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Insee Flash Grand Est · Novembre 2025 · n° 111
Insee Flash Grand EstLa rénovation des logements, levier majeur pour faire face à la vulnérabilité énergétique

Emmanuelle Crenner, Loïc Rousseau (Insee)

Avec la flambée des prix de l’énergie, le nombre de ménages en situation de vulnérabilité énergétique dans le Grand Est serait passé de 518 000 en 2021 à 826 000 en 2023.

Si le nombre de rénovations se maintient au rythme actuel, le taux de vulnérabilité pourrait diminuer de 22 % en 2021 à 18 % en 2030. Il pourrait même descendre à 15 % avec une application stricte de la loi Climat et résilience. Quel que soit le scénario, ces baisses concerneraient davantage les ménages locataires vivant dans le parc privé.

Insee Flash Grand Est
No 111
Paru le :Paru le18/11/2025
Insee - Rénovation des logements, levier face à la vulnérabilité énergétique.
Publication rédigée par :Emmanuelle Crenner, Loïc Rousseau (Insee)

Avec la flambée des prix de l’énergie, 308 000 ménages vulnérables de plus

En 2021 dans le Grand Est, 518 000 ménages dépensent plus de 9,2 % de leur pour l’énergie, et sont ainsi considérés comme [Crenner, Frey, 2025 ; pour en savoir plus (2)]. Les tensions géopolitiques internationales depuis 2022 ont entraîné une hausse des prix de l’énergie : entre 2021 et 2023, les prix du gaz et de l’électricité ont fortement augmenté (respectivement +67 % et +27 % hors abonnement), tout comme celui du fioul (+40 %).

Les données de la ne sont pas disponibles pour 2023, mais si on applique à cette consommation les hausses de prix constatées entre 2021 et 2023, à conditions de logements et revenus inchangés, 308 000 ménages supplémentaires seraient vulnérables en 2023 dans la région ; le taux de vulnérabilité serait de 35 %, soit 13 points de plus qu’en 2021. Les ménages chauffés au gaz seraient plus affectés (+17 points) que les ménages chauffés au fioul et à l’électricité (+11 et +8 points).

Comme en 2021, le taux de vulnérabilité serait beaucoup plus élevé parmi les ménages qui vivent dans une « passoire thermique » (logement affichant un F et G). Mais la hausse la plus forte concernerait les ménages vivant dans un logement classé E ou D (+19 et +15 points) (figure 1).

Figure 1Part des ménages en situation de vulnérabilité énergétique par classe DPE et selon le scénario de prix de l’énergie

(en %)
Part des ménages en situation de vulnérabilité énergétique par classe DPE et selon le scénario de prix de l’énergie ((en %)) - Lecture : Avec les prix des énergies en 2023, 3 % des ménages occupant un logement classé A ou B seraient en situation de vulnérabilité énergétique.
Scénario A et B C D E F et G
Prix 2023 3 12 29 50 73
Prix 2021 2 5 14 31 60
  • Lecture : Avec les prix des énergies en 2023, 3 % des ménages occupant un logement classé A ou B seraient en situation de vulnérabilité énergétique.
  • Champ : Ménages du Grand Est ayant un revenu non nul.
  • Sources : Insee, Fidéli 2022 ; SDES, bilan annuel de l’énergie 2021 ; Ademe, base des DPE juillet 2022-juin 2023 ; Dreal Grand Est hypothèse d’évolution des prix des énergies.

Figure 1Part des ménages en situation de vulnérabilité énergétique par classe DPE et selon le scénario de prix de l’énergie

  • Lecture : Avec les prix des énergies en 2023, 3 % des ménages occupant un logement classé A ou B seraient en situation de vulnérabilité énergétique.
  • Champ : Ménages du Grand Est ayant un revenu non nul.
  • Sources : Insee, Fidéli 2022 ; SDES, bilan annuel de l’énergie 2021 ; Ademe, base des DPE juillet 2022-juin 2023 ; Dreal Grand Est hypothèse d’évolution des prix des énergies.

La vulnérabilité énergétique augmenterait davantage pour les 20 % des ménages les plus modestes, jusqu’à atteindre 71 %, soit +20 points. Les personnes seules et les familles monoparentales seraient plus touchées que les couples (+17 points contre +9 points). Ceci s’explique avant tout par le fait que les personnes seules occupent plus souvent un logement relativement grand par rapport à la taille du ménage [2025, Lavaud C., Le Lan R. ; pour en savoir plus (3)], et par les niveaux de vie plus faibles des familles monoparentales.

Même si la part des ménages vulnérables resterait nettement supérieure dans les communes rurales, la hausse des prix affecterait plus fortement les ménages des communes urbaines, qui se chauffent plus souvent au gaz (+14 points contre +12 points).

Avec la loi Climat et résilience, le taux de vulnérabilité pourrait passer de 22 % en 2021 à 15 % en 2034

Trois scénarios d’amélioration de la performance énergétique du parc actuel de logements ont été réalisés, en maintenant les prix de l’énergie et les revenus identiques à ceux de l’année 2021.

Le premier scénario, dit tendanciel (figure 2), se place à horizon 2030, et prolonge les tendances actuelles de rénovation. Dans ce scénario, 37 % des logements seraient rénovés entre 2021 et 2030 (figure 3). À revenus identiques, 18 % des ménages seraient vulnérables en 2030, contre 22 % en 2021. La consommation conventionnelle d’énergie des ménages pour le logement diminuerait de 15 %.

Le deuxième scénario, dit climat-résilience, se place à horizon 2034. Il s’appuie sur les obligations de rénovation des logements mis en location, prévues par la loi Climat et résilience de 2021. D’ici à 2034, 55 % des logements seraient rénovés. En 2034, le taux de vulnérabilité des ménages passerait à 15 % et la consommation conventionnelle d’énergie baisserait de 23 %.

Le troisième scénario, dit bas-carbone, se place à horizon 2050. Le schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires définit une trajectoire de rénovation des logements pour atteindre 100 % de logements classés en DPE A ou B. La consommation conventionnelle d’énergie des ménages se réduirait de 65 % comparée à 2021. Il resterait alors 4 % de ménages en situation de vulnérabilité énergétique, du fait de leurs revenus très faibles ou de l’occupation d’un logement très grand et donc difficile à chauffer.

À la suite de l’amélioration de la performance énergétique des logements, le taux de vulnérabilité des ménages vivant en 2021 dans une passoire thermique baisserait en moyenne de 1,3 point par an à l’horizon 2030 dans le scénario 1, de 1,6 point par an à l’horizon 2034 dans le scénario 2, voire de 1,8 point par an à l’horizon 2050 dans le scénario 3.

Figure 2Simulation des effets de rénovation des logements sur la vulnérabilité énergétique et la consommation énergétique conventionnelle des ménages

Simulation des effets de rénovation des logements sur la vulnérabilité énergétique et la consommation énergétique conventionnelle des ménages - Lecture : Selon le scénario tendanciel, en 2030, 414 000 ménages seraient en situation de vulnérabilité énergétique, soit 18 % des ménages du Grand Est.
Indicateur Situation initiale Scénario tendanciel Scénario climat-résilience Scénario bas-carbone
Horizon de projection 2021 2030 2034 2050
Nombre de ménages en situation de vulnérabilité énergétique 518 000 414 000 354 000 86 000
Évolution par rapport à la situation initiale (en %) // -20 -32 -83
Part des ménages en situation de vulnérabilité énergétique (en %) 22 18 15 4
Évolution de la consommation conventionnelle d’énergie par rapport à la situation initiale (en %) // -15 -23 -65
  • Lecture : Selon le scénario tendanciel, en 2030, 414 000 ménages seraient en situation de vulnérabilité énergétique, soit 18 % des ménages du Grand Est.
  • Champ : Ménages du Grand Est ayant un revenu non nul.
  • Sources : Insee, Fidéli 2022 ; SDES, bilan annuel de l’énergie 2021 ; Ademe, base des DPE juillet 2022-juin 2023 ; Dreal Grand Est, hypothèse de rénovation des logements.

Figure 3Scénario tendanciel : part des rénovations simulées selon la classe DPE d’origine

Scénario tendanciel : part des rénovations simulées selon la classe DPE d’origine - Lecture : Pour le scénario tendanciel, 17 % des logements classés B en 2021 sont rénovés et passent en DPE A en 2030.
Matrice de transition Classe DPE en 2021 Évolution simulée en 2030 (en %)
A B C D E F G
A 100 // // // // // //
B 17 83 // // // // //
C 8 18 74 // // // //
D // 4 24 72 // // //
E // // 6 41 53 // //
F // // // 10 85 5
G // // // // 49 11 40
  • Lecture : Pour le scénario tendanciel, 17 % des logements classés B en 2021 sont rénovés et passent en DPE A en 2030.
  • Source : Dreal Grand Est, hypothèse de rénovation des logements.

Figure 3Scénario tendanciel : part des rénovations simulées selon la classe DPE d’origine

  • Lecture : Pour le scénario tendanciel, 17 % des logements classés B en 2021 sont rénovés et passent en DPE A en 2030.
  • Source : Dreal Grand Est, hypothèse de rénovation des logements.

La vulnérabilité énergétique diminue davantage parmi les locataires du parc privé et dans les départements les plus ruraux 

Dans les scénarios « tendanciel » et « climat-résilience », la diminution du taux de vulnérabilité des ménages locataires serait plus importante dans le parc privé (respectivement ‑5 et ‑9 points, contre ‑3 et ‑6 points dans le parc social). Comme les logements privés ont plus fréquemment un DPE E, F ou G en 2021, ils feraient davantage l’objet de rénovations. Pour les propriétaires occupants, le taux de vulnérabilité diminuerait moins : ‑4 points dans le scenario tendanciel et ‑6 points dans le scénario climat-résilience. En effet, dans ces scénarios, les objectifs de rénovation de logements sont plus limités pour les propriétaires occupants.

Les départements présentant les plus forts taux de vulnérabilité de la région en 2021 (Ardennes, Meuse et Vosges) afficheraient toujours les taux les plus élevés en 2030 et 2034. Cependant, ces taux diminueraient plus vite que dans les autres départements. À l’inverse, la baisse serait la plus modérée dans le Bas-Rhin, département où la vulnérabilité est la moins élevée de la région.

Encadré - Partenariat

L’étude a été réalisée dans le cadre d’un partenariat entre la Dreal (Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement) et la direction régionale de l’Insee du Grand Est.

Publication rédigée par :Emmanuelle Crenner, Loïc Rousseau (Insee)
Publication rédigée par :Emmanuelle Crenner, Loïc Rousseau (Insee)

Sources

Pour pouvoir réaliser des estimations de vulnérabilité énergétique à un niveau géographique fin, l’étude repose sur les diagnostics DPE de la base Ademe enregistrés entre juillet 2022 et juin 2023. Un travail d’appariement avec les logements de la base Fidéli 2022 a été effectué. Les données ont été pondérées par calage, afin de conserver les structures du parc immobilier au 1er janvier 2023. Le taux de vulnérabilité des ménages du territoire est alors estimé pour 2023, 2030, 2034 et 2050, grâce aux informations disponibles dans les diagnostics ainsi qu’à celles relatives aux revenus des ménages et aux prix des énergies en 2021.

Définitions

Le revenu disponible d’un ménage est le revenu à sa disposition pour consommer et épargner. Il comprend les revenus d’activité nets de cotisations sociales, les indemnités de chômage, les retraites et pensions, les revenus du patrimoine (fonciers et financiers) et les autres prestations sociales perçues, nets des impôts directs.

Un ménage est dit vulnérable énergétiquement s’il consacre plus de 9,2 % de son revenu disponible aux dépenses conventionnelles d’énergie liées à son logement, soit plus du double de la médiane métropolitaine, et si son niveau de vie ne dépasse pas le troisième quartile du niveau de vie observé de en France métropolitaine.

Les dépenses énergétiques conventionnelles liées au logement correspondent à un usage standard du logement occupé. Elles sont évaluées sur la base de la consommation conventionnelle d’énergie associée au diagnostic de performance énergétique (DPE).

Le diagnostic de performance énergétique (DPE) renseigne sur la performance énergétique d’un logement en évaluant la consommation d’énergie et les émissions de gaz à effet de serre conventionnelles au m2, pour un usage standard.

Pour en savoir plus

(1) Retrouvez davantage de données associées à cette publication en téléchargement.

(2) Crenner E., Frey G., « Le Grand Est est la troisième région la plus touchée par vulnérabilité énergétique liée au logement », Insee Analyses Grand Est no 204, novembre 2025.

(3) Lavaud C., Le Lan R., « Un quart des ménages vivent dans un logement en sous‑occupation très accentuée », Insee Première no 2064, juillet 2025.

(4) Beck S., Masson K., Mora V., Prusse S., « Une estimation du taux de vulnérabilité énergétique des ménages pour le logement », Documents de travail no 2025‑01, Insee, janvier 2025.