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Insee Première · Novembre 2024 · n° 2027
Insee PremièreUn travailleur frontalier sur cinq parcourt plus de 50 km pour aller travailler

Dorothée Ast, Guillaume Bichler, Quentin Manuaud, Olivier Schmidt (Insee)

En 2021, les travailleurs frontaliers parcourent en moyenne 34 km pour se rendre à leur travail, contre 14 km pour les non-frontaliers résidant dans les mêmes territoires. Ils utilisent majoritairement la voiture. 18 % d’entre eux ont des trajets de 50 km ou plus, et ces longs trajets sont en forte augmentation par rapport à 2010. Au niveau des frontières vers le Luxembourg, Genève et Bâle, les flux de travailleurs frontaliers sont très concentrés. Les trajets sont particulièrement longs vers le Luxembourg et vers l’Arc jurassien suisse, alors qu’ils sont plus courts vers Monaco.

Un travailleur frontalier sur cinq parcourt plus de 50 km pour aller travailler
Publication rédigée par :Dorothée Ast, Guillaume Bichler, Quentin Manuaud, Olivier Schmidt (Insee)

Les travailleurs frontaliers parcourent en moyenne 34 km pour se rendre au travail

En 2021, environ 465 000 personnes résident en France métropolitaine et travaillent dans l’un des huit pays frontaliers : Belgique, Luxembourg, Allemagne, Suisse, Italie, Monaco, Espagne et Andorre. La Suisse attire près de la moitié de ces (soit 224 000 personnes), et le Luxembourg près d’un quart (105 000), en raison notamment de salaires plus élevés qu’en France. Les flux de travailleurs vers l’Allemagne (50 000), la Belgique (46 000) et Monaco (33 000) sont moins conséquents, mais représentent un peu plus d’un quart (28 %) des travailleurs frontaliers. En revanche, l’Espagne, l’Italie et Andorre attirent très peu d’actifs venant de France (environ 5 000 travailleurs, soit 1 %). Les flux de travailleurs dans l’autre sens, depuis les pays voisins vers la France, sont nettement plus réduits : un peu moins de 30 000 salariés sont concernés en 2021.

45 proches des frontières suisse, luxembourgeoise, allemande, belge ou monégasque sont particulièrement concernées (sources). L’étude porte sur les travailleurs frontaliers résidant dans ces zones et qui ont des trajets de moins de 150 km, réalisés régulièrement voire quotidiennement. Ils représentent 94 % de l’ensemble des frontaliers.

Des trajets 2,5 fois plus longs pour les travailleurs frontaliers que pour les non-frontaliers

En 2021, ces travailleurs frontaliers parcourent en moyenne 34 km pour se rendre à leur travail, et ont ainsi des trajets 2,5 fois plus longs que les autres actifs en emploi résidant dans les mêmes territoires. Leurs trajets durent en moyenne 34 minutes, sans compter les problèmes de congestion qui peuvent fortement rallonger les temps de trajets, notamment au niveau de la frontière luxembourgeoise et de la frontière suisse. 88 % des travailleurs frontaliers ont des trajets de plus de 10 km, et 18 % ont même des trajets très longs, d’au moins 50 km (figure 1). En moyenne, les travailleurs frontaliers parcourent autant de distance en France que côté étranger pour rejoindre leur lieu de travail.

Figure 1 – Répartition des trajets domicile-travail selon la distance par pays de travail en 2021

en %
Figure 1 – Répartition des trajets domicile-travail selon la distance par pays de travail en 2021 (en %) - Lecture : En 2021, 8 % des frontaliers travaillant en Allemagne parcourent moins de 10 km pour se rendre à leur travail.
Pays de travail Moins de 10 km De 10 à moins de 20 km De 20 à moins de 30 km De 30 à moins de 40 km De 40 à moins de 50 km 50 km ou plus
Allemagne 8 20 22 20 13 17
Belgique 11 18 22 16 10 23
Luxembourg 2 8 17 29 19 25
Monaco 31 23 34 6 4 3
Suisse, dont : 14 24 19 14 12 17
depuis Auvergne-Rhône-Alpes 16 30 20 11 11 11
depuis la Bourgogne-Franche-Comté 3 11 19 19 16 31
depuis le Grand Est 19 17 16 18 9 21
Ensemble des frontaliers 12 19 20 18 13 18
Non-frontaliers 57 21 11 5 3 4
  • Lecture : En 2021, 8 % des frontaliers travaillant en Allemagne parcourent moins de 10 km pour se rendre à leur travail.
  • Champ : Personnes en emploi de 15 ans ou plus résidant dans les 45 zones d’emploi du champ de l’étude, qui se déplacent pour aller travailler et dont la distance domicile-travail est inférieure à 150 km.
  • Sources : Insee, recensement de la population 2021, exploitation complémentaire ; distancier Metric-OSRM, © les contributeurs d’Ouvrir dans un nouvel ongletOpenStreetMap et du projet Ouvrir dans un nouvel ongletOSRM.

Figure 1 – Répartition des trajets domicile-travail selon la distance par pays de travail en 2021

  • Lecture : En 2021, 8 % des frontaliers travaillant en Allemagne parcourent moins de 10 km pour se rendre à leur travail.
  • Champ : Personnes en emploi de 15 ans ou plus résidant dans les 45 zones d’emploi du champ de l’étude, qui se déplacent pour aller travailler et dont la distance domicile-travail est inférieure à 150 km.
  • Sources : Insee, recensement de la population 2021, exploitation complémentaire ; distancier Metric-OSRM, © les contributeurs d’Ouvrir dans un nouvel ongletOpenStreetMap et du projet Ouvrir dans un nouvel ongletOSRM.

Les parcourent quant à eux en moyenne 14 km pour aller au travail. Ils ont majoritairement des trajets de moins de 10 km (57 %), d’une durée moyenne de 17 minutes hors congestion, et 30 % travaillent dans leur commune de résidence.

La voiture est le mode de déplacement privilégié pour les déplacements domicile-travail, encore plus par les travailleurs frontaliers (82 %) que par les non-frontaliers (76 %). Les actifs qui travaillent dans un pays voisin utilisent autant les transports en commun que ceux qui travaillent en France, mais nettement moins les modes doux comme la marche ou le vélo, du fait de la distance. Avec des trajets longs et une forte utilisation de la voiture, les travailleurs frontaliers émettent davantage de CO2 lors de leurs déplacements domicile-travail que les non-frontaliers (encadré).

Les travailleurs frontaliers résident majoritairement dans les des (63 %, contre 46 % des autres actifs en emploi), en particulier dans des couronnes de situés à l’étranger (42 %) et dont l’aire d’attraction dépasse la frontière. C’est le cas particulièrement de Luxembourg, Genève, Monaco, Bâle, Sarrebruck, Lausanne et Charleroi. Cela explique en partie la forte utilisation de la voiture, l’accès aux transports en commun étant plus limité dans les couronnes que dans les pôles. Les travailleurs frontaliers sont moins nombreux à résider dans des pôles (28 %, contre 49 % des autres actifs), et ceux qui y résident utilisent souvent la voiture, car ils travaillent majoritairement en dehors du pôle.

Les zones d’emploi du Genevois Français, de Thionville, de Saint-Louis et de Menton sont particulièrement concernées par le travail frontalier : les frontaliers y représentent au moins la moitié des actifs en emploi (figure 2).

Figure 2 – Principales zones d’emploi concernées par le travail frontalier et principaux flux de travailleurs frontaliers en 2021

Figure 2 – Principales zones d’emploi concernées par le travail frontalier et principaux flux de travailleurs frontaliers en 2021 - Lecture : En 2021, dans la zone d’emploi du Genevois Français, les travailleurs frontaliers représentent 53 % des actifs en emploi de la zone dans le champ de l’étude. 87 300 personnes résident dans la zone d’emploi et travaillent dans le canton de Genève, et ils parcourent en moyenne 17 km.
Zone d'emploi Nombre de frontaliers Part des frontaliers parmi les actifs en emploi
(en %)
Principaux flux
Nuts 3 de travail Nombre de frontaliers Distance moyenne (en km)
Le Genevois Français (8416) 98 200 53 Genève 87 300 17
Vaud 10 200 44
Thionville (4424) 80 100 52 Luxembourg 77 000 34
Arr. Arlon 2 000 25
Saint-Louis (4418) 24 400 50 Bâle-Ville (Basel-Stadt) 13 300 12
Bâle-Campagne (Basel-Landschaft) 6 500 25
Menton (9314) 16 600 50 Monaco 16 600 9
Pontarlier (2715) 23 400 41 Neuchâtel 12 000 31
Vaud 8 700 47
Le Chablais (8415) 13 200 25 Genève 5 800 35
Vaud 5 700 49
Valais (Wallis) 1 500 48
Saint-Claude (2716) 5 200 24 Vaud 4 500 39
Forbach (4408) 8 300 23 Regionalverband Saarbrücken 5 400 14
Haguenau (4409) 14 900 13 Rastatt 4 700 29
Karlsruhe, Stadtkreis 2 800 43
Ortenaukreis 1 900 46
Baden-Baden, Stadtkreis 1 800 35
Germersheim 1 500 31
Sarreguemines (4420) 6 300 13 Regionalverband Saarbrücken 2 800 27
Metz (4410) 20 500 11 Luxembourg 20 400 59
Saint-Avold (4416) 5 100 11 Saarlouis 2 200 20
Luxembourg 1 500 83
Sedan (4421) 3 700 11 Arr. Virton 1 500 22
Annecy (8401) 15 500 11 Genève 14 500 43
La Vallée de l'Arve (8414) 4 600 11 Genève 4 400 37
Mulhouse (4411) 16 900 10 Bâle-Ville (Basel-Stadt) 8 800 38
Bâle-Campagne (Basel-Landschaft) 3 600 50
Montbéliard (2714) 4 600 8 Jura 3 500 37
Maubeuge (3217) 6 200 8 Arr. Mons 2 500 26
Roubaix-Tourcoing (3218) 10 500 7 Arr. Tournai-Mouscron 4 900 12
Arr. Kortrijk 3 200 22
Nice (9315) 14 700 6 Monaco 14 700 24
Belfort (2705) 3 900 5 Jura 3 200 34
Valenciennes (3222) 6 700 5 Arr. Tournai-Mouscron 2 600 30
Arr. Mons 1 800 33
Sélestat (4422) 2 100 5 /// /// ///
Colmar (4405) 3 300 4 /// /// ///
Verdun (4426) 1 100 4 /// /// ///
Dunkerque (3213) 2 500 3 /// /// ///
Charleville-Mézières (4403) 1 700 3 /// /// ///
Le Mont Blanc (8418) 900 3 /// /// ///
Lille (3216) 6 600 2 Arr. Tournai-Mouscron 2 800 26
Strasbourg (4423) 6 700 2 Ortenaukreis 4 900 26
Belley (8404) 500 2 /// /// ///
Oyonnax (8425) 600 2 /// /// ///
Besançon (2706) 1 500 1 /// /// ///
Lons-le-Saunier (2713) 900 1 /// /// ///
Béthune (3205) 500 1 /// /// ///
Douai (3212) 600 1 /// /// ///
Saint-Omer (3219) 500 1 /// /// ///
Sarrebourg (4419) 300 1 /// /// ///
Chambéry (8407) 700 1 /// /// ///
Cannes (9304) 1 400 1 /// /// ///
Cambrai (3208) 200 0 /// /// ///
Lens (3215) 400 0 /// /// ///
Nancy (4412) 1 100 0 /// /// ///
Bourg en Bresse (8405) 200 0 /// /// ///
  • /// : flux non représentés.
  • Notes : Sont représentés les principaux flux de travailleurs frontaliers depuis les zones d’emploi côté français et vers les Nuts 3 (nomenclature des unités territoriales statistiques niveau 3) des pays voisins (flux d'au moins 1 500 frontaliers). La nomenclature Nuts est un système hiérarchique de découpage du territoire économique de l'Union européenne à 3 niveaux.
  • Lecture : En 2021, dans la zone d’emploi du Genevois Français, les travailleurs frontaliers représentent 53 % des actifs en emploi de la zone dans le champ de l’étude. 87 300 personnes résident dans la zone d’emploi et travaillent dans le canton de Genève, et ils parcourent en moyenne 17 km.
  • Champ : Personnes en emploi de 15 ans ou plus résidant dans les 45 zones d’emploi du champ de l’étude, qui se déplacent pour aller travailler et dont la distance domicile-travail est inférieure à 150 km.
  • Sources : Insee, recensement de la population 2021, exploitation complémentaire ; distancier Metric-OSRM, © les contributeurs d’Ouvrir dans un nouvel ongletOpenStreetMap et du projet Ouvrir dans un nouvel ongletOSRM.

Figure 2 – Principales zones d’emploi concernées par le travail frontalier et principaux flux de travailleurs frontaliers en 2021

  • Notes : Sont représentés les principaux flux de travailleurs frontaliers depuis les zones d’emploi côté français et vers les Nuts 3 (nomenclature des unités territoriales statistiques niveau 3) des pays voisins (flux d'au moins 1 500 frontaliers). La nomenclature Nuts est un système hiérarchique de découpage du territoire économique de l'Union européenne à 3 niveaux.
  • Lecture : En 2021, dans la zone d’emploi du Genevois Français, les travailleurs frontaliers représentent 53 % des actifs en emploi de la zone dans le champ de l’étude. 87 300 personnes résident dans la zone d’emploi et travaillent dans le canton de Genève, et ils parcourent en moyenne 17 km.
  • Champ : Personnes en emploi de 15 ans ou plus résidant dans les 45 zones d’emploi du champ de l’étude, qui se déplacent pour aller travailler et dont la distance domicile-travail est inférieure à 150 km.
  • Sources : Insee, recensement de la population 2021, exploitation complémentaire ; distancier Metric-OSRM, © les contributeurs d’Ouvrir dans un nouvel ongletOpenStreetMap et du projet Ouvrir dans un nouvel ongletOSRM.

Des trajets particulièrement longs vers le Luxembourg et l’Arc jurassien suisse

Les trajets des travailleurs frontaliers présentent des fortes disparités selon la frontière, en termes de distance et de mode de transport. Ils sont particulièrement longs vers le Luxembourg : les actifs parcourent 42 km en moyenne pour se rendre au travail, et un quart d’entre eux parcourent au moins 50 km. Une large majorité d’entre eux utilisent la voiture (82 %). Toutefois, ils sont relativement nombreux à utiliser les transports en commun (17 %), notamment le train via la ligne TER Metz-Hagondange-Thionville-Luxembourg. Ils travaillent principalement à Luxembourg-ville ou Esch-sur-Alzette. Ils sont le plus souvent employés (28 %) ou ouvriers (28 %). Les activités financières et d’assurance y sont nettement surreprésentées (11 %, contre 3 % pour les non-frontaliers).

Vers la Suisse, les trajets des travailleurs frontaliers sont particulièrement longs depuis la Bourgogne-Franche-Comté, avec 43 km en moyenne. Ces travailleurs prennent quasi exclusivement la voiture, et la durée de leurs trajets est longue, 43 minutes en moyenne, ce qui peut s’expliquer notamment par le territoire montagneux (massif du Jura). Ils travaillent généralement dans l’Arc jurassien suisse, notamment à La Chaux-de-Fonds ou Le Locle. La moitié de ces actifs frontaliers sont des ouvriers, travaillant notamment dans le secteur de l’horlogerie. Les trajets sont moins longs pour les travailleurs frontaliers vers la Suisse qui résident en Auvergne-Rhône-Alpes (28 km en moyenne) ou dans la région Grand Est (35 km). Ces actifs travaillent souvent respectivement à Genève ou à Bâle, et utilisent un peu plus les transports en commun (13 % d’entre eux), le vélo (4 %, soit autant que les non-frontaliers) ou les deux-roues motorisés (4 %).

Les travailleurs frontaliers vers l’Allemagne et la Belgique ont des profils relativement similaires. Ils prennent quasi exclusivement la voiture pour se rendre au travail. Il s’agit majoritairement d’hommes, souvent ouvriers (50 % des actifs travaillant en Belgique et 45 % pour l’Allemagne). Par rapport aux autres pays de travail, leurs trajets sont plus longs de l’autre côté de la frontière que du côté français. En particulier, les actifs travaillant en Belgique effectuent près des deux tiers de leur trajet côté belge. Ces actifs sont nombreux à travailler à Mouscron, Tournai, Mons ou Arlon, à proximité de la frontière, mais Bruxelles attire aussi des frontaliers malgré la distance. En Allemagne, les principales villes de travail des frontaliers sont Sarrebruck, Karlsruhe, Kehl et Rastatt.

Les actifs qui travaillent à Monaco ont un profil assez spécifique. Leurs trajets sont beaucoup plus courts que ceux des autres travailleurs frontaliers (18 km en moyenne), et seulement un peu plus longs que ceux des non-frontaliers (14 km). Seulement 44 % d’entre eux utilisent la voiture, privilégiant souvent les transports en commun (27 %), les deux-roues motorisés (22 %) ou la marche (6 %), du fait de trajets relativement courts et d’un contexte plutôt urbain. Les employés et les cadres sont surreprésentés parmi ces actifs.

Forte augmentation des longs trajets vers l’étranger entre 2010 et 2021

Entre 2010 et 2021, le nombre de travailleurs frontaliers a nettement augmenté (+37 %), notamment vers le Luxembourg et la Suisse. Les actifs avec des trajets de 50 km ou plus sont particulièrement plus nombreux, avec une hausse de +63 % (figure 3). Ces longs trajets ont très fortement augmenté vers la Suisse et le Luxembourg (respectivement +89 % et +75 %). Le nombre de frontaliers parcourant 50 km ou plus a même doublé vers l’Arc jurassien suisse et le canton de Genève. Les longs trajets ont augmenté aussi vers la Belgique (+34 %). En revanche, vers l’Allemagne, les flux sont restés stables, et les trajets ont peu changé.

Figure 3 – Trajets domicile-travail selon le pays de travail en 2021, et évolution par rapport à 2010

Figure 3 – Trajets domicile-travail selon le pays de travail en 2021, et évolution par rapport à 2010 - Lecture : En 2021, la distance moyenne domicile-travail des frontaliers travaillant en Belgique est de 38 km. Elle a augmenté de 2,7 km entre 2010 et 2021. 9 700 frontaliers ont des trajets de 50 km ou plus (soit 23 % des trajets vers la Belgique), et ce nombre a augmenté de 34 % entre 2010 et 2021.
Pays de travail Distance moyenne Trajets de 50 km ou plus
Distance moyenne en 2021 (en km) Évolution depuis 2010 (en km) Part en 2021
(en %)
Effectif en 2021 Évolution du nombre depuis 2010 (en %)
Allemagne 35 0,5 17 7 900 3
Belgique 38 2,7 23 9 700 34
Luxembourg 42 1,5 25 25 400 75
Monaco 18 1,3 3 1 000 47
Suisse, dont : 32 2,6 17 35 900 89
depuis Auvergne-Rhône-Alpes 28 2,8 11 15 400 129
depuis la Bourgogne-Franche-Comté 43 4,0 31 12 200 101
depuis le Grand Est 35 1,9 21 8 300 32
Ensemble des frontaliers 34 2,1 18 80 000 63
Non-frontaliers 14 1,1 4 180 500 18
  • Lecture : En 2021, la distance moyenne domicile-travail des frontaliers travaillant en Belgique est de 38 km. Elle a augmenté de 2,7 km entre 2010 et 2021. 9 700 frontaliers ont des trajets de 50 km ou plus (soit 23 % des trajets vers la Belgique), et ce nombre a augmenté de 34 % entre 2010 et 2021.
  • Champ : Personnes en emploi de 15 ans ou plus résidant dans les 45 zones d’emploi du champ de l’étude, qui se déplacent pour aller travailler et dont la distance domicile-travail est inférieure à 150 km.
  • Sources : Insee, recensement de la population 2021, exploitation complémentaire ; distancier Metric-OSRM, © les contributeurs d’Ouvrir dans un nouvel ongletOpenStreetMap et du projet Ouvrir dans un nouvel ongletOSRM.

L’augmentation des trajets longs peut s’expliquer en partie par la hausse des prix de l’immobilier sur la période dans la plupart des zones d’emploi les plus concernées par le travail frontalier vers la Suisse. Ainsi, le prix de vente médian au mètre carré d’une maison de taille moyenne (sources) a fortement augmenté entre 2010-2012 et 2020-2022, notamment dans les zones d’emploi d’Annecy (+40 %), du Chablais (+30 %), de Pontarlier (+28 %) et du Genevois français (+19 %). De plus, les règles concernant le télétravail des frontaliers ont été assouplies depuis la crise sanitaire du Covid-19, ce qui peut faciliter une installation plus éloignée du lieu de travail.

Du fait de la forte progression des longs trajets, la distance moyenne domicile-travail des frontaliers a augmenté de 2,1 km entre 2010 et 2021. L’allongement de la distance moyenne a été plus marqué vers la Belgique (+2,7 km) et vers la Suisse (+2,6 km). Pour les actifs travaillant en France, la distance moyenne a augmenté de 1,1 km. Les longs trajets en France ont aussi davantage augmenté que les trajets courts, mais leur part reste très réduite en 2021 (4 %).

En une dizaine d’années, l’utilisation de la voiture a un peu diminué (-2,7 points) au profit notamment des transports en commun (+1,7 point). Cette tendance a été similaire, mais moins marquée, pour les non-frontaliers. Seuls les actifs travaillant en Allemagne ou en Belgique prennent un peu plus souvent la voiture qu’en 2010.

Des flux routiers très concentrés vers le Luxembourg et les cantons de Genève et de Bâle

Vers la Suisse et le Luxembourg, quelques communes frontalières concentrent une grande part des flux des frontaliers utilisant leur voiture, en augmentation depuis 2010. Ainsi, la moitié des actifs qui vont travailler au Luxembourg en voiture, soit 46 000 personnes, traversent la frontière via l’autoroute A31 à Zoufftgen. 28 000 frontaliers passent par Saint-Louis pour aller travailler dans le canton de Bâle, presque autant par Gaillard pour se rendre dans le canton de Genève et 18 000 par Saint-Julien-en-Genevois. Un automobiliste frontalier sur cinq traverse une de ces quatre communes pour se rendre à son travail, ce qui peut générer des congestions rallongeant les temps de trajet et augmentant les émissions de CO2.

Les flux sont moins concentrés vers la Belgique, l’Allemagne et la Suisse depuis la Bourgogne-Franche-Comté du fait de frontières plus étendues et de destinations de travail plus dispersées.

Encadré - Des trajets qui génèrent 2,4 fois plus de CO2 que ceux des non‑frontaliers

Parmi les déplacements domicile-travail de moins de 100 km, ceux des travailleurs frontaliers émettent en moyenne 2,4 fois plus de gaz à effet de serre (GES) que ceux des non-frontaliers. En 2021, les travailleurs frontaliers émettent chacun, en moyenne, 1,4 tonne d’ pour ces déplacements, contre 0,6 pour les non-frontaliers. Ils représentent ainsi 17 % des émissions liées aux déplacements domicile-travail de la zone d’étude, alors qu’ils ne représentent que 8 % de la population en emploi. Cela s’explique majoritairement par des distances plus longues et dans une moindre mesure par une utilisation plus fréquente de la voiture. À titre de comparaison, en France, les émissions de gaz à effet de serre pour l’ensemble des activités sont de 6,5 tonnes d'équivalent CO2 (tCO2e) par habitant en 2021.

Les émissions sont élevées pour les frontaliers vers l’Allemagne, la Belgique et le Luxembourg avec une moyenne de 1,7 tonne d’équivalent CO2. Vers la Suisse, les émissions varient sensiblement en fonction de la région de résidence : elles sont très élevées pour les trajets depuis la Bourgogne-Franche-Comté (2,1 tCO2e), alors qu’elles sont nettement plus réduites depuis le Grand Est (1,4 tCO2e) et Auvergne-Rhône-Alpes (1,1 tCO2e). Les actifs qui travaillent à Monaco ont des émissions comparables à celles des non-frontaliers de la zone d’étude.

Publication rédigée par :Dorothée Ast, Guillaume Bichler, Quentin Manuaud, Olivier Schmidt (Insee)

Sources

Le champ de l’étude est constitué des actifs en emploi de 15 ans ou plus résidant dans les 45 zones d’emploi de France métropolitaine les plus concernées par le travail frontalier vers les cinq pays de destination principaux (Suisse, Luxembourg, Allemagne, Belgique et Monaco), qui déclarent se déplacer pour se rendre à leur travail et qui parcourent des trajets de 150 km maximum. Sur ce champ, les travailleurs frontaliers sont comparés aux actifs qui résident dans ces mêmes 45 zones d’emploi et qui travaillent en France. Le champ se limite à la France métropolitaine, car les flux de frontaliers depuis et vers la Guyane sont très faibles.

Les résultats sont issus de l’exploitation complémentaire du recensement de la population de 2021 et de 2010. Des données du recensement 2017, avec géolocalisation du lieu de résidence et du lieu de travail, sont mobilisées pour améliorer la précision des trajets en France. Le distancier Metric-OSRM de l’Insee permet de calculer les distances par la route en voiture entre lieu de résidence et lieu de travail ainsi que les durées de trajets associées, pour le « trajet routier optimal » en voiture, c’est-à-dire sans congestions ni autres ralentissements. Pour le vélo et la marche, des corrections sont appliquées pour tenir compte de la spécificité de ces modes de transport.

Les communes frontalières traversées par les travailleurs frontaliers sont déterminées pour les trajets en voiture, en identifiant les communes françaises qui touchent la frontière et qui sont sur le trajet optimal des travailleurs.

Pour étudier les évolutions des trajets entre 2010 et 2021, les calculs sont réalisés en se basant sur la commune de résidence et la commune de travail, sans corrections pour les modes de déplacement doux, et sans tenir compte d’éventuelles modifications d’infrastructures sur le réseau routier. Les distances obtenues sont donc moins précises mais permettent des calculs d’évolutions à méthodologie constante.

Les émissions de gaz à effet de serre liées aux déplacements domicile-travail sont des estimations résultant d’un travail mené en collaboration par l’Insee et le Service des données et études statistiques (Sdes) du ministère de la Transition écologique, de l’Énergie, du Climat et de la Prévention [Beck et al., 2024]. Les sources mobilisées nécessitent de restreindre le champ aux trajets de moins de 100 km. Les émissions de gaz à effet de serre tiennent compte de la combustion de carburant mais pas de la production de l’énergie, de la construction des véhicules, des infrastructures de transport, ni de la congestion.

La Ouvrir dans un nouvel ongletbase de données DV3F du Cerema (Centre d’études et d’expertise sur les risques, la mobilité et l’aménagement) permet de connaître les prix des ventes de logements opérées par territoire. Pour cette étude, les maisons « de taille moyenne » sont les maisons dont la surface est supérieure ou égale à 90 m² et inférieure à 130 m², à usage d’habitation, vendues seules, d’une ancienneté minimum de 5 ans.

La Base Tous Salariés (BTS) est utilisée pour estimer le nombre de travailleurs salariés qui résident dans les pays voisins et qui travaillent en France.

Publication rédigée par :Dorothée Ast, Guillaume Bichler, Quentin Manuaud, Olivier Schmidt (Insee)

Définitions

Dans cette étude, un travailleur frontalier est une personne qui réside en France et qui travaille dans un pays voisin (Suisse, Luxembourg, Belgique, Allemagne, Monaco, Espagne, Italie ou Andorre).

Une zone d’emploi est un espace géographique à l’intérieur duquel la plupart des actifs résident et travaillent.

Un non-frontalier est une personne qui réside et travaille en France.

Les communes qui envoient au moins 15 % de leurs actifs travailler dans le pôle constituent la couronne de l’aire d’attraction du pôle.

Une aire d’attraction d’une ville définit l’étendue de l’influence d’une ville sur les communes environnantes. Une aire est un ensemble de communes, d’un seul tenant et sans enclave, constitué d’un pôle de population et d’emploi, et d’une couronne qui regroupe les communes dont au moins 15 % des actifs travaillent dans le pôle.

Les pôles sont déterminés principalement à partir de critères de densité et de population totale, suivant une méthodologie cohérente avec celle de la grille communale de densité. Un seuil d’emplois est ajouté de façon à éviter que des communes essentiellement résidentielles, comportant peu d’emplois, soient considérées comme des pôles.

L’équivalent CO2 d’une émission de gaz à effet de serre (gaz bloquant le rayonnement de chaleur émis par la Terre) est la quantité de dioxyde de carbone (CO2) qui aurait le même potentiel de réchauffement global.

Pour en savoir plus

Publications régionales associées.

Beck S., Morin T., Prusse S., Trevien C., « Une estimation des émissions individuelles de gaz à effet de serre lors des déplacements domicile-travail », Insee Document de travail no 2024-03, février 2024.

Morin T., Prusse S., Trevien C., « Déplacements domicile‑travail : des émissions de gaz à effet de serre très variables selon les territoires », Insee Première no 1975, décembre 2023.

Cacheux L., Martin B., Villaume S., « De plus en plus d’actifs parcourent de longues distances pour aller travailler », Insee Analyses Grand Est no 158, mai 2023.

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