Insee Analyses Martinique · Septembre 2025 · n° 78

En 2024, malgré un taux d’emploi globalement stable en Martinique, la situation des jeunes se dégrade

En 2024, 61 % des personnes âgées de 15 à 64 ans résidant en Martinique occupent un emploi au sens du Bureau international du travail (BIT), un taux relativement stable par rapport à 2023 (figure 1). Ce niveau demeure toutefois inférieur de 8 points à celui observé en France métropolitaine, traduisant une insertion plus faible sur le marché du travail.

En Martinique, le taux d’emploi des hommes s’établit à 60 % en 2024, un niveau stable sur un an. Celui des femmes atteint 62 %, relativement stable également. Hommes et femmes présentent ainsi une insertion comparable sur le marché du travail martiniquais, à la différence de l’Hexagone où les femmes sont moins souvent en emploi. L’écart avec la France métropolitaine est donc plus marqué pour les hommes, pour lesquels le taux d’emploi est supérieur de 12 points, que pour les femmes (+5 points).

En 2024, les 50-64 ans bénéficient d’une dynamique favorable sur le marché du travail : leur taux d’emploi progresse de 4 points pour atteindre 69 %, rejoignant ainsi le niveau observé en France hexagonale. Cette hausse s’inscrit à la fois dans un contexte de réforme des retraites, incitant les actifs les plus âgés à prolonger leur activité professionnelle, et dans un environnement local marqué par des pensions de retraite plus modestes [Bilioniere, Salibekyan-Rosain , 2023 ; pour en savoir plus (2)].

Chez les 15-29 ans, le taux d’emploi reste relativement stable et s’établit à 30 %. Cette tranche d’âge demeure la moins insérée sur le marché du travail en Martinique, comme en France métropolitaine. C’est parmi les jeunes que l’écart avec la France métropolitaine est le plus marqué, avec un taux d’emploi inférieur de 19 points à la moyenne métropolitaine. Par ailleurs, si le faible taux d’emploi des jeunes est à relativiser par le fait que près de la moitié d’entre eux sont encore en études (47 %), 21 % des jeunes de Martinique ne sont ni en emploi, ni en études, ni en formation (NEET) en 2024 [Anaïs, Salibekyan-Rosain, 2023 ; pour en savoir plus (3)]. Cette proportion, quasi stable sur un an, est près de deux fois plus élevée qu’en France métropolitaine (12 %).

De même, chez les 30-49 ans, tranche d’âge généralement la mieux insérée sur le marché de l’emploi, le taux d’emploi reste relativement stable à 71 %, un niveau inférieur à celui observé en Hexagone (84 %).

En 2024, le taux d’emploi des personnes diplômées de l’enseignement supérieur recule de 4 points pour s’établir à 80 % (figure complémentaire 1). Ce repli résulte d’une diminution du nombre de personnes en emploi parmi les diplômés du supérieur en âge de travailler. Cette baisse accentue l’écart avec la France métropolitaine, où le taux d’emploi des diplômés du supérieur augmente et s’établit à 86 %. À l’inverse, le taux d’emploi des personnes peu ou pas diplômées, c’est-à-dire ne possédant aucun diplôme ou seulement le brevet des collèges, progresse de 4 points, atteignant 40 %.

Malgré ces évolutions, le niveau de diplôme demeure un déterminant majeur de l’insertion professionnelle : les diplômés du supérieur sont deux fois plus souvent en emploi que les peu ou pas diplômés. Par ailleurs, les personnes peu ou pas diplômées présentent un taux d’emploi comparable en Martinique et en France hexagonale, contrairement à la Guadeloupe et à la Guyane où leur intégration sur le marché du travail demeure plus difficile. L’écart le plus marqué concerne les titulaires d’un CAP-BEP ou équivalent, avec un taux d’emploi de 61 % en Martinique, contre 71 % en France métropolitaine.

En 2024, 16 % des personnes en emploi travaillent à temps partiel, une proportion stable sur un an et proche de celle de la France métropolitaine (17 %). Comme dans l’Hexagone, les femmes y ont davantage recours que les hommes (21 % contre 8 %). En revanche, ce sont les jeunes de 15 à 29 ans qui sont les plus concernés par le temps partiel en Martinique (25 %), alors qu’en France métropolitaine, ce sont les 50 ans et plus qui y recourent le plus fréquemment.

Parmi les personnes à temps partiel, certaines souhaitent travailler davantage et sont disponibles pour le faire : elles sont alors considérées en sous-emploi, au même titre que celles en chômage technique ou partiel. En 2024, 8 % des personnes en emploi sont en situation de sous-emploi, soit le double de la France métropolitaine (figure 2). Cette proportion n’évolue pas significativement par rapport à 2023.

Comme dans le reste du pays, en Martinique, les femmes sont plus exposées au sous-emploi que les hommes (10 % contre 5 %), en raison notamment de leur recours plus fréquent au temps partiel. Les jeunes de 15 à 29 ans sont également davantage concernés (15 %), une proportion en hausse de 6 points sur un an, suggérant l’émergence d’une difficulté nouvelle pour cette tranche d’âge.

En 2024, 76 % des personnes en sous-emploi n’effectuent pas de démarches actives de recherche d’un autre emploi, une part proche de celle observée en France métropolitaine (73 %). A l’inverse, 18 % déclarent rechercher activement à augmenter leur durée de travail, contre 24 % en Hexagone. 6 % des personnes en sous-emploi en Martinique ont involontairement travaillé moins que d’habitude en raison d’un dispositif d’activité partielle, contre seulement 3 % dans l’Hexagone. Cette situation s’inscrit dans le contexte de la crise sociale liée à la vie chère survenue fin 2024, qui a conduit de nombreuses entreprises à recourir à l’activité partielle.

Comme en France métropolitaine, le sous-emploi concerne davantage les personnes peu ou pas diplômées : en Martinique, 46 % des personnes en situation de sous-emploi possèdent au plus le brevet des collèges, contre seulement 19 % chez les personnes en emploi hors sous-emploi (figure complémentaire 2). À l’inverse, seules 9 % des personnes en sous-emploi sont diplômées de l’enseignement supérieur, contre 36 % des autres personnes en emploi.

Le sous-emploi est moins répandu parmi les professions les plus qualifiées : seules 1 % des personnes concernées sont cadres, contre 14 % parmi les autres personnes en emploi (figure complémentaire 3). À l’inverse, 56 % des personnes en sous-emploi sont employées, contre 32 % parmi les personnes en emploi non concernées par le sous-emploi. La part des ouvriers est en revanche comparable parmi les personnes en sous emploi et parmi les autres personnes en emploi.

En 2024, le taux de chômage au sens du BIT augmente de 1 point en Martinique (figure 3). Il concerne 12 % de la population active de 15 ans ou plus, soit un niveau supérieur de 5 points à celui observé en France métropolitaine.

Cette hausse est principalement portée par la situation des hommes, dont le taux de chômage s’élève de 3 points pour atteindre 14 %. À l’inverse, le chômage des femmes reste quasi stable à 11 %.

Le chômage s’accentue également chez les jeunes de 15 à 29 ans, dont le taux atteint 29 % en 2024, en hausse de 5 points sur un an. Comme en France métropolitaine, les moins de 30 ans sont plus exposés au chômage que les plus âgés. Toutefois, en Martinique, leur situation est nettement plus défavorable qu’en Hexagone (14 %).

Le chômage augmente également chez les 30-49 ans, atteignant 13 % (+2 points sur un an), soit plus du double du taux métropolitain (6 %) pour cette tranche d’âge. En revanche, le taux de chômage des seniors (50 ans et plus) reste stable à 7 % et proche de celui de l’Hexagone.

Comme en France métropolitaine, les personnes peu ou pas diplômées restent plus exposées au chômage, 15 % contre seulement 8 % pour les diplômés de l’enseignement supérieur (figure complémentaire 4). Ces derniers, bien que mieux insérés, sont toutefois plus concernés par le chômage qu’en France métropolitaine (5 %). En 2024, le taux de chômage des titulaires d’un CAP-BEP ou équivalent s’aggrave nettement, avec une hausse de 6 points, pour atteindre 17 %. Il dépasse ainsi de 10 points celui observé en France hexagonale, traduisant une dégradation marquée de la situation sur le marché du travail pour les titulaires de ces diplômes en Martinique.

Le chômage peut s’installer dans le temps, signe d’un éloignement persistant vis-à-vis du marché du travail. Les personnes concernées sont alors en situation de chômage de longue durée, c’est-à-dire privées d’emploi depuis au moins un an. En Martinique, 5 % de la population active est dans cette situation, une part stable sur un an, mais de 3 points supérieure à celle observée en France métropolitaine (figure 4).

Le chômage de longue durée affecte dans des proportions similaires les hommes et les femmes. Il est en revanche moins répandu chez les plus âgés, avec un taux de 4 % parmi les 50 ans et plus, contre 8 % chez les 15-29 ans et 6 % chez les 30-49 ans.

En Martinique, les situations de chômage ont tendance à s’installer plus durablement qu’en France métropolitaine : un peu plus de quatre chômeurs sur dix sont en situation de chômage de longue durée, contre deux sur dix en France métropolitaine. Plus significatif encore, un peu plus de deux chômeurs sur dix de Martinique sont au chômage depuis au moins deux ans (contre moins d’un sur dix en France métropolitaine).

En outre, une part importante de chômeurs de longue durée en Martinique n’ont jamais travaillé : c’est le cas de 18 % d’entre eux en 2024, contre 11 % en France métropolitaine.

Certaines catégories professionnelles sont plus exposées au chômage de longue durée. En 2024, la part des chômeurs de longue durée ayant déjà travaillé atteint 8 % chez les ouvriers et 7 % chez les employés, contre seulement 1 % chez les cadres. Le niveau de diplôme joue également un rôle déterminant : la part des chômeurs de longue durée s’élève à 8 % chez les personnes peu ou pas diplômées, contre 2 % pour les diplômés de l’enseignement supérieur.

Parmi les personnes inactives, c’est-à-dire ni en emploi, ni au chômage au sens du BIT, certaines déclarent souhaiter travailler sans pour autant rechercher activement un emploi ou être disponibles à court terme pour en occuper un. Elles constituent le « halo autour du chômage ». Cette catégorie inclut notamment des personnes qui n’ont pas entamé de démarche de recherche, ainsi que celles qui y ont renoncé, souvent par découragement.

En 2024, le halo autour du chômage regroupe 9 % de la population en âge de travailler en Martinique (figure 5). Cette proportion reste la même par rapport à 2023 et demeure près de deux fois plus élevée qu’en France métropolitaine.

En considérant les personnes du halo et les chômeurs au sens du BIT, ce sont au total 18 % des 15-64 ans qui sont sans emploi et qui souhaitent travailler en Martinique, contre 10 % en France hexagonale. Cette part n’évolue pas significativement sur un an.

En Martinique, 29 % des personnes inactives déclarent souhaiter travailler, contre 17 % en France métropolitaine, suggérant une situation d’inactivité plus subie qu’au niveau national (figure complémentaire 5). Par ailleurs, les motifs avancés par ceux qui ne souhaitent pas travailler mettent également en lumière des difficultés plus importantes en Martinique : les problèmes de santé sont notamment plus fréquemment mentionnés (27 % contre 18 % en France métropolitaine), tandis que le fait d’être à la retraite ou d’en être proche est moins souvent cité (13 % contre 21 % en France métropolitaine).

Les évolutions à la hausse ou à la baisse d’une année sur l’autre qui ne sont pas statistiquement significatives, signalées par l’absence d’astérisque dans les figures, ne permettent pas de conclure à une variation réelle. Ces variations pouvant résulter de fluctuations liées au recours à une enquête par sondage, sont interprétées avec prudence et sont donc considérées comme globalement stables. Dans l’étude, les indicateurs correspondants sont qualifiés de « quasi stables », « relativement stables » ou présentés comme n’évoluant « pas significativement ».