Insee PremièreLes personnes nées françaises à l’étranger ont un profil plus proche des natifs que des immigrés

Roselyne Kerjosse, Jérôme Lê (Unité des études démographiques et sociales, Insee)

En 2019, 1,7 million de personnes nées françaises à l’étranger résident en France.

Leur parcours est lié à l’histoire coloniale de la France et, plus récemment, à l’expatriation de Français dans le monde, qui rentrent ensuite en France avec leurs enfants. La moitié d’entre elles sont nées au Maghreb, mais cette proportion a baissé au fil du temps au profit de l’Europe et des autres pays d’Afrique. Cette population est particulièrement âgée (la moitié ont plus de 61 ans). Elle diminue car les mouvements migratoires ne compensent pas sa mortalité.

Le profil des Français nés à l’étranger diffère sensiblement de celui des immigrés et ressemble davantage à celui des personnes nées en France, les natifs. Ces personnes ne sont pas comptabilisées comme immigrées selon la définition retenue en France, alors qu’elles le sont pour les comparaisons internationales. Les Français nés à l’étranger sont généralement arrivés en France beaucoup plus jeunes et leur origine sociale les rapproche davantage des personnes nées en France. Ils sont aussi généralement plus diplômés et plus souvent cadres que les immigrés et que les personnes nées en France. Toutefois, ceux nés en Afrique rencontrent davantage de difficultés pour trouver un emploi, quoique de façon moins marquée que les immigrés de la même origine.

Roselyne Kerjosse, Jérôme Lê (Unité des études démographiques et sociales, Insee)
Insee Première No 1829- Décembre 2020

La définition française d’ « immigré » exclut les personnes nées françaises à l’étranger

En 2019, 8,4 millions de personnes vivant en France sont nées à l’étranger. Parmi elles, 6,7 millions sont , selon la définition retenue par le Haut Conseil à l’intégration (1991), c’est-à-dire qu’elles sont nées de nationalité étrangère à l’étranger. Cette définition, propre à la France, exclut les 1,7 million de . Les comparaisons internationales, telles qu’elles sont faites par l’ONU ou Eurostat, se basent généralement sur la mesure des populations non-native (nées à l’étranger, quelle que soit leur nationalité), et dans une moindre mesure non-national (étrangères). Cette dernière catégorie est moins utilisée, car les personnes étrangères peuvent acquérir la nationalité du pays d’accueil et toutes n’ont pas nécessairement migré, c’est-à-dire franchi de frontière (cas des enfants nés en France de parents étrangers). Ainsi, 10,0 % de la population vivant en France est immigrée selon la définition française, et 12,5 % est née à l’étranger, selon l’approche internationale. Les personnes nées françaises à l’étranger représentent en effet 2,5 % de la population. Leur situation recouvre une diversité de parcours liée à l’histoire coloniale française et plus récemment, à l’expatriation de Français dans le monde, qui rentrent ensuite en France avec leurs enfants nés au cours de leur séjour à l’étranger.

La moitié des personnes nées françaises à l’étranger sont originaires du Maghreb

Depuis 1968, le nombre de Français nés à l’étranger vivant en France est globalement stable, autour de 1,7 million de personnes (figure 1). Entre 1954 et 1962, l’indépendance de la plupart des anciens protectorats et colonies (Maghreb, Afrique Occidentale et Équatoriale, Madagascar, Indochine) s’accompagne du retour de nombreux Français vers la France. En 1968, 60 % des personnes nées françaises à l’étranger sont originaires d’Algérie, en raison notamment du statut d’ancien département du pays (encadré). En 2019, elles n’en représentent plus que 32 %. De manière plus large, les personnes originaires du Maghreb représentent 78 % des Français nés à l’étranger en 1968 contre 51 % en 2019. Cette baisse s’est faite au profit de l’Europe (dont l’ex-URSS), passée de 12 % à 21 %, et des autres pays d’Afrique, passés de 5 % à 15 %. Les principaux pays d’origine en Europe sont frontaliers de la France, en particulier l’Allemagne en raison du stationnement d’un important contingent militaire français et de leurs familles, entre 1945 et 1993 (figure 2). Les principaux pays d’Afrique, hors Maghreb, sont Madagascar, le Sénégal et la Côte d’Ivoire. Enfin, 8 % de ces Français sont nés en Asie, principalement au Vietnam.

Figure 1 - Nombre de personnes nées françaises à l’étranger et vivant en France, depuis 1968

Figure 1 - Nombre de personnes nées françaises à l’étranger et vivant en France, depuis 1968 - Lecture : en 2019, 1,7 million de personnes résidant en France sont nées françaises à l’étranger, dont 537 000 en Algérie. La moitié de ces personnes ont plus de 61 ans.
Algérie Maroc, Tunisie Autres pays d'Afrique Europe (dont ex-URSS) Autres pays du monde Âge médian
(en années)
en milliers
1968 1 007 305 82 203 81 29
1975 905 336 107 245 94 34
1982 851 347 135 256 120 38
1990 800 346 167 280 144 44
1999* 724 349 198 319 165 50
2006 665 352 223 348 181 54
2012 612 345 240 363 201 57
2017 562 335 256 364 202 60
2019p 537 331 260 366 209 61
  • p : estimations provisoires.
  • Notes : pour des raisons de comparabilité sur longue période, les pays de l’ex-URSS sont regroupés avec l’Europe. Les chiffres de 1999 ont été redressés.
  • Lecture : en 2019, 1,7 million de personnes résidant en France sont nées françaises à l’étranger, dont 537 000 en Algérie. La moitié de ces personnes ont plus de 61 ans.
  • Champ : France métropolitaine de 1968 à 1990 ; France hors Mayotte de 1999 à 2013 ; France depuis 2014. Personnes nées françaises à l’étranger et vivant en France.
  • Source : Insee, base Saphir (1968 à 1999), recensements de la population (2006 à 2017) et estimations de population (2019).

Figure 1 - Nombre de personnes nées françaises à l’étranger et vivant en France, depuis 1968

  • p : estimations provisoires.
  • Notes : pour des raisons de comparabilité sur longue période, les pays de l’ex-URSS sont regroupés avec l’Europe. Les chiffres de 1999 ont été redressés.
  • Lecture : en 2019, 1,7 million de personnes résidant en France sont nées françaises à l’étranger, dont 537 000 en Algérie. La moitié de ces personnes ont plus de 61 ans (échelle de droite).
  • Champ : France métropolitaine de 1968 à 1990 ; France hors Mayotte de 1999 à 2013 ; France depuis 2014. Personnes nées françaises à l’étranger et vivant en France.
  • Source : Insee, base Saphir (1968 à 1999), recensements de la population (2006 à 2017) et estimations de population (2019).

Encadré - Le cas particulier des personnes nées en Algérie avant 1962

L’Algérie a été un département français de 1848 à 1962. De ce fait, la plupart des personnes nées en Algérie durant cette période possédaient la nationalité française à leur naissance mais ne bénéficiaient pas de la citoyenneté française. Ces personnes dites de « statut personnel musulman » étaient considérées comme des « sujets français » (statut civil de droit local), à la différence des citoyens français, dont le statut civil était de « droit commun ». Lors de l’indépendance en 1962, les personnes de statut personnel musulman ont perdu la nationalité française au profit de la nationalité algérienne. Les « Français musulmans d’Algérie » qui résidaient alors en métropole ont cependant pu souscrire, avant le 22 mars 1967, une déclaration récognitive de nationalité française. Certaines personnes ayant perdu la nationalité française en 1962, ont également pu, par la suite, l’obtenir de nouveau, par exemple si elles avaient immigré en France. Ces personnes sont dites « françaises par réintégration » et sont classées avec les personnes nées françaises à l’étranger.

Dans les enquêtes annuelles de recensement (EAR) comme dans l’enquête Emploi en continu (EEC), la nationalité de naissance est déclarative (sources). Que ce soit avant ou après 1962, les naissances en Algérie sont considérées comme à l’étranger. Les personnes interrogées ne connaissent pas toujours les subtilités liées à la nationalité à la naissance en Algérie, voire n’y adhèrent pas. Ainsi, en 2019, parmi les personnes nées en Algérie avant 1962, 71 % se déclarent françaises de naissance dans l’EEC ; elles sont 61 % dans l’EAR. Ces différences proviennent du mode d’interrogation (avec l’aide d’un enquêteur ou non). Dans les deux cas, ces chiffres sont sous-estimés (de 280 000 personnes dans l’EAR et de 220 000 dans l’EEC), car la nationalité algérienne n’existait pas avant 1962. Les personnes qui ne se déclarent pas de nationalité française sont classées comme immigrées alors qu’elles sont en réalité pour la quasi-totalité nées de nationalité française. Parmi les personnes nées en Algérie après 1962, seules 17 % (EEC) et 15 % (EAR) se déclarent françaises de naissance.

Figure 2 – Principaux pays de naissance des personnes nées françaises à l'étranger et vivant en France

Figure 2 – Principaux pays de naissance des personnes nées françaises à l'étranger et vivant en France - Lecture : en 2019, 32 % des personnes nées françaises à l'étranger et vivant en France sont nées en Algérie et la moitié d’entre elles ont plus de 67 ans.
Part des effectifs
(en %)
Âge médian
(en années)
Algérie 31,6 67
Maroc 12,1 65
Tunisie 7,3 69
Allemagne 5,2 57
Madagascar 3,6 56
Sénégal 2,3 54
Suisse 2,3 34
Vietnam 2,3 67
Espagne 2,2 56
Belgique 2,1 43
Italie 2,1 67
Côte d’Ivoire 1,6 44
Portugal 1,5 59
Monaco 1,4 29
Royaume-Uni 1,2 21
  • Lecture : en 2019, 32 % des personnes nées françaises à l'étranger et vivant en France sont nées en Algérie et la moitié d’entre elles ont plus de 67 ans.
  • Champ : personnes nées françaises à l’étranger et vivant en France.
  • Source : Insee, estimations de population, enquête annuelle de recensement 2019.

Figure 2 – Principaux pays de naissance des personnes nées françaises à l'étranger et vivant en France

  • Lecture : en 2019, 32 % des personnes nées françaises à l'étranger et vivant en France sont nées en Algérie et la moitié d’entre elles ont plus de 67 ans.
  • Champ : personnes nées françaises à l’étranger et vivant en France.
  • Source : Insee, estimations de population, enquête annuelle de recensement 2019.

Une population vieillissante qui se renouvelle peu

La moitié des personnes nées françaises à l’étranger ont plus de 61 ans en 2019. Elles sont particulièrement âgées par rapport aux personnes nées en France ( de 41 ans) et aux immigrés (46 ans). Par ailleurs, cette population a fortement vieilli : en 1968, l’âge médian des Français nés à l’étranger était de 29 ans (32 ans pour les personnes nées en France et 42 ans pour les immigrés). Ce vieillissement touche davantage les personnes originaires des anciennes colonies françaises. Entre 1968 et 2019, l’âge médian est passé de 33 ans à 67 ans pour les Français nés en Algérie, de 23 ans à 66 ans pour ceux nés au Maroc ou en Tunisie, et de 17 ans à 50 ans pour ceux des autres pays d’Afrique. Pour les pays d’Europe (dont l’ex-URSS), ce vieillissement est moins marqué : de 35 à 50 ans.

Le nombre de Français nés à l’étranger vivant en France a légèrement diminué entre 2006 et 2019 (– 5 000 personnes par an). En effet, entre 2006 et 2018, les flux migratoires de Français nés à l’étranger n’ont pas compensé la mortalité de ceux qui y résidaient déjà. Sur cette période, leur solde migratoire est en moyenne de + 12 000 personnes par an : il correspond à la différence entre leurs entrées (+ 23 000 en moyenne par an) et leurs sorties du territoire (– 11 000). Dans le même temps, 17 000 décès sont survenus en moyenne chaque année.

Deux tiers des personnes nées françaises à l’étranger sont arrivées en France mineures, contre un tiers des immigrés

Selon les données des enquêtes Emploi 2013 à 2019 (sources), la plupart des Français nés à l’étranger sont venus vivre en France quand ils étaient encore enfants : un quart d’entre eux avait moins de 3 ans et la moitié moins de 10 ans (figure 3). Les Français nés en Europe sont ceux qui sont arrivés les plus jeunes : un quart sont arrivés quand ils avaient moins d’un an et les trois quarts avant 8 ans. En comparaison, les Français nés en Afrique sont plus souvent arrivés en France une fois adolescents ou jeunes adultes. Les âges d’arrivée sont assez différents pour les personnes immigrées : les deux tiers sont arrivées alors qu’elles étaient déjà adultes, avec peu de différences selon le continent de naissance. Ces différences dans les âges d’arrivée entre Français nés à l’étranger et immigrés se sont accrues avec le temps. L’âge médian d’arrivée des personnes venues s’installer en France en 2018 est de 26 ans pour les immigrés et de 7 ans pour celles nées françaises à l’étranger.

Pour qu’un enfant obtienne la nationalité française à sa naissance à l’étranger, il est nécessaire qu’au moins un de ses parents soit français et en fasse la demande auprès des services consulaires dans les délais impartis. 80 % des Français nés à l’étranger ont au moins un parent français de naissance et 58 % leurs deux parents (les autres cas correspondent aux parents français par acquisition). Certains parents n’ont pas effectué les démarches pour obtenir la nationalité française pour leur enfant. Ainsi, 5 % des immigrés déclarent avoir au moins un parent français de naissance et 2 % leurs deux parents. Enfin, 18 % des Français nés à l’étranger possèdent une double nationalité contre 58 % des immigrés ayant acquis la nationalité française, selon les enquêtes Statistiques sur les revenus et les conditions de vie de 2013 à 2018.

Figure 3a - Âge d'arrivée en France, par origine

Figure 3a - Âge d'arrivée en France, par origine - Lecture : un quart des personnes nées françaises en Algérie et vivant en France sont arrivées en France avant l’âge de 5 ans.
Lieu de naissance Origine Âge d'arrivée en France
(en années)
1er quartile Médiane 3e quartile
Algérie Nés français à l'étranger 5 14 23
Immigrés 15 24 30
Maroc, Tunisie Nés français à l'étranger 4 10 19
Immigrés 16 23 29
Autres pays d'Afrique Nés français à l'étranger 3 11 20
Immigrés 17 23 30
Europe Nés français à l'étranger 0 3 8
Immigrés 9 21 29
Autres pays du monde Nés français à l'étranger 2 8 20
Immigrés 14 23 29
Ensemble des nés français à l'étranger 3 10 20
Ensemble des immigrés 13 23 29
  • Lecture : un quart des personnes nées françaises en Algérie et vivant en France sont arrivées en France avant l’âge de 5 ans.
  • Champ : France hors Mayotte.
  • Source : Insee, enquêtes Emploi 2013 à 2019.

Des origines sociales plus proches de celles des natifs que des immigrés

De par leurs origines sociales, les Français nés à l’étranger se rapprochent davantage des personnes nées en France (ou natifs) que des immigrés. Entre 2013 et 2019, la proportion de Français nés à l’étranger dont le père est ou était cadre ou profession intermédiaire est de 30 %, contre 28 % chez les natifs et 18 % chez les immigrés (figure 3). La proportion de père ouvrier ou employé est sensiblement la même pour les trois groupes (proche de 40 %). Les immigrés ont un peu plus souvent un père artisan, commerçant ou chef d’entreprise (24 %, contre 17 % des Français nés à l’étranger et 19 % des natifs). Ces différences sont moins marquées pour les personnes nées en Algérie : la proportion d’enfants de cadre ou profession intermédiaire est de 22 % parmi les Français nés en Algérie contre 14 % parmi les immigrés de la même origine. Pour le Maroc ou la Tunisie, ces chiffres sont respectivement de 33 % et 12 %, pour les autres pays d’Afrique de 37 % et 25 % et pour l’Europe de 36 % et 18 %.

Les personnes nées françaises à l’étranger ont un niveau de diplôme supérieur aux natifs et aux immigrés

Parmi les personnes ayant terminé leurs études, les Français nés à l’étranger sont proportionnellement plus souvent diplômés de l’enseignement supérieur (31 %) que les natifs (29 %) et les immigrés (25 %, figure 4). Inversement, la proportion de personnes peu ou pas diplômées est plus forte parmi les immigrés (48 %) que parmi les Français nés à l’étranger (35 %) et les natifs (28 %). Parmi les Français nés à l’étranger, ceux nés en Algérie, qui sont les plus âgés, sont les moins diplômés (24 % de diplômés du supérieur et 44 % de peu ou pas diplômés). En cela, leur profil se rapproche davantage des immigrés de la même origine. Ces derniers sont toutefois nettement plus jeunes (48 ans d’âge médian contre 67 ans pour les nés français en Algérie) et leur niveau de diplôme s’élève avec les générations.

Figure 4a - Niveau de diplôme, par origine

en %
Figure 4a - Niveau de diplôme, par origine (en %) - Lecture : 24 % des personnes nées françaises en Algérie et vivant en France sont diplômées du supérieur.
Lieu de naissance Origine Diplômé du supérieur Diplômé du secondaire Peu ou pas diplômé
Algérie Nés français à l'étranger 24 33 44
Immigrés 21 26 54
Maroc, Tunisie Nés français à l'étranger 32 36 33
Immigrés 19 26 54
Autres pays d'Afrique Nés français à l'étranger 36 35 29
Immigrés 27 31 42
Europe Nés français à l'étranger 39 36 26
Immigrés 26 28 47
Autres pays du monde Nés français à l'étranger 36 37 28
Immigrés 31 24 45
Ensemble des nés français à l'étranger 31 35 35
Ensemble des immigrés 25 27 48
Ensemble des personnes nées en France 29 43 28
Ensemble de la population 29 41 30
  • Notes : le niveau de diplôme est calculé pour les personnes ayant terminé leurs études initiales. Les personnes peu ou pas diplômées n’ont aucun diplôme, un certificat d'études primaires ou le brevet des collèges.
  • Lecture : 24 % des personnes nées françaises en Algérie et vivant en France sont diplômées du supérieur.
  • Champ : France hors Mayotte.
  • Source : Insee, enquêtes Emploi 2013 à 2019.

Les personnes nées françaises à l’étranger sont nettement plus âgées que les autres résidents en France. Elles ont quitté le système scolaire à une époque où le nombre de diplômés du supérieur était nettement plus faible. À âge et sexe donnés, le niveau de diplôme des Français nés à l’étranger est ainsi bien supérieur à celui des immigrés mais également à celui des natifs, et ce, quelle que soit l’origine géographique (figure 5). Par rapport aux natifs, le d’être diplômé du supérieur est multiplié par 1,3 pour les Français nés à l’étranger, alors qu’il est 30 % plus faible pour les immigrés. Inversement, celui d’être peu ou pas diplômé n’est pas significativement différent entre natifs et Français nés à l’étranger, alors qu’il est nettement plus élevé pour les immigrés. S’agissant des personnes nées en Algérie, celles nées françaises ont un rapport de chances d’être peu ou pas diplômées légèrement supérieur à celui des natifs, tandis que celles qui sont immigrées ont un rapport de chances très nettement supérieur.

Figure 5 - Niveau de diplôme et situation professionnelle à caractéristiques égales

Figure 5 - Niveau de diplôme et situation professionnelle à caractéristiques égales - Lecture : à âge et sexe égaux, le rapport des chances d’être diplômé du supérieur plutôt que de ne pas l'être est 1,2 fois plus élevé pour les personnes nées françaises en Algérie et vivant en France que pour les personnes nées en France.
Lieu de naissance Origine Odd-ratios (rapport de chances) de la probabilité d'être...
Diplômé du supérieur Peu ou pas diplômé Inactif Chômeur Cadre Ouvrier
Modèle selon l’origine
Personnes nées en France Réf. Réf. Réf. Réf. Réf. Réf.
Algérie Nés français à l'étranger 1,2 1,1 1,1 1,9 1,1 0,7
Immigrés 0,6 4,1 2,8 3,3 0,6 1,8
Maroc, Tunisie Nés français à l'étranger 1,6 0,7 1,2 1,8 1,5 0,8
Immigrés 0,5 4,5 2,6 2,8 0,8 1,9
Autres pays d'Afrique Nés français à l'étranger 1,3 1,1 1,1 1,7 ns 0,8
Immigrés 0,7 3,2 1,3 2,3 0,5 1,9
Europe Nés français à l'étranger 1,6 0,8 ns 1,2 1,3 0,8
Immigrés 0,9 2,1 1,1 1,2 ns 1,5
Autres pays du monde Nés français à l'étranger 1,3 1,1 1,1 1,4 1,2 ns
Immigrés 0,9 3,3 2,2 2,0 ns 1,5
Modèle sans distinguer l’origine
Personnes nées en France Réf. Réf. Réf. Réf. Réf. Réf.
Nés français à l'étranger 1,3 ns 1,1 1,6 1,2 0,8
Immigrés 0,7 3,0 1,8 2,1 0,8 1,7
  • ns : non significatif au seuil de 5 %.
  • Notes : les odd-ratios (ou ) sont calculés à partir de modèles logistiques. Le niveau de diplôme est calculé pour les personnes ayant terminé leurs études initiales. Les personnes peu ou pas diplômées n’ont aucun diplôme, un certificat d’études primaires ou le brevet des collèges. La probabilité d’être actif est calculée parmi les personnes de 15 à 64 ans ayant terminé leurs études. La probabilité d’être cadre ou ouvrier est calculée parmi les personnes en emploi. Les autres variables explicatives (non reportées) sont : l’âge, l’âge au carré et le sexe. Pour la situation professionnelle, le diplôme est également contrôlé.
  • Lecture : à âge et sexe égaux, le rapport des chances d’être diplômé du supérieur plutôt que de ne pas l'être est 1,2 fois plus élevé pour les personnes nées françaises en Algérie et vivant en France que pour les personnes nées en France.
  • Champ : France hors Mayotte.
  • Source : Insee, enquêtes Emploi 2013 à 2019.

Une situation plus favorable pour ceux en emploi, moins lorsqu’ils en cherchent un

Les différences d’âge se retrouvent dans la situation sur le marché du travail. 39 % des Français nés à l’étranger sont à la retraite, soit deux fois plus que les natifs (21 %) et les immigrés (19 %). Cette proportion est particulièrement forte parmi les personnes nées françaises en Algérie (56 %), au Maroc ou en Tunisie (53 %).

Parmi les personnes de 15 à 64 ans qui ne sont ni étudiantes ni retraitées, la proportion de Français nés à l’étranger qui occupent un emploi (72 %) se situe entre celle des natifs (79 %) et des immigrés (62 %). En effet, les Français nés à l’étranger semblent rencontrer davantage de difficultés que les natifs à trouver un emploi lorsqu’ils sont actifs (rapport de chances d’être au chômage plutôt qu’en emploi de 1,6). C’est en particulier le cas pour ceux nés en Algérie, au Maroc ou en Tunisie, et dans les autres pays d’Afrique (figure 5). Ces difficultés à trouver un emploi demeurent toutefois inférieures à celles rencontrées par les immigrés, notamment ceux originaires d’Algérie, du Maroc ou de Tunisie.

En revanche, lorsqu’ils sont en emploi, les Français nés à l’étranger ont généralement des situations plus favorables. Ceux qui occupent des emplois de cadres (25 %) sont nettement plus nombreux que les natifs (18 %) et les immigrés (15 %) ; inversement pour la proportion d’ouvriers (15 % contre respectivement 20 % et 30 %). Toutefois, à âge, sexe et diplôme équivalents, cet avantage se réduit, même s’il demeure significatif : le rapport de chances par rapport aux natifs d’être cadre est de 1,2, et celui d’être ouvrier de 0,8, contre 0,8 et 1,7 pour les immigrés. Ceci se vérifie également origine par origine, par rapport aux natifs et aux immigrés.

Sources

Le recensement de la population permet de connaître la population de la France, dans sa diversité et son évolution. De 1968 à 1999, le recensement est exhaustif et a lieu tous les 7 à 10 ans. Ces données sont compilées et harmonisées dans la base Saphir. Depuis 2004, des enquêtes annuelles de recensement (EAR) sont réalisées chaque année auprès d’une partie de la population. Les personnes sont interrogées sur leur nationalité à la naissance et leur lieu de naissance. Il est ainsi possible de savoir si une personne est née en France, française née à l’étranger ou immigrée. Les estimations de populations sont effectuées sur la dernière EAR.
L’enquête Emploi en continu (EEC) est la seule source fournissant une mesure des concepts d’activité, de chômage, d’emploi et d’inactivité, tels qu’ils sont définis par le Bureau international du travail (BIT). Elle comporte des informations sur les caractéristiques des personnes, en particulier sur leur origine géographique et celle de leur ascendance directe. L’interrogation est assurée par un enquêteur, à la différence du bulletin de recensement qui est rempli par les personnes elles-mêmes. Ceci peut expliquer que le nombre de Français nés à l’étranger soit un peu plus élevé dans l’EEC que dans les EAR (1,8 million contre 1,7 million en 2019), alors que le champ de l’EEC est restreint aux personnes vivant en ménage ordinaire. La différence porte principalement sur les personnes nées en Algérie avant 1962 (encadré). Pour obtenir une précision suffisante des résultats, les effectifs de sept millésimes d’enquêtes (2013-2019) sont empilés.

Définitions

Un immigré est une personne née de nationalité étrangère à l’étranger et résidant en France. Certains immigrés ont pu devenir français, les autres restant étrangers.

Une personne est née française à l’étranger si, à sa naissance, au moins l’un de ses parents est français. Peu importe que les parents soient mariés ou non dès lors que la filiation est légalement établie à l’égard du parent français. La naissance doit faire l’objet d’une déclaration : soit auprès du service d’état civil de l’ambassade ou au consulat du pays de résidence, si la loi locale ne s’y oppose pas ; soit auprès de l’état civil local, dans le cas contraire. Les parents peuvent ensuite faire la demande de transcription à leur ambassade ou consulat.

L’âge médian partage la population étudiée en deux parties égales : 50 % de la population a moins que cet âge médian et 50 % a plus.

Le rapport des chances rapporte la cote d’un événement dans une sous-population, c’est-à-dire le rapport entre la probabilité que cet événement arrive dans cette sous-population plutôt qu’il n’y arrive pas, à la cote de ce même événement dans une autre sous-population.

Pour en savoir plus

Escafré-Dublet A., Kesztenbaum L., Simon P., « Ouvrir dans un nouvel ongletQuand le recensement comptait les Français musulmans », Population & Sociétés n° 583, Ined, novembre 2020.

« L’essentiel sur... les immigrés et étrangers », Chiffres-Clés, Insee, juillet 2020.

« Ouvrir dans un nouvel ongletMigration and migrant population statistics », Statistics Explained, Eurostat, mai 2020.

Lê J., « En 2017, la moitié des personnes arrivées en France sont nées en Europe », Insee Focus n° 145, février 2019.

Lê J., Okba M., « L’insertion des immigrés, de l’arrivée en France au premier emploi », Insee Première n° 1717, novembre 2018.