Insee FocusL’industrie agroalimentaire : une activité en demi-teinte

Franz Kohler, Maryse Thibert, division Industrie et agriculture, Insee

En 2014, le recul de la production agroalimentaire s’atténue, l’excédent commercial se réduit légèrement en raison d’une baisse mesurée des exportations et l’emploi ne diminue plus. En 2013, l’industrie agroalimentaire (hors tabac) compte 60 500 entreprises, dégage un chiffre d’affaires de 184 milliards d’euros et contribue pour 18 % à la valeur ajoutée de l’industrie manufacturière. Elle emploie 522 000 salariés.

Insee Focus
No 49
Paru le :Paru le14/12/2015
Franz Kohler, Maryse Thibert, division Industrie et agriculture, Insee
Insee Focus No 49- Décembre 2015

La production en volume recule encore un peu en 2014

En 2014, la production en volume de la branche de l’ (y compris tabac) continue de décroître (- 0,5 %) mais moins qu’au cours des deux années précédentes (chronologiquement - 1,6 % et - 1,4 %). Dans le même temps, l’activité manufacturière reprend pied progressivement (+ 0,3 % en 2014) (figure 1). La production agroalimentaire (y compris tabac) a moins reculé que l’ensemble de l’industrie manufacturière lors de la récession de 2008-2009 (- 3,0 % contre - 13,2 %) mais aussi moins rebondi en 2010-2011 (+ 2,0 % contre + 6,7 %). En 2014, sa production est inférieure de 4,4 % à celle de 2007, alors que ce recul est de 10,2 % pour l’ensemble de l’industrie manufacturière.

Le repli en 2014 ne touche pas toutes les branches : la production des boissons et du tabac baisse fortement (- 3,6 %) alors que celle de l’industrie alimentaire est globalement stable. De même, au sein de cette industrie, la branche des huiles est très dynamique (+ 7,9 %), grâce notamment à la hausse de la récolte de colza. En revanche, la fabrication de préparations et conserves à base de poissons et celle des « autres produits alimentaires » ont plus fortement baissé (respectivement - 6 % et - 1,8 %). Pour cette dernière, à l’exception des chocolats et produits de confiserie, aucun des autres produits phare comme le sucre, les plats préparés et les aliments pour enfants n’a pu enrayer une décroissance amorcée depuis 2007 (- 10,8 % pour l’ensemble de la branche d’autres produits alimentaires).

Figure 1Production par branche en volume

indice base 100 en 2000
Production par branche en volume (indice base 100 en 2000)
Industrie manufacturière Industrie agroalimentaire
2000 100,0 100,0
2001 102,0 100,3
2002 100,2 101,1
2003 98,5 100,6
2004 100,4 101,8
2005 100,9 101,7
2006 103,1 103,1
2007 104,6 106,1
2008 102,4 104,8
2009 90,8 102,9
2010 94,1 102,5
2011 96,9 105,0
2012 94,1 103,3
2013 93,6 101,9
2014 93,9 101,4
  • Champ : France.
  • Source : Insee, comptes nationaux en base 2010.

Figure 1Production par branche en volume

  • Champ : France.
  • Source : Insee, comptes nationaux en base 2010.

L’excédent commercial se dégrade légèrement

En 2014, comme en 2013, l’excédent commercial des produits agroalimentaires se dégrade : 6,4 milliards d’euros, après 6,8 milliards en 2013. Toutefois, le niveau se maintient au-dessus de celui de 2010, année de vif rebond après la crise. Les importations augmentent (+ 0,7 %) moins fortement qu’en 2013, tandis que les exportations décroissent légèrement (- 0,4 %), marquant un premier recul depuis 2009.

Le déficit commercial des viandes se creuse et l’excédent des « autres produits alimentaires » et des boissons recule. Les exportations de viandes de volailles à destination du Moyen-Orient ont pâti de la suppression des aides européennes, et celles de viandes porcines, de restrictions sanitaires et de l’embargo russe. Les exportations de sucre ont durement souffert d’une baisse des prix, que la hausse des quantités n’a pas pu compenser. Du côté des importations, la forte hausse du prix des produits de confiserie alliée à celle du volume, ont lourdement pesé sur le des « autres produits alimentaires ». Les boissons, malgré une légère contraction de leur excédent, restent encore un des pivots du commerce extérieur de l’agroalimentaire (figure 2).

Figure 2Échanges extérieurs de produits agroalimentaires

en milliards d'euros
Échanges extérieurs de produits agroalimentaires (en milliards d'euros)
Exportations Importations
2000 28,1 20,9
2001 28,4 22,1
2002 29,3 22,7
2003 29,2 22,6
2004 29,5 23,4
2005 30,4 24,2
2006 33,0 25,8
2007 35,1 28,1
2008 36,9 31,1
2009 33,6 29,6
2010 37,0 30,9
2011 42,0 34,8
2012 43,3 36,1
2013 44,3 37,5
2014 44,2 37,7
  • Champ : France.
  • Source : Insee, comptes nationaux en base 2010.

Figure 2Échanges extérieurs de produits agroalimentaires

  • Champ : France.
  • Source : Insee, comptes nationaux en base 2010.

Des effectifs salariés en faible hausse en 2014

En baisse constante depuis 2004, l’emploi salarié (sources) hors intérim dans l’industrie agroalimentaire s’est redressé légèrement en 2014 (+ 0,2 %). De 2000 à 2014, l’agroalimentaire a perdu 6 % de ses effectifs, bien moins cependant que l’industrie manufacturière dont les effectifs ont été réduits de plus du quart (figure 3).

Figure 3Évolution de l'emploi salarié (hors intérim)

indice base 100 en 2000
Évolution de l'emploi salarié (hors intérim) (indice base 100 en 2000)
Industrie manufacturière Industrie agroalimentaire
2000 100,0 100,0
2001 99,6 101,2
2002 97,4 101,6
2003 94,8 101,7
2004 92,3 100,2
2005 90,0 99,1
2006 88,3 97,9
2007 87,1 97,2
2008 85,0 95,9
2009 80,5 95,3
2010 78,2 95,2
2011 77,8 95,0
2012 77,1 94,7
2013 75,6 94,0
2014 74,5 94,1
  • Note : les titulaires de contrats d'intérim ne sont pas classés dans les secteurs d'activité qui les emploient effectivement, mais systématiquement dans l'activité de travail temporaire.
  • Champ : France.
  • Source : Insee, estimations d'emploi au 31 décembre, données corrigées des variations saisonnières (série cvs).

Figure 3Évolution de l'emploi salarié (hors intérim)

  • Note : les titulaires de contrats d'intérim ne sont pas classés dans les secteurs d'activité qui les emploient effectivement, mais systématiquement dans l'activité de travail temporaire.
  • Champ : France.
  • Source : Insee, estimations d'emploi au 31 décembre, données corrigées des variations saisonnières (série cvs).

522 000 salariés et 184 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2013

En 2013, le secteur de l’industrie agroalimentaire (y compris artisanat commercial mais hors tabac) compte 60 500 entreprises et emploie 522 000 salariés en équivalent temps plein (ETP). Il réalise un chiffre d’affaires de 184 milliards d’euros et une valeur ajoutée de 39 milliards d’euros. Il représente 21 % du chiffre d’affaires de l’industrie manufacturière et 18 % de sa valeur ajoutée (figure 4). L’industrie alimentaire (agroalimentaire hors boissons et tabac) domine très largement, réalisant 84 % du chiffre d’affaires.

Au sein de l’industrie agroalimentaire (hors tabac), près de 89 % des entreprises comptent moins de 10 salariés (ETP) mais ne réalisent que 16 % de la valeur ajoutée totale. Les entreprises de 250 salariés ou plus emploient 38 % des effectifs et contribuent pour la moitié à la valeur ajoutée du secteur. Elles devancent les entreprises de taille moyenne (de 10 à 249 salariés), plus importantes en termes d’effectifs (40 %), mais qui n’assurent qu’un peu plus du tiers de la valeur ajoutée.

Le chiffre d’affaires de l’industrie agroalimentaire provient pour 86 % d’activités de production agroalimentaire et pour 11 % d’activités de commerce de gros.

Figure 4Chiffres clés de l'industrie agroalimentaire en 2013 (hors tabac)

Chiffres clés de l'industrie agroalimentaire en 2013 (hors tabac) - Lecture : 60 500 entreprises ont pour activité principale l'industrie agroalimentaire ; elles représentent 26,8 % des entreprises dont l'activité principale relève de l'industrie manufacturière.
Entreprises (milliers) Salariés ETP (milliers) Chiffre d'affaires hors taxe (miliards d'euros) Chiffre d'affaires à l'export (milliards d'euros) Valeur ajoutée (milliards d'euros) Investissements corporels bruts hors apports (milliards d'euros)
De 0 à 9 salariés en ETP1 54,0 113,8 18,8 1,2 6,1 1,1
De 10 à 249 salariés en ETP 6,2 207,6 68,8 10,5 13,6 2,0
250 salariés ou plus en ETP 0,3 200,7 96,6 25,2 19,1 3,4
Ensemble des entreprises de l'industrie agroalimentaire 60,5 522,1 184,2 36,9 38,8 6,5
Ensemble des entreprises de l'industrie manufacturière 226 2672,5 878,2 316,9 213,1 31,0
Poids des entreprises de l'industrie agroalimentaire2 (en %) 26,8 19,5 21,0 11,6 18,2 21,0
  • 1. Équivalent temps plein. Effectifs hors intérim.
  • 2. Poids des entreprises ayant une activité principale dans le secteur de l'industrie agroalimentaire par rapport à l'ensemble des entreprises de l'industrie manufacturière.
  • Champ : France, unités légales et entreprises profilées (voir « Sources »).
  • Lecture : 60 500 entreprises ont pour activité principale l'industrie agroalimentaire ; elles représentent 26,8 % des entreprises dont l'activité principale relève de l'industrie manufacturière.
  • Source : Insee, Ésane.

Légère baisse du taux de marge en 2013

En 2013, les immobilisations corporelles par salarié s’élèvent à 145 000 euros dans l’industrie agroalimentaire hors tabac, soit une intensité capitalistique plus faible que celle de l’industrie manufacturière (figure 5). Ce taux atteint 363 000 euros par salarié pour les entreprises des boissons et 125 000 euros dans l'industrie alimentaire.

Le secteur agroalimentaire est relativement peu tourné vers l’extérieur. En 2013, il réalise 20 % de son chiffre d’affaires à l’export, contre 36 % dans l’industrie manufacturière. En effet, l’industrie alimentaire exporte assez peu : 18 %. En revanche, ce taux est de 30 % dans l’industrie des boissons.

En 2013, le taux de marge dans l’agroalimentaire baisse légèrement : - 0,7 point. Si la valeur ajoutée au coût des facteurs a progressé, les frais de personnel ont été plus dynamiques. Ce taux reste plus élevé que dans l’industrie manufacturière (33 % contre 21 %) et atteint 56 % dans le secteur des boissons.

En 2013, le taux d’investissement (corporel) de l’industrie agroalimentaire (hors tabac) est supérieur (17 %) à celui de l’industrie manufacturière (15 %). Son taux d’autofinancement est également bien plus élevé (147 %), atteignant 254 % dans le secteur des boissons.

Figure 5Ratios du secteur de l'industrie agroalimentaire en 2013 (hors tabac)

Ratios du secteur de l'industrie agroalimentaire en 2013 (hors tabac)
Industrie agroalimentaire Industrie manufacturière
Organisation et débouchés de la production
Taux d'exportation1 (en %) 20,0 36,1
Intensité capitalistique2 (en milliers d'euros) 145,1 162,9
Frais de personnel par salarié ETP (en milliers d'euros) 45,9 58,2
Partage de la valeur ajoutée au coût des facteurs3
Part des frais de personnel (en %) 67,4 78,7
Part de l'excédent brut d'exploitation : taux de marge (en %) 32,6 21,3
Ratios d'investissement
Taux d'investissement4 (en %) 16,8 14,5
Taux d'autofinancement5 (en %) 146,6 123,7
  • 1. Part du chiffre d'affaires à l'export dans le chiffre d'affaires total.
  • 2. Immobilisations corporelles brutes / effectif salarié en ETP.
  • 3. Valeur ajoutée de laquelle on déduit les impôts sur la production et à laquelle on ajoute les subventions d'exploitation.
  • 4. Investissements corporels bruts hors apport / valeur ajoutée.
  • 5. Capacité d'autofinancement / investissements corporels bruts hors apport.
  • Champ : France, unités légales et entreprises profilées (voir rubrique « Sources »).
  • Source : Insee, Ésane.

Sources

Trois sources principales :

  • itemles comptes nationaux annuels (base 2010) pour retracer l’évolution de la production des branches de l’industrie agroalimentaires et des échanges extérieurs des produits agroalimentaires de 2000 à 2014 ;
  • les estimations d'emploi salarié pour l’évolution des effectifs salariés des secteurs d’établissement depuis 2000 ;
  • le dispositif statistique Ésane (Élaboration des statistiques annuelles d'entreprises) pour les principales caractéristiques comptables des secteurs d’activité manufacturiers en 2013. En 2013, le champ de la source Ésane couvre à la fois des unités légales et des entreprises au sens de la loi de modernisation de l'économie issues du profilage des grands groupes. En effet, actuellement, tous les groupes n’ont pas encore été profilés. Les évolutions entre 2012 et 2013 sont également présentées ici sur la base du champ de 2013.

Définitions

Branche / Branche d'activité :

Une branche (ou branche d'activité) regroupe des unités de production homogènes, c'est-à-dire qui fabriquent des produits (ou produisent des services) qui appartiennent au même item de la nomenclature d'activité économique considérée.

Au contraire, un secteur regroupe des unités statistiques (entreprises, unités légales) classées selon leur activité principale.

Les industries agroalimentaires correspondent aux divisions 10, 11 et 12 de la nomenclature NAF rév.2. Les données prennent en compte l'artisanat commercial.

Le solde des échanges extérieurs (CAF/FAB) retracé dans les comptes nationaux est la différence entre la valeur des exportations FAB et celle des importations CAF.

Secteur d'activité / Secteur :

Un secteur regroupe des entreprises de fabrication, de commerce ou de service qui ont la même activité principale (au regard de la nomenclature d'activité économique considérée).

L'activité d'un secteur n'est donc pas tout à fait homogène et comprend des productions ou services secondaires qui relèveraient d'autres items de la nomenclature que celui du secteur considéré.

Au contraire, une branche regroupe des unités de production homogènes.

Entreprise :

L'entreprise est la plus petite combinaison d'unités légales qui constitue une unité organisationnelle de production de biens et de services jouissant d'une certaine autonomie de décision, notamment pour l'affectation de ses ressources courantes.

Emploi en nombre de personnes / Emploi en équivalent temps plein :

L'emploi peut se mesurer en nombre de personnes ayant travaillé, même pendant une durée limitée.

On peut aussi mesurer les emplois en équivalent temps-plein. C'est le nombre total d'heures travaillées dans l'activité considérée divisé par la moyenne annuelle des heures travaillées dans des emplois à plein temps sur le territoire économique. L'Insee calcule également un taux d'emploi en équivalent temps plein.

Unité légale / Entreprise-unité légale / Siren :

L'unité légale est une entité juridique de droit public ou privé. Cette entité juridique peut être :

  • une personne morale, dont l'existence est reconnue par la loi indépendamment des personnes ou des institutions qui la possèdent ou qui en sont membres ;
  • une personne physique, qui, en tant qu'indépendant, peut exercer une activité économique.

Elle est obligatoirement déclarée aux administrations compétentes (greffes des tribunaux de commerce, Sécurité sociale, DGFiP...) pour exister. L'existence d'une telle unité dépend du choix des propriétaires ou de ses créateurs (pour des raisons organisationnelles, juridiques ou fiscales). L'unité légale est l'unité principale enregistrée dans Sirene.

Remarque :

Cette définition de l'unité légale ne doit pas être confondue avec celle de l'entreprise, considérée comme unité statistique.

Exportations de biens et de services :

Les exportations de biens et de services sont des opérations (ventes, troc et dons) par lesquelles des résidents fournissent des biens et des services à des non-résidents.

Pour qu’il y ait exportations, il faut qu’il y ait changement de propriété entre résidents et non-résidents. Le déplacement physique de biens à travers les frontières nationales n’implique pas en soi l’importation ou l’exportation de ces biens.

Ainsi, par exemple les biens envoyés à l’étranger pour travail à façon ne sont plus comptés en exportations de biens, et la marchandise transformée n’est plus comptée comme une importation de biens. En revanche est comptabilisée une importation de service industriel par le pays du donneur d’ordre, d’un montant égal à la différence de valeur entre le produit fini et les intrants. Le solde total des échanges extérieurs n’est pas modifié.


Remarque :

Cette définition du Système Européen des Comptes nationaux et régionaux de 2010 (SEC 2010), basée sur le changement de propriété est cohérente avec la 6e édition du manuel de balance des paiements (BPM6).

Importations de biens et de services :

Les importations de biens et de services (P7) sont des opérations (achats, troc et dons) par lesquelles des non-résidents fournissent des biens et des services à des résidents.

Pour qu’il y ait importations, il faut qu’il y ait changement de propriété entre résidents et non-résidents. Le déplacement physique de biens à travers les frontières nationales n’implique pas en soi l’importation ou l’exportation de ces biens.

Ainsi, par exemple les biens envoyés à l’étranger pour travail à façon ne sont plus comptés en exportations de biens, et la marchandise transformée n’est plus comptée comme une importation de biens. En revanche est comptabilisée une importation de service industriel par le pays du donneur d’ordre, d’un montant égal à la différence de valeur entre le produit fini et les intrants. Le solde total des échanges extérieurs n’est pas modifié.

Remarque :

Cette définition du Système Européen des Comptes nationaux et régionaux de 2010 (SEC 2010), basée sur le changement de propriété, est cohérente avec la 6e édition du manuel de balance des paiements (BPM6).

Pour en savoir plus

« Les entreprises en France », Insee Références, Édition 2015, octobre 2015.

Rignols É., « L'industrie manufacturière : léger redressement de la production en 2014 », Insee Focus n° 39, octobre 2015.

« Ouvrir dans un nouvel ongletBaisse des prix et embargo russe pèsent sur les exportations agricoles et agroalimentaires françaises », Agreste Conjoncture n° 262, mars 2015.