L’inflation reflue, la croissance hésite
Note de conjoncture - juin 2023
Éclairage - Les prix à la consommation des produits alimentaires pourraient ralentir nettement d’ici fin 2023
La hausse continue de l’inflation alimentaire, depuis fin 2021, et les niveaux inédits atteints ces derniers mois constituent un défi pour le conjoncturiste, pour en comprendre les déterminants et en prévoir l’évolution. De fait, les matières premières agricoles et énergétiques se sont fortement renchéries depuis plus d’un an mais certains cours ont aussi nettement reflué à partir de l’été dernier. Pour analyser comment ces mouvements se traduisent in fine dans les prix à la consommation, il importe d’en étudier d’abord la diffusion aux prix agricoles à la production puis aux prix à la production des industries agroalimentaires et, enfin, aux prix de vente des distributeurs (prix à la consommation). Cet éclairage propose une modélisation des différentes étapes de cette chaîne de transmission, permettant d’analyser les comportements de fixation des prix pendant la période actuelle et d’en inférer une évolution en prévision.
Premier maillon de la chaîne, les prix agricoles à la production (hors fruits et légumes) se sont accrus de 23 % en 2022, par rapport à 2021. La hausse est de 16 % pour les prix à la production des industries agroalimentaires et de 7 % pour les prix à la consommation des produits alimentaires (hors produits frais). Selon la modélisation retenue dans cet éclairage, le renchérissement des intrants extérieurs à la filière – cours mondiaux des matières premières agricoles, énergie, … – aurait expliqué une part importante de cette dynamique des prix au cours de l’année 2022 : près de 90 % de la dynamique des prix agricoles à la production, environ 70 % de celle des prix des industries agroalimentaires et environ la moitié de celle des prix à la consommation des produits alimentaires. Les coûts salariaux auraient constitué le deuxième facteur de hausse de ces prix en 2022, contribuant notamment pour un peu plus d’un tiers à la hausse des prix à la consommation des produits alimentaires hors frais. Des comportements de marges auraient également été à l’œuvre en 2022 : hausse sensible des marges unitaires dans les industries agroalimentaires notamment, après leur compression en 2021, tandis que la dynamique des prix à la consommation pourrait traduire au contraire une compression des marges unitaires des distributeurs à partir de la fin 2021 jusqu’à fin 2022 après quoi un mouvement inverse s’opère. Cette analyse des comportements de marges reste bien sûr entourée de l’incertitude inhérente à la modélisation retenue.
La modélisation retenue dans cet éclairage met aussi en évidence les effets retardés, sur les prix à la production et à la consommation, des mouvements de prix des matières premières. Notre simulation suggère que les hausses des cours des matières premières agricoles se répercutent sur les prix à la consommation à hauteur d’environ 50 % au bout de trois trimestres, et à hauteur de 80 % au bout d’un an. Ainsi, en prévision pour les mois à venir, le reflux des cours des matières premières agricoles et énergétiques depuis l’été 2022 devrait exercer une pression à la baisse sur les prix agricoles à la production puis sur les prix à la production des industries agroalimentaires. Ces derniers pourraient refluer à leur tour, une « normalisation » des comportements de marges pouvant même en accentuer la dynamique baissière. Ce reflux induirait un ralentissement des prix à la consommation des produits alimentaires (hors frais) à partir du deuxième trimestre 2023, soutenus néanmoins par la dynamique des coûts salariaux et par de probables comportements de reconstitution de marges des distributeurs en prévision. Ces mouvements en prévision, issus d’une modélisation économétrique, restent cependant conditionnés, entre autres facteurs, aux cycles de négociations entre producteurs, transformateurs et distributeurs...
Note de conjoncture
Paru le :15/06/2023