Insee Conjoncture Guyane ·
Juillet 2021 · n° 14Bilan économique 2020 - Guyane
En 2020, l’économie guyanaise subit, comme les autres régions françaises, les conséquences de la pandémie mondiale : son PIB devrait subir une baisse de 4 %, dû au confinement du printemps. Cet impact touche une économie qui suit une dynamique positive depuis plusieurs années, qu’elle doit surtout aux besoins importants d’une population en forte croissance. De plus, les dispositifs d’aides gouvernementales associés à l’importance du secteur public en Guyane permettent d’amortir le ralentissement de l’activité. Ainsi, l’emploi est peu affecté, la hausse des prix est contenue et la consommation se redresse après le confinement.
Ce bilan économique fait partie des 17 bilans économiques régionaux 2020 publiés par
l'Insee.
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Synthèse régionale - Contexte national Bilan économique 2020
Sylvie Blanc, Aliette Cheptitski (Insee)
- Synthèse régionale - L’économie 2020 au rythme de la crise
- Une situation de l’emploi, globalement peu modifiée
- Une consommation qui se redresse après le confinement
- Une hausse contenue pour les prix et forte pour l’épargne
- Une modification de la structure des échanges extérieurs
- Les entreprises dans l’attente de la reprise
- Contexte national - En 2020, la crise sanitaire a pesé lourdement sur l’activité économique mondiale
- En France, l’activité en 2020 a davantage chuté que dans la moyenne de la zone euro
- L’impact de la pandémie a été contrasté suivant les différentes branches d’activité
- Avec l’utilisation massive de l’activité partielle, l’emploi a beaucoup moins baissé que l’activité économique
- En moyenne, le pouvoir d’achat des ménages et le taux de marge des entreprises ont été préservés, grâce aux mesures de soutien
Synthèse régionale - L’économie 2020 au rythme de la crise
En 2020, en Guyane comme partout en France, un confinement a été mis en place pour freiner l’épidémie de Covid-19 du 17 mars au 11 mai stoppant brutalement l’économie puis des restrictions tout au long de l’année. Ceci a eu un impact sur l’économie de la Guyane, amorti néanmoins par rapport aux autres régions françaises. Trois facteurs expliquent cet effet pondéré. D’abord, d’un point de vue conjoncturel, comme sur l’ensemble du territoire national, les mesures gouvernementales ont permis de maintenir l’emploi malgré la baisse d’activité. Ensuite, la Guyane étant en expansion démographique, ses besoins en équipements soutiennent le niveau d’investissement et diminue les effets de la baisse d’activité. Enfin, la crise sanitaire arrive sur un territoire qui, comme les Antilles, est marqué par l’importance du secteur public, ce qui en amortit le choc. Néanmoins, quelques secteurs (restaurants, activités culturelles, loisirs….) ont dû arrêter d’exercer leur activité pendant une partie de l’année .
En 2020, la Guyane a connu un confinement général du 17 mars au 11 mai, puis restrictions adaptées à la circulation du virus : des confinements de certains quartiers au plus fort de la vague entre juin et septembre, des réouvertures progressives des bars, des restaurants, des cinémas, des salles de sport… Un couvre-feu a été mis en place en Guyane : les horaires ont été adaptés en fonction des taux d’incidence (de 19h à 23h jusqu’à 5h). Les déplacements depuis ou vers Saint-Laurent et Saint-Georges nécessitaient un motif impérieux à certaines périodes.
Avec le coup d’arrêt brutal dû au confinement de mars à mai 2020, le recul de l’activité économique de la Guyane est estimé à 25 % pendant la période, avant de montrer des signes de reprise progressive en fin d’année. Comme dans l’ensemble des régions d’Outre-mer, l’impact y a été moins important que dans les autres régions françaises, notamment en ce qui concerne l’emploi salarié et la création d’entreprises, qui demeurent à un niveau toujours élevé. Lors du premier confinement, en effet, la France métropolitaine a subi un recul de 33 % alors qu’il était de -20% à la Martinique et à la Guadeloupe, et -28% à La Réunion.
Les effets négatifs de ce premier confinement sont estimés à – 4 % de PIB sur l’année (pour en savoir plus). Ils arrivent sur une croissance relativement dynamique (+4,3 % en 2019, +2,8 % en 2018). Elle avait été ralentie en 2017, année de conflits sociaux.
Les différentes mesures de soutien à l’activité et à l’emploi ont joué un rôle essentiel pour atténuer l’impact de la crise sanitaire. En particulier, le dispositif d'activité partielle a été rapidement mis en place par le gouvernement (aussi appelé chômage partiel ou technique) pour favoriser le maintien dans l'emploi des salariés. Fin avril, au plus fort de la première vague, le dispositif de chômage partiel a ainsi concerné jusqu’à 39 % des travailleurs en Guyane. L’utilisation de ce dispositif est encore plus importante en Guadeloupe (53 %) et en Martinique (45 %). Ces mesures ont été, dans l’ensemble, similaires à celles mises en place en France métropolitaine mais leur incidence sur l’économie a été un peu plus marquée. Le poids plus important du secteur non marchand, et notamment des administrations, permet d’amoindrir les conséquences des confinements et de la baisse d’activité. En Guyane, les services non marchands, et particulièrement les services administrés (administration publique et éducation, santé et action sociale) représentent 34 % de la valeur ajoutée contre 22 % en France métropolitaine.
Une situation de l’emploi, globalement peu modifiée
Conséquence, l’emploi salarié continue d’augmenter mais à un rythme inférieur à celui des deux dernières années. La hausse de 1,5 % en 2020 succède à une hausse de + 4 ,4 % en 2019. Après avoir diminué en début d’année, les effectifs salariés ont rebondi au deuxième semestre. Au total, ce sont 800 emplois qui sont créés en 2020, essentiellement dans le secteur tertiaire non marchand. Le secteur privé, qui représente un peu plus de la moitié des emplois, en a créé 140. En France métropolitaine, ce sont trois quarts des emplois qui relèvent du secteur privé. Un secteur, cependant, souffre davantage que les autres : l’hébergement et la restauration. En effet, les effectifs salariés diminuent de 10 % en Guyane.
Ainsi, le volume d’heures rémunérées global baisse de 7 % en 2020 par rapport à 2019. En particulier au 2ᵉ trimestre ce volume a chuté de 20 % par rapport au même trimestre 2019 (Pour en savoir plus). C’est moins qu’aux Antilles. (figure 2)
Le taux de chômage diminue en 2020 pour s’établir à 16 %, il était de 20 % en 2019. Cette baisse n’est due qu’aux difficultés à rechercher un emploi durant le confinement au 2ᵉ trimestre. Conséquence de ces difficultés, les personnes en recherche d’emploi ont ainsi quitté la population des actifs pour celle des inactifs. Elles rejoignent ainsi, notamment, la population formant le halo autour du chômage qui augmente de 2 points par rapport à 2019 et s’établit à 21 % de la population âgée de 15 à 64 ans.
Dès le 3e trimestre, le taux de chômage retrouve son niveau de début d’année.
Une consommation qui se redresse après le confinement
La pandémie a affecté de manière différente les moteurs de la croissance. Le premier d’entre eux, la consommation des ménages, recule durant le premier confinement de 22 %.
En 2020, les ventes de voitures particulières et commerciales accusent une baisse de 19 % par rapport à l’année précédente. Le marché de l’occasion est moins impacté avec un repli de 7,1 %.
Les importations de biens de consommation durables reculent de 0,7 % alors que les importations de biens non durables (essentiellement du textile, des produits alimentaires et pharmaceutiques) progressent quant à elles de 3,1 %.
Une hausse contenue pour les prix et forte pour l’épargne
Cette consommation atone des ménages s’inscrit pourtant dans une évolution des prix favorable. En 2020, les prix augmentent de 0,6 % en Guyane (figure 3), soit deux fois moins que la hausse observée sur les 12 mois précédents. Ce net ralentissement est principalement dû à la baisse des prix de l’énergie. Cette évolution des prix en Guyane est similaire à celle observée pour la France entière ainsi qu’en Guadeloupe et en Martinique. La Réunion est le seul territoire où les prix baissent entre janvier 2020 et janvier 2021.
La crise sanitaire a entraîné la mise en place de mesures de restriction des déplacements et d’ouverture des commerces aux secteurs essentiels de l’économie. Aussi confinement et couvre-feux ont fortement limité la consommation habituelle des Guyanais. L’augmentation des prix a été plus importante dans les secteurs où la consommation a été forte. Ainsi, les prix de l’alimentation, ont augmenté de 2 %. Les prix des produits manufacturés ont une augmentation similaire à l’ensemble des produits (+ 0,7 %). À l’opposé, les prix de l’énergie ont fortement baissé de 5,3 %. La baisse de l’activité économique et des déplacements a provoqué une hausse des stocks de pétrole avant que la production d’or noir s’ajuste à la demande.
La hausse de l’emploi et la relative stabilité des prix ne tirent pas, comme traditionnellement la consommation des ménages. Les activités de loisirs (restaurants, sorties, vacances,…) ont été contraintes ce qui a diminué les dépenses. Il en résulte une augmentation globale de l’épargne des ménages de 14 %. La croissance des dépôts à vue des ménages (+22 % ; +109 M€) porte cette hausse. Cette hausse globale masque des disparités de comportements entre les ménages. Tous n’ont pas pu épargner.
Une modification de la structure des échanges extérieurs
La pandémie génère une situation inédite : l’augmentation de l’épargne ne trouvant pas de débouchés à cause du confinement, la structure des échanges avec l’extérieur se modifie. Les importations de denrées alimentaires, boissons et produits à base de tabac augmentent (+ 6,3 %) tout comme celles des produits agricoles (+ 7,7 %). À rebours des années précédentes, les importations de produits pétroliers raffinés chutent de 38 % avec les restrictions de déplacement, ce qui entraîne un léger rééquilibrage de la balance commerciale de la Guyane structurellement déficitaire. Les importations d’équipements mécaniques, de matériel électrique, électronique et informatique sont également en baisse par rapport à 2019 (- 2 %). À l’image des autres départements français d’outre-mer, la Guyane se caractérise par la faiblesse de ses échanges extérieurs, spatial excepté. Les différentes productions locales font face à des contraintes spécifiques liées notamment à l’éloignement de leurs marchés d’exportation et à la compétitivité des produits.
De fait, si la nature des échanges se modifie, les importations demeurent bien largement supérieures aux exportations. Ainsi, le trafic global du Grand Port Maritime de Guyane (GPMG) est en hausse de 2,4 %. Les importations qui représentent 88 % du trafic portuaire du GPMG sont en hausse de 2 % tandis que les exportations augmentent de 6 %. Toutefois pour une tonne de marchandises exportées, 7,7 tonnes sont importées. L’essentiel de la hausse des importations est dû aux BTP dont les besoins poussent le trafic de clinker et de produits pour la fabrication du ciment local.
Les entreprises dans l’attente de la reprise
Les investissements réalisés par les entreprises, autre moteur de la croissance économique, baissent de 20 % mais d’autres signaux positifs pourraient atténuer cette évolution négative. En effet, comme les ménages, les entreprises ont épargné : leurs dépôts à vue augmentent de 37 % tout comme leurs actifs financiers totaux, portant leur valeur totale à 868,6 M€ fin 2020.
Le secteur du tourisme a souffert de la crise sanitaire en raison d'une part des restrictions d'échanges entre territoires et d'autre part des mesures de couvre-feux limitant les déplacements dans le territoire. Malgré des mesures spécifiques pour faciliter le tourisme endogène, les structures touristiques ont eu du mal à maintenir une activité minimale. Au 2e trimestre 2020, plus de 60 % de salariés étaient en situation d’activité partielle (figure 4). L'hôtellerie a pu bénéficier d'un regain d’activité à la fin du troisième trimestre essentiellement dû au tourisme d’affaire.
Avec le contexte sanitaire difficile en Guyane comme ailleurs dans le monde, ce sont tout de même 7 tirs qui ont été effectués depuis Kourou avec 64 charges utiles envoyées. Le calendrier initial prévoyait une activité soutenue avec 8 lancements au 1er semestre 2020. Le chantier de construction de la zone de lancement d’Ariane 6 s’est poursuivi. .
tableauFigure 1 – Evolution des différents agrégats du PIB pendant la période de confinement
impact du confinement (en volume %) |
Impact en évolution | Impact PIB sur l'année |
Impact en millions € |
---|---|---|---|
PIB | -25,4% | -3,9% | -163 |
Consommation finale | -15,1% | -2,6% | -108 |
dont Conso Ménages | -22,4% | -2,2% | -92 |
Investissement | -20,1% | -0,9% | -38 |
Variation de Stocks | n.c. | 1,9% | 81 |
Solde du commerce extérieur | 37,7% | -2,4% | -99 |
Exportations | -75,4% | -4,5% | -187 |
Importations | -17,4% | 2,1% | 89 |
- Lecture : Pendant le confinement, l’activité économique diminue de 19,6 % en volume par rapport à une situation normale.
- Sources : Comptes économiques, traitement Cerom, commerce extérieur, ICA.
tableauFigure 2 – Evolution du volume mensuel des heures rémunérées en 2020 par rapport à 2019
Région | Guadeloupe | Martinique | Guyane |
---|---|---|---|
Janvier | 3,5 | 1,2 | 5,7 |
Février | 1,7 | -0,4 | 4,4 |
Mars | -13,4 | -14,9 | -9,8 |
Avril | -41,3 | -39 | -29,1 |
Mai | -27,4 | -25,4 | -19 |
Juin | -14,6 | -11,9 | -12,2 |
Juillet | -10 | -7,6 | -12,3 |
Aout | -7,2 | -6,1 | -7,8 |
Septembre | -5,6 | -5,2 | -4,4 |
Octobre | -7,1 | -5,3 | -2,2 |
Décembre | -6,6 | -10,7 | -1,4 |
- Note : ensemble des heures rémunérées des salariés y compris les heures supplémentaires ainsi que les absences pour lesquelles le salarié est rémunéré
- Lecture : en Guadeloupe en avril 2020 le volume d'heures rémunérées est inférieur de 40% au volume d'avril 2019
- Source : Insee, Déclarations sociales nominatives (DSN)
graphiqueFigure 2 – Evolution du volume mensuel des heures rémunérées en 2020 par rapport à 2019
tableauFigure 3 – Indice des prix à la consommation en Guyane – Janvier 2021
Regroupements | Pondérations 2021 | Indice pour le mois de | Variation (%) | |
---|---|---|---|---|
Jan 2020 | Jan 2021 | au cours des 12 derniers mois | ||
Ensemble | 10 000 | 102,8 | 103,4 | 0,6 |
Alimentation | 1 760 | 104,5 | 106,6 | 2,0 |
Produits frais | 172 | 110,3 | 111,6 | 1,2 |
Alimentation hors produits frais | 1 588 | 103,7 | 105,8 | 2,0 |
Tabac | 168 | 125,0 | 140,3 | 12,2 |
Produits manufacturés | 3 040 | 97,4 | 98,0 | 0,7 |
Habillement et chaussures | 634 | 93,4 | 95,2 | 1,9 |
Produits de santé | 438 | 88,6 | 86,7 | -2,1 |
Autres produits manufacturés | 1 968 | 100,8 | 101,6 | 0,8 |
Énergie | 752 | 109,6 | 103,8 | -5,3 |
dont Produits pétroliers | 521 | 107,7 | 98,4 | -8,7 |
Services | 4 280 | 103,6 | 104,3 | 0,7 |
Loyers et services rattachés | 1 367 | 103,7 | 104,4 | 0,7 |
Service de santé | 548 | 105,2 | 105,5 | 0,2 |
Services de transports | 106 | 89,7 | 91,6 | 2,1 |
Services de communications | 429 | 96,0 | 95,3 | -0,7 |
Autres services | 1 830 | 106,6 | 106,3 | -0,2 |
Alimentation et tabac | 1 928 | 106,4 | 109,5 | 2,9 |
Produits manufacturés et énergie | 3 792 | 100,0 | 99,3 | -0,6 |
Manufacturés hors habillement et chaussures | 2 406 | 98,5 | 98,8 | 0,2 |
Ensemble hors produits frais | 9 835 | 102,6 | 103,2 | 0,6 |
Ensemble hors énergie | 9 248 | 102,2 | 103,3 | 1,1 |
Ensemble hors transport | 9 894 | 103,2 | 103,5 | 0,3 |
Ensemble hors tabac | 9 832 | 102,4 | 102,9 | 0,4 |
- Source : Insee, Indice des prix à la consommation des ménages
tableauFigure 4 – Part des salariés du secteur hébergement-restauration en situation d'activité partielle
Guyane | France hors Mayotte | |
---|---|---|
mars 2020 | 25,6 | 31,7 |
avril 2020 | 68,9 | 68,2 |
mai 2020 | 64,6 | 62,6 |
juin 2020 | 60,1 | 31,5 |
juil.-20 | 60 | 15,6 |
août 2020 | 45,6 | 10,9 |
sept. 2020 | 30,6 | 11,9 |
oct. 2020 | 19,6 | 19,5 |
nov. 2020 | 14,6 | 54,5 |
déc. 2020 | 11,3 | 52,6 |
- Avertissement : données arrêtées au 8 mars 2021
- Source DSN
graphiqueFigure 4 – Part des salariés du secteur hébergement-restauration en situation d'activité partielle
Contexte national - En 2020, la crise sanitaire a pesé lourdement sur l’activité économique mondiale
L’activité mondiale en 2020 a été avant tout déterminée par l’évolution de la pandémie de Covid-19 et par les mesures d’endiguement adoptées dans les différents pays. La Chine, où le confinement strict et la chute de l’activité ne se sont pas étendus au-delà du premier trimestre, a enregistré un PIB en croissance de 2,3 % en moyenne sur l’année. Les États-Unis – où l’épidémie s’est peu à peu intensifiée, entraînant la mise en place de restrictions locales – et le Japon – bien que relativement épargné – ont en revanche connu une chute du PIB de - 3,5 % et - 4,7 % respectivement. De même, et de façon plus marquée, le PIB a diminué de 6,7 % en moyenne dans la zone euro, laquelle a connu deux vagues épidémiques, au printemps et à l’automne, et instauré des restrictions nationales strictes. Dans la plupart des pays, la consommation des ménages a souffert des mesures limitant les déplacements et les opportunités de consommer ; la production des branches du commerce, des services de transport et de l’hébergement-restauration ont été particulièrement affectées.
En France, l’activité en 2020 a davantage chuté que dans la moyenne de la zone euro
Après une croissance de 1,8 % en 2019, l’activité économique française a chuté fortement à - 8,0 % en 2020 (figure 5). L’effet de la crise sanitaire a donc été du même ordre de grandeur qu’en Italie (- 8,9 %), nettement plus prononcé qu’en Allemagne (- 5,1 %) et un peu moins qu’au Royaume-Uni et en Espagne (respectivement - 9,8 % et - 10,8 %).
Tous les principaux postes de la demande (hors stocks) participent à cette chute. La plus forte contribution est celle de la consommation des ménages, de - 3,7 points : les mesures de restriction ont grandement limité les opportunités de consommer des ménages, avec – entre autres – la fermeture pendant plusieurs mois des magasins « non essentiels », des restaurants et cafés ou encore des activités culturelles et sportives. Bien que, de manière inhabituelle, la baisse de l’investissement n’ait guère été amplifiée par rapport à celle de l’activité, ce poste contribue à hauteur de - 2,1 points à la chute du PIB – l’investissement des entreprises contribuant plus que celui des ménages et que celui des administrations publiques. La contribution des échanges extérieurs suit, à - 1,1 point : les exportations ont en effet davantage diminué que les importations, bien que les deux aient pâti de la situation économique dégradée de la France et de ses principaux partenaires (notamment européens).
tableauFigure 5 – Variations annuelles du PIB et contribution des principaux postes de la demande
PIB (en %) | Consommation des ménages (en points) | Investissement des ménages (en points) | Investissement des entreprises (en points) | Investissement des administrations publiques (en points) | Echanges extérieurs (en points) | Stocks (en points) | |
---|---|---|---|---|---|---|---|
2016 | 1,0 | 0,9 | 0,1 | 0,3 | 0,0 | -0,4 | -0,4 |
2017 | 2,5 | 0,9 | 0,3 | 0,7 | 0,0 | 0,0 | 0,2 |
2018 | 1,8 | 0,5 | 0,1 | 0,5 | 0,1 | 0,5 | 0,0 |
2019 | 1,8 | 1,0 | 0,2 | 0,4 | 0,3 | -0,3 | 0,0 |
2020 | -8,0 | -3,7 | -0,7 | -1,1 | -0,2 | -1,1 | -0,2 |
- Note : les volumes sont corrigés des variations saisonnières et des effets des jours ouvrables (CVS-CJO).
- Lecture : en 2020, le PIB a diminué de - 8,0 % ; la contribution de la consommation privée des ménages a été de – 3,7 points.
- Source : Insee, comptes nationaux trimestriels, base 2014 ; calculs Insee.
graphiqueFigure 5 – Variations annuelles du PIB et contribution des principaux postes de la demande
Cette forte baisse du PIB en moyenne sur l’année recouvre cependant de grandes disparités mensuelles, au gré de l’évolution de la pandémie et des mesures de restrictions (figure 6). Le creux d’activité le plus marqué s’est situé au mois d’avril, à environ - 30 % (en écart au niveau d’avant crise, à savoir le quatrième trimestre 2019) : il reflète la sévérité du confinement mis en place entre le 17 mars et le 11 mai au moment de la première vague épidémique (fermeture d’une partie de l’économie et interdiction de sortir du domicile hors motifs autorisés) mais aussi sa soudaineté, obligeant de nombreuses entreprises à réduire ou cesser leur activité du fait de l’absence de protocoles sanitaires ou de la difficulté à instaurer massivement le télétravail. Le rebond a cependant été particulièrement vif en mai et juin, l’activité se stabilisant entre août et octobre à près de - 3 % par rapport à son niveau d’avant crise. La résurgence de l’épidémie et le confinement instauré en novembre ont ensuite conduit à une nouvelle baisse de l’activité, mais d’ampleur bien moindre, celle-ci se situant ce mois-ci à - 7 % en écart à l’avant crise : les mesures mises en place entre le 30 octobre et le 15 décembre ont en effet été moins strictes, et les ménages et les entreprises se sont davantage adaptées à la situation sanitaire (protocoles sanitaires, télétravail).
tableauFigure 6 – Pertes d’activité mensuelles estimées, écart au quatrième trimestre 2019
Perte d'activité mensuelle | |
---|---|
Janv. 2020 | -0,4 |
Fév | -0,6 |
Mars | -16,5 |
Avr | -30,0 |
Mai | -17,3 |
Juin | -7,6 |
Juil | -4,6 |
Août | -2,4 |
Sept | -2,4 |
Oct | -2,8 |
Nov | -7,1 |
Déc | -4,0 |
- Lecture : en novembre, l’activité économique a été en retrait d’environ – 7 % par rapport au niveau du quatrième trimestre 2019.
- Source : calculs Insee à partir de sources diverses.
graphiqueFigure 6 – Pertes d’activité mensuelles estimées, écart au quatrième trimestre 2019
L’impact de la pandémie a été contrasté suivant les différentes branches d’activité
En 2020, la valeur ajoutée totale a dans l’ensemble davantage baissé que la consommation privée, avec néanmoins des différences selon les branches (figure 7). La chute de la valeur ajoutée a été la plus forte dans l’hébergement-restauration (- 42 %) – en lien avec les fermetures réglementaires et l’arrêt d’une grande partie du tourisme –, dans les matériels de transport (- 28 %) et les services de transport (- 23 %) – qui ont souffert de la baisse des déplacements nationaux et internationaux –, dans la construction (- 16 %) – qui a surtout été affectée pendant le premier confinement –, et dans les autres services aux ménages (- 23 %) – qui regroupent les activités culturelles et sportives. Au total, les contributions les plus fortes à la baisse totale de la valeur ajoutée sont celles de l’hébergement-restauration, des services de transport et – en raison de leur poids dans la valeur ajoutée et dans le sillage de la situation économique globalement dégradée – des services aux entreprises ; chacune à hauteur d’environ - 1 point.
tableauFigure 7 – Variation annuelle et contribution des branches en 2020Valeur ajoutée
Agriculture (en points) | Autres branches industrielles (en points) | Industrie agro-alimentaires (en points) | Matériels de transport (en points) | Construction (en points) | Autres services marchands (en points) | Commerce (en points) | Transport (en points) | Hébergement-restauration (en points) | Services aux entreprises (en points) | Services aux ménages (en points) | Services non marchands (en points) | |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Agriculture | 0,0 | |||||||||||
Industrie | -0,8 | -0,1 | -0,4 | |||||||||
Construction | -0,9 | |||||||||||
Services marchands | -0,4 | -0,7 | -1,1 | -1,2 | -0,9 | -0,7 | ||||||
Services non marchands | -1,0 |
- Note : les volumes sont corrigés des variations saisonnières et des effets des jours ouvrables (CVS-CJO). La valeur ajoutée totale est calculée hors impôts et subventions sur produits (contrairement au PIB).
- Lecture : en 2020, la valeur ajoutée totale a baissé de - 8,2 % ; l’hébergement-restauration a contribué à cette baisse à hauteur de – 1 point.
- Source : Insee, comptes nationaux trimestriels, base 2014 ; calculs Insee.
graphiqueFigure 7 – Variation annuelle et contribution des branches en 2020Valeur ajoutée
Avec l’utilisation massive de l’activité partielle, l’emploi a beaucoup moins baissé que l’activité économique
Après une accélération en 2019 (+ 266 100 emplois en fin d’année par rapport à la fin d’année 2018, après 171 500), l’emploi salarié privé a diminué en 2020 (- 332 300) : l’ampleur de la baisse a cependant été bien moindre (- 1,7 % par rapport à fin 2019) que pour l’activité économique. Le dispositif d’activité partielle, considérablement renforcé dès le début de la crise sanitaire, a été massivement utilisé par les entreprises afin de conserver une grande partie de leurs salariés empêchés de travailler : en avril 2020, 8,4 millions de salariés ont ainsi été concernés.
Le taux de chômage a connu des mouvements contraires et atypiques en 2020 : le contexte des deux confinements a en effet rendu difficiles, voire impossibles, les démarches de recherche active d’emploi, affectant par conséquent la mesure du taux de chômage. Ces effets « en trompe-l’œil » expliquent la baisse du taux de chômage au deuxième trimestre et en partie la baisse survenue également au quatrième trimestre : le taux de chômage s’y est situé à 8 % de la population active, soit quasiment le même niveau qu’un an auparavant (après 8,1 % fin 2019).
En moyenne, le pouvoir d’achat des ménages et le taux de marge des entreprises ont été préservés, grâce aux mesures de soutien
Après une évolution particulièrement dynamique en 2019 (+ 3,4 %), le revenu disponible brut des ménages a progressé plus modérément en 2020 (+ 1,0 %). D’une part, la masse salariale a diminué (- 4,1 %, conséquence des destructions d’emploi et de la mise au chômage partiel de nombreux salariés). C’est aussi le cas des revenus de la propriété (- 12,6 %) – reflétant en particulier le recul des dividendes versés. Cependant, les dispositifs de soutien (activité partielle et fonds de solidarité), ainsi que les stabilisateurs automatiques (assurance chômage, RSA, impôts) ont permis au revenu des ménages de globalement résister. Les prestations sociales ont ainsi augmenté de 9,5 %, tandis que les impôts sur le revenu et le patrimoine ont diminué à - 3,6 %. Le fonds de solidarité a notamment limité la baisse de l’excédent brut d’exploitation des entrepreneurs individuels (- 0,6 %). Par ailleurs, le déflateur de la consommation des ménages a ralenti avec l’inflation en 2020, à + 0,6 % après + 0,8 %. Finalement, le pouvoir d’achat a fortement ralenti à 0,4 %, après 2,6 % (figure 8) ; tandis que le pouvoir d’achat par unité de consommation s’est maintenu (0,0 %).
Du côté des entreprises, la valeur ajoutée (CVS-CJO) des sociétés non financières a chuté de 8,5 %. Le taux de marge a certes baissé lui aussi, mais dans une moindre mesure, à 31,7 % (après 33,4 % en 2019), soutenu par les dispositifs de soutien mentionnés précédemment (fonds de solidarité notamment et chômage partiel). Il revient ainsi à un niveau proche de celui observé entre 2015 et 2018, après avoir temporairement augmenté en 2019 sous l’effet principalement de l’enregistrement du CICE.
tableauFigure 8 – Variations annuelles du pouvoir d’achat et contribution de ses principaux déterminants
Revenus d'activité (en points) | Prestations (en points) | EBE des ménages purs (en points) | Revenus de la propriété (en points) | Impôts et cotisations (en points) | Prix à la consommation des ménages (en points) | Pouvoir d'achat (en %) | |
---|---|---|---|---|---|---|---|
2017 | 2,3 | 0,6 | 0,3 | -0,1 | -0,8 | -0,8 | 1,8 |
2018 | 1,9 | 0,8 | 0,3 | 0,7 | -0,6 | -1,7 | 1,4 |
2019 | 2,2 | 1 | 0,4 | -0,1 | -0,1 | -0,8 | 2,6 |
2020 | -2,7 | 3,4 | 0,2 | -0,7 | 0,8 | -0,6 | 0,4 |
- Note : les données sont corrigées des variations saisonnières et des effets des jours ouvrables (CVS-CJO).
- Lecture : en 2020, le pouvoir d’achat des ménages a ralenti à 0,4 % ; les revenus d’activités ont contribué à hauteur de près de – 3 points.
- Source : Insee, comptes nationaux trimestriels, base 2014 ; calculs Insee.
graphiqueFigure 8 – Variations annuelles du pouvoir d’achat et contribution de ses principaux déterminants
Définitions
Les inactifs sont les personnes âgées de 15 ans ou plus qui ne sont ni en emploi ni au chômage.
le dispositif de l’activité partielle (ou chômage partiel) permet aux établissements confrontés à des difficultés temporaires de diminuer ou suspendre leur activité tout en assurant aux salariés une indemnisation pour compenser leur perte de salaire. L’activité partielle fait l’objet de demandes d’autorisation préalables (DAP) déposées par les établissements souhaitant recourir à l’activité partielle en raison de la crise sanitaire, ainsi que les demandes d’indemnisation (DI). Lors de la phase d’indemnisation, il est possible que le nombre d’heures effectivement consommé soit inférieur à celui qui avait été demandé. En complément des données administratives (DAP et DI), les réponses des entreprises à l’enquête mensuelle Acemo-Covid-19 sont mobilisées. Elles permettent d’estimer le nombre de salariés qui ont été effectivement placés en activité partielle chaque mois, et d’anticiper ainsi les demandes d’indemnisations qui vont arriver, les entreprises disposant, pour un mois donné, d’un délai d’un an pour faire leur demande. L’ensemble des données présentées sur l’activité partielle sont susceptibles d’être révisées.
le volume d’heures rémunérées correspond à la durée pour laquelle le salarié est rémunéré sur une période. Cela inclut notamment les heures supplémentaires mais aussi les absences pour lesquelles le salarié perçoit une rémunération, comme les congés payés, les jours fériés ou les jours attribués au titre de la réduction du temps de travail. Ce volume d’heures rémunérées est une composante importante de l’activité économique, même s’il ne la mesure pas directement : d’une part, certaines absences sont considérées comme du travail rémunéré et d’autre part, la rémunération des salariés ne reflète pas toujours les fluctuations de leur productivité.
les montants des transactions par carte bancaire en face‑à‑face proviennent de Cartes Bancaires CB. Elles sont anonymisées et agrégées à l‘échelle départementale. Elles concernent tout détenteur de carte bancaire CB sur le territoire français, ce qui, outre les ménages, peut couvrir aussi des entreprises. Elles couvrent l’essentiel des transactions bancaires, avec et sans contact, à l’exception des transactions en vente à distance (internet). Elles permettent de suivre une partie de la consommation des ménages. Les transactions réalisées par d’autres moyens de paiement (espèces, chèque, ticket restaurant, etc.) ne sont pas suivies.
Estimation prenant en compte la correction des variations saisonnières et les effets des jours ouvrables.
Contrairement à la crise de 2008-2009, où la contribution négative de l’investissement dominait.
Situation sur le marché du travail au 26 avril 2020, Dares.
Un chômeur au sens du BIT est une personne âgée de 15 ans ou plus, sans emploi durant une semaine donnée, disponible pour travailler dans les deux semaines, et qui a effectué au cours des quatre dernières semaines une démarche active de recherche d’emploi.
Pour en savoir plus
Matthieu Cornut et Jean Louis (INSEE), David Farderl (IEDOM), « Un recul de l’activité économique de 25 % pendant le confinement », Insee Flash n°128, juin 2020
Christine Charton, Éric Durieux (Insee), "Confinement du printemps 2020 : un impact économique différencié selon les départements", Insee Références, avril 2021
Estimation prenant en compte la correction des variations saisonnières et les effets des jours ouvrables.
Contrairement à la crise de 2008-2009, où la contribution négative de l’investissement dominait.
Situation sur le marché du travail au 26 avril 2020, Dares.
Un chômeur au sens du BIT est une personne âgée de 15 ans ou plus, sans emploi durant une semaine donnée, disponible pour travailler dans les deux semaines, et qui a effectué au cours des quatre dernières semaines une démarche active de recherche d’emploi.