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Insee Flash Centre-Val de Loire · Novembre 2021 · n° 45
Insee Flash Centre-Val de LoireMoins de pauvres en milieu rural, notamment dans les communes périurbaines

Martine Blouin (Insee)

Près de 10 % des habitants des territoires ruraux de Centre-Val de Loire sont en situation de pauvreté monétaire. Un taux de pauvreté plus bas que dans l’espace urbain, mais également une intensité de la pauvreté moins forte et des inégalités de niveaux de vie moins marquées caractérisent ces territoires.

La pauvreté touche davantage, dans les communes rurales qu’urbaines, les propriétaires et les ménages dont le référent fiscal est âgé de plus de 75 ans. Cependant, les ménages les plus exposés restent les familles monoparentales, les ménages de grande taille et les personnes seules, dans le rural comme dans l’urbain. Pour l’ensemble des caractéristiques de la population observées, les habitants des communes rurales périurbaines connaissent moins la pauvreté.

Insee Flash Centre-Val de Loire
No 45
Paru le :Paru le18/11/2021

En 2018, 120 000 habitants des du Centre-Val de Loire vivent sous le , soit 9,7 % de cette population (figure 1). C’est seulement 36 % de la population régionale en situation de pauvreté monétaire, tandis que 49 % des habitants de la région sont ruraux. Dans les territoires ruraux, le taux de pauvreté est en effet plus faible que dans les communes urbaines, où il atteint 16,4 % (13,1 % dans l’ensemble de la région et 14,8 % au niveau national).

Les territoires ruraux moins affectés par la pauvreté

Pauvreté moins fréquente, moins intense et inégalités moins fortes, la comparaison des espaces ruraux et urbains est à l’avantage des premiers. La pauvreté monétaire est davantage présente dans les territoires ruraux autonomes. Ils comptent 67 000 personnes pauvres, soit 12,2 % des habitants. C’est 4,5 points de plus que dans le , mais 4,2 de moins que dans les . Comme au niveau national, les situations de pauvreté se rencontrent moins souvent dans les communes peu denses.

L’, s’avère aussi moins prononcée dans ces territoires (le , médian des pauvres est 17,7 % plus faible que le seuil de pauvreté, contre 20,1 % dans l’urbain). La moitié de la population pauvre au sens monétaire y vit avec moins 894 € par mois par unité de consommation, contre 868 € dans les communes urbaines. Les inégalités monétaires apparaissent aussi moins fortes en milieu rural. Les 10 % de la population les plus aisés ont un niveau de vie supérieur à 35 170 €, quand celui des 10 % les plus pauvres ne dépasse pas 13 140 €, soit un rapport interdécile de 2,7. En milieu urbain, les « riches » sont plus riches que dans les territoires ruraux, et les « pauvres » plus pauvres (rapport interdécile de 3,3).

Les départements comptant le plus de communes rurales de la région, le Cher et l’Indre affichent pourtant les taux de pauvreté les plus élevés, respectivement 14,3 % et 14,5 % en moyenne, la pauvreté étant plus présente sur l’ensemble de leur territoire.

Figure 1Population pauvre et population ayant un niveau de vie inférieur au 1ᵉʳ décilePart de la population pauvre (en %)

  • Note : carte lissée dans un rayon de 15 km.
  • Champ : France métropolitaine, personnes appartenant à des ménages fiscaux en logement ordinaire.
  • Sources : Insee-DGFIP-Cnaf-Cnav-CCMSA, Fichier localisé social et fiscal (FiLoSofi) 2018

Comme en milieu urbain, la pauvreté touche davantage les familles monoparentales

Les déterminants de la pauvreté sont essentiellement communs entre territoires ruraux et urbains. Quel que soit le type de territoire, rural ou urbain, les familles monoparentales restent les ménages qui vivent le plus fréquemment sous le seuil de pauvreté (figure 2). Les familles monoparentales pauvres rurales rassemblent 27 000 personnes parmi les 81 000 personnes pauvres des familles monoparentales de la région. Dans les communes rurales, une famille monoparentale sur quatre se trouve en situation de pauvreté, une sur trois dans l’espace urbain.

Moins souvent pauvres dans le rural, les familles monoparentales y sont aussi moins nombreuses rapportées à l’ensemble des familles (10,9 % des familles), plus petites (2,4 personnes) et moins souvent sous la responsabilité d’une femme (pour 71 % d’entre elles). Comme dans les territoires urbains, les familles monoparentales rurales, lorsqu’elles sont pauvres, sont plus grandes (2,7 personnes), et plus souvent sous la responsabilité d’une femme (pour 75 % d’entre elles).

Tous âges confondus, le taux de pauvreté des personnes seules est de l’ordre de 16 %, un peu plus élevé pour les hommes. Leur niveau de vie médian reste toutefois supérieur à celui des femmes dans les communes rurales. Ce qui n’est pas le cas dans les communes urbaines, où la part d’hommes seuls pauvres atteint de surcroît 20 % (16 % pour les femmes). Les couples sans enfant sont les ménages les moins souvent pauvres, comme en milieu urbain. Les couples avec enfants sont un peu plus exposés à la pauvreté, 8 % des personnes vivant dans un tel ménage sont pauvres, mais deux fois moins que dans les communes urbaines.

Figure 2Taux de pauvreté au seuil de 60 % selon les caractéristiques des ménages fiscaux

Unité, %
Taux de pauvreté au seuil de 60 % selon les caractéristiques des ménages fiscaux (Unité, %)
Communes rurales – Hors influence Communes rurales – Sous Influence Communes urbaines
Famille monoparentale 28,5 21,3 33,2
Femme seule 17,4 14,2 16,0
Homme seul 18,9 14,2 20,0
Moins de 30 ans (âge du référent fiscal) 17,8 11,0 26,2
75 ans ou plus (âge du référent fiscal) 9,6 7,3 7,1
5 personnes ou plus sans le ménage 21,5 12,5 32,1
Propriétaire 8,0 5,0 5,0
Locataire 26,6 19,9 31,3
  • Champ : Centre-Val de Loire, personnes appartenant à des ménages fiscaux en logement ordinaire dont le revenu disponible est positif ou nul.
  • Sources : Insee-DGFIP-Cnaf-Cnav-CCMSA, Fichier localisé social et fiscal (FiLoSofi) 2018

Figure 2Taux de pauvreté au seuil de 60 % selon les caractéristiques des ménages fiscaux

Unité, %
  • Champ : Centre-Val de Loire, personnes appartenant à des ménages fiscaux en logement ordinaire dont le revenu disponible est positif ou nul.
  • Sources : Insee-DGFIP-Cnaf-Cnav-CCMSA, Fichier localisé social et fiscal (FiLoSofi) 2018

Entre 3 et 4 fois plus de pauvres parmi les locataires que les propriétaires

Les locataires sont plus souvent pauvres dans tous les types de territoires, mais les propriétaires plus exposés à la pauvreté dans le rural que l’urbain. La pauvreté touche ainsi plus les locataires que les propriétaires en milieu rural (pour 23,2 % d’entre eux, et 6,3 % des propriétaires). L’écart est encore plus important dans les communes urbaines, où près d’un locataire sur 3 et un propriétaire sur 20 sont pauvres. Les taux de pauvreté sont relativement moins élevés dans le rural périurbain. En revanche, les propriétaires des communes rurales hors influence d’un pôle sont plus souvent pauvres que dans l’espace urbain (8 % d’entre eux). Le quart de ces propriétaires pauvres vivent dans un ménage dont le référent fiscal a de plus de 75 ans.

Les ménages jeunes plus pauvres, mais moins que les urbains

Les ménages jeunes sont moins fréquemment pauvres que dans l’urbain, mais le rural compte plus de seniors pauvres aux grands âges, surtout des femmes. Dans les communes rurales – comme urbaines – la population des ménages dont le référent fiscal a moins de 30 ans est plus souvent pauvre que lorsque ce référent est plus âgé. Néanmoins, leur taux de pauvreté est deux fois moins élevé dans le rural (14,1 %, contre 26,2 % dans l’urbain). Autre particularité de l’espace rural, quoique le taux de pauvreté ait tendance à décroître quand l’âge du référent fiscal augmente, celui des populations des ménages dont le référent a plus de 75 ans dépasse celui dont le référent a entre 60 et 74 ans. Le taux de pauvreté dans le rural est supérieur à celui dans l’urbain pour ces seuls âges (8,5 %, contre 7,1 %). Plus des deux tiers de ces ménages ruraux pauvres dont le référent fiscal est âgé sont des personnes seules, avec une très forte majorité de femmes (4 sur 5). Ces personnes font partie de générations pour lesquelles l’activité professionnelle féminine était moins généralisée. En France métropolitaine, il s’agit plus souvent de veuves ayant eu des carrières incomplètes, voire ne bénéficiant que d’une pension de réversion (voir : « Niveau de vie et pauvreté des personnes âgées, Revenus et patrimoine des ménages – Édition 2021 ».

Les ménages de grande taille et les personnes seules connaissent plus de difficultés

Les grands ménages sont nettement moins souvent pauvres en milieu rural que dans l’espace urbain. Un quart des personnes des ménages régionaux de grande taille, 5 personnes et plus, vit dans la pauvreté. Cette part varie du simple au double entre le rural et l’urbain : 16,2 % pour les ménages ruraux de grande taille, 32,1 % dans les communes urbaines. Cela concerne seulement 12,5 % des membres de ménages de grande taille dans les communes rurales sous influence d’un pôle urbain, mais 21,5 % dans le rural autonome.

Dans l’espace rural, les personnes seules sont aussi souvent pauvres que celles vivant dans un grand ménage. Elles le sont en général un peu moins fréquemment que dans les communes urbaines, mais plus dans le rural autonome.

Encadré - Partenariat

Cette étude a été réalisée dans le cadre d’un partenariat entre la Direction régionale de l’Insee Centre-Val de Loire et la Préfecture de la région Centre-Val de Loire.

Publication rédigée par :Martine Blouin (Insee)

Sources

Les données du fichier localisé social et fiscal (Filosofi) proviennent du rapprochement des données fiscales fournies à l’Insee par la Direction générale des finances publiques (DGFiP) et des données sur les prestations sociales émanant des principaux organismes gestionnaires de ces prestations. L’information sur le revenu déclaré des ménages fiscaux permet de reconstituer à différents niveaux territoriaux leur revenu disponible, c’est-à-dire après la prise en compte des impôts, ainsi que des prestations sociales et en imputant des revenus financiers non déclarés.

Définitions

Commune urbaine – commune rurale sous influence ou hors influence d’un pôle urbanisé.

La grille communale de densité s’appuie sur la distribution de la population à l’intérieur de la commune en découpant le territoire en carreaux de 1 kilomètre de côté. Elle repère ainsi des zones agglomérées. C’est l’importance de ces zones agglomérées au sein des communes qui permet de les caractériser. La grille communale permet ainsi de distinguer quatre catégories de communes : les communes densément peuplées et de densité intermédiaire d’une part, qui constituent l’espace urbain, et d’autre part, les communes peu denses et très peu denses qui constituent l'espace rural. Voir : « La grille communale de densité ».

Cette seule caractéristique de l’espace rural ne permet pas d’en appréhender toutes les dimensions. Il faut y associer des critères de type fonctionnel, notamment le degré d’influence d’un pôle d’emploi. Cette approche permet de définir statistiquement un continuum allant des espaces les plus distants des pôles et peu peuplés jusqu’aux espaces ruraux les plus urbanisés. Voir : « Une nouvelle définition du rural pour mieux rendre compte des réalités des territoires et de leurs transformations, La France et ses territoires – Édition 2021 ».

Les communes rurales « hors influence d’un pôle d’emploi » sont hors influence des villes ou appartiennent à une aire d’attraction des villes de moins de 50 000 habitants. Ce groupe est qualifié de « rural autonome » dans le sens où ces communes fonctionnent sans l’influence d’un pôle, ou sous l’influence d’un petit pôle qui structure peu son environnement.

Les communes rurales qui appartiennent à une aire d’attraction des villes de plus de 50 000 habitants sont qualifiées de « communes rurales sous influence d’un pôle d’emploi » (ou de « rural périurbain »).

Pauvreté monétaire : un individu est considéré comme pauvre lorsqu’il vit dans un ménage dont le niveau de vie est inférieur au seuil de pauvreté. Le seuil de pauvreté se situe à 60 % de la médiane de la distribution nationale des niveaux de vie. Fin 2018, le seuil de pauvreté monétaire s’établit à 1 090 € par mois par unité de consommation, c’est-à-dire pour une personne seule (1 635 € mensuels pour un couple sans enfant et 1 744 € pour une adulte et deux jeunes enfants). Le taux de pauvreté correspond à la proportion de personnes dont le niveau de vie est inférieur à ce seuil.

Note : dans Filosofi, le seuil de pauvreté est fixé à 60 % du niveau de vie médian métropolitain.

Intensité de la pauvreté : l’intensité de la pauvreté permet d’apprécier à quel point le niveau de vie de la population pauvre est éloigné du seuil de pauvreté. Comme Eurostat, l’Insee mesure cet indicateur comme l’écart relatif entre le niveau de vie médian de la population pauvre et le seuil de pauvreté. Plus cet indicateur est élevé et plus la pauvreté est dite intense, au sens où le niveau de vie des plus pauvres est très inférieur au seuil de pauvreté.

Formellement, il est calculé de la manière suivante : (seuil de pauvreté - niveau de vie médian de la population pauvre) / seuil de pauvreté.

Niveau de vie : le niveau de vie est égal au revenu disponible du ménage divisé par son nombre d’unités de consommation (UC). Il est donc le même pour tous les individus d’un ménage. L’échelle d’équivalence, dite de l’OCDE modifiée, attribue 1 UC au premier adulte du ménage, 0,5 UC aux autres personnes de 14 ans ou plus et 0,3 UC aux enfants de moins de 14 ans.

Revenu disponible : le revenu disponible est le revenu à la disposition du ménage pour consommer et épargner. Il comprend les revenus d’activité nets des cotisations sociales, les indemnités de chômage, les retraites et pensions, les revenus du patrimoine (fonciers et financiers) et les autres prestations sociales perçues, nets des impôts directs.

Ces derniers incluent l’impôt sur le revenu, la taxe d’habitation, la contribution sociale généralisée – CSG –, contribution à la réduction de la dette sociale – CRDS – et les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine. Il comprend une partie du solde des transferts inter ménages.

Pour en savoir plus

En Centre-Val de Loire, un habitant sur huit vit sous le seuil de pauvreté, Insee Analyses Centre-Val de Loire n° 75, 25 février 2021.

Les femmes seules, avec ou sans enfants, surexposées à la pauvreté, Insee Flash-Val de Loire n° 41, 31 mars 2021.

Revenus et patrimoine des ménages, Insee Références, Édition 2021, 27 mai 2021.

Un niveau de vie et des disparités de revenus plus élevés en Île-de-France et dans les communes denses, Insee Focus n° 196, 16 juin 2020.