Économie et Statistique n° 451-452-453 - 2012 La modélisation macroéconomique : continuités, tensions
Klein et l'émergence de la modélisation macroéconomique
Michel De Vroey et Pierre Malgrange
Cet article se propose de revenir sur la genèse de la macroéconométrie moderne en montrant comment s'est opéré le passage de l'ouvrage fondateur de Keynes, La Théorie générale de l'emploi, de l'intérêt et de la monnaie, au modèle de Klein et Goldberger, considéré comme le point de départ de la modélisation macroéconomique néo-keynésienne. Les deux premières sections traitent des antécédents des travaux de Klein. Nous évoquons tout d'abord la résistance exprimée par Keynes à l'égard du travail économétrique de Tinbergen. Nous décrivons ensuite comment Modigliani a transformé le modèle inaugural de Hicks en un modèle différent qui deviendra la version standard du modèle IS-LM. Ces bases ayant été posées, nous étudions le parcours intellectuel de Klein. Notre examen met en avant le fait que Klein, après s'être proposé dans ses premiers travaux de fonder la macroéconomie sur des fondements microéconomiques rigoureux, s'est graduellement écarté de cet impératif pour des raisons d'ordre opérationnel. Par ailleurs, la motivation qui avait poussé Klein à entreprendre le travail empirique attaché à son nom était de dégager par les faits qui, des classiques ou de Keynes, avait raison. Nous montrons qu'il a échoué dans cette tâche, son erreur ayant été de confondre les notions de taux naturel de chômage et de chômage involontaire. Ceci illustre le phénomène plus général d'un écart entre intention et résultat : que des contributions deviennent marquantes ne signifie pas nécessairement que les intentions ayant présidé à leur création aient abouti.
Economie et Statistique
No 451-453
Paru le :03/01/2013