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Insee Conjoncture Grand Est · Juillet 2021 · n° 27
Insee Conjoncture Grand EstBilan économique 2020 - Grand Est

En 2020, dans le Grand Est comme ailleurs en France et dans les pays voisins, le ralentissement économique est d’ampleur inédite en raison des mesures prises pour endiguer la crise sanitaire comme les confinements, les restrictions aux déplacements, les couvre-feux, les fermetures de commerces et équipements, le télétravail... Le secteur de l’hébergement-restauration est particulièrement concerné par les restrictions, ainsi que le transport aérien de passagers. La chute d’activité pèse fortement sur l’emploi, mais son effet est atténué par le dispositif d’activité partielle. Les dix départements de la région sont tous fortement affectés par la crise, mais à des degrés divers. Le Haut-Rhin est celui où le repli de l’activité est la plus forte, tandis que la Haute-Marne est le département qui perd le plus d’emplois, notamment dans l’industrie et le commerce.

En début d’année 2021, les conséquences des restrictions sont moins sévères et l’activité économique se redresse sensiblement.

Insee Conjoncture Grand Est
No 27
Paru le :Paru le08/07/2021

Ce bilan économique fait partie des 17 bilans économiques régionaux 2020 publiés par l'Insee.
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Transfrontalier - La croissance en berne dans les quatre pays voisins Bilan économique 2020

Marie-Laure Kayali, Olivasoa Razafindramanana (Insee)

En 2020, les mesures de restriction liées à la crise sanitaire affectent nettement les activités économiques des pays voisins : la croissance se dégrade nettement en Belgique et en Allemagne (y compris dans les trois Länder limitrophes) et modérément en Suisse et au Luxembourg. La consommation des ménages et le commerce extérieur sont particulièrement touchés. Dans ce contexte défavorable, l’emploi recule et le chômage progresse dans les quatre pays voisins du Grand Est.

Insee Conjoncture Grand Est

No 27

Paru le :08/07/2021

Récession en Allemagne

Après dix années de croissance continue, l’Allemagne entre dans une profonde récession en 2020, année de crise sanitaire. Ainsi, le PIB recule de 4,9 %, après + 0,6 % et + 1,3 % en 2019 et 2018. Dans l’industrie, qui représente un quart de l’économie globale, la performance (valeur ajoutée brute, VAB) diminue de 10,5 % par rapport à 2019, en raison des perturbations des chaînes d’approvisionnement internationales. C’est ce secteur qui contribue le plus à la baisse de l’activité globale. Les services sont également affectés, en particulier les transports, l’hébergement et la restauration, dont la VAB fléchit de 6,1 % sur un an. Seule la construction enregistre une valeur ajoutée positive (+ 2,8 %). La consommation intérieure, facteur déterminant de la croissance, se réduit de 6,1 %, alors que la consommation publique progresse de 3,3 % (achats d’équipements de protection et soins hospitaliers). La chute des investissements par les entreprises en équipements, machines et automobiles (- 12,1 %) contribue grandement à la contraction de l’activité.

La pandémie mondiale pèse lourdement sur le commerce extérieur allemand. Depuis 2009, les exportations et importations de biens et services ont chuté pour la première fois en 2020 (respectivement de - 9,4 % et - 8,5 %). Le pays réalise tout de même un excédent de 180 milliards d’euros contre 224 en 2019. L’Allemagne exporte surtout des automobiles, machines et produits chimiques vers les États-Unis, la Chine et la France. Quant aux importations, elles proviennent avant tout de Chine (116,7 milliards d’euros), la France se situant au cinquième rang des partenaires (56,5 milliards d’euros).

En moyenne en 2020, 44,8 millions d’actifs occupent un emploi, en repli de 1,1 % en un an. Le tertiaire, qui regroupe 33,5 millions d’actifs, en perd 281 000 (- 0,8 %), particulièrement dans les secteurs des commerces, transports et hébergements (- 2,0 %). Dans le secteur manufacturier (hors construction), le nombre de personnes en emploi baisse de 191 000 (- 2,3 %), pour s'établir à environ 8,2 millions en 2020. Grâce au chômage partiel, la baisse de l’emploi salarié se limite à - 0,8 %. Dans le même temps, le nombre de chômeurs progresse de 474 000 pour aboutir à 1,85 million (+ 34,5 %) et le taux de chômage au sens du BIT (Bureau international du travail) passe de 3,0 % à 4,0 %.

L’industrie freine nettement la croissance dans les trois Länder voisins

Dans le Land du Bade-Wurtemberg, l’activité baisse de 5,5 % en 2020, après - 0,5 % et + 2,2 % pour les deux années précédentes. Ce Land connaît la plus forte récession de ces dernières années. L’activité industrielle, qui représente un tiers du PIB bade-wurtembergeois, est particulièrement touchée par le ralentissement économique et sa valeur ajoutée recule de 6,3 %. Dans les trois plus importantes branches industrielles, que sont la fabrication d’automobiles, la fabrication de machines et équipements, et la fabrication de produits métalliques, la performance chute respectivement de 6,9 %, 10,2 % et 9,8 %. La demande intérieure mais surtout étrangère contribue à la baisse de la valeur ajoutée (- 5,4 % et - 7,0 %). Dans ce contexte, les exportations de biens manufacturiers se replient de 7,3 % à 190 milliards d’euros et les importations de 5,2 % (174,4 milliards d’euros). Le tertiaire freine aussi l’activité, mais dans une moindre mesure (- 4,4 %). Après une progression quasi continue depuis 1990, l’emploi décroît : 6,31 millions de personnes en emploi en moyenne en 2020, soit - 74 100 par rapport à 2019 (- 1,2 %). L’industrie est davantage touchée que les services, et perd 34 000 actifs (- 2,2 % contre - 1,0 %). La part des demandeurs d’emploi dans la population active augmente à 4,2 %, contre 3,2 % l’année précédente.

En Rhénanie-Palatinat, le PIB recule de 4,5 %, après une stagnation en 2019 et + 0,6 % en 2018. Il est nettement affaibli par les résultats de l’industrie, fortement affectée par la pandémie ; sa valeur ajoutée chute de 10,7 % et contribue pour 2,6 points à la baisse de l’activité, alors que dans le secteur des services, elle ne fléchit que de 4,0 %. En revanche, dans la construction, la VA progresse de 5,5 %. Pour la première fois depuis dix ans, l’emploi se contracte de 1,4 %, soit - 28 800 actifs. L’expansion du chômage partiel limite toutefois la baisse de l’emploi dans l’industrie et dans les services (- 2,5 % et - 0,9 %). Fin 2020, la part des demandeurs d’emploi dans la population active s’établit à 5,2 % contre 4,3 % fin 2019.

L’économie sarroise continue de se replier nettement à - 6,7 %, après - 3,1 % et - 0,5 %. Comme ailleurs, le poids de l’industrie est important et son chiffre d’affaires chute de 16,2 %. Le nombre d’emplois salariés poursuit sa baisse dans l’industrie (- 6,5 %), ainsi que dans certaines branches du tertiaire, comme l’hôtellerie-restauration (- 20,2 %). Globalement, l’emploi diminue de 2,2 %. Dans ce contexte, les exportations et les importations reculent de 13,0 % et 9,7 %. Quant à la proportion de demandeurs d’emploi dans la population active, elle passe de 6,2 % fin 2019 à 7,1 % fin 2020.

Suisse : activité économique en recul modéré

D’après une estimation provisoire du Secrétariat d’État à l’économie (SECO), le PIB de la Suisse se réduirait de 2,9 % en 2020 (après une croissance de 1,1 % en 2019 et 3,0 % en 2018). L’activité suisse est habituellement portée par une industrie et un secteur des services dynamiques ; ces derniers sont frappés sévèrement par la crise sanitaire. La production industrielle recule de 4,0 %. Quant au chiffre d’affaires, il fléchit de 6,6 % dans l’industrie mais de 35,3 % dans l’hébergement-restauration. De plus, la consommation privée affiche une baisse historique de 4,4 %. Après quatre années de croissance, le commerce extérieur est fortement affecté : les exportations et les importations se contractent de 7,1 % et de 11,2 %. La balance commerciale s’avère néanmoins positive avec un excédent record de 38,9 milliards d’euros.

La Suisse compte 5 millions de personnes actives occupées en moyenne sur l’année 2020, soit une légère baisse de 0,3 % sur un an, alors qu’en Suisse du Nord-Ouest leur nombre progresse (+ 1,5 %).

Fin 2020, près de 344 000 frontaliers étrangers travaillent en Suisse, dont plus de la moitié réside en France. Ces derniers sont plus nombreux qu’en 2019 : + 1,2 % sur un an. Concernant les frontaliers résidant en Alsace, ils sont plus de 34 700 à se rendre dans les cinq cantons de la Suisse du Nord-Ouest (+ 1,6 %). Le taux de chômage suisse au sens du BIT est en hausse de 0,4 point, pour atteindre 4,8 % de la population active ; il passe de 3,5 % à 4,7 % sur un an en Suisse du Nord-Ouest.

Chute exceptionnelle et historique du PIB en Belgique

La Banque nationale de Belgique évalue la croissance belge à - 6,3 %, effondrement le plus significatif depuis la Seconde Guerre mondiale et plus de trois fois supérieur à celui constaté lors de la récession de 2009 (- 2,0 %). Après une croissance autour de + 1,8 % ces trois dernières années, l’économie belge n’a pas résisté à la crise sanitaire mondiale et son niveau est très éloigné de celui d’avant-crise. Dans les services, la valeur ajoutée baisse de 6,4 % en 2020, contre une progression de 1,6 % en 2019. Cette contraction est principalement liée aux très mauvais résultats « du commerce, de la réparation d’automobiles, des transports, de l’hébergement et de restauration » suite aux mesures gouvernementales prises dans le cadre de la crise sanitaire. L’activité dans cette branche s’est dès lors repliée de 13,2 % (contribution de - 2,2 points à la chute du PIB). La branche d’activité des « arts, spectacles et activités récréatives et autres activités de services » est la plus affectée avec une chute de valeur ajoutée de l’ordre de 20 % (contribution de - 0,4 % à la chute du PIB). En 2020,la performance de l’industrie et de la construction diminue de 4,2 % (contre respectivement + 2,2 % et + 4,2 % en 2019). La consommation des ménages baisse nettement (- 8,7 %), face à une régression modérée de la consommation publique (- 0,9 %). Avec l’incertitude permanente, les investissements privés et publics se contractent également. Le volume des exportations diminue de 5,7 % et celui des importations de 5,1 %. L’emploi intérieur perd 2 500 personnes en 2020, soit - 0,1 %, contre une hausse de 75 600 en 2019 (+ 1,6 %) : le nombre de salariés baisse en effet de 16 500, quand le nombre d’indépendants s’accroît de 14 000. La Belgique compte 282 000 chômeurs, soit une hausse de 3,2 % en 2020. Quant au taux de chômage au sens du BIT, il s’établit à 3,8 % contre 4,0 % un an auparavant.

Selon l’Institut wallon de l’évaluation, de la prospective et de la statistique (IWEPS), l’activité économique wallonne se contracte de 5,9 % en 2020 (après + 1,6 % en 2019). La consommation privée recule de 7,2 %, tandis que la consommation publique nationale reste sensiblement au même niveau (- 0,9 %). Les exportations comme les importations chutent, respectivement de 4,2 % et 4,6 %. Le nombre de personnes actives occupées s’accroît de 1 700 en un an, comme le nombre de chômeurs : + 2 900, soit + 2,7 % par rapport à l’année précédente. Le taux de chômage atteint 5,0 %, contre 4,4 % un an auparavant.

L’économie luxembourgeoise résiste malgré les incertitudes de la crise sanitaire

L’activité économique de l’année 2020 est marquée par un recul du PIB de 1,3 % (contre une progression de 2,3 % en 2019) selon les premières estimations de l’Institut national de la statistique et des études économiques luxembourgeois (STATEC). Cette baisse est la plus forte depuis la crise de 2008-2009. Les services d’information et communication prennent une part importante à la croissance (hausse de la valeur ajoutée de 17 % en 2020 pour les TIC). Les branches les plus dynamiques sont les services publics et la construction (+ 5,0 % et + 3,5 %). Les exportations diminuent davantage que les importations (7 % contre 6 %). En un an, l’emploi salarié progresse de 1,6 %, et le nombre de frontaliers de 2,1 % à 208 000 actifs. En revanche, le chômage bondit : 18 900 personnes sont au chômage fin 2020, soit + 20,8 % sur l’année. Le taux de chômage au sens du BIT passe ainsi de 5,4 % à 6,3 %.

Figure 1Taux de croissance du PIB : variation par rapport à l'année précédente

en %
Taux de croissance du PIB : variation par rapport à l'année précédente (en %)
2015 2016 2017 2018 2019 2020
Allemagne 1,7 2,2 2,5 1,3 0,6 -4,9
Bade-Wurtemberg 3,1 1,2 3,6 2,2 -0,5 -5,5
Rhénanie-Palatinat 2,6 1,1 1,4 0,6 0,0 -4,5
Sarre 0,6 -0,5 1,0 -0,5 -3,1 -6,7
Suisse 1,3 1,6 1,8 3,0 1,1 -2,9
Belgique 1,7 1,5 1,7 1,8 1,8 -6,3
Wallonie 1,3 1,4 2,3 1,3 1,6 -5,9
Luxembourg 3,9 2,4 1,8 3,1 2,3 -1,3
France 1,1 1,2 2,3 1,5 1,5 -8,2
Zone euro 2,1 2,0 2,4 1,9 1,2 -6,6
Union Européenne 2,3 2,0 2,4 2,1 1,5 -6,2
  • Note : le produit intérieur brut (PIB) est une mesure de l'activité économique. Il est défini comme la valeur de tous les biens et services produits, moins la valeur des biens et services utilisés dans leur création. Le calcul du taux de croissance annuel du PIB en volume est destiné à permettre les comparaisons des dynamiques du développement économique à la fois à travers le temps et entre des économies de différentes tailles. Pour le calcul du taux de croissance du PIB en volume, le PIB à prix constants est évalué avec les prix de l'année précédente et les changements du volume ainsi calculés sont imputés au niveau d'une année de référence. C'est ce qu'on appelle une série chaînée liée. Par conséquent, les mouvements de prix ne contribuent pas à augmenter le taux de croissance.
  • Sources : INSEE, Destatis, Statistisches Landesämter Rheinland-Pfalz, Baden-Württemberg, Saarland, Confédération Suisse, Secrétariat d'Etat à l'économie, Banque nationale de Belgique, Office national pour l'emploi belge, Institut wallon de l'évaluation, de la prospective et de la statistique, Institut national de la statistique et des études luxembourgeois.

Figure 1Taux de croissance du PIB : variation par rapport à l'année précédente

  • Note : le produit intérieur brut (PIB) est une mesure de l'activité économique. Il est défini comme la valeur de tous les biens et services produits, moins la valeur des biens et services utilisés dans leur création. Le calcul du taux de croissance annuel du PIB en volume est destiné à permettre les comparaisons des dynamiques du développement économique à la fois à travers le temps et entre des économies de différentes tailles. Pour le calcul du taux de croissance du PIB en volume, le PIB à prix constants est évalué avec les prix de l'année précédente et les changements du volume ainsi calculés sont imputés au niveau d'une année de référence. C'est ce qu'on appelle une série chaînée liée. Par conséquent, les mouvements de prix ne contribuent pas à augmenter le taux de croissance.
  • Sources : INSEE, Destatis, Statistisches Landesämter Rheinland-Pfalz, Baden-Württemberg, Saarland, Confédération Suisse, Secrétariat d'Etat à l'économie, Banque nationale de Belgique, Office national pour l'emploi belge, Institut wallon de l'évaluation, de la prospective et de la statistique, Institut national de la statistique et des études luxembourgeois.
Publication rédigée par :Marie-Laure Kayali, Olivasoa Razafindramanana (Insee)