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Insee Analyses · Novembre 2021 · n° 69
Insee AnalysesImpact de la crise sanitaire sur un panel anonymisé de clients de La Banque Postale  Les revenus de la plupart des clients ont été affectés de manière limitée et temporaire

Odran Bonnet, Tristan Loisel, Tom Olivia (Insee)

Les données anonymisées de transactions bancaires des clients de La Banque Postale constituent une source complémentaire pour analyser l’impact de la crise sanitaire sur les populations les plus précaires. En 2020, la crise affecte les revenus de la plupart des clients de manière limitée et temporaire. La forte baisse des dépenses consécutive aux restrictions sanitaires engendre donc une augmentation de l’épargne. La proportion de clients à découvert diminue, notamment pour le quart de clients avec les plus faibles revenus.

Cependant, parmi les clients les plus modestes, des populations en marge du marché de l’emploi sont davantage pénalisées. Un groupe est étudié spécifiquement : les personnes seules, sans personne à charge et percevant le montant maximal du RSA en début d’année. Leurs perspectives de retour en emploi ont baissé pendant la crise sanitaire, et ainsi, leurs revenus en 2020 sont inférieurs à ceux attendus en extrapolant la tendance pré-crise. Pour ces clients, les aides exceptionnelles Covid-19 versées en mai et en novembre ne compensent que partiellement les pertes de revenus d’activité : sur l’ensemble de l’année 2020, leurs revenus sont inférieurs de 4 % par rapport au niveau attendu à partir de la tendance pré-crise, mais sans les aides, ils auraient été inférieurs de 7 %. Cependant, même hors crise, la majorité des allocataires du RSA en début d’année le demeure tout le long de l’année. L’écart de revenus moyens s’explique donc par la minorité d’allocataires qui aurait pu retrouver un emploi sans la crise.

Un impact de la crise sanitaire plus important sur la consommation que sur les revenus

En 2020, en France, en euros constants, le PIB se contracte de 7,9 % et la consommation des ménages diminue de 7,1 % [Insee, 2021]. Pour éviter que la crise sanitaire liée à la Covid-19 ne se répercute sur les revenus des ménages en dépit du système de protection sociale habituel (allocations chômage, minima sociaux, etc.), l’État a mis en place des mesures d’ de soutien aux salariés (élargissement du dispositif de chômage partiel notamment) et aux ménages (versement d’aides aux plus précaires). Finalement, malgré une production et une consommation en net repli, le revenu disponible de l’ensemble des ménages a augmenté de 1,0 % et le pouvoir d’achat par unité de consommation est resté stable [Insee, 2021]. Cependant, cette évolution moyenne ne représente pas la diversité des situations individuelles. Par exemple, les volumes d’aide alimentaire distribués par les associations auraient augmenté de façon prononcée en 2020 et le nombre de foyers bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) augmente de 7,4 % entre fin décembre 2019 et fin décembre 2020 [Ouvrir dans un nouvel ongletDrees, 2021].

Observer la précarité financière à partir des données bancaires de La Banque Postale

Les données bancaires de La Banque Postale permettent d’éclairer la diversité des situations financières en 2020 (sources). Elles ont le double avantage de pouvoir être exploitées avant que les données fiscales ne soient disponibles et de retranscrire des évolutions mensuelles de revenus, de consommation et de patrimoine. En outre, elles contiennent des informations spécifiques sur les difficultés bancaires, comme les découverts. Cette étude mobilise un panel de 203 000 clients de La Banque Postale ayant des comptes actifs entre janvier 2019 et juin 2021. Elle approfondit les résultats d’une étude sur des données du Crédit Mutuel [Insee, 2021], en se concentrant plus spécialement sur les faibles revenus.

En raison de la particularité de ces données bancaires, les , les dépenses et le patrimoine étudiés ici ne correspondent pas aux concepts habituellement utilisés dans les publications de l’Insee. Les revenus sont mesurés à partir des chèques et virements entrants. Les  correspondent à la somme des avoirs sur l’ensemble des comptes (comptes courants, livrets d’épargne, assurances vie et comptes titres) de La Banque Postale détenus par un client. Les  correspondent à la somme des opérations par cartes, retraits, chèques émis et prélèvements. Le caractère multidimensionnel de la précarité financière est appréhendé ici par trois indicateurs : la , la et la .

Pas de hausse des indicateurs globaux de précarité en 2020

Sur cet échantillon de clients de La Banque Postale, les revenus augmentent en moyenne de 1,5 % entre 2019 et 2020. Les trois indicateurs de précarité sont en diminution sur l’ensemble de la période examinée, entre janvier 2019 et juin 2021 (figure 1).

Si ces évolutions ne s’écartent pas sensiblement de celles constatées au niveau macroéconomique, elles reflètent également les spécificités de la clientèle de La Banque Postale et le vieillissement de l’échantillon utilisé. Cela ne signifie pas ipso facto que la précarité recule en France sur la période. En effet, la clientèle de La Banque Postale n’est pas représentative de la population dans son entièreté : notamment, quand elle est en emploi, elle occupe moins souvent des emplois de cadre et plus souvent d’employé. De plus, le panel étant composé des mêmes clients du début à la fin de la période, les observations de juin 2021 correspondent, par construction, à des individus plus âgés que celles de janvier 2019, dont les revenus ont pu augmenter indépendamment de la conjoncture (du fait de leur ancienneté dans leur emploi par exemple). De plus, par construction, les clients ont une ancienneté moyenne dans la banque plus importante à la fin de la période qu’au début. Cela peut, en particulier, affecter les soldes sur les comptes.

Les confinements affectent moins les revenus que l’épargne et les patrimoines. Lors du premier confinement, les restrictions sanitaires provoquent une baisse de la consommation plus forte que celle du revenu, permettant aux ménages d’épargner. Ainsi, sur cet échantillon particulier de La Banque Postale, la proportion de clients avec moins de 3 000 euros sur leurs comptes baisse de 2 points entre mars et mai 2020 (42 % en mai). Elle rebondit ensuite légèrement lors du déconfinement mais en restant inférieure au niveau d’avant crise. Lors de ce premier confinement, les avoirs supplémentaires sur les comptes réduisent la proportion de clients à découvert (– 1 point). Les confinements de novembre puis de mars 2021, moins stricts, ont des effets plus modérés que le premier : l’épargne, la précarité en patrimoine et la proportion de découverts par mois sont stables.

La proportion de personnes avec des revenus inférieurs à 1 000 euros par mois augmente en revanche ponctuellement, de l’ordre de 1 point, lors du premier confinement, alors que la tendance est à la baisse sur l’ensemble de la période. Par ailleurs, elle n’augmente pas lors des deux confinements suivants.

Figure 1a – Précarité en patrimoine des clients du panel de La Banque Postale : part de clients ayant moins de 3 000 euros sur leurs comptes en fin de mois

en %
Figure 1a – Précarité en patrimoine des clients du panel de La Banque Postale : part de clients ayant moins de 3 000 euros sur leurs comptes en fin de mois (en %) - Lecture : fin mars 2020, 44 % des clients ont moins de 3 000 euros sur leurs comptes.
Précarité en patrimoine :
moins de 3 000 euros sur leurs comptes en fin de mois
2019
Janvier 46,5
Février 46,1
Mars 45,7
Avril 45,9
Mai 45,7
Juin 45,1
Juillet 45,6
Août 45,5
Septembre 45,8
Octobre 45,9
Novembre 45,2
Décembre 45,4
2020
Janvier 45,2
Février 44,8
Mars 44,2
Avril 42,6
Mai 41,6
Juin 41,7
Juillet 41,8
Août 42,1
Septembre 42,2
Octobre 42,5
Novembre 41,6
Décembre 41,5
2021
Janvier 41,2
Février 40,7
Mars 40,9
Avril 40,6
Mai 40,7
Juin 40,6
  • Lecture : fin mars 2020, 44 % des clients ont moins de 3 000 euros sur leurs comptes.
  • Champ : France, échantillon de clients bancarisés principaux de La Banque Postale présents sur toute la période janvier 2019-juin 2021 après filtrage des comptes inactifs.
  • Sources : La Banque Postale ; Insee : calculs des auteurs.

Figure 1a – Précarité en patrimoine des clients du panel de La Banque Postale : part de clients ayant moins de 3 000 euros sur leurs comptes en fin de mois

  • Note : les périodes de confinements sont représentées par des bandes colorées.
  • Lecture : fin mars 2020, 44 % des clients ont moins de 3 000 euros sur leurs comptes.
  • Champ : France, échantillon de clients bancarisés principaux de La Banque Postale présents sur toute la période janvier 2019-juin 2021 après filtrage des comptes inactifs.
  • Sources : La Banque Postale ; Insee : calculs des auteurs.

Relativement à une « trajectoire hors crise », des revenus moindres y compris pour les clients les moins aisés

Le panel de clients de La Banque Postale permet de mesurer l’impact de la crise sanitaire en confrontant la trajectoire des clients en 2020 à celle attendue si la tendance pré-crise de 2019 s’était poursuivie (méthodes).

Selon cette méthode, les revenus sur l’ensemble de l’année 2020 apparaissent inférieurs de 2 % au niveau attendu « hors crise », et les dépenses de 6 %. Lors du premier confinement de mars à mai 2020, les dépenses et les revenus sont très inférieurs à leur niveau attendu en extrapolant la tendance pré-crise (figure 2). En avril, les dépenses sont inférieures de 34 % et les revenus de 10 %. Hormis cette période, les dépenses et les revenus en 2020 sont proches des niveaux attendus. Le confinement de novembre a un impact nettement plus faible sur les dépenses comme sur les revenus.

Pour les clients les plus précaires, le déficit de revenus pendant le confinement, par rapport au niveau attendu, a été un peu plus important et persistant que pour les autres groupes. Pour le quart de clients aux revenus les plus faibles début 2020, leurs revenus moyens sont, chaque mois, inférieurs à ceux attendus en extrapolant la tendance pré-crise ; seul novembre, mois de versement d’une aide exceptionnelle aux plus précaires, fait exception. Sur l’ensemble de l’année, les revenus de ce groupe sont inférieurs de 3 % au niveau attendu.

Figure 2a – Écarts des dépenses et des revenus mensuels en 2020 par rapport au niveau simulé hors crise, pour les clients aux revenus de janvier inférieurs au 1er quartile

en %
Figure 2a – Écarts des dépenses et des revenus mensuels en 2020 par rapport au niveau simulé hors crise, pour les clients aux revenus de janvier inférieurs au 1er quartile (en %) - Lecture : en avril 2020, le quart des clients aux revenus les plus faibles en janvier ont des dépenses 33 % inférieures au niveau attendu si la tendance pré-crise s’était poursuivie.
Dépenses Revenus
Janvier 0,0 0,0
Février – 1,3 – 0,9
Mars – 10,1 – 2,6
Avril – 33,2 – 12,4
Mai – 14,7 – 7,0
Juin 5,8 – 0,8
Juillet – 5,8 – 7,6
Août – 0,8 – 1,1
Septembre – 5,9 – 1,4
Octobre – 2,9 – 2,4
Novembre – 4,2 2,9
Décembre – 3,5 – 5,4
  • Lecture : en avril 2020, le quart des clients aux revenus les plus faibles en janvier ont des dépenses 33 % inférieures au niveau attendu si la tendance pré-crise s’était poursuivie.
  • Champ : France, échantillon de clients bancarisés principaux de La Banque Postale présents sur toute la période janvier 2019-juin 2021 après filtrage des comptes inactifs.
  • Sources : La Banque Postale ; Insee : calculs des auteurs.

Figure 2a – Écarts des dépenses et des revenus mensuels en 2020 par rapport au niveau simulé hors crise, pour les clients aux revenus de janvier inférieurs au 1er quartile

  • Note : les périodes de confinements sont représentées par des bandes colorées.
  • Lecture : en avril 2020, le quart des clients aux revenus les plus faibles en janvier ont des dépenses 33 % inférieures au niveau attendu si la tendance pré-crise s’était poursuivie.
  • Champ : France, échantillon de clients bancarisés principaux de La Banque Postale présents sur toute la période janvier 2019-juin 2021 après filtrage des comptes inactifs.
  • Sources : La Banque Postale ; Insee : calculs des auteurs.

La chute de la consommation alimente l’épargne et diminue la proportion de découverts

La diminution des dépenses lors du premier confinement favorise l’épargne : elle réduit ainsi la précarité en patrimoine et la proportion de découverts. En décembre 2020, les patrimoines financiers bruts du quart de clients avec les plus faibles revenus en début d’année sont supérieurs de 360 euros au niveau attendu, contre 1 200 euros pour le quart de clients aux plus hauts revenus. Ce sont donc les hauts revenus qui ont épargné davantage et alimenté leurs patrimoines financiers [Insee, 2021].

La proportion de clients à découvert est également inférieure au niveau attendu (– 2 points). L’effet est plus fort pour les bas revenus (– 3 points), les hauts revenus étant plus rarement dans cette situation, et ce, quelle que soit l’année considérée. Ces résultats peuvent sembler différer de ceux obtenus à partir d’enquêtes. Ainsi, dans l’enquête Epicov, un quart des personnes déclarent que leur situation financière s’est dégradée pendant la crise, et cette proportion est d’autant plus élevée que le niveau de vie du ménage était initialement bas [Givord, Silhol, 2020].

Cependant, la perception d’une situation financière dégradée ne se traduit pas nécessairement par une baisse des soldes détenus sur les comptes en banque des ménages. Si leurs revenus d’activité baissent et les perspectives économiques s’assombrissent, les ménages peuvent considérer que leur situation financière se détériore même si leur capacité d’épargne s’améliore temporairement. D’ailleurs, l’enquête Camme montre que la proportion de ménages déclarant s’endetter ou tirer sur leurs réserves a diminué en 2020 et ce quel que soit le niveau de vie [Clerc, Legleye, Nougaret, 2021].

Les allocataires du RSA en 2020 : moins de retours à l’emploi, davantage de transferts sociaux

En 2020, certains emplois parmi les plus précaires et les moins qualifiés ont davantage pâti de la crise que les autres. Des personnes ont perdu leur emploi, d’autres, inactifs ou au chômage avant la crise, n’ont pas pu en retrouver un.

Des aides financières exceptionnelles ont été versées en mai et novembre afin de compenser l’augmentation de la précarité due à cette baisse de l’emploi. Les données bancaires de La Banque Postale permettent de mesurer la capacité de ces aides à prévenir la dégradation de la situation de certaines populations. L’analyse se concentre sur les personnes seules, sans personne à charge et percevant le montant forfaitaire maximal en janvier ou en février 2020 (fin 2019, les personnes seules sans personnes à charge représentaient 55 % des allocataires du RSA [Ouvrir dans un nouvel ongletDrees, 2021]).

Sur l’ensemble de l’année 2020, les revenus de ces allocataires sont inférieurs de 4 % (7 % sans les aides) au niveau attendu à partir de la tendance pré-crise (figure 3). En particulier, ils sont inférieurs au niveau attendu chaque mois de l’année, à l’exception des mois de mai et novembre, mois durant lesquels des aides exceptionnelles ont été versées. Ce phénomène s’explique vraisemblablement par des retours moins fréquents en emploi pour ces clients qui sont allocataires en début d’année. Afin d’estimer la proportion des retours en emploi, la proportion de clients n’ayant plus pour principale source de revenus les allocations de la Caf est calculée mensuellement (méthodes). En 2019 comme en 2020, cette proportion augmente au gré des retours à l’emploi tout au long de l’année (figure 4). Cependant, en 2020, cette hausse s’atténue à partir du premier confinement. Fin 2020, cette proportion est inférieure de 4 points par rapport à 2019. Ces résultats reflètent la baisse des flux de sortie du RSA qui explique l’augmentation du nombre de bénéficiaires en 2020 [Ouvrir dans un nouvel ongletCnaf, 2020].

En 2020, si la moyenne des revenus des allocataires du RSA étudiés est inférieure au niveau attendu, la est identique au niveau attendu, sauf en mai et novembre où elle est plus élevée. La majorité des allocataires étudiés n’a donc pas connu de baisse de revenus. En effet, une majorité d’entre eux ne retrouvant pas d’emploi (ni en 2019, ni en 2020), leurs revenus dépendent exclusivement des transferts sociaux qui ne diminuent pas en 2020, mais augmentent grâce aux aides exceptionnelles. Par ailleurs, les découverts ne sont pas plus fréquents, vraisemblablement pour cette même raison et du fait des restrictions de consommation subies lors des confinements. Enfin, ces allocataires, dont les dépenses concernent avant tout les consommations de première nécessité, diminuent plus faiblement leur consommation en 2020 que le reste de l’échantillon.

Figure 3 - Écarts des revenus mensuels en 2020 par rapport au niveau simulé hors crise, pour certains allocataires du RSA en début d’année

Écart au revenu attendu en %
Figure 3 - Écarts des revenus mensuels en 2020 par rapport au niveau simulé hors crise, pour certains allocataires du RSA en début d’année (Écart au revenu attendu en %) - Lecture : en avril 2020, les clients qui étaient seuls, sans personne à charge et percevaient le montant maximal du RSA en début d’année (janvier ou février) ont des revenus en moyenne 9 % inférieurs au niveau attendu si la tendance pré-crise s’était poursuivie.
Moyenne Moyenne
hors aides exceptionnelles
Médiane Médiane
hors aides exceptionnelles
Janvier 0,0 0,0 0,0 0,0
Février – 1,5 – 1,5 0,0 0,0
Mars – 8,2 – 8,2 0,0 0,0
Avril – 9,2 – 9,2 0,0 0,0
Mai 4,9 – 11,6 30,5 0,0
Juin – 9,3 – 9,3 – 0,2 – 0,2
Juillet – 13,1 – 13,1 – 0,5 – 0,5
Août – 7,3 – 7,3 – 0,7 – 0,7
Septembre – 6,1 – 6,1 – 0,7 – 0,7
Octobre – 5,0 – 5,0 – 0,7 – 0,7
Novembre 13,7 – 1,6 29,3 – 0,7
Décembre – 7,2 – 7,2 – 0,9 – 0,9
  • Note : les revenus « hors aides exceptionnelles » excluent les aides exceptionnelles de mai et novembre 2020.
  • Lecture : en avril 2020, les clients qui étaient seuls, sans personne à charge et percevaient le montant maximal du RSA en début d’année (janvier ou février) ont des revenus en moyenne 9 % inférieurs au niveau attendu si la tendance pré-crise s’était poursuivie.
  • Champ : France, échantillon de clients bancarisés principaux de La Banque Postale présents sur la période janvier 2019-juin 2021, seuls, sans personne à charge et percevant le montant maximal du RSA (avec ou sans forfait logement) en début d’année (en janvier ou en février).
  • Sources : La Banque Postale ; Insee : calculs des auteurs.

Figure 3 - Écarts des revenus mensuels en 2020 par rapport au niveau simulé hors crise, pour certains allocataires du RSA en début d’année

  • Notes : les revenus « hors aides exceptionnelles » excluent les aides exceptionnelles de mai et novembre 2020. Les périodes de confinements sont représentées par des bandes colorées.
  • Lecture : en avril 2020, les clients qui étaient seuls, sans personne à charge et percevaient le montant maximal du RSA en début d’année (janvier ou février) ont des revenus en moyenne 9 % inférieurs au niveau attendu si la tendance pré-crise s’était poursuivie.
  • Champ : France, échantillon de clients bancarisés principaux de La Banque Postale présents sur la période janvier 2019-juin 2021, seuls, sans personne à charge et percevant le montant maximal du RSA (avec ou sans forfait logement) en début d’année (en janvier ou en février).
  • Sources : La Banque Postale ; Insee : calculs des auteurs.

Figure 4 – Part de certains allocataires du RSA en début d’année dont les allocations de la Caf ne sont plus la source principale de revenus

en %
Figure 4 – Part de certains allocataires du RSA en début d’année dont les allocations de la Caf ne sont plus la source principale de revenus (en %) - Lecture : en mai 2020, 8,5 % des clients qui étaient seuls, sans personne à charge et percevaient le montant maximal du RSA en janvier ou en février n’ont plus les allocations de la Caf comme principale source de revenus.
2019 2020
Janvier 4,3 2,8
Février 4,1 3,9
Mars 6,7 6,5
Avril 9,8 8,3
Mai 11,8 8,5
Juin 15,8 10,6
Juillet 19,8 15,9
Août 18,2 14,3
Septembre 18,7 13,8
Octobre 17,6 13,7
Novembre 18,6 15,1
Décembre 20,0 15,8
  • Lecture : en mai 2020, 8,5 % des clients qui étaient seuls, sans personne à charge et percevaient le montant maximal du RSA en janvier ou en février n’ont plus les allocations de la Caf comme principale source de revenus.
  • Champ : France, échantillon de clients bancarisés principaux de La Banque Postale présents sur la période janvier 2019-juin 2021, seuls, sans personne à charge et percevant le montant maximal du RSA (avec ou sans forfait logement) en début d’année (en janvier ou en février).
  • Sources : La Banque Postale ; Insee : calculs des auteurs.

Figure 4 – Part de certains allocataires du RSA en début d’année dont les allocations de la Caf ne sont plus la source principale de revenus

  • Notes : les revenus « hors aides exceptionnelles » excluent les aides exceptionnelles de mai et novembre 2020. Les périodes de confinements sont représentées par des bandes colorées.
  • Lecture : en mai 2020, 8,5 % des clients qui étaient seuls, sans personne à charge et percevaient le montant maximal du RSA en janvier ou en février n’ont plus les allocations de la Caf comme principale source de revenus.
  • Champ : France, échantillon de clients bancarisés principaux de La Banque Postale présents sur la période janvier 2019-juin 2021, seuls, sans personne à charge et percevant le montant maximal du RSA (avec ou sans forfait logement) en début d’année (en janvier ou en février).
  • Sources : La Banque Postale ; Insee : calculs des auteurs.
Publication rédigée par :Odran Bonnet, Tristan Loisel, Tom Olivia (Insee)
Publication rédigée par :Odran Bonnet, Tristan Loisel, Tom Olivia (Insee)

Sources

Accès et utilisation des données

L’Insee remercie La Banque Postale pour sa disponibilité et pour lui avoir permis d’accéder à ses données dans un cadre sécurisé garantissant l’anonymat des clients, ainsi que le Conseil d’Analyse Économique et la Direction Générale du Trésor pour leurs remarques. Les traitements permettant de construire cet échantillon ont été réalisés par La Banque Postale sur ses propres systèmes informatiques sécurisés. L’accès aux données de l’échantillon a été réalisé au sein du Centre d’accès sécurisé aux données – CASD.

L’échantillon mis à disposition par La Banque Postale est un panel anonymisé de 300 000 clients, dont La Banque Postale est la banque principale au moins un mois entre janvier 2019 et décembre 2020. Si toujours présents dans la banque, les clients échantillonnés sont suivis jusqu’en juin 2021. Les données contiennent les soldes de comptes en fin de mois (comptes courants individuels et comptes joints, comptes épargne et comptes titres), toutes les transactions effectuées (montants et dates des opérations par carte, chèques, virements, prélèvements, retraits et dépôts) et quelques données sociodémographiques (âge, sexe, département, etc.). L’échantillonnage réalisé par La Banque Postale est stratifié par âge et par département.

Limites de l’étude liées aux données

Les données bancaires, riches en information, comportent néanmoins un certain nombre de limites :

  • la non-représentativité : l’échantillon exclut les individus non bancarisés. De plus, les clients de La Banque Postale sont en moyenne plus précaires que les clients des autres banques, il y a moins de cadres et plus d’employés. Cela empêche d’extrapoler les résultats de l’étude à l’ensemble des individus bancarisés. C’est cependant un avantage pour étudier les populations les plus défavorisées. Par ailleurs, l’échantillon ne contient presque pas de clients de moins de 20 ans. Enfin, les éventuels revenus informels qui ne seraient pas déposés sur les comptes bancaires ne sont pas pris en compte par définition ;
  • la multi-bancarisation : les personnes peuvent avoir des comptes bancaires dans d’autres institutions. La Banque Postale n’a sélectionné dans l’échantillon que des clients qu’elle identifie comme bancarisés principaux à La Banque Postale. Malgré cette sélection, cela amène à sous-estimer l’épargne des ménages. Le problème est cependant probablement moins prégnant pour les personnes à faibles revenus ;
  • l'absence d’information sur le ménage : les informations bancaires sont fournies au niveau individuel, et non au niveau du ménage. Une analyse par unité de consommation est donc impossible. Les comptes bancaires d’éventuels autres membres du ménage ne sont pas observés, même si leurs comptes sont aussi domiciliés à La Banque Postale. Si le client possède un compte joint, l’ensemble des opérations et des montants relatifs à ce compte est divisé par le nombre total de détenteurs ;
  • les comptes inactifs : certains comptes sont inactifs (moins de 150 euros de dépenses ou de revenus sur 3 mois glissants). Leur nombre augmente au cours de la période. Un tiers des observations sont éliminées par ce critère.

Constitution de l’échantillon final

Afin d’éviter un biais dû à l’augmentation du nombre de comptes inactifs sur la période, seuls les clients qui dépensent (par cartes, retraits et prélèvements) et perçoivent plus de 150 euros sur trois mois glissants sont conservés dans l’étude. Parmi les 300 000 clients échantillonnés, seuls 203 000 clients présents en continu de janvier 2019 à juin 2021 sont conservés. L’échantillon est pondéré à partir du recensement de la population selon l’âge quinquennal et le département afin de mieux représenter la structure générale de la population française. Cette opération ne suffit toutefois pas pour que l’échantillon soit représentatif de la population française.

Méthodes

Comparer les trajectoires 2020 et 2019

Afin d’identifier l’impact de la crise sanitaire sur les dépenses ou les revenus, il est nécessaire d’estimer l’écart entre les valeurs observées en 2020 et les valeurs attendues, si la tendance pré-crise s’était poursuivie. En 2020, le niveau prédit un mois donné est égal au niveau du même mois en 2019 multiplié par le taux de croissance annuel entre janvier 2019 et janvier 2020 (avant la crise sanitaire). Ainsi, pour une variable Y, l’écart relatif du niveau observé par rapport au niveau attendu est égal à :


Un écart de revenus en avril 2020 de – 0,1 signifie que les clients ont perçu, en moyenne, en avril 2020, des revenus inférieurs de 10 % par rapport au niveau attendu en extrapolant la tendance pré-crise.

La qualité de cette mesure repose sur la validité de l’hypothèse d’évolutions similaires en 2019 et en 2020, en l’absence de crise. Par définition, les niveaux contrefactuels, c’est-à-dire qui auraient prévalu en 2020 en l’absence de crise, sont inconnus et cette hypothèse ne peut pas être testée, sauf en février 2020. En effet, à cette date, la crise n’a pas encore éclaté : si l’hypothèse est valide, les écarts entre les valeurs observées et les valeurs prédites doivent être faibles pour ce mois, ce qui est le cas (figure 2, figure 3).

Constitution des groupes de revenus en début d’année

Chaque année, l’échantillon est divisé en 4 groupes définis à partir des quartiles des revenus observés en janvier.

en euros
(en euros)
2019 2020
1er quartile 880 940
Médiane 1 390 1 460
3e quartile 2 010 2 070

Utiliser un seul mois de revenus (en l'occurrence, janvier) ne permet pas de mesurer de manière fiable les revenus des clients. Par exemple, des clients aisés peuvent être classés parmi le groupe avec des faibles revenus si leurs revenus sont exceptionnellement bas ce mois-ci. Pour limiter ce biais, les observations dont la consommation en janvier est distante de plus de deux écarts-types de la moyenne sont écartées. De plus, les clients percevant moins que le montant forfaitaire maximal du RSA pour personne seule ce mois-ci sont également exclus.

Identifier les clients au RSA et leurs retours à l’emploi

Les bénéficiaires sont identifiés dans les données s’ils perçoivent un virement en janvier ou en février correspondant au montant forfaitaire maximal (avec ou sans forfait logement) au centime près. Les retours à l’emploi ne sont pas directement observés dans les données utilisées. Ils sont estimés par la proportion de clients n’ayant pas les allocations de la Caf pour principale source de revenus. Elle correspond à la part des clients ne percevant pas la majorité de leurs revenus le jour de versement du RSA (en général, le 5 de chaque mois).

Définitions

Les revenus mensuels sont mesurés par la somme des virements et des chèques entrants d’un montant inférieur à 40 000 euros. Les montants ronds ne sont pas pris en compte, à l’exception des aides exceptionnelles de mai et novembre (sauf mention du contraire). Par exemple, un montant de 500,00 euros n’est pas comptabilisé, tandis qu’un montant de 500,13 euros l’est. En effet, ces montants ronds correspondent vraisemblablement à des transferts entre comptes, plus qu’à des revenus. Les flux entrants sur un compte joint sont individualisés, c’est-à-dire divisés par le nombre de détenteurs du compte (deux en général).

Le patrimoine financier brut d’un client correspond à la somme de tous les avoirs sur ses comptes hormis les dettes et les crédits : comptes courants (individuels et joints), comptes épargne, assurances vie et comptes titres.

Les dépenses mensuelles correspondent à la somme des dépenses par carte, des retraits (au distributeur ou au guichet), des chèques sortants et des prélèvements.

L’indicateur de précarité en revenus est égal à la part de clients avec moins de 1 000 euros de revenus mensuels.

L’indicateur de précarité en patrimoine correspond à la part de clients avec moins de 3 000 euros d’avoirs, au total, en fin de mois.

L’indicateur de précarité en découvert est égal à la part de clients avec, dans le mois, au moins 5 jours débiteurs au-delà du découvert autorisé.

Si on ordonne la distribution des revenus, le revenu médian partage cette distribution en deux parties d’effectifs égaux. Ainsi, 50 % de l’échantillon gagne plus et 50 % gagne moins.

Les aides exceptionnelles comptabilisées dans les revenus mensuels sont celles de mai et novembre 2020 : 150 euros (+ 100 euros par enfant à charge de moins de 20 ans) accordés notamment aux bénéficiaires du RSA et aux bénéficiaires de l'Allocation de solidarité spécifique (ASS).

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Publication rédigée par :Odran Bonnet, Tristan Loisel, Tom Olivia (Insee)