Insee Analyses Bretagne · Octobre 2025 · n° 136

Les industries agroalimentaires en 2022 : un secteur majeur pour l’emploi industriel breton

Les industries agroalimentaires (IAA) regroupent l’ensemble des activités de transformation et de conservation des matières premières agricoles en produits destinés à l’alimentation (champ) (sources). Elles sont composées d’une diversité de domaines, comme ceux de l’industrie des viandes, des produits laitiers, de la boulangerie-pâtisserie ou encore la fabrication de plats préparés. Les IAA constituent un maillon essentiel de la chaîne agroalimentaire, entre la production agricole et la distribution aux consommateurs, avec le support du commerce de gros (encadré 1).

Les IAA, hors artisanat de commerce, représentent 57 800 emplois salariés en équivalent temps plein (ETP) en Bretagne en 2022. Ces emplois sont répartis au sein de 1 200 établissements implantés dans la région. La Bretagne est la première région de France métropolitaine en matière d’emploi dans les IAA : 15 % des emplois métropolitains y sont localisés (13 % dans les Pays de la Loire et 11 % en Auvergne-Rhône-Alpes). Ce volume élevé d’emplois fait des IAA le premier secteur de l’industrie manufacturière bretonne avec 40 % des emplois industriels en 2022, cette part étant stable au cours des dix dernières années.

Présenter les IAA à travers leurs principales activités, analyser la composition de leur tissu productif et examiner leur répartition territoriale permettent de mieux connaître ce secteur, qui joue un rôle majeur dans l’emploi en Bretagne.

En lien avec des productions agricoles tournées vers l’élevage, les industries agroalimentaires bretonnes sont fortement orientées vers les activités de transformation et de conservation de produits d’origine animale. L’industrie de la viande prédomine avec 23 400 emplois, soit 41 % de l’emploi des IAA bretonnes, loin devant l’industrie des produits laitiers (7 800 emplois). En particulier, l’industrie de la viande de boucherie est très présente : avec 14 800 emplois, elle est spécifique à l’agroalimentaire breton puisqu’elle est 2,2 fois plus présente dans les IAA régionales qu’en moyenne dans les IAA de France métropolitaine (figure 1). Cette industrie inclut notamment l’activité des abattoirs et concerne les quatre plus grands établissements agroalimentaires employeurs de la région (encadré 2).

Parmi les secteurs les plus spécifiques des IAA bretonnes se trouvent également ceux des industries de l’alimentation pour animaux de ferme, du beurre ou des autres produits laitiers, des produits de la mer ou encore des légumes. Encore plus concentrée dans la région, la fabrication de cidre reste toutefois l’un des secteurs agroalimentaires générant le moins d’emplois (240). Mis à part ce dernier, les secteurs les plus spécifiques des IAA bretonnes regroupent largement des activités de premières transformations de matières brutes, ayant un faible taux de valeur ajoutée. Par conséquent, la Bretagne représente une part plus faible dans la valeur ajoutée nationale des IAA que dans l’emploi.

Pour les autres secteurs des IAA, la fabrication industrielle de plat préparés (4 800 emplois), les préparations industrielles de produits à base de viande (4 500) et l’industrie de la viande de volaille (4 200) comptent parmi ceux qui emploient le plus de personnes en Bretagne. Les industries de la boulangerie (3 300 emplois) et de la biscuiterie (2 400) sont également très représentées.

Entre 2008 et 2022, l’emploi est en forte hausse dans l’industrie bretonne des produits laitiers (+43 % des emplois salariés en fin d’année). Ce développement provient d’une diversification du secteur, en particulier de l’essor de la fabrication de lait en poudre (pour le marché chinois notamment) avec la création par le groupe Synutra d’une usine à Carhaix en 2016. Sur la même période, l’emploi augmente également dans la boulangerie-pâtisserie industrielle (+28 %) et dans la fabrication industrielle de plats préparés (+26 %).

Pour le secteur industriel des viandes, dans un contexte de forte concurrence internationale, les évolutions de l’emploi sont différentes selon les spécialisations. L’industrie de la volaille a été affaiblie par plusieurs facteurs, dont la fin des restitutions aux exportations (subventions qui visaient à maintenir la compétitivité de la volaille française sur les marchés internationaux où les prix étaient plus bas). Les deux grands opérateurs historiques du domaine du poulet destiné à l’exportation, Doux et Tilly-Sabco, en ont été fortement affectés, subissant restructuration et fermeture de sites en 2018, à Guerlesquin pour Tilly-Sabco et à Châteaulin pour Doux. Le secteur a perdu 34 % de ses effectifs salariés entre 2008 et 2022. La baisse est moins forte dans le secteur des préparations de produits à base de viande (-18 % entre 2008 et 2022). A contrario, l’emploi a légèrement augmenté dans le secteur de la viande de boucherie (+9 % entre 2008 et 2022).

Au total, pour l’ensemble des activités agroalimentaires, après une période de stabilité de l’emploi entre 2008 et 2015, les IAA bretonnes renforcent leurs effectifs de 6 % entre 2015 et 2022.

Avec 21 % d’établissements comptant 50 salariés ou plus contre 12 % au niveau national, le secteur agroalimentaire breton se distingue par une plus forte présence de grands établissements (figure 2). Les spécialisations principalement composées de grands établissements comme l’industrie de la viande de volaille, des produits à base de viande ou encore des plats préparés sont fortement implantées dans la région.

En Bretagne, environ la moitié des établissements de ces trois secteurs comptent 50 salariés ou plus (contre respectivement 25 %, 18 % et 19 % en France métropolitaine). De plus, les établissements bretons de l’industrie de la viande de boucherie et de celle des produits laitiers sont plus souvent de plus grande taille que leurs homologues métropolitains.

En outre, à elle seule, l’industrie des viandes représente la moitié des très grands établissements bretons, qui comptent 250 salariés ou plus.

Tous secteurs confondus, les très grands établissements représentent 5 % du tissu agroalimentaire breton mais emploient presque la moitié des salariés des IAA (47 %). Inversement, les établissements de moins de 50 salariés représentent 79 % du tissu mais n’emploient que 15 % des salariés des IAA. Cette concentration de l’emploi dans les plus grands établissements agroalimentaires est équivalente à la moyenne métropolitaine.

Les industries agroalimentaires sont implantées sur l’ensemble du territoire breton (figure 3). Parmi les 61 intercommunalités que compte la région, 43 dénombrent sur leur territoire au moins 250 emplois salariés dans les IAA. Dans certaines zones, l’emploi salarié est très dépendant des IAA : celles-ci pèsent pour 30 % des emplois dans les intercommunalités du Centre Morbihan, du Roi Morvan et de Blavet Bellevue Océan. Les IAA représentent aussi 25 % des emplois salariés de Loudéac Communauté - Bretagne Centre, intercommunalité ayant par ailleurs le plus d’emplois dans l’agroalimentaire (4 400 emplois), devant celles de Vitré (4 300) et de Lamballe Terre et Mer (3 600).

L’implantation de très grands établissements explique souvent le nombre élevé d’emplois et l’orientation agroalimentaire principale des intercommunalités (figure 4). La présence de grands abattoirs, comme le site de Lamballe de la Cooperl Arc Atlantique, celui du Mené de Kermené, le site de Quimperlé du groupe Bigard ou encore celui de Vitré de la Société Vitréenne d’Abattage Jean Rozé, structure ainsi largement les IAA au sein de leur intercommunalité. Il en est de même pour le site de Guer de Mix’Buffet (salades traiteur, snacking), le site de Kervignac de Cité Marine (plats préparés à base de produits de la mer) ou encore l’établissement Bridor à Servon-sur-Vilaine (pains et pâtisseries).

Au niveau local, les évolutions de l’emploi agroalimentaire dépendent souvent des dynamiques du ou des plus grands établissements implantés. Par exemple, l’emploi salarié agroalimentaire a augmenté au sein des intercommunalités de Lamballe Terre et Mer et de Blavet Bellevue Océan, grâce notamment au développement des activités de la Cooperl pour l’une et de Cité Marine pour l’autre (les gains sont respectivement de 1 400 et 900 emplois en fin d’année, soit +61 % et +197 % entre 2008 et 2022). Des crises successives (la fermeture des abattoirs Gad en 2013, puis en 2018 l’incendie de l’usine de saumon de Marine Harvest, groupe déjà en réduction d’effectif) ont touché l’emploi agroalimentaire de l’intercommunalité du Pays de Landivisiau, qui a perdu plus de la moitié de ses emplois depuis 2008. Les évolutions locales de l’emploi dépendent également des transformations globales du secteur qui prédomine sur le territoire : par exemple, Centre Morbihan Communauté a perdu un quart de ses effectifs en raison notamment de la fragilité de l’industrie volaillère.

Les établissements bretons des industries agroalimentaires relèvent majoritairement de groupes de sociétés, qu’ils s’agissent de groupes franco-français (31 %) ou de multinationales sous contrôle français (22 %) ou sous contrôle étranger (6 %). Les autres établissements (41 %) appartiennent à des unités indépendantes.

Les multinationales emploient 74 % des salariés en ETP des IAA bretonnes, une part plus élevée qu’en France métropolitaine (68 %) (figure 5). La dépendance de l’emploi agroalimentaire à une multinationale étrangère est toutefois plus faible en Bretagne (12 % des emplois contre 16 % au niveau national). En contrepartie, le poids des multinationales sous contrôle français est plus élevé dans la région (62 % des emplois contre 52 % au niveau national).

En Bretagne comme au niveau national, l’emploi des industries des viandes et des produits laitiers relève largement des multinationales françaises. Les multinationales étrangères pèsent quant à elles davantage dans l’emploi des industries des aliments pour animaux (33 %), des plats préparés (29 %) et des produits de la mer (29 %).

Le champ des industries agroalimentaires (IAA) est défini dans cette étude par les établissements dont l’activité principale, au sens de la NAF rév. 2, relève des « Industries alimentaires » et de la « Fabrication de boissons », à l’exclusion des activités relevant de l’artisanat commercial, à savoir la charcuterie, la boulangerie, la boulangerie-pâtisserie, la pâtisserie et la cuisson de produits de boulangerie. Le commerce de gros est exclu de ce champ.