Insee Flash Grand Est · Décembre 2025 · n° 112

La mécanique, activité phare des brevets dans le Grand Est

Un brevet est un titre de propriété industrielle conférant à son titulaire une exclusivité d’exploitation de l’invention sur un territoire déterminé. Généralement, le premier inventeur (ou déposant) a priorité pour le brevet. Toute la recherche n’est pas sujette à brevet : par exemple, les théories scientifiques ou les logiciels ne sont pas brevetables.

En 2018, 876 brevets sont déposés par au moins un inventeur résidant dans le Grand Est sur les 12 700 brevets déposés en France, soit 7 % des brevets nationaux. Le Grand Est se situe au 4^e rang en nombre de brevets, derrière l’Île-de-France, l’Auvergne-Rhône-Alpes et l’Occitanie. La région se classe au 6^e rang en rapportant les dépôts de brevets à la population : en 2018, 158 brevets sont déposés pour un million d’habitants dans le Grand Est contre 196 en France.

Le nombre de brevets déposés a triplé depuis 1986, dans le Grand Est comme à l’échelle de la France (figure 1). Cette croissance est similaire chez nos voisins allemands et suisses. En effet, un traité de coopération en matière de brevets permet l’essor des demandes Patent Cooperation Treaty ou PCT. Ces demandes sont plus largement utilisées depuis 1990. À partir de 1994, des harmonisations notamment sur les aspects des droits de propriété intellectuelle favorisent les dépôts de brevets. Après 2007, le nombre de brevets déposés diminue peu à peu dans le Grand Est, tandis qu’il se stabilise au niveau national.

Un brevet peut impliquer plusieurs inventeurs, tout comme plusieurs pays ou régions. Entre 2009 et 2018, deux brevets sur cinq déposés dans le Grand Est découlent de travaux internationaux avec au moins un pays étranger, bien plus qu’un sur six au niveau national. Cela s’explique notamment par la proximité de pays à la pointe dans le domaine de la recherche. En outre, la recherche médicale ou pharmaceutique présente aux frontières nécessite fréquemment des partenariats internationaux.

Le plus souvent, les inventeurs résidant dans la région échangent puis déposent leurs brevets avec des Allemands ou des Suisses (respectivement 25 % et 12 %) (figure 2). Ces deux nationalités déposent davantage de brevets, en lien avec une proportion de chercheurs légèrement plus importante qu’en France : entre 1,8 % et 1,9 % des salariés (en équivalent temps plein) chez nos voisins allemands, suisses, et même luxembourgeois, contre 1,7 % en France.

Ainsi, la part des brevets co-déposés avec un inventeur du Bade-Wurtemberg en Allemagne dépasse celle de la première région française, l’Île-de-France (respectivement 15 % et 9 %).

À l’inverse, les co-dépôts avec au moins une autre région française représentent 23 % des brevets du Grand Est, en deçà des autres régions françaises hormis Auvergne-Rhône-Alpes.

En matière de brevets, la mécanique est l’activité dominante dans la région, suivie par la chimie : respectivement 43 % et 33 % des brevets déposés en 2018. Les deux autres principales activités (électronique-électricité et instrumentation) représentent chacune autour de 18 % des brevets (figure 3). Au niveau national, la répartition sectorielle est plus équilibrée avec 35 % des brevets en mécanique, 30 % dans l’électrotechnique et 25 % dans la chimie.

Au sein de la mécanique, une centaine de brevets relèvent du domaine des transports. La construction automobile est fortement présente, avec notamment le groupe Stelantis et ses sous-traitants, dans le Grand Est comme en Bourgogne-Franche-Comté. Cette emprise du secteur automobile concerne aussi les Länder allemands voisins. De plus, les industries régionales diversifiées et innovantes de la chimie comptent parmi les fournisseurs de l’automobile européenne.

Jusqu’à la crise de 2008, les dépôts de brevets en chimie augmentaient plus rapidement dans la région qu’au niveau national. Les avancées en biotechnologie ont été massivement brevetées depuis 1998 dans les domaines des produits pharmaceutiques et de la chimie organique fine. Depuis, le nombre de dépôts de brevets a tendance à diminuer en chimie.

En 2000, un brevet sur deux relevait de l’activité de la chimie dans le Grand Est pour un tiers en France. En 2018, c’est un sur trois dans la région, contre un sur quatre au niveau national. En dépit du choc d’offres extra-européennes, les groupes chimiques de la région, comme Arkema ou BASF, déposent de nombreux brevets : des activités comme la chimie du vivant, nutrition et santé ou la chimie verte se développent.