Insee Analyses Occitanie · Décembre 2025 · n° 165

11 % d’immigrés dans l’Hérault en 2022 : un moindre accès à l’emploi mais un rôle essentiel dans les activités en tension

En 2022, 130 900 immigrés résident dans l’Hérault (figure 1). Ces personnes nées étrangères à l’étranger représentent 11 % de la population du département, une part un peu plus élevée que dans la région (9 %) et qu’en France de province (8 %). L’Hérault est le 12^e département de province où la part d’immigrés est la plus élevée, à égalité avec la Haute-Garonne et les Pyrénées-Orientales.

Trois immigrés héraultais sur cinq sont de nationalité étrangère et deux sur cinq ont été naturalisés Français, comme en moyenne en France (figure 1).

Dans l’Hérault, la population immigrée double entre 1968 et 2022, comme la population totale. Cette stabilité masque des dynamiques différentes au cours des cinquante dernières années (figure 2). Les immigrés représentaient en effet déjà 11 % de la population du département en 1968. Beaucoup d’entre eux s’installent dans le département après la Seconde Guerre mondiale dans le cadre de la politique française en faveur de l’immigration pour pallier le manque de main-d’œuvre. La proportion d’immigrés diminue entre 1975 et la fin des années 90, dans un contexte de frein à l’immigration de travail. Elle augmente de nouveau depuis le début des années 2000.

Entre 2010 et 2022, la progression du nombre de personnes immigrées représente 20 % de l’augmentation totale de la population de l’Hérault.

La composition actuelle de la population immigrée de l’Hérault reflète la variété des contextes d’immigration depuis soixante ans (figure 3).

Dans les années 60, de nombreux Espagnols ont émigré vers le département dans le cadre d’un appel massif à la main-d’œuvre étrangère en France. Cette période correspond aussi à l’arrivée d’immigrés en provenance d’Italie, mais en nombre bien plus réduit. Des travailleurs sont aussi recrutés dans les anciennes colonies françaises, essentiellement en Algérie et au Maroc.

En 1975, plus de la moitié des immigrés du département étaient nés en Espagne, les autres venaient essentiellement d’Algérie, du Maroc et d’Italie [figure complémentaire 1 ; données].

Entre 1975 et 1990, le nombre d’immigrés d’origine marocaine est multiplié par 2,6. Dans le même temps, celui des immigrés d’origine algérienne progresse peu tandis que les immigrés venus d’Espagne et d’Italie sont de moins en moins nombreux. La crise économique qui suit le choc pétrolier de 1973 met fin à l’immigration de travail alors que l’immigration de regroupement familial progresse, essentiellement en provenance du Maroc. Ainsi, 27 % des immigrés nés au Maroc sont des femmes en 1975, alors qu’elles sont 45 % en 1999 et 50 % en 2022.

Les immigrés arrivés récemment dans le département ont des origines géographiques plus diversifiées ; il s’agit en partie de jeunes venus pour étudier (encadré 1).

Ainsi en 2022, cinq immigrés héraultais sur dix sont nés dans un pays d’Afrique, essentiellement au Maroc ou en Algérie. Trois sur dix sont nés en Europe, le plus souvent en Espagne. Ces derniers étant majoritairement arrivés avant 1975, la moitié d’entre eux a plus de 56 ans aujourd’hui. Les immigrés originaires du Maroc ou de l’Algérie, arrivés pour la plupart entre 1975 et 2009, sont plus jeunes. Leur âge médian est de 46 ans.

Dans l’Hérault, la part des femmes dans la population immigrée en 2022 est la même que dans la population non immigrée (53 %).

La population immigrée est très concentrée dans les deux grandes villes du département : cinq immigrés sur dix vivent à Montpellier ou à Béziers, alors que ces communes rassemblent seulement trois Héraultais non immigrés sur dix.

Les immigrés sont proportionnellement plus nombreux qu’en moyenne dans le département à Montpellier (19 % d’immigrés) et à Béziers (16 %) mais également à Lunel, 5^e ville du département (16 %). La part d’immigrés est moins élevée à Sète et Agde (10 et 8 %), 3ᵉ et 4ᵉ villes du département (figure 4).

Parmi les 20 unités urbaines françaises de plus de 300 000 habitants, celle de Montpellier figure au 5^e rang en matière de part d’immigrés après celles de Paris, de Strasbourg, de Nice et de Grenoble [figure complémentaire 2, données].

En 2020, 25 % des immigrés du département et 8 % des non-immigrés résident dans un quartier prioritaire de la politique de la ville (QPV). La proportion d’immigrés est très forte dans les QPV du nord-ouest de Montpellier : 34 % dans le quartier de Cévennes, 40 % dans celui de Mosson et 43 % dans celui de Petit Bard Pergola. Dans ces QPV, plus de la moitié des ménages sont en situation de pauvreté monétaire.

En 2022, les trois quarts des immigrés résidant dans l’Hérault ont entre 15 et 64 ans (94 500 personnes). Parmi eux, 51 % occupent un emploi. Dans le reste de la population, le taux d’emploi des 15-64 ans est de 63 %. Les différences d’accès à l’emploi sont plus accentuées pour les femmes que pour les hommes. En effet, 42 % des femmes immigrées sont en emploi, contre 62 % des femmes non immigrées. Chez les hommes, l’écart est bien moins marqué (61 % contre 65 %).

Les chances d’occuper un emploi augmentent avec le niveau de diplôme. Cependant, même à niveau de diplôme élevé (bac +5 ou supérieur), le taux d’emploi des immigrés est très inférieur à celui des Héraultais non immigrés (70 % contre 85 %). L’accès restreint aux emplois publics pour les étrangers, la barrière de la langue, une moins bonne connaissance du marché du travail peuvent par exemple constituer des freins à l’emploi des immigrés.

Un tiers des immigrés âgés de 15 à 64 ans ne sont ni en emploi ni au chômage. Ces inactifs sont essentiellement des femmes. Le taux d’inactivité des hommes est un peu plus faible pour les immigrés que pour les non-immigrés (-1 point), mais l’écart est beaucoup plus fort pour les femmes (+12 points).

En 2022, 11 % des Héraultais occupant un emploi sont immigrés. Plus de la moitié de ces immigrés en emploi sont ouvriers ou employés. La part d’ouvriers est deux fois plus forte parmi les immigrés que parmi les autres actifs en emploi (27 % contre 13 %) alors que les employés sont en même proportion dans les deux populations (25 %). Les immigrés exercent en revanche moins souvent une profession de cadre ou une profession intermédiaire que les non-immigrés.

Les métiers qui emploient le plus grand nombre de personnes immigrées sont pour l’essentiel des métiers en tension ou à forte pénibilité : aides à domicile, ouvriers du bâtiment, maçons, ouvriers du nettoyage, agents de service des établissements de santé, cuisiniers et aides de cuisine. Ces professions emploient 25 % des immigrés du département contre à peine 10 % des personnes non immigrées.

En particulier, les immigrés sont nombreux dans les métiers du bâtiment (figure 5). Dans l’Hérault, plus d’un maçon sur deux et plus d’un ouvrier peu qualifié du gros œuvre sur deux sont immigrés. En 2022, 14 % des immigrés en emploi exercent leur activité dans la construction contre 6 % des non-immigrés.

Les immigrés sont également surreprésentés dans certains métiers très qualifiés comme chercheur de la recherche publique (19 % sont des immigrés) et enseignant du supérieur (15 %). Ils contribuent aussi à renforcer les effectifs des médecins hospitaliers et des médecins libéraux spécialistes (13 % sont des immigrés). Plus de la moitié de ces actifs très qualifiés sont originaires de l’Union européenne (30 %) ou du Maghreb (23 %). Un chercheur sur deux est arrivé depuis moins de 10 ans alors que les enseignants du supérieur et les médecins sont majoritairement installés en France depuis au moins 20 ans. Les immigrés sont cependant sous-représentés parmi les cadres (9 %), l’écart tendant à se réduire avec le temps.

En 2022, deux tiers des immigrés âgés de plus de 24 ans ont un diplôme [figure complémentaire 4 ; données]. Les immigrés sont moins souvent diplômés que les non-immigrés, mais leurs diplômes sont de niveau plus élevé. En effet, 21 % des diplômés immigrés ont au moins un niveau bac +5 contre 16 % des diplômés non-immigrés. Ils n’occupent pas pour autant un emploi en adéquation avec leurs qualifications : 42 % des immigrés très diplômés sont en situation de déclassement professionnel, c’est-à-dire qu’ils sont surdiplômés pour l’emploi qu’ils occupent. Cette situation concerne 35 % des personnes non immigrées.

L’écart est plus important encore parmi les titulaires d’un diplôme de niveau bac à bac +4 : 53 % des immigrés sont déclassés contre 32 % des non-immigrés.

Différentes raisons peuvent contraindre les immigrés à accepter un emploi pour lequel ils sont surqualifiés, par exemple la non-reconnaissance de diplômes obtenus à l’étranger, l’absence de valorisation d’une expérience professionnelle à l’étranger ou une moins bonne maîtrise de la langue française.

Le champ de l’étude est celui du recensement de la population. De ce fait, les immigrés ne sont comptabilisés que s’ils sont présents pour au moins 12 mois sur le territoire français (durée passée ou à venir). La durée de séjour s’entend en cumulant la durée écoulée et celle restant à écouler ; ainsi un étranger qui s’installe définitivement en France est comptabilisé, même s’il n’est installé que depuis 2 mois. En revanche, les étudiants étrangers présents en France uniquement pour l’année scolaire (moins de 12 mois) ne sont pas comptabilisés. Autre exemple, un travailleur saisonnier étranger présent sur le territoire pour quelques mois (moins de 12 mois) et résidant de façon habituelle à l’étranger n’est pas comptabilisé.