Insee Focus ·
Avril 2022 · n° 265Pendant les périodes de confinement, un tiers des personnes de 18 ans ou plus ont
échangé tous les jours avec leur famille
Pendant les périodes particulières des confinements liés à l’épidémie de Covid-19, une personne majeure sur dix résidant en France métropolitaine déclare avoir éprouvé un sentiment d’abandon permanent ou récurrent. Les femmes sont deux fois plus nombreuses que les hommes à en faire état.
Trois personnes sur dix déclarent avoir eu besoin d’aide entre mars 2020 et octobre 2021. Dans la grande majorité des cas, l’aide attendue relevait d’un soutien moral (79 %) et dans une moindre mesure, d’une aide matérielle ou financière (respectivement 26 % et 18 %). Près des trois quarts des personnes ayant eu besoin d’aide ont sollicité leur entourage pour l’obtenir et, parmi elles, presque toutes l’ont effectivement reçue.
Les périodes de confinement ont, par ailleurs, amené à adapter les modes de communication avec ses proches. Ainsi, un tiers des personnes de 18 ans ou plus ont échangé tous les jours avec leur famille pendant les périodes de confinement, contre un peu plus d’un quart avant la crise sanitaire et après juillet 2021. Les liens avec la famille se sont ainsi maintenus. En revanche, les échanges avec les amis et voisins sont moins fréquents à l’automne 2021 qu’avant mars 2020.
- Une personne sur dix a éprouvé un sentiment d’abandon permanent ou récurrent pendant les confinements
- 94 % des personnes ayant demandé de l’aide à leurs proches depuis le début de la crise sanitaire l’ont obtenue
- Des liens maintenus avec les proches grâce aux contacts à distance pendant les périodes de confinement
Une personne sur dix a éprouvé un sentiment d’abandon permanent ou récurrent pendant les confinements
Les périodes de confinement liées à la pandémie de Covid-19 (17 mars − 10 mai 2020, 30 octobre − 14 décembre 2020 et 3 avril − 2 mai 2021) ont durement mis à l’épreuve la santé mentale des habitants. Ainsi, une personne majeure sur dix déclare avoir éprouvé un sentiment d’abandon permanent ou récurrent pendant ces périodes (sources ; figure 1). Par ailleurs, trois personnes sur dix ont éprouvé ce même sentiment d’abandon mais de manière ponctuelle. Ainsi, quatre personnes sur dix expriment s’être senties, parfois ou souvent, voire en permanence, perdues ou abandonnées pendant les trois confinements. Ce mal-être est parfois durable : près d’un quart des personnes qui se sont senties perdues ou abandonnées de façon récurrente ou permanente pendant les confinements ont déclaré l’avoir été de nouveau au cours des quatre semaines précédant l’enquête, en octobre 2021.
tableauFigure 1 – Sentiment d’abandon pendant les périodes de confinement
Femmes | Hommes | Ensemble | |
---|---|---|---|
Sentiment récurrent ou permanent1 | 15 | 7 | 11 |
Sentiment ponctuel2 | 37 | 23 | 31 |
N’a jamais éprouvé ce sentiment | 48 | 70 | 58 |
Total | 100 | 100 | 100 |
- 1. Personnes ayant répondu « En permanence », « Très souvent » ou « Souvent » à la question « Vous est-il arrivé de vous sentir perdu(e), abandonné(e) ? ».
- 2. Personnes ayant répondu « Quelques fois » ou « Rarement » à la question « Vous est-il arrivé de vous sentir perdu(e), abandonné(e) ? ».
- Lecture : 11 % des personnes de 18 ans ou plus ont éprouvé un sentiment d’abandon récurrent ou permanent pendant les périodes de confinement.
- Champ : France métropolitaine, personnes âgées de 18 ans ou plus résidant en logement ordinaire.
- Source : Insee, enquête Camme d’octobre 2021.
graphiqueFigure 1 – Sentiment d’abandon pendant les périodes de confinement
Les femmes sont nettement plus nombreuses que les hommes à avoir éprouvé ce sentiment d’abandon pendant les périodes de confinement. Une femme sur deux indique s’être sentie perdue ou abandonnée, contre trois hommes sur dix. Elles sont également deux fois plus nombreuses que ces derniers à déclarer un sentiment d’abandon récurrent ou permanent (15 % des femmes se sont senties souvent, très souvent, voire en permanence abandonnées, contre 7 % des hommes). Si le genre est le principal déterminant de ce ressenti, d’autres facteurs entrent aussi en jeu comme la composition familiale ou les conditions de logement. Les personnes seules et les parents de famille monoparentale ont été plus touchés : respectivement 17 % et 15 % d’entre eux indiquent avoir eu ce sentiment de manière récurrente ou permanente. À l’inverse, le fait d’appartenir à un ménage aisé et le fait de disposer d’un espace extérieur diminuent le risque d’avoir eu cette impression de manière récurrente ou permanente. Seules 6 % des personnes appartenant aux ménages les plus aisés ont éprouvé un sentiment d’abandon, contre 22 % de celles appartenant aux ménages les plus modestes. 10 % des personnes disposant d’un espace extérieur ont déclaré un tel sentiment récurrent voire permanent, contre 19 % de celles qui n’en avaient pas.
94 % des personnes ayant demandé de l’aide à leurs proches depuis le début de la crise sanitaire l’ont obtenue
Le désarroi ou la détresse liés à cette période se retrouvent aussi dans la part de personnes déclarant avoir eu besoin d’aide. Entre mars 2020 et octobre 2021, 30 % des personnes de 18 ans ou plus ont éprouvé le besoin d’avoir de l’aide de leur famille ou de leur entourage hors famille (amis, voisins, etc.). Cette attente était majoritairement celle d’un soutien moral (79 %), puis, dans une moindre mesure, d’une aide matérielle (26 %) ou financière (18 %). Ce besoin d’aide est, toutes choses égales par ailleurs (méthode), plus souvent exprimé par les femmes (2,5 fois plus que les hommes), par les personnes vivant seules ou avec des enfants (respectivement 1,9 et 1,6 fois plus que les couples sans enfant), par celles appartenant aux ménages les plus modestes (1,4 fois plus que les ménages médians) et par les personnes de moins de 45 ans (entre 1,4 et 1,6 fois plus suivant la classe d’âge par rapport aux 45-55 ans).
Les ménages ont majoritairement pu compter sur leurs proches. Près des trois quarts des personnes ayant eu besoin d’aide ont sollicité leur entourage pour obtenir cette aide. Parmi elles, 94 % l’ont obtenue.
La solidité de cette solidarité ressort encore à l’automne 2021 : 92 % des personnes de 18 ans ou plus pensent pouvoir compter sur quelqu’un, de manière certaine ou probable, pour recevoir du soutien moral, 86 % pensent pouvoir compter sur leurs proches pour une aide matérielle non financière et 73 % pour une aide financière.
Des liens maintenus avec les proches grâce aux contacts à distance pendant les périodes de confinement
Les périodes de confinement, limitant voire interdisant les rencontres, ont amené à adapter les relations avec ses proches. Durant ces périodes, les liens familiaux se sont resserrés via d’autres moyens que les rencontres en échangeant par exemple par téléphone, messagerie (mail, SMS), visioconférence ou courrier. Ainsi, pendant les périodes de confinement, un tiers des personnes de 18 ans ou plus ont échangé tous les jours avec leur famille (en dehors des personnes vivant avec elles), contre un peu plus du quart avant la crise sanitaire et après juillet 2021 (figure 2). Les femmes, déjà plus nombreuses que les hommes à communiquer quotidiennement avec leur famille avant la pandémie (35 %, contre 19 % des hommes), l’ont également été pendant les périodes de confinement (respectivement 44 % et 23 %). Cette intensification des contacts familiaux à distance ne s’observe plus après les confinements, les rencontres étant à nouveau possibles. Entre juillet et octobre 2021, la part des personnes déclarant communiquer quotidiennement avec leur famille est à des niveaux proches de ceux observés avant la crise, respectivement 33 % pour les femmes et 18 % pour les hommes. La part des personnes ayant quotidiennement rencontré leur famille entre juillet et octobre 2021 est également comparable à celle observée avant la crise sanitaire (respectivement 10 % pour les femmes et autour de 5-6 % pour les hommes).
tableauFigure 2 – Communications ou rencontres quotidiennes avec la famille ou l’entourage selon la période
Communications quotidiennes | Rencontres quotidiennes | |||||
---|---|---|---|---|---|---|
Avant la crise sanitaire | Pendant les périodes de confinement | Entre juillet et octobre 2021 | Avant la crise sanitaire | Pendant les périodes de confinement | Entre juillet et octobre 2021 | |
Avec la famille (en dehors des personnes vivant dans le ménage) | ||||||
Femmes | 35,0 | 44,0 | 33,0 | 10,2 | /// | 10,1 |
Hommes | 19,0 | 23,0 | 18,0 | 6,5 | /// | 5,3 |
Ensemble | 27,5 | 34,3 | 26,3 | 8,5 | /// | 7,9 |
Avec l’entourage (amis, voisins, etc.) | ||||||
Femmes | 17,5 | 21,4 | 15,0 | 9,4 | /// | 7,5 |
Hommes | 17,7 | 15,5 | 13,9 | 9,0 | /// | 8,1 |
Ensemble | 17,5 | 18,6 | 14,5 | 9,2 | /// | 7,8 |
- /// : absence de résultat due à la nature des choses.
- Lecture : pendant les périodes de confinement, 44 % des femmes de 18 ans ou plus ont communiqué quotidiennement avec leur famille (en dehors des personnes vivant dans leur ménage).
- Champ : France métropolitaine, personnes âgées de 18 ans ou plus résidant en logement ordinaire.
- Source : Insee, enquête Camme d’octobre 2021.
À l’inverse, les échanges quotidiens avec l’entourage (hors famille) ont peu évolué pendant les périodes de confinement : 18 % des personnes de 18 ans ou plus échangeaient quotidiennement avant la crise sanitaire ; ils étaient 19 % à le faire pendant les périodes de confinement. Les femmes ont été un peu plus nombreuses que les hommes à communiquer quotidiennement avec leurs amis ou leurs voisins pendant le confinement (21 % contre 16 %). Femmes et hommes ont ensuite un peu espacé ces contacts au profit des rencontres. Ainsi, la part de celles et ceux en contact quotidien à distance avec leurs amis ou leurs voisins diminue à l’été 2021 (15 % pour les femmes et 14 % pour les hommes). Si la part des hommes ayant quotidiennement passé du temps avec leur entourage (hors famille) a peu évolué (passant de 9 % avant la crise sanitaire à 8 % entre juillet et octobre 2021), les femmes ont, quant à elles, moins fréquemment rencontré leur entourage (hors famille) chaque jour (un peu moins de 8 % entre juillet et octobre 2021, contre un peu plus de 9 % avant la crise sanitaire).
Pour les personnes qui avaient des rencontres plus rares avec leurs amis et voisins avant mars 2020, la fréquence de ces échanges a diminué : chez les hommes comme chez les femmes, la part des personnes ayant rencontré moins d’une fois par mois leur entourage (hors famille) a augmenté, passant respectivement de 6 % à 12 % pour les hommes et de 8 % à 12 % pour les femmes.
Sources
Afin de suivre l’opinion des ménages habitant en France métropolitaine sur leur environnement économique et sur leur situation personnelle, l’Insee réalise une enquête mensuelle de conjoncture auprès des ménages (Camme).
En octobre 2021, le questionnaire a été complété de questions sur les relations sociales ou les sentiments vécus avant la crise sanitaire liée à la pandémie de Covid-19, pendant les périodes de confinement, ou encore depuis juillet 2021. 1 576 personnes de 18 ans ou plus ont répondu à l’enquête en France métropolitaine.
Méthodes
L’analyse toutes choses égales par ailleurs, fondée sur une régression, est une méthode qui vise à démêler l’effet des différentes variables affectant un phénomène. Par exemple, elle permet de mesurer l’effet du genre sur le sentiment d’abandon, à niveau d’âge ou de configuration familiale donnés, en tenant compte du fait que les plus âgés sont plus souvent des femmes.
Définitions
Les ménages les plus modestes correspondent aux 20 % des ménages ayant le revenu corrigé du nombre d’unités de
consommation le plus faible (ou premier cinquième) et les ménages les plus aisés correspondent à ceux ayant les 20 % des revenus les plus élevés. Les ménages médians correspondent aux ménages dont le revenu corrigé est situé entre 40 et 60 % sur la
distribution des revenus (soit le troisième cinquième).
Les revenus mensuels renseignés dans l’enquête Camme sont déclarés spontanément par
l’enquêté lors de la collecte. Les précisions suivantes peuvent être apportées par
l’enquêteur : « Prendre en compte tous les types de revenus : salaires, pensions de
retraite, allocations chômage, prestations familiales, etc. Il faut indiquer le montant
avant prélèvement de l’impôt à la source ». Ces données déclaratives correspondraient
davantage à un revenu primaire ou à un salaire, plutôt qu’au revenu disponible mesuré
habituellement.
Pour comparer les revenus de ménages de compositions différentes, le revenu est divisé
par le nombre d’unités de consommation (UC) : 1 UC pour le premier adulte du ménage,
0,5 UC pour les autres personnes de 14 ans ou plus, 0,3 UC pour les enfants de moins
de 14 ans.
Pour en savoir plus
Retrouvez plus de données en téléchargement sur www.insee.fr
Fiche « Relations sociales », in France, Portrait social, coll. « Insee Références », édition 2020.
Gleizes F., Grobon S., Legleye S., « 3 % des individus isolés de leur famille et de leur entourage : un cumul de difficultés socioéconomiques et de mal-être », Insee Première n° 1770, septembre 2019.