Insee Conjoncture RéunionBilan économique 2018 - La Réunion

En 2018, l’activité ralentit fortement à La Réunion : la progression du produit intérieur brut en volume est de + 1,7 % après quatre années de croissance autour de 3 %. Cette année est marquée par un marché du travail pénalisé par la baisse des contrats aidés. L’activité économique a également pâti en fin d’année des blocages routiers liés au mouvement des Gilets jaunes. De fait, l’emploi salarié diminue pour la première fois depuis 2012 (- 3 400 emplois), surtout dans les associations et le secteur public. Le taux de chômage au sens du BIT remonte en conséquence à 24 %. Pour autant, le revenu disponible brut des Réunionnais continue à progresser (+ 2,6 %), porté par la hausse des salaires et des prestations sociales. Même amputé par une inflation de 1,8 % en 2018, le pouvoir d’achat total à La Réunion progresse de 0,7 % et la consommation des ménages reste le premier moteur de croissance. Elle progresse de 1,1 % en volume, après plusieurs années de hausse soutenue au-dessus de 3 %. La consommation des administrations publiques et l’embellie qui se poursuit dans le secteur du tourisme soutiennent également la croissance. En revanche, l’investissement est à l’arrêt et la campagne sucrière difficile pénalise les exportations réunionnaises.

Insee Conjoncture Réunion
No 08
Paru le :Paru le06/06/2019
Bérangère Duplouy, Insee ; Bruno Patier, Division Synthèse conjoncturelle, Insee
Insee Conjoncture Réunion No 08- Juin 2019

Ce bilan économique fait partie des 17 bilans économiques régionaux 2018 publiés par l'Insee.
Retrouvez les bilans des autres régions ici.

Consulter

Synthèse régionale - Contexte national Bilan économique 2018

Bérangère Duplouy, Insee ; Bruno Patier, Division Synthèse conjoncturelle, Insee

L’activité ralentit fortement en 2018 à La Réunion : la progression du PIB en volume est de + 1,7 % après quatre années de croissance autour des 3 %. Le repli du marché du travail conjugué à une reprise de l’inflation limitent l’augmentation du pouvoir d’achat des Réunionnais. La consommation des ménages progresse ainsi faiblement (+ 1,1 %). Dans le même temps, la consommation des administrations et l’investissement ralentissent également. Seules les dépenses des touristes tirent leur épingle du jeu.

Insee Conjoncture Réunion

No 8

Paru le :06/06/2019

Synthèse régionale - La croissance décroche

Le produit intérieur brut (PIB) de La Réunion ralentit très nettement en 2018 : le PIB progresse de 1,7 % après quatre années de croissance autour de 3 % entre 2014 et 2017 (figure 1).

Figure 1Le PIB augmente de 1,7 % en volume à La Réunion, comme au niveau nationalÉvolution du taux de croissance du PIB en volume à La Réunion et en France

en %
Le PIB augmente de 1,7 % en volume à La Réunion, comme au niveau national (en %)
La Réunion France
2005 4,4 1,7
2006 4,2 2,4
2007 4,6 2,4
2008 0,8 0,3
2009 -4,0 -2,9
2010 -1,7 1,9
2011 2,6 2,2
2012 0,2 0,3
2013 0,0 0,6
2014 2,9 1,0
2015 3,6 1,1
2016(e) 3,1 1,1
2017(e) 3,2 2,3
2018(e) 1,7 1,7
  • (e) : estimation.
  • Source : Insee, Comptes nationaux (base 2014), Comptes régionaux définitifs jusque 2015 (base 2014) ; Cerom, comptes rapides (2016-2018).

Figure 1Le PIB augmente de 1,7 % en volume à La Réunion, comme au niveau nationalÉvolution du taux de croissance du PIB en volume à La Réunion et en France

  • (e) : estimation.
  • Source : Insee, Comptes nationaux (base 2014), Comptes régionaux définitifs jusque 2015 (base 2014) ; Cerom, comptes rapides (2016-2018).

Le PIB par habitant progresse de 1,9 % en 2018, soit nettement moins vite qu’en 2017 : il s’établit ainsi à 22 200 euros en 2018. Pour la première fois depuis 2011, la hausse du PIB par habitant national (+ 2,2 %) estainsi plus forte qu’à La Réunion. Le rattrapage réunionnais marque le pas : le PIB par habitant réunionnais représente 63 % du niveau national, comme en 2017.

En France, après avoir crû vivement en 2017 (2,3 %), le PIB français ralentit en 2018 (+ 1,7 %). Le commerce extérieur contribue positivement à la croissance (+ 0,7 point), plus forte contribution depuis 2012 : les importations ralentissent davantage que les exportations. Néanmoins, la demande intérieure hors stock est freinée par la consommation des ménages et demande publique. En outre, les entreprises déstockent en 2018, ce qui pénalise aussi la croissance. Enfin, l’investissement des entreprises décélère mais reste robuste.

Coup de frein sur la consommation

À La Réunion, la consommation des ménages contribue toujours à la croissance en 2018 (figure 2). Mais elle progresse faiblement cette année : + 1,1 % en volume après plusieurs années de croissance soutenue au-dessus de 3 %. Ce net ralentissement s’explique par une faible progression des revenus d’activité versés en 2018 : seulement + 2,2 %.

Figure 2La consommation, moteur en panne de la croissanceLe PIB à La Réunion et ses principales composantes

La consommation, moteur en panne de la croissance
Évolution 2017/2018 Contribution à la croissance (en points)
Volume Prix Valeur
en %
Produit Intérieur Brut 1,7 0,7 2,4 1,7
Consommation des ménages 1,1 1,6 2,7 0,7
Consommation des administrations publiques 1,5 0,5 1,9 0,6
Investissement 1,3 1,0 2,4 0,3
Importations 0,1 0,6 0,8 0,0
Exportations - 9,4 - 1,5 - 10,8 -0,3
Dépense des touristes 19,2 1,5 21,0 0,3
  • (e) : estimation.
  • Source : Insee, Comptes nationaux (base 2014), Comptes régionaux définitifs jusque 2015 (base 2014) ; Cerom, comptes rapides (2016-2018).

L’année 2018 est en effet marquée par une situation du marché du travail qui se dégrade. L’emploi salarié est en recul sur l’année 2018, en lien avec la baisse du nombre de contrats aidés et les blocages liés au mouvement des Gilets jaunes de la fin d’année : - 3 400 emplois entre le 4e trimestre 2017 et le 4e trimestre 2018. Le taux de chômage au sens du Bureau international du travail augmente ainsi de nouveau en 2018, pour s’établir à 24 % de la population active. Il augmente de deux points depuis 2016, après avoir décru entre 2013 et 2016.

La progression du pouvoir d’achat est également amputée par l’augmentation des prix à la consommation : + 1,8 % sur un an, soit la plus forte inflation depuis six ans. Au final, le pouvoir d’achat progresse peu (+ 0,7 %) et les ménages ajustent leur consommation.

Ralentissement de la consommation des administrations publiques

Les dépenses de consommation des administrations publiques ralentissent également. Après une hausse de 3,2 % en volume en 2017, elles ne progressent que de 1,5 % cette année. Les dépenses de l’État continuent de progresser à un rythme soutenu (+ 2,7 % en valeur). En revanche, celles des administrations locales ralentissent franchement cette année (+ 0,9 % en valeur).

En 2018, la fréquentation touristique continue d’augmenter à un rythme soutenu (+ 5 % de touristes extérieurs en plus). De plus, les touristes ont dépensé davantage que les années précédentes. En conséquence, les dépenses touristiques progressent très fortement (+ 21 % en valeur). Elles constituent ainsi cette année le troisième moteur de la croissance réunionnaise, après la consommation des ménages et celle des administrations publiques.

Un investissement presque à l’arrêt

En 2017, l’investissement avait commencé à ralentir : il avait progressé de 3,2 % en volume après + 6,1 % en 2016. En 2018, la hausse de l’investissement est encore plus modeste (+ 1,3 % en volume) et sa contribution à la croissance est désormais très faible. Si l’investissement continue de progresser dans le bâtiment, il est désormais en net recul pour les biens d’équipement, après des années 2014 à 2016 très dynamiques.

En lien avec la faiblesse de la consommation et de l’investissement, les importations sont stables en 2018 (+ 0,1 % en volume) et ne pèsent donc pas sur la croissance. En revanche, ce sont les exportations, en retrait de 9,4 % cette année, qui contribuent négativement à la croissance. Les exportations de poissons diminuent de 10 % en valeur, en lien avec la baisse du prix de vente de la légine. En parallèle, les exportations de sucre se replient plus encore après une campagne sucrière catastrophique (- 29 % en valeur).

Contexte national - L’économie française en ralentissement

L’activité américaine est portée par les mesures fiscales, celle de la zone euro ralentit

En 2018, l’activité aux États-Unis connaît un regain de croissance (+ 2,9 % après + 2,2 %) portée par un fort rebond des dépenses gouvernementales et par les mesures fiscales en faveur du revenu des ménages et de l’investissement des entreprises. En revanche, après un pic d’activité en 2017 (+ 2,5 %) inédit depuis 2007, la croissance en zone euro ralentit (+ 1,8 %) malgré une politique monétaire de la Banque centrale européenne toujours très accommodante. Cette baisse de régime affecte différemment la croissance des principaux pays : l’activité en Italie et en Allemagne se replie durant le second semestre 2018, l’activité française ralentit nettement tandis que l’Espagne conserve un rythme de croissance dynamique. La croissance britannique s’essouffle aussi un peu, sa demande intérieure ralentissant dans un contexte d’attentisme lié au Brexit.

L’économie française ralentit en 2018 après une année 2017 dynamique

Après avoir crû vivement en 2017 (2,3 %), le PIB français ralentit en 2018 (+ 1,7 %, figure 3). Le commerce extérieur contribue positivement à la croissance (+ 0,7 point), plus forte contribution depuis 2012. En effet les importations ralentissent davantage (+ 1,2 % après + 3,9 %) que les exportations (+ 3,6 % après + 4,7 %). Les entreprises déstockent en 2018 (contribuant pour - 0,3 point à la croissance annuelle, après + 0,2 en 2017), et la demande intérieure hors stock est freinée par la consommation des ménages (contribution de + 0,5 point à la croissance du PIB après + 0,7 point) et la demande publique (+ 0,3 point après + 0,4 point).

L’investissement des entreprises décélère mais reste robuste

L’investissement des ménages ralentit nettement en 2018 (+ 1,5 % après + 5,6 % en 2017), notamment en raison du repli des mises en chantier et de la stabilisation des transactions de logements anciens. Par ailleurs, l’investissement des entreprises ralentit tout en restant robuste (+ 2,8 % après + 4,7 % en 2017) dans un contexte de taux d’utilisation des capacités productives dans l’industrie manufacturière à son plus haut niveau depuis 10 ans (85,1 %).

Figure 3Les ralentissements de la consommation et de l'investissement freinent la croissance du PIB

Variation annuelle du PIB en %, contributions en points
Les ralentissements de la consommation et de l'investissement freinent la croissance du PIB (Variation annuelle du PIB en %, contributions en points)
Consommation privée Investissement privé Demande publique Solde du commerce extérieur Variations de stocks Croissance du PIB (%)
2014 0,4 0,2 0,2 -0,5 0,7 1,0
2015 0,8 0,4 0,1 -0,4 0,3 1,1
2016 0,9 0,6 0,4 -0,4 -0,4 1,1
2017 0,7 1,0 0,4 -0,1 0,2 2,3
2018 0,5 0,5 0,3 0,7 -0,3 1,7
  • Champ : France.
  • Source : Insee, comptes nationaux, base 2014.

Figure 3Les ralentissements de la consommation et de l'investissement freinent la croissance du PIB

  • Champ : France.
  • Source : Insee, comptes nationaux, base 2014.

Figure 4Le regain d'inflation en 2018 conduit à de moindres gains de pouvoir d'achat

Variation annuelle du pouvoir d'achat des ménages en %, contributions en points
Le regain d'inflation en 2018 conduit à de moindres gains de pouvoir d'achat (Variation annuelle du pouvoir d'achat des ménages en %, contributions en points)
Revenus d'activité Revenus nets du patrimoine Prestations sociales Prélèvements obligatoires Prix de la consommation Pouvoir d'achat des menages (%)
2014 0,9 0,2 0,9 -0,6 -0,1 1,2
2015 1,0 0,0 0,6 -0,5 -0,3 0,8
2016 1,4 0,1 0,6 -0,4 -0,2 1,6
2017 2,1 0,3 0,5 -0,8 -0,8 1,4
2018 1,8 0,8 0,8 -0,7 -1,5 1,2
  • Champ : France.
  • Source : Insee, comptes nationaux, base 2014.

Figure 4Le regain d'inflation en 2018 conduit à de moindres gains de pouvoir d'achat

  • Champ : France.
  • Source : Insee, comptes nationaux, base 2014.

Le rythme des créations d’emploi conduit à une baisse un peu moins rapide du chômage

L’emploi total progresse en glissement en fin d’année 2018 de + 164 000 après + 343 000 fin 2017 (dont + 150 000 sur le champ salarié marchand non agricole après + 323 000 en 2017). Ainsi, en moyenne annuelle, le taux de chômage poursuit un peu plus lentement son repli pour atteindre 9,1 % de la population active française, après 9,4 % en 2017 et 10,0 % en 2016 (respectivement 8,8 % au 4e trimestre 2018, 9,0 % fin 2017 et 10,0 % fin 2016).

Le pouvoir d’achat ralentit légèrement du fait de l’inflation

En moyenne annuelle, les prix à la consommation accélèrent en 2018 pour la troisième année consécutive (+ 1,8 %, après + 1,0 % en 2017), conduisant à un léger ralentissement du pouvoir d’achat des ménages : + 1,2 % après + 1,4 % en 2017 (figure 4). Le ralentissement de la masse salariale provenant de celui de l’emploi joue également dans le même sens. En revanche, le ralentissement du pouvoir d’achat est atténué par l’accélération des revenus du patrimoine, des prestations sociales en espèces et le ralentissement des prélèvements fiscaux. En outre, la chronique infra-annuelle de l’évolution du pouvoir d’achat est marquée en 2018 par plusieurs mesures nouvelles (bascule CSG-cotisations sociales, réduction de taxe d’habitation, fiscalité indirecte sur le tabac et l’énergie notamment).

Définitions

Une grandeur économique peut se mesurer de deux façons différentes : en prix courants, c’est-à-dire en valeur, ou en prix constants, c’est-à-dire en volume. Pour mesurer la croissance économique, on s’intéresse aux variations du produit intérieur brut (PIB en volume), c’est-à-dire abstraction faite de la variation des prix.