toutefois beaucoup changé : les prix alimentaires et des produits manufacturés tendent à se stabiliser et l’inflation est désormais majoritairement portée par les prix de services. Dans ce secteur, les entreprises répercutent à leurs clients la hausse passée de leurs coûts salariaux. Les hausses de salaires restent toutefois modérées et n’alimentent pas une boucle prix-salaires : après deux années de recul (en 2022 et en 2023), les salaires réels augmenteraient seulement modestement début 2024.

Outre les gains de salaires réels, les ménages bénéficieraient de la revalorisation des prestations, en premier lieu des pensions, ainsi que du dynamisme des revenus de la propriété, qui reflètent les hausses de rémunération servie aux épargnants. Au final, l’acquis de croissance de pouvoir d’achat par unité de consommation à mi-année 2024 atteindrait +0,8 % contre +0,3 % en 2023 et -0,3 % en 2022.

Un peu de tonus pour la consommation

Les gains de pouvoir d’achat favoriseraient un relatif rebond de la consommation des ménages. Ce serait notamment le cas des achats alimentaires, qui après deux années de recul inédit, commenceraient timidement à remonter la pente, ainsi que des dépenses d’hébergement-restauration, qui repartiraient de l’avant après avoir calé en fin d’année dernière. Toutefois, la confiance des ménages, bien qu’en amélioration depuis son point bas de mi 2022 reste très en deçà de sa moyenne de longue période. La hausse de la consommation n’excéderait pas celle du pouvoir d’achat et le taux d’épargne se stabiliserait à un niveau élevé, entre deux et trois points au-dessus de celui observé fin 2019.

Investissement déprimé par les conditions de financement

Le resserrement monétaire continue de peser sur les investissements. Dans le bâtiment, les promoteurs immobiliers restent très pessimistes et la construction de logements neufs poursuivrait son repli, même si celui-ci s’atténuerait un peu au printemps. L’entretien-amélioration, en revanche, continuerait de progresser. Les achats des entreprises, qui ont plutôt bien résisté en 2023, seraient atones au premier semestre. Selon les enquêtes de conjoncture, les entreprises restent prudentes sur leurs intentions d’achat et signalent l’impact nettement défavorable des conditions de financement. L’investissement en biens d’équipement reculerait et seule la progression régulière des dépenses en services, notamment informatiques, permettraient à l’investissement des entreprises de se stabiliser.

Croissance différée, contrastes sectoriels marqués

En février 2024, le climat des affaires se situe un peu en deçà de sa moyenne de longue période. Les enquêtes de conjoncture témoignent par ailleurs d’une divergence inédite des situations conjoncturelles entre secteurs : favorable dans l’aéronautique, qui reprend de l’altitude et subit essentiellement des contraintes d’offre ; déprimée dans les branches énergo-intensives, qui ont plus souffert de la hausse des prix de l’énergie. Les premières données disponibles pour janvier 2024 (notamment production industrielle et consommation des ménages) sont pour leur part mal orientées et la croissance serait nulle au premier trimestre, pénalisée par des arrêts ponctuels dans l’industrie, en particulier dans le raffinage et l’automobile. L’amélioration de la consommation ne se traduirait ainsi dans la croissance qu’au printemps (+0,3 % prévu au deuxième trimestre 2024). Côté commerce extérieur, les ventes à l’étranger remonteraient la pente à partir du printemps, soutenues par la reprise des livraisons aéronautiques. Au final, l’acquis de croissance à mi-année serait modeste (+0,5 %).

Légère hausse du chômage

Après avoir été nettement supérieur au climat des affaires pendant près de deux ans, le climat de l’emploi s’est normalisé depuis la fin 2023, signalant un retour à une évolution plus en ligne avec l’activité après une longue phase d’enrichissement de la croissance en emploi. D’ici mi-2024, avec une croissance modeste sur le semestre, l’emploi progresserait toujours mais assez peu (+40 000). Compte tenu de la hausse de la population active, notamment sous l’effet de la réforme des retraites, le taux de chômage, qui repart à la hausse depuis début 2023, continuerait d’augmenter un peu, s’établissant à 7,6 % mi-2024 contre 7,2 % un an plus tôt.

Aléas : épargne des ménages et financement des entreprises

Cette prévision demeure entourée d’incertitudes, à la hausse comme à la baisse. En premier lieu, la persistance des tensions géopolitiques pourrait avoir des répercussions sur le commerce mondial ou sur les prix du pétrole. Le comportement des agents résidents constitue un aléa notable : côté entreprises, celles-ci ont maintenu un certain niveau d’investissement jusqu’à présent mais la dégradation de leurs conditions de financement pourrait entraîner un repli plus prononcé ; côté ménages, le taux d’épargne reste élevé et un regain de confiance pourrait apporter un soutien à l’activité.