Insee
Insee Première · Mai 2021 · n° 1860
Insee PremièreLes comptes de la Nation en 2020 Baisse historique du PIB, mais résilience du pouvoir d’achat des ménages

Victor Amoureux, Jean-Cyprien Héam, Thomas Laurent (Insee)

En 2020, l’activité affiche un recul historique en France : le produit intérieur brut (PIB) en euros constants diminue de 7,9 %, après + 1,8 % en 2019 et + 1,9 % en 2018. Ce recul est très largement consécutif à la crise sanitaire liée à la Covid-19 : l’économie a été fortement perturbée par l’épidémie, tandis que les mesures visant à limiter sa propagation (confinements, couvre-feux, fermetures de commerces, etc.), prises à la fois en France et dans de nombreux pays étrangers, ont à leur tour ralenti l’activité. La baisse mesurée cette année est ainsi la plus importante dans l’histoire des comptes nationaux français, établis depuis 1949.

Avec la forte chute de l’activité en France, le revenu national brut (RNB) perd 6,1 %. Cette baisse est, pour près des trois quarts, assumée par les administrations publiques, du fait des mesures de soutien à l’économie (activité partielle, fonds de solidarité, etc.). Même si le revenu des entreprises non financières se contracte, le taux de marge reste à un niveau comparable à celui de ces dernières années. La hausse modérée du revenu des ménages (+ 1,0 %), combinée au recul de la consommation (− 6,5 %), entraîne une hausse exceptionnelle de leur épargne en 2020. Au total, le besoin de financement de la nation augmente de 41,2 Md€.

En 2020, le PIB chute de 7,9 %, après + 1,8 % en 2019

En 2020, le produit intérieur brut (PIB) chute de 7,9 % en euros constants, après deux années de hausse soutenue (+ 1,9 % en 2018 et + 1,8 % en 2019) (figure 1).

Figure 1 - Le PIB et les opérations sur biens et services

Figure 1 - Le PIB et les opérations sur biens et services
Évolution en volume
aux prix de l’année
précédente (en %)
2020
2018 2019 2020 En milliards d'euros Évolution des prix
(en %)
Évolution en valeur
(en %)
Contribution
à la
croissance
du PIB en
volume
Produit intérieur brut (PIB) 1,9 1,8 – 7,9 2 302,9 2,5 – 5,5 – 7,9
Importations 3,1 2,3 – 11,9 688,4 – 1,6 – 13,2 – 3,9
Total des emplois finals 2,2 2,0 – 8,8 2 991,3 1,6 – 7,4 – 11,7
Consommation effective des ménages dont : 0,9 1,5 – 6,6 1 601,2 2,5 – 4,2 – 4,5
dépense de consommation des ménages 1,0 1,8 – 7,1 1 175,0 0,6 – 6,5 – 3,6
individualisable des administrations 0,7 0,6 – 4,9 377,5 8,8 3,5 – 0,7
Consommation collective des administrations publiques 0,9 1,8 – 0,1 199,8 2,3 2,3 0,0
Formation brute de capital fixe, dont : 3,3 4,0 – 8,6 528,8 1,1 – 7,6 – 2,0
entreprises non financières 4,3 2,6 – 7,7 296,7 0,7 – 7,0 – 1,0
ménages 1,8 2,8 – 12,1 118,4 2,2 – 10,2 – 0,7
administrations publiques 3,2 9,0 – 4,1 86,1 0,9 – 3,3 – 0,2
Variations de stocks (contribution à la croissance) 0,0 0,0 – 0,2 19,5 0,0 0,0 – 0,2
Exportations 4,5 1,6 – 15,8 641,9 – 1,0 – 16,6 – 5,0
  • Source : Insee, comptes nationaux, base 2014.

La production est en net recul (− 8,3 %, après + 2,1 %), de même que les consommations intermédiaires (− 8,7 %, après + 2,3 %).

La baisse est particulièrement marquée dans la production manufacturière (− 12,7 %), en particulier dans les branches des matériels de transport (− 28,1 %). La production des raffineries chute également (− 27,7 % en volume), en raison de la baisse des consommations de carburants et des fermetures de raffineries. Le repli est également marqué dans les biens d’équipement (− 11,4 %). En revanche, il est plus modéré dans le secteur agroalimentaire (− 2,6 %). Dans l’agriculture, la production baisse aussi (− 2,3 %) ; les récoltes de 2020 ont pâti de conditions météorologiques défavorables. La production dans la construction a,  pour sa part, été notamment affectée au premier confinement, et diminue de 13,0 % sur l’ensemble de l’année.

La production se dégrade nettement dans les services (− 7,6 %). Si les services immobiliers (− 1,0 %) et les services financiers (− 2,5 %) se contractent peu, les autres services marchands reculent fortement (− 9,4 %). Les services principalement non marchands englobant la santé et l’éducation se replient plus modérément (− 3,3 %).

Du côté des emplois finals, l’ensemble des composantes de la demande se contractent (figure 2) : la consommation contribue pour plus de la moitié à la baisse du PIB (− 4,5 points), complétée par l’investissement (− 2,0 points) et le solde extérieur (− 1,1 point) ; les variations de stocks ont une contribution légèrement négative (− 0,2 point).

Figure 2 - Évolution du PIB en volume et contributions à cette évolution

évolution en %, contributions en points
Figure 2 - Évolution du PIB en volume et contributions à cette évolution (évolution en %, contributions en points)
2016 2017 2018 2019 2020
Évolution du produit intérieur brut (PIB) 1,1 2,3 1,9 1,8 – 7,9
Consommation (ménages et APU*) 1,3 1,1 0,7 1,2 – 4,5
Investissement 0,6 1,0 0,7 0,9 – 2,0
Solde du commerce extérieur – 0,4 – 0,1 0,4 – 0,3 – 1,1
Variation de stocks – 0,4 0,2 0,0 0,0 – 0,2
  • * Administrations publiques.
  • Source : Insee, comptes nationaux, base 2014.

Figure 2 - Évolution du PIB en volume et contributions à cette évolution

  • * Administrations publiques.
  • Source : Insee, comptes nationaux, base 2014.

La consommation recule fortement, notamment pour les ménages

Les dépenses de consommation des ménages reculent nettement en volume en 2020 (− 7,1 % en euros constants, après + 1,8 % en 2019). La baisse est particulièrement marquée dans les services (− 11,0 % en volume), en particulier dans les secteurs où les mesures de restriction sanitaire ont été les plus importantes : les transports (− 44,2 %), l’hébergement-restauration (– 34,2 %) et les services aux ménages (− 22,8 %) – comprenant notamment les services récréatifs (théâtres, cinémas, etc.). En revanche, elle est moins importante dans les services financiers (− 2,7 %), tandis que la consommation de services immobiliers augmente (+ 1,1 %). La consommation des ménages en biens décroît plus modérément (− 3,8 %) : alors que la consommation de biens fabriqués diminue nettement (− 8,1 %), de même que la consommation d’énergie (− 7,3 %), celles de produits agroalimentaires (+ 3,2 %) et de produits agricoles (+ 1,9 %) progressent, en miroir de la baisse de la consommation de services de restauration.

La consommation des administrations publiques recule de 3,2 % en volume. En particulier, la consommation individualisable se replie de 4,9 % : dans la santé, les reports des actes médicaux et des consultations hors Covid-19 dépassent le surcroît de soins, notamment en réanimation, lié à la Covid ; dans l’éducation, l’enseignement reçu par les élèves a décru, du fait d’un plus grand nombre de décrocheurs et de certains cours n’ayant pu être assurés pendant le confinement et, dans le primaire, d’une plus grande part de l’éducation assurée par les parents, donc hors du champ de la comptabilité nationale. La consommation collective diminue de 0,1 %, du fait d’un moindre nombre d‘heures travaillées durant le premier confinement. Ces baisses en volume ne s’accompagnent pas d’une baisse en valeur, mesurée par la somme des coûts (salaires et consommations intermédiaires notamment) en progression de 3,0 %, de sorte que le déflateur de la consommation des administrations publiques augmente nettement (+ 6,4 %).

L’investissement se replie nettement

La formation brute de capital fixe (FBCF) de l’ensemble des agents économiques chute en 2020 (− 8,6 %), après une année 2019 en forte hausse (+ 4,0 %). En particulier, l’investissement des ménages se contracte nettement (− 12,1 %), en raison des baisses marquées dans la construction (− 14,5 %). L’investissement des entreprises financières, quantitativement moins important, se replie encore plus fortement (− 18,4 %). En revanche, le recul est moins prononcé (− 7,7 %) pour les entreprises non financières. En effet, l’investissement en services aux entreprises se montre résilient (− 1,5 %) et celui en services d’information-communication augmente sensiblement (+ 2,7 %). En revanche, les baisses sont fortes pour les biens fabriqués (− 12,1 %) et pour la construction (− 16,4 %). Enfin, la FBCF des administrations publiques se contracte plus faiblement (− 4,1 %) : la baisse y est notamment moins marquée dans la construction (− 7,1 %) que pour les autres secteurs institutionnels.

En 2020, les entreprises ont moins stocké que l’année précédente. En revanche, une partie des masques produits ou importés a été stockée par les entreprises et surtout les administrations (Santé publique France) : environ 2 milliards d'euros (Md€) sur 6 Md€ d’achats à prix courants. In fine, les variations de stocks contribuent pour 0,2 point à la baisse du PIB.

Les échanges internationaux sont fortement dégradés et le déficit extérieur se creuse

Les échanges extérieurs ont été très fortement affectés par la crise sanitaire : en volume, les exportations diminuent de 15,8 % et les importations de 11,9 % en 2020. Du côté des biens, les baisses sont massives dans les matériels de transport (− 30,6 % pour les exportations, − 20,7 % pour les importations), en particulier dans l’aéronautique. Elles sont également marquées, mais de moindre ampleur, pour les biens d’équipement (− 12,3 % pour les exportations, − 8,8 % pour les importations). Enfin, les échanges extérieurs d’énergie, notamment de pétrole raffiné, diminuent fortement (− 19,1 % pour les exportations, − 17,2 % pour les importations). Du côté des services, les dépenses des touristes se sont réduites presque de moitié (− 48,8 % pour les exportations, − 46,8 % pour les importations), tandis que le recul est également important en services de transport (− 12,0 % pour les exportations, − 14,6 % pour les importations). Les services aux entreprises diminuent également (− 8,7 % pour les exportations, − 9,5 % pour les importations), tandis que les services financiers sont en hausse (+ 2,4 % pour les exportations, + 6,7 % pour les importations). Si la baisse des échanges extérieurs est généralisée, des points forts de la France sont particulièrement affectés par la crise sanitaire et contribuent ainsi à creuser le déficit par effet de structure, notamment les autres matériels de transports, dont l’aéronautique, pour 19,3 Md€ et le tourisme pour 8,1 Md€. Le déficit est amplifié par les importations exceptionnelles de masques (notamment chirurgicaux et FFP2), pour environ 5 Md€. À l’inverse, il se réduit nettement pour les biens énergétiques, de 17,7 Md€ en valeur : à la contraction des échanges en volume s’ajoutent les fortes baisses des cours du brent. Au total, le déficit du commerce extérieur se creuse : il s’élève à 46,5 Md€ en 2020, après 23,3 Md€ en 2019.

Le pouvoir d’achat des ménages progresse modérément malgré la pandémie

En 2020, le revenu disponible brut (RDB) des ménages résiste, en progression de 1,0 % après + 3,4 % l’année précédente (figure 3). Dans le même temps, le prix de la dépense de consommation finale ralentit (+ 0,6 %, après + 0,8 % en 2019), du fait principalement de la baisse des prix énergétiques (− 4,2 %, après + 1,7 %). Ainsi, malgré le fort ralentissement de l’activité, le pouvoir d’achat du revenu disponible continue d’augmenter : + 0,4 %, après + 2,6 % en 2019. Cette progression inclut l’effet de la croissance de la population ; une fois ramené au niveau individuel et compte tenu de l’évolution de la taille des ménages, le pouvoir d’achat (par unité de consommation) est stable en moyenne : 0,0 %, après + 2,0 % en 2019.

Figure 3 - Quelques éléments du tableau économique d'ensemble

à prix courants, en milliards d'euros, en %
Figure 3 - Quelques éléments du tableau économique d'ensemble (à prix courants, en milliards d'euros, en %)
Évolution en %
(sauf italiques)
Niveau 2020
(en Md€)
2018 2019 2020
Produit intérieur brut, dont : 2,9 3,1 – 5,5 2 302,9
Valeur ajoutée au prix de base 2,7 3,2 – 5,3 2 054,3
Impôts sur les produits nets des subventions sur les produits1 4,2 2,6 – 7,4 248,6
Revenu national brut 2,9 3,0 – 6,1 2 339,2
Revenu disponible brut de l'ensemble de l'économie 2,8 3,1 – 6,3 2 290,1
Valeur ajoutée brute des secteurs
Valeur ajoutée des entreprises 3,3 3,7 – 8,1 1 381,2
Sociétés non financières 3,1 4,5 – 8,3 1 168,3
Entreprises individuelles 2,6 1,8 – 7,7 127,4
Sociétés financières 7,2 – 3,8 – 6,6 85,5
Valeur ajoutée des administrations publiques 1,5 1,6 1,7 393,7
Éléments de partage de la valeur ajoutée
Rémunération des salariés des entreprises 3,3 0,8 – 5,9 835,7
Excédent brut d'exploitation et revenu mixte des entreprises 3,4 7,4 – 10,5 511,1
Rémunération des salariés des administrations 1,1 1,1 2,3 304,1
Sociétés non financières
Excédent brut d'exploitation 2,6 10,5 – 12,5 371,4
Revenus de la propriété nets versés 32,2 23,0 – 5,5 51,2
Épargne brute 0,7 10,0 – 14,4 256,3
Formation brute de capital fixe 5,4 4,0 – 6,7 287,7
Variation des stocks 0,1 – 0,2 – 5,4 14,6
Capacité (+) ou besoin (-) de financement – 22,1 16,3 – 9,0 – 17,2
Taux de marge2 – 0,2 1,8 – 1,5 31,8
Taux d'autofinancement3 – 4,3 5,2 – 8,1 89,1
Sociétés financières
Excédent brut d'exploitation 20,9 – 13,2 – 25,8 18,5
Formation brute de capital fixe 0,7 15,2 – 17,5 22,6
Capacité (+) ou besoin (-) de financement 5,5 – 4,1 – 10,1 – 12,4
Ménages, y compris entreprises individuelles (EI)
Excédent brut d'exploitation et revenu mixte hors EI4 2,4 3,2 1,2 202,9
Revenu mixte net des EI 4,7 0,9 0,4 93,7
dont subventions d'exploitation nettes – 3,0 – 5,8 537,8 10,8
Salaires nets reçus 4,6 3,7 – 4,3 795,2
Prestations sociales hors transferts sociaux en nature5 2,1 2,9 9,5 569,4
Revenus de la propriété nets reçus 13,0 – 2,3 – 12,6 73,7
Impôts courants 9,6 0,2 – 3,6 240,1
Revenu disponible brut 3,1 3,4 1,0 1 494,7
Dépense de consommation finale 2,7 2,6 – 6,5 1 175,0
Revenu disponible brut ajusté 2,6 3,0 1,4 1 920,8
Consommation effective des ménages 2,3 2,4 – 4,2 1 601,2
Épargne brute 5,2 8,0 43,4 319,7
Formation brute de capital fixe 3,7 5,1 – 10,5 127,4
Capacité (+) ou besoin (-) de financement 3,2 7,4 112,6 181,0
Taux d'épargne6 0,3 0,6 6,3 21,4
Taux d'épargne financière7 0,1 0,4 7,5 12,1
Relations avec le reste du monde
Exportations de biens (FAB) 4,8 2,9 – 15,8 451,6
Importations de biens (FAB) 4,8 1,9 – 12,4 500,6
Exportations de services - importations de services 2,6 – 3,7 – 9,2 2,5
Solde des opérations de répartition en provenance du reste du monde 0,0 – 1,8 – 18,0 – 11,8
Capacité (+) ou besoin (-) de financement de la Nation 0,5 – 1,3 – 41,2 – 58,3
  • 1 Les impôts sur les produits regroupent la TVA, les impôts sur les importations et d'autres impôts sur les produits (TICPE, taxes sur les tabacs, sur les alcools, etc.).
  • 2 Excédent brut d'exploitation / valeur ajoutée brute.
  • 3 Épargne brute / formation brute de capital fixe.
  • 4 Excédent principalement tiré de la location de logements, y compris les loyers imputés que les propriétaires se versent à eux-mêmes, et de l'autoconsommation.
  • 5 Les prestations sociales autres que les transferts sociaux en nature sont principalement des prestations en espèces (retraites, indemnités journalières, allocations familiales, indemnités chômage, RSA).
  • 6 Épargne brute / revenu disponible brut.
  • 7 Capacité de financement / revenu disponible brut.
  • Source : Insee, comptes nationaux, base 2014.

En 2020, toutes les composantes du RDB des ménages sont fortement affectées par la crise sanitaire. Les revenus d‘activité baissent nettement et contribuent ainsi négativement au RDB (− 2,4 points), de même que les revenus du patrimoine (− 0,6 point). À l’inverse, les prestations sociales en espèces (chômage, retraites, etc.) le soutiennent fortement (+ 3,4 points), de même que la baisse des impôts directs, mais plus modérément (+ 0,6 point).

Les revenus nets d’activité décroissent fortement (− 3,8 %) bien que plus modérément que le produit intérieur brut (− 5,5 % en valeur). Les salaires nets reçus par les ménages se contractent de 4,3 %. Avec la mise en œuvre du dispositif d’activité partielle, le salaire moyen net par tête recule (− 3,3 %, après + 2,7 %) plus nettement que l’emploi salarié (− 1,0 %). Les revenus des entrepreneurs individuels sont quasi stables, sous l’effet des subventions versées par le fonds de solidarité. Hors aides, leurs revenus auraient nettement reculé (− 9,0 %).

Les revenus du patrimoine se contractent de 3,0 %, du fait de la chute des dividendes reçus (− 22,3 %) liée à la baisse d’activité, tandis que l’excédent brut d’exploitation dégagé par les ménages propriétaires augmente à un rythme ralenti (+ 1,2 % contre + 2,4 % en moyenne sur les cinq dernières années).

En revanche, les prestations sociales en espèces sont exceptionnellement dynamiques avec une croissance de 9,5 %, en progression de 49,6 Md€ par rapport à 2019, sous l’effet principalement du dispositif d’activité partielle (+ 27,6 Md€), des indemnités chômage (+ 4,2 Md€), des indemnités journalières de l’assurance maladie (+ 2,6 Md€) ainsi que des aides exceptionnelles envers les plus précaires (+ 2,1 Md€). Les pensions de retraites restent structurellement dynamiques (+ 7,2 Md€).

Les impôts courants se contractent également (− 8,9 Md€, soit – 3,6 %). L’impôt sur le revenu des personnes physiques diminue de 2,0 Md€, de même que le montant de CSG collecté (− 2,7 Md€). Les autres prélèvements sociaux, tels que la CRDS, diminuent de 0,5 Md€. La baisse de la taxe d’habitation pour 80 % des ménages se poursuit pour un allégement de 3,5 Md€.

Avec les mesures de restriction, la dépense de consommation des ménages en volume chute (– 7,1 %, après + 1,8 %), alors que le pouvoir d’achat du RDB est en légère hausse (+ 0,4 %). Ainsi, les ménages ont dans leur ensemble fortement épargné : le taux d’épargne gagne 6,3 points pour s’établir à 21,4 % du RDB. De même, les ménages investissent moins dans l’immobilier, si bien que le taux d’épargne financière progresse encore davantage : + 7,5 points. Ce surcroît d’épargne financière (+ 112,6 Md€) a principalement pris la forme de dépôts bancaires (compte courant, livret A, etc.), au détriment d’autres supports financiers tels que l’assurance-vie dont la collecte décroît beaucoup (de l’ordre de 30 Md€).

Le revenu disponible brut des ménages ne rend pas compte de l’ensemble des ressources dont ils disposent. En effet, au-delà de leurs dépenses de consommation, les ménages disposent également de biens et services dont le coût est pour l’essentiel pris en charge par la collectivité : éducation, santé, aides au logement versées aux locataires, notamment. En 2020, le revenu disponible ajusté des ménages, qui englobe ces dépenses, progresse plus rapidement que le revenu disponible brut (+ 1,4 %), notamment du fait de l’augmentation des coûts des services de santé.

L’épargne des sociétés non financières se dégrade de 43,3 Md€

En 2020, la valeur ajoutée des sociétés non financières diminue fortement (− 8,3 % en valeur, après + 4,5 %), soit une contraction de 105,7 Md€. Toutefois, la rémunération des salariés se replie de 49,8 Md€ (− 6,1 %) grâce au dispositif d’activité partielle. En outre, les impôts nets des subventions sur la production baissent de 2,9 Md€ (− 8,2 %), en dépit de la baisse de 18,5 Md€ des subventions au titre du CICE, sous l’effet des aides versées par le fonds de solidarité et des exonérations de cotisations. Ainsi, l’excédent brut d’exploitation (EBE) décroît de 53,0 Md€ (soit − 12,5 %, après + 10,5 % en 2019). Le taux de marge revient à 31,8 %, un niveau proche de celui observé entre 2015 et 2018, après avoir temporairement augmenté en 2019 sous l’effet principalement de l’enregistrement du CICE.

Les revenus de la propriété versés (nets des reçus) baissent de 3,0 Md€, ce qui atténue légèrement la baisse de l'EBE. Au total, l’épargne des sociétés non financières décroît de 43,3 Md€.

Autre conséquence de la crise sanitaire, les sociétés non financières, ont nettement moins investi : – 6,7 % (soit – 20,7 Md€), si bien que la hausse de leur besoin de financement reste limitée à 9,0 Md€. Au total, le taux d’autofinancement diminue de 8,1 points pour atteindre 89,1 % en 2020.

L’activité des sociétés financières se dégrade en 2020

La valeur ajoutée des sociétés financières continue de décroître en 2020 (− 6,6 % après − 3,8 %), du fait des sociétés d'assurance, tandis que l’activité bancaire est quasi stable. La valeur ajoutée des sociétés d’assurance se replie fortement (− 31,7 %). En effet, la production d’assurance-vie se contracte vivement avec une forte décollecte des supports euros, pouvant refléter une préférence accrue des ménages pour des supports liquides (comptes bancaires, livrets réglementés, etc.), dans un environnement incertain et de taux d’intérêt durablement bas. La production d’assurance-dommage se contracte légèrement.

La stabilité de la valeur ajoutée des banques (+ 0,1 %) résulte de mouvements opposés : la baisse des services facturés et celle de la marge d’intermédiation sur les dépôts sont compensées par la hausse des marges d’intermédiation sur les crédits.

Le besoin de financement de la Nation se creuse de 41,2 Md€

Le déficit des échanges extérieurs se creuse de 23,2 Md€.

Le solde des opérations de répartition se dégrade fortement, de 18,0 Md€, du fait principalement des revenus de la propriété (– 14,2 Md€). Ce solde combine une amélioration sur les produits d’intérêts (+ 6,4 Md€) et une nette dégradation du solde lié aux dividendes et bénéfices réinvestis (– 20,3 Md€). Au total, le besoin de financement de la Nation se dégrade de 1,8 % du PIB pour atteindre 2,5 % du PIB en 2020.

Encadré 1 – Les révisions du PIB en volume et du pouvoir d’achat

La publication du compte provisoire de l’année 2020 s’accompagne de la publication des comptes définitif (2018) et semi-définitif (2019), qui actualisent les estimations précédentes (mai 2020). Le taux de croissance du PIB en volume est rehaussé en 2018 et 2019, à respectivement 1,9 % et 1,8 % au lieu de 1,8 % et 1,5 % dans les estimations précédentes.

Pour l’année 2020, l'évolution du PIB, corrigée de l’effet des jours ouvrables (CJO), avait été estimée à − 8,2 % lors de la première estimation du 1er trimestre 2021 (comptes trimestriels). L’évolution du PIB est maintenant évaluée à − 8,0 % en volume pour 2020, corrigée des jours ouvrés, soit une révision de + 0,2 point. L’effet des jours ouvrés sur la croissance en 2020, de + 0,1 point de PIB, s’explique notamment par le fait que 2020 est bissextile. Parmi les composantes de la demande, l’investissement (FBCF) contribue surtout à cette révision. Le déflateur du PIB est également révisé de + 0,2 point (+ 2,5 % au compte provisoire, contre + 2,3 % à la première estimation du 1er trimestre, CJO), de sorte que la croissance du PIB en valeur est révisée de + 0,4 point, à − 5,7 % en données CJO au lieu de − 6,1 % (et à − 5,5 % en données brutes).

Dans le compte provisoire 2020, l’augmentation du revenu disponible brut des ménages est rehaussée par rapport à la première estimation des comptes trimestriels sur le 1er trimestre 2021 : + 1,0 % après + 3,4 % plutôt que + 0,6 % après + 3,1 %. L'évolution du pouvoir d’achat du revenu disponible brut des ménages est également revue à la hausse en 2020 : + 0,4 % après + 2,6 % plutôt que + 0,2 % après + 2,1 %.

Encadré 2 – Au-delà du PIB, le revenu national disponible

Le produit intérieur brut (PIB) est une mesure de l’activité productive sur le territoire d’un pays ; il est privilégié dans le suivi de la conjoncture économique. Toutefois, une partie de l’activité produite dans un pays rémunère des investissements étrangers et le travail transfrontalier effectué par les non-résidents. À l’inverse, une partie des ressources des résidents provient de revenus de placements à l’étranger et de salaires perçus pour des activités réalisées à l’étranger. Le revenu national brut (RNB) prend en compte ces flux.

En 2020, le PIB baisse de 5,5 % en valeur. La contraction du RNB est de plus grande ampleur (– 6,1 %) en raison de la dégradation du solde des revenus de la propriété (reçus moins versés au reste du monde). Le solde des autres flux de revenus avec l’extérieur se dégrade aussi : le RNDB baisse ainsi de 6,3 %.

Publication rédigée par :Victor Amoureux, Jean-Cyprien Héam, Thomas Laurent (Insee)

Pour en savoir plus

Pointeaux A. et al., « Les comptes des administrations publiques en 2020 – Un déficit public historique dans le contexte de la crise sanitaire », Insee Première n° 1859, mai 2021.

Baleyte J. et al., « L’économie française en 2020 : une année de bouleversements », Insee Analyse n° 64, mai 2021.

Carnot N., « Comment s’est réparti le coût macroéconomique de la crise sanitaire ? », Note de blog, Insee, mai 2021.

Hourriez G., « Santé, éducation, services administratifs : la difficile mesure des activités non marchandes en temps de crise sanitaire », Note de blog, Insee, novembre 2020.

« Les comptes de la Nation en 2020, Insee Résultats, mai 2021.