Insee Analyses Bourgogne-Franche-Comté · Septembre 2024 · n° 121

Les nouveaux arrivants bénéficient souvent de meilleures conditions de vie

En 2021, 45 300 personnes ont quitté la Bourgogne-Franche-Comté pour une autre région métropolitaine alors que 47 500 se sont installées dans la région. Elles viennent pour moitié soit d’Auvergne-Rhône-Alpes soit de l’Île-de-France (régions limitrophes très peuplées), pour une sur six du Grand Est. Selon leurs profils et niveaux de vie, les nouveaux arrivants ne sont pas attirés par les mêmes territoires. Près de la moitié des nouveaux arrivants dans la région s’installent dans les principales villes, et plus du quart dans des territoires ruraux où le niveau de vie est moins élevé (figure 1) et (figure 2).

Ces emménagements peuvent être liés à la poursuite d'études, à un nouvel emploi, à l’accès à un nouveau logement, souvent lié à un départ à la retraite, ou à la recherche d’un meilleur cadre de vie, sans que ces facteurs soient exclusifs les uns des autres.

En Bourgogne-Franche-Comté, comme dans les autres régions, les nouveaux arrivants sont globalement jeunes (figure 3). Les jeunes vivent plus souvent seuls et sont géographiquement plus mobiles que les familles avec des enfants. Trois nouveaux arrivants sur dix sont des personnes seules alors qu’ils ne représentent que deux résidents sur dix. L’âge moyen des nouveaux résidents est de 36 ans contre 44 ans pour la population déjà présente. Ces arrivées de jeunes contribuent à ralentir le vieillissement de la population. Il s’agit notamment d’étudiants, ces derniers représentent 12 % des effectifs entrants contre 7 % parmi les stables. Ils s’installent principalement à Dijon, Besançon et dans une moindre mesure à Belfort, des villes qui offrent un choix de formations riches et diversifiées grâce à la présence de pôles universitaires.

La région séduit également des actifs. Son faible taux de chômage est un levier d’attractivité. Ainsi, 45 % des nouveaux habitants de la région occupent un emploi au cours de l’année de leur arrivée. C’est encore plus vrai pour ceux s’installant dans la bande frontalière avec la Suisse, où plus de la moitié des arrivants est dans ce cas (figure 4).

L’attractivité du marché de l’emploi suisse, de par ses salaires élevés, s’exerce au-delà des populations ayant un lien direct avec la région. Seul un nouvel arrivant dans la bande frontalière sur six est né en Bourgogne-Franche-Comté, alors que globalement, un sur quatre venant résider dans la région y est né. Dans la bande frontalière, les entrants s’installent pour la plupart autour de Pontarlier, et dans les communautés de communes des Lacs et Montagnes du Haut-Doubs ou du Val de Morteau.

Ils ont le niveau de vie médian le plus élevé parmi l’ensemble des nouveaux arrivants dans la région, avec 2 560 € par mois (encadré). Ces nouveaux habitants sont ceux qui ont connu la plus forte évolution de revenu en arrivant dans la région. Leur niveau de vie médian a augmenté de 29 % sur un an, soit 575 €. Malgré tout, il reste légèrement inférieur à celui de la population habitant déjà ces zones (figure 5).

L’importante proportion de personnes se déclarant au chômage parmi les arrivants dans la bande frontalière (15 %) peut expliquer en partie cette situation. Pour un couple nouvel arrivant, trouver simultanément un emploi pour chacun des conjoints peut s’avérer difficile et ainsi entraîner une phase de chômage transitoire.

Par ailleurs, la coexistence d’emplois frontaliers et locaux entraîne des inégalités de revenus. Les 10 % les plus aisés touchent 3,6 fois plus que les 10 % les plus modestes, alors que ce rapport est de 3,4 parmi les résidents. Ainsi, ces personnes, avec peu ou pas d’expérience professionnelle, sont plus souvent pauvres que leurs nouveaux voisins déjà installés (10 % contre 6 %).

En emménageant dans la région, les nouveaux arrivants peuvent souvent bénéficier d’une amélioration de leur cadre de vie grâce à un logement plus spacieux. La surface moyenne de leur logement passe de 79 m² à 93 m² à leur arrivée. Elle reste cependant plus petite que celle des logements des personnes déjà installées (101 m²).

Le changement est plus net pour ceux ayant les revenus les plus confortables. Ainsi, près de la moitié des individus, soit 36 % des ménages, choisissent d’habiter dans une maison. Parmi les individus entrants, un quart a changé de type de logement pour passer d’un appartement à une maison.

La région attire également de nombreux retraités, une population habituellement peu mobile. Plus de la moitié de ces personnes âgées de 65 ans ou plus sont propriétaires à leur arrivée. Ces installations peuvent être liées à un rapprochement familial ou à la possession d’une résidence dans la région.

Globalement, l’accès à la propriété concerne de nombreux arrivants, quel que soit leur âge. Parmi les nouveaux ménages arrivants, un tiers est propriétaire de son nouveau logement. Parmi ceux qui étaient locataires auparavant, un sur six devient propriétaire à son arrivée dans la région. Avec un niveau de vie mensuel médian de 2 240 €, les arrivants accédant à la propriété sont 17 % plus aisés que l’ensemble des nouveaux arrivants. À leur installation dans la région, ils voient leur niveau de vie augmenter de plus de 300 € par mois.

L’offre immobilière en Bourgogne-Franche-Comté est un atout pour son attractivité. Le prix médian au m² des logements vendus entre 2015 et 2019 (1 370 €) est le plus faible des régions françaises derrière Grand Est. Il est 35 % inférieur au prix médian de France de province. Ces différences sont liées à la fois au niveau de la demande générée par les évolutions démographiques, et au nombre de logements disponibles. Dans la région, l’habitat individuel est un peu plus développé qu’à l’échelle de la France de province. De plus, le parc de logements est ancien, 75 % des résidences principales ont été construites avant 1990, soit 5 points de plus qu’en France de province.

Localement, les prix fluctuent selon les zones d’habitation. Dans les territoires ruraux, proposant un environnement proche de la nature, les deux tiers des nouveaux arrivants occupent une maison dont ils sont souvent propriétaires. La faible pression démographique et l’éloignement des grands pôles d’emploi et de services limitent la demande, ce qui tempère la hausse des prix.

Inversement, en bordure de la Suisse, la tension démographique est importante et l’offre de logement est limitée par la géographie montagneuse. Ainsi, les prix de l’immobilier sont parmi les plus élevés de la région. Seuls trois entrants sur dix sont propriétaires et près des trois quarts vivent en appartement. Entre 2015 et 2019, la moitié des logements vendus dans les territoires ruraux aux salaires élevés l'ont été à plus de 2 200 € le m² contre 1 660 € en moyenne dans l’ensemble du Doubs.

Les espaces « urbains » attirent des personnes aux revenus élevés. Ces nouveaux Bourguignons-Francs-Comtois sont deux fois plus souvent diplômés du supérieur et plus souvent cadres que leurs nouveaux voisins. Ces personnes qualifiées privilégient les zones densément peuplées où se concentrent les emplois des fonctions métropolitaines comme Dijon, Besançon ou Mâcon. À Dijon Métropole, le niveau de vie médian des nouveaux habitants est plus de 7 % supérieur à celui des stables.

Dans les territoires « ruraux à forts revenus patrimoniaux », les arrivants ont également des revenus confortables. Leur niveau de vie mensuel médian est de 2 260 €, soit 340 € de plus que l’ensemble des arrivants dans la région. Ces territoires attirent des familles, et les actifs occupés constituent la moitié des arrivants dans ces territoires. Parmi les 10 % des arrivants les plus riches, près de la moitié sont des couples avec un ou plusieurs enfants. Ces familles s’installent le long de l’axe Dijon/Mâcon où elles ont un accès relativement rapide aux grandes villes, pourvoyeuses d’emplois et disposant de nombreux équipements pour la vie quotidienne et les loisirs. Dans l’intercommunalité de Beaune, Côte et Sud, le niveau de vie médian des nouveaux arrivants est 15 % plus élevé que celui des habitants déjà installés.

Les espaces « ruraux peu denses à faibles revenus » accueillent aussi des nouveaux entrants aisés. Il s’agit plutôt de retraités dont le niveau de vie est supérieur à celui des retraités déjà installés. En particulier, le quart des retraités entrants les plus riches vit avec plus de 2 700 € par mois, soit 450 € de plus que le quart des retraités les plus riches déjà installés. Ils viennent habiter à proximité des grands axes autoroutiers, notamment dans l’Yonne et le Morvan, dans des intercommunalités comme Puisaye-Forterre ou le Grand Autunois.

À ces profils favorisés d'arrivants s'ajoute une part relativement importante de personnes touchées par la pauvreté. Ainsi, 18 % des arrivants vivent sous le seuil de pauvreté, contre 13 % des personnes déjà installées en Bourgogne-Franche-Comté. Avec un seul revenu pour élever un ou plusieurs enfants, les familles monoparentales sont particulièrement concernées par la pauvreté. 35 % des personnes de ces familles arrivant dans la région vivent sous le seuil de pauvreté, soit huit points de plus que les familles monoparentales déjà présentes.

Les personnes les plus modestes s’installent davantage dans les territoires urbains. Près d’un arrivant sur cinq dans l'urbain vit sous le seuil de pauvreté contre 15 % parmi les stables. Les logements sociaux se concentrent dans les villes et attirent des personnes à faibles ressources. De plus, la moitié des entrants dans les territoires urbains sont des étudiants ou jeunes actifs de moins de 30 ans. Leurs revenus sont relativement faibles, souvent issus d’emplois temporaires pour les premiers, d’emplois dont le salaire aura tendance à croître avec l’ancienneté pour les seconds.

Les nouveaux arrivants des zones « rurales peu denses à faibles revenus » sont aussi particulièrement exposés à la pauvreté puisque 19 % vivent sous le seuil de pauvreté. Parmi ces personnes en situation de précarité, 29 % vivent dans des familles avec un ou plusieurs enfants. Elles sont plutôt jeunes, plus de la moitié a moins de 35 ans. Ces territoires attirent également une forte proportion de personnes retraitées en situation de pauvreté, 15 % contre 10 % en moyenne dans la région.

Lorsqu’on s’éloigne des principaux axes, les arrivants sont moins nombreux et généralement moins riches. C’est par exemple le cas dans la communauté de communes des Hauts de Val de Saône, où les nouveaux arrivants ont un niveau de vie médian 16 % inférieur à celui des stables.

Les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), ou intercommunalités, ont été classés selon la décomposition des revenus et la grille de densité grâce à deux méthodes d’analyses factorielles : une analyse factorielle multiple (AFM), puis une classification hiérarchique sur composantes principales (CHCP). Ces méthodes prennent en compte les différentes composantes du revenu, ainsi que le degré de ruralité de chacun des EPCI. Sur les 116 EPCI de la région, trois ont été écartés puisque principalement situés à l’extérieur de celle-ci : CA Moulins Agglomération, CC de la Cléry, du Betz et de l’Ouanne, et CC des Savoir-Faire.

Les communes densément peuplées et les communes de densité intermédiaire constituent l’espace urbain ; les communes peu denses et les communes très peu denses constituent l’espace rural.

Les différences de densité de population et de décomposition des revenus des ménages définissent quatre classes d’intercommunalités rurales dans la région : « le rural peu dense à faibles revenus », « le rural de classe moyenne ou plutôt aisée », « le rural à fort revenus patrimoniaux » et « le rural aux salaires élevés ».