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Insee Conjoncture Réunion · Juillet 2021 · n° 17
Insee Conjoncture RéunionBilan économique 2020 - La Réunion L’activité économique recule nettement, mais le pouvoir d’achat résiste

En 2020, la crise sanitaire de la Covid-19 et les mesures de restrictions mises en œuvre visant à limiter la progression de l’épidémie - confinement, motifs impérieux, etc.  - ont bouleversé l’économie réunionnaise. Le recul de l’activité est net à La Réunion : le PIB baisse en volume de 4,2 % en 2020 après une croissance de 2,2 % en 2019. Cette chute est néanmoins deux fois moins forte qu’au niveau national (- 7,9 %). À La Réunion, le recul du PIB résulte de la conjugaison d’une nette baisse de la consommation des ménages et de celle des administrations publiques, d’un investissement en berne et d’une chute sans précédent des dépenses touristiques. Malgré ce contexte économique défavorable, le pouvoir d’achat des ménages progresse de 2,3 %.

En 2020, l’emploi salarié augmente de 2 % : le secteur privé est le principal moteur de cette croissance avec 4 700 emplois créés (+ 2,6 %). L’emploi salarié privé est préservé par les dispositifs d’activité partielle, limitant la perte de revenus des ménages. Si les salaires versés sur le territoire reculent de 1,2 % en 2020, cette baisse est en partie compensée par les indemnités de chômage partiel. Ainsi, fortement mobilisées dans le cadre des mesures d’urgence économiques et sociales pendant la crise sanitaire, les prestations sociales sont très dynamiques et soutiennent le revenu des ménages.

Insee Conjoncture Réunion
No 17
Paru le :Paru le08/07/2021

Ce bilan économique fait partie des 17 bilans économiques régionaux 2020 publiés par l'Insee.
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Consommation - revenus - Le pouvoir d’achat résiste malgré la crise sanitaire Bilan économique 2020

Gaëlle Rabaey, Ourida Cherchem (Insee)

En 2020, en dépit de la crise sanitaire, le pouvoir d’achat des ménages progresse de 2,3 % après + 2,7 % en 2019. Dans le même temps, la dépense de consommation des ménages recule de 1,7 %. Au total, l’épargne des Réunionnais augmente fortement en 2020.

Malgré le recul de l’activité, l’emploi salarié privé est préservé par les dispositifs d’activité partielle, limitant la perte de revenus des ménages. Si les salaires versés sur le territoire reculent de 1,2 % en 2020, cette baisse est en partie compensée par les indemnités de chômage partiel. Ainsi, fortement mobilisées dans le cadre des mesures d’urgence économiques et sociales pendant la crise sanitaire, les prestations sociales sont très dynamiques et soutiennent le revenu des ménages.

Insee Conjoncture Réunion

No 17

Paru le :08/07/2021

Malgré le contexte économique défavorable, le (RDBM) résiste : il progresse de 2,3 % à La Réunion (figure 1). Par ailleurs, les prix à la consommation des biens et services sont stables du fait des baisses marquées des prix de l’énergie et du transport aérien. Ainsi, le pouvoir d’achat total du RDB des ménages réunionnais augmente de 2,3 %, contre + 2,7 % en 2019.

Figure 1Évolution du revenu disponible des ménages entre 2019 et 2020

(en %)
Évolution du revenu disponible des ménages entre 2019 et 2020 ((en %))
Total Par habitant
en valeur en volume en valeur en volume
La Réunion (e) 2,3 2,3 2,2 2,2
France 1,0 0,4 0,7 0,1
  • (e) : estimation.
  • Sources : Insee, Comptes nationaux base 2014 - Cerom, comptes rapides.

Cette progression inclut un léger effet démographique : une fois ramené au nombre d’habitants, le pouvoir d’achat individuel des Réunionnais augmente de 2,2 % contre seulement + 0,1 % en France (figure 2). En effet, à La Réunion, le revenu des ménages est deux fois plus dynamique qu’en France et les prix sont stables (+ 0,5 % au niveau national).

En 2020, le revenu disponible brut par habitant s’élève à 18 700 euros sur l’île, soit 85 % du niveau national.

Figure 2Évolution du revenu disponible brut des ménages en volume par habitant à La Réunion et en France

(en %)
Évolution du revenu disponible brut des ménages en volume par habitant à La Réunion et en France ((en %))
Année La Réunion France
2000 2,2 2,8
2001 3,6 2,5
2002 5,3 2,3
2003 2,5 0,1
2004 2,4 1,5
2005 1,9 0,6
2006 2,8 2,2
2007 3,5 2,5
2008 -7,5 0,0
2009 6,7 1,2
2010 2,5 1,1
2011 -1,1 -0,4
2012 0,6 -0,9
2013 -0,1 -1,7
2014 1,9 0,7
2015 1,8 0,4
2016 2,6 1,2
2017 2,2 1,3
2018(e) 0,8 0,9
2019(e) 2,8 2,2
2020(e) 2,7 0,1
  • (e) : estimation.
  • Note : le revenu des ménages présenté ici ne prend pas en compte les revenus de la propriété des ménages pour des questions de volatilité de la série historique de ce type de revenus à La Réunion. Cela peut engendrer des écarts entre le pouvoir d’achat des ménages commenté dans cette publication et la série présentée ci-dessus. En particulier en 2020, la baisse des revenus de la propriété impacte négativement le revenu des ménages, ce qui explique la différence entre le chiffre du pouvoir d’achat individuel commenté dans la publication du Bilan économique 2020 et celui que l’on retrouve sur cette figure.
  • Source : Insee, Comptes nationaux base 2014, Comptes régionaux base 2014 jusque 2017 puis estimations Cerom 2018-2020.

Figure 2Évolution du revenu disponible brut des ménages en volume par habitant à La Réunion et en France

  • (e) : estimation.
  • Note : le revenu des ménages présenté ici ne prend pas en compte les revenus de la propriété des ménages pour des questions de volatilité de la série historique de ce type de revenus à La Réunion. Cela peut engendrer des écarts entre le pouvoir d’achat des ménages commenté dans cette publication et la série présentée ci-dessus. En particulier en 2020, la baisse des revenus de la propriété impacte négativement le revenu des ménages, ce qui explique la différence entre le chiffre du pouvoir d’achat individuel commenté dans la publication du Bilan économique 2020 et celui que l’on retrouve sur cette figure.
  • Source : Insee, Comptes nationaux base 2014, Comptes régionaux base 2014 jusque 2017 puis estimations Cerom 2018-2020.

Une baisse modérée des salaires

En 2020, les salaires versés à La Réunion reculent de 1,2 %, tandis que l’emploi salarié progresse de 2 % fin 2020. L’impact de la crise sanitaire sur le marché du travail a été moins marqué qu’au niveau national, où l’emploi a reculé de 1,1 % et les salaires de 3,9 %.

Les salaires versés dans le secteur privé baissent de 4,1 % sur l’île, tandis que la rémunération versée par les administrations publiques augmente de 2,8 % sous l’effet du maintien des salaires des agents du secteur public et des revalorisations du personnel soignant. Dans le privé, le repli des salaires est dû à la baisse inédite d’activité dans les secteurs marchands. Il est compensé en grande partie par le versement d’indemnités de chômage partiel et journalières pour garde d’enfants mises en place.

En particulier, la crise sanitaire impacte massivement à La Réunion les activités liées au tourisme : la masse salariale versée dans le secteur de l’hébergement-restauration recule de 17 % et celle dans le transport de 10 %. Par ailleurs, avec une activité en net ralentissement pendant plusieurs mois, la masse salariale dans la construction baisse de 6 %.

Dans le même temps, la masse salariale dans les secteurs financiers et dans ceux liés à l’énergie augmente respectivement de 1,9 % et 3,7 %.

Les prestations sociales soutiennent le revenu des ménages

Les prestations sociales en espèces sont particulièrement dynamiques en 2020 sous l’effet des mesures mises en place (+ 12,2 % après + 4,5 % en 2019). Avec une population davantage exposée à la pauvreté qu’en métropole, ces prestations augmentent plus rapidement qu’au niveau national (+ 9,5 %).

Mesure phare de l’année 2020, la mise en place du dispositif d’activité partielle à hauteur de 200 millions d’euros d’indemnités versées, a permis de préserver l’emploi salarié et de limiter la baisse des revenus des ménages. Associées aux indemnités journalières de l’assurance maladie pour garde d’enfants ou personne vulnérable, ces indemnités expliquent la moitié de l’augmentation des prestations en espèces.

Deuxièmes contributrices à cette hausse, les prestations versées par la Caisse d’allocation familiale (hors logement) augmentent de 10,2 %. D’une part, 67 millions d’euros d’aides exceptionnelles ont été attribués dans le cadre de la crise sanitaire (aide de solidarité aux personnes précaires, aide aux jeunes de moins de 25 ans en situation de précarité). D’autre part, le montant de l’allocation de rentrée scolaire est revalorisée de 100 euros par enfant. Aussi, les prestations liées au RSA croissent de 11 % sous l’effet de la hausse du nombre de bénéficiaires du RSA (+ 1 %) et de la mise en place d’une prime exceptionnelle de fin d’année à destination de ces allocataires.

Dans le même temps, le montant des pensions de retraites continue de croître fortement de manière structurelle (+ 3,9 %) et contribue ainsi à la dynamique des prestations versées.

Les prestations sociales en nature (allocations logement, remboursements de Sécurité sociale, etc.) augmentent de 9,1 % en 2020, après + 8,4 % en 2019. La hausse est portée par la forte augmentation des dépenses exécutées en ville (remboursements de médicaments, analyses médicales, etc.).

De plus, les collectivités territoriales ont mis en place des aides exceptionnelles tournées vers les publics scolarisés et précaires (chèques tourisme, pass social, aides alimentaires, etc.).

Le recul de la consommation des ménages profite à l’épargne

Malgré un revenu disponible brut en hausse de 2,3 %, la dépense de consommation des ménages recule de 1,7 %. Ce repli est quatre fois moindre à La Réunion qu’au niveau national (- 7,1 %), impacté par des restrictions plus nombreuses au quatrième trimestre (couvre-feux, confinement, fermetures). Les transactions par cartes bancaires CB illustrent la dynamique de cette consommation. Ainsi, sur l’ensemble de l’année, leur montant baisse de seulement 0,7 % à La Réunion, confrontée à un seul confinement de deux mois, contre – 7 % sur le territoire national (figure 3).

Figure 3Évolution hebdomadaire des montants des transactions 2020 par carte bancaire CB par rapport à la même semaine de 2019

en %
Évolution hebdomadaire des montants des transactions 2020 par carte bancaire CB par rapport à la même semaine de 2019 (en %)
semaine La Réunion France entière
2 14,4 3,3
3 8,5 4,1
4 0,9 6,9
5 2,5 4,5
6 4,2 2,8
7 7,0 2,3
8 7,1 4,0
9 0,7 0,0
10 2,3 4,1
11 12,1 8,3
12 -31,6 -40,5
13 -50,9 -57,9
14 -48,5 -54,4
15 -39,2 -46,6
16 -33,8 -48,4
17 -32,2 -41,5
18 -42,5 -44,9
19 -33,7 -34,4
20 17,7 3,9
21 3,5 -1,2
22 12,6 2,9
23 7,7 2,5
24 3,3 4,3
25 22,1 7,2
26 -0,1 -4,2
27 -4,7 -1,5
28 10,0 6,0
29 8,0 8,7
30 10,7 12,1
31 -6,4 5,8
32 9,8 15,5
33 15,1 12,4
34 12,5 11,0
35 3,1 4,9
36 0,4 6,0
37 5,1 5,4
38 5,4 4,6
39 -0,9 0,8
40 -5,2 0,9
41 5,6 2,4
42 10,3 7,3
43 10,2 2,2
44 5,3 -2,4
45 -5,4 -33,5
46 8,2 -29,7
47 1,4 -28,4
48 -1,1 -27,0
49 1,7 4,7
50 2,4 -1,7
51 -2,8 -7,7
52 14,1 -1,7
53 13,9 -4,5
  • Note : transactions par carte bancaire CB en face-à-face qui n'incluent pas la vente à distance (internet).
  • Champ : France.
  • Sources : Cartes bancaires CB, calculs Insee.

Figure 3Évolution hebdomadaire des montants des transactions 2020 par carte bancaire CB par rapport à la même semaine de 2019

  • Note : transactions par carte bancaire CB en face-à-face qui n'incluent pas la vente à distance (internet). Les traits verticaux indiquent les dates de fermeture et réouverture des commerces « non essentiels » lors des deux confinements.
  • Champ : France.
  • Sources : Cartes bancaires CB, calculs Insee.

Les dépenses relatives aux principaux postes de consommation ralentissent ou baissent de façon marquée, à l’exception des dépenses d’alimentation et de boissons qui augmentent nettement. En effet, le confinement et le télétravail ont notamment conduit au report de la dépense hors du domicile vers une consommation au domicile. Du fait des restrictions sur les déplacements durant le confinement et de la quasi-fermeture de l’espace aérien, la chute de la consommation est particulièrement marquée pour le transport aérien, l’hébergement-restauration et les carburants. Comme en témoigne la baisse de 12 % de la quantité d’hydrocarbures importée, les ménages réduisent en effet leurs dépenses de transports et de carburant, notamment durant le confinement. Face à la fermeture des restaurants, les ménages reportent leurs dépenses sur les produits alimentaires, dont les importations bondissent de 7 %.

Le recul de la consommation, combiné à des gains de pouvoir d’achat dynamiques, conduit à une forte hausse de l’épargne des ménages réunionnais (+ 17 %).

Publication rédigée par :Gaëlle Rabaey, Ourida Cherchem (Insee)

Pour comprendre

Les données sur les transactions bancaires proviennent de Cartes Bancaires CB et couvrent l’essentiel des transactions par cartes bancaires. Elles sont tirées d’une extraction de transactions anonymisées et agrégées à l’échelle départementale afin de respecter les exigences de confidentialité. Ces informations sont sujettes à certaines limites. Les données utilisées concernent tout détenteur de carte bancaire CB sur le territoire français, ce qui, outre les ménages, peut recouvrir aussi des entreprises. Ces données ne recouvrent pas les transactions réalisées par d’autres moyens de paiement (espèces, chèque, ticket restaurant, etc.). De plus, à l’inverse des données utilisées à l’échelle nationale, notamment dans l’estimation de la perte de consommation des ménages, les données départementales intègrent certaines transactions non assimilables à de la consommation (dons à des associations, achat de timbres fiscaux, etc.). Enfin, les transactions à distance (notamment celles sur internet) ne sont pas prises en compte.

Définitions

Revenu disponible brut des ménages (comptabilité nationale) : revenu dont disposent les ménages pour consommer ou investir, après opérations de redistribution. Il comprend l’ensemble des revenus d’activité (rémunérations salariales y compris cotisations légalement à la charge des employeurs, revenu mixte des non-salariés), des revenus de la propriété (intérêts, dividendes, revenus d’assurance-vie…) et des revenus fonciers (y compris les revenus locatifs imputés aux ménages propriétaires du logement qu’ils occupent). On y ajoute principalement les prestations sociales en espèces reçues par les ménages et on en retranche les cotisations sociales et les impôts versés.

Une grandeur économique peut se mesurer de deux façons différentes : en prix courants, c’est- à-dire en valeur, ou en prix constants, c’est-à- dire en volume.

Pour en savoir plus