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Insee Flash Provence-Alpes-Côte d'Azur · Mars 2024 · n° 102
Insee Flash Provence-Alpes-Côte d'AzurMarseille : dans le centre ancien, plus de quatre logements du parc privé sur cinq sont détenus par des multipropriétaires

Argouarc’h J., Durieux S. (Insee)

À Marseille, trois logements de particuliers sur quatre sont détenus par des multipropriétaires, et même plus de quatre sur cinq en centre-ville. Il s’agit souvent de petits appartements anciens loués. Les ménages multipropriétaires possédant au moins un bien immobilier à Marseille vivent en très grande majorité dans la région. Ce sont fréquemment des actifs et des familles, et plus encore lorsque les ménages possèdent au moins cinq logements. Les biens marseillais loués sont particulièrement concentrés dans certains arrondissements, notamment le centre ancien et ses alentours. Leur propriété est également concentrée, et les propriétaires résident souvent dans les quartiers du sud ou de l’est de Marseille. Les locataires des détenteurs d’au moins dix logements ont un niveau de vie sensiblement plus faible que les autres locataires du parc privé.

Insee Flash Provence-Alpes-Côte d'Azur
No 102
Paru le :Paru le28/03/2024

Cette étude fait partie d'une série de publications sur la multipropriété en Provence-Alpes-Côte d'Azur.

Multipropiétaires d'un logement en Provence-Alpes-Côte d'Azur
Publication rédigée par :Argouarc’h J., Durieux S. (Insee)

Un marché locatif tendu à Marseille

À Marseille comme dans la région, l’accès à un logement abordable et adapté constitue un enjeu majeur. Les tensions sur le marché du logement sont en effet fortes. À des prix immobiliers élevés dans certains quartiers s’ajoutent une offre locative restreinte localement par la concurrence des plateformes d’hébergement et un parc de logements privé en partie dégradé. Le rapport Nicol de 2015 sur la requalification du parc immobilier privé à Marseille a ainsi dénombré 40 000 logements indignes et menaçant la santé ou la sécurité, essentiellement dans le centre (encadré).

Dans le même temps, le parc social abrite 16 % des habitants en 2020. C’est insuffisant au regard de la demande et des revenus de la population, dont un quart vit sous le seuil de pauvreté. Une part importante des Marseillais ne peut donc pas accéder aisément à la propriété et loue sa résidence principale, le plus souvent dans le parc privé. Ainsi, la majorité des ménages (54 %) sont locataires, davantage qu’à Nice (49 %) et bien plus que dans la région (42 %). Ces différents éléments participent de la concentration de la propriété immobilière à Marseille, notamment à des fins de rentabilité locative.

La location, premier usage des logements marseillais détenus par des multipropriétaires

En 2017, près des trois quarts des logements de particuliers du parc privé marseillais sont détenus par des , soit directement soit via une société civile immobilière (SCI, sources). Cette proportion est équivalente à celle de la ville de Nice ou de la région. Les logements marseillais détenus par des multipropriétaires sont en revanche plus souvent loués (44 %) qu’en moyenne régionale (32 %). Ils sont également plus souvent déclarés , 12 % contre 9 % dans la région). À l’inverse, les sont rares (2 % contre 7 % à Nice et 15 % au niveau régional), mais en progression durant la dernière décennie. Les autres logements détenus par les multipropriétaires sont très majoritairement leur résidence principale.

Les logements loués ou vacants appartenant à des multipropriétaires sont concentrés dans le centre ancien marseillais et ses alentours. Du fait de l’urbanisme de la ville, les biens marseillais de multipropriétaires sont principalement des appartements (85 %) assez petits (63 m² en moyenne contre 73 m² au niveau régional). Les biens loués ont 90 ans en moyenne et les logements vacants presque 100 ans. Ils sont plus anciens que les logements niçois ou régionaux loués ou vacants détenus par des multipropriétaires. Généralement, plus les multipropriétaires détiennent de biens, plus ces biens sont anciens et petits.

Les multipropriétaires détiennent plus de 80 % du parc privé de logements de particuliers dans le centre ancien de Marseille (1er, 2e, 5e et 6e arrondissements, figure 1). À l’inverse des autres grandes villes où les prix immobiliers sont plus élevés dans le centre ancien, ce n’est pas systématiquement le cas à Marseille. Les biens détenus par des propriétaires de cinq biens ou plus se situent ainsi plus fréquemment dans les quartiers les moins favorisés du centre (Noailles, Belsunce, Les Chartreux) et dans des quartiers du nord de la ville comme le 15e arrondissement.

Figure 1Nombre de logements détenus par des multipropriétaires et leur part dans l’ensemble des logements de particuliers, par arrondissement de Marseille

Nombre de logements détenus par des multipropriétaires et leur part dans l’ensemble des logements de particuliers, par arrondissement de Marseille - Lecture : 15 300 logements du 1er arrondissement de Marseille sont détenus par des multipropriétaires ; ils représentent 84 % de l’ensemble des logements de particuliers de cet arrondissement.
Code géographique Libellé géographique Nombre de logements marseillais de particuliers détenus par des ménages multipropriétaires Part dans l’ensemble des logements de particuliers marseillais (en %)
13201 Marseille 1er Arrondissement 15 300 84
13202 Marseille 2e Arrondissement 8 200 83
13203 Marseille 3e Arrondissement 12 200 78
13204 Marseille 4e Arrondissement 18 200 76
13205 Marseille 5e Arrondissement 20 800 81
13206 Marseille 6e Arrondissement 19 500 82
13207 Marseille 7e Arrondissement 15 600 80
13208 Marseille 8e Arrondissement 28 000 77
13209 Marseille 9e Arrondissement 20 000 69
13210 Marseille 10e Arrondissement 15 200 69
13211 Marseille 11e Arrondissement 11 500 65
13212 Marseille 12e Arrondissement 18 200 72
13213 Marseille 13e Arrondissement 17 300 65
13214 Marseille 14e Arrondissement 10 100 66
13215 Marseille 15e Arrondissement 12 500 67
13216 Marseille 16e Arrondissement 4 500 74
  • Lecture : 15 300 logements du 1er arrondissement de Marseille sont détenus par des multipropriétaires ; ils représentent 84 % de l’ensemble des logements de particuliers de cet arrondissement.
  • Champ : Logements situés à Marseille et possédés par des personnes physiques résidant en France en leur nom propre ou via une société civile immobilière.
  • Sources : Insee, fichiers démographiques sur les logements et les individus (Fidéli) 2017 ; DGFiP, fichiers de mise à jour des informations cadastrales (Majic) 2017 ; Registre du commerce et des sociétés.

Figure 1Nombre de logements détenus par des multipropriétaires et leur part dans l’ensemble des logements de particuliers, par arrondissement de Marseille

  • Lecture : 15 300 logements du 1er arrondissement de Marseille sont détenus par des multipropriétaires ; ils représentent 84 % de l’ensemble des logements de particuliers de cet arrondissement.
  • Champ : Logements situés à Marseille et possédés par des personnes physiques résidant en France en leur nom propre ou via une société civile immobilière.
  • Sources : Insee, fichiers démographiques sur les logements et les individus (Fidéli) 2017 ; DGFiP, fichiers de mise à jour des informations cadastrales (Majic) 2017 ; Registre du commerce et des sociétés.

Une forte concentration des logements loués

Les logements détenus par les multipropriétaires à Marseille appartiennent plus fréquemment que dans la région à des ménages ayant au moins cinq logements, dont une partie peut se situer en dehors de Marseille (figure 2).

Figure 2Part de logements de multipropriétaires qui appartiennent à des propriétaires d’au moins cinq logements, par lieu d’implantation des logements

(en %)
Part de logements de multipropriétaires qui appartiennent à des propriétaires d’au moins cinq logements, par lieu d’implantation des logements ((en %)) - Lecture : 45 % des logements situés à Marseille et détenus par des multipropriétaires le sont par des multipropriétaires qui possèdent cinq biens ou plus alors que c’est le cas de 35 % des logements en France détenus par des multipropriétaires.
Lieu d’implantation Part
Logements marseillais 45
Logements niçois 41
Logements en Provence-Alpes-Côte d’Azur 40
Logements en France 35
  • Lecture : 45 % des logements situés à Marseille et détenus par des multipropriétaires le sont par des multipropriétaires qui possèdent cinq biens ou plus alors que c’est le cas de 35 % des logements en France détenus par des multipropriétaires.
  • Sources : Insee, fichiers démographiques sur les logements et les individus (Fidéli) 2017 ; DGFiP, fichiers de mise à jour des informations cadastrales (Majic) 2017 ; Registre du commerce et des sociétés.

Figure 2Part de logements de multipropriétaires qui appartiennent à des propriétaires d’au moins cinq logements, par lieu d’implantation des logements

  • Lecture : 45 % des logements situés à Marseille et détenus par des multipropriétaires le sont par des multipropriétaires qui possèdent cinq biens ou plus alors que c’est le cas de 35 % des logements en France détenus par des multipropriétaires.
  • Sources : Insee, fichiers démographiques sur les logements et les individus (Fidéli) 2017 ; DGFiP, fichiers de mise à jour des informations cadastrales (Majic) 2017 ; Registre du commerce et des sociétés.

Aussi, la propriété du parc locatif privé est particulièrement concentrée à Marseille. Les multipropriétaires d’au moins cinq logements représentent 11 % des à Marseille mais ils détiennent 57 % des logements marseillais loués (52 % à Nice). Cette part varie d’une ville à une autre : elle est similaire à Lyon, plus basse à Toulouse (51 % du parc locatif) mais supérieure à Lille (62 %). Les logements des propriétaires d’au moins cinq biens immobiliers sont plus souvent situés dans certains quartiers ou arrondissements. Ainsi, dans le centre historique, les biens loués ou vacants sont surreprésentés et sont également concentrés au sein de certains immeubles. Dans ces immeubles, un ménage peut détenir une grande partie des biens (cinq ou plus) ou même tous les biens. C’est plus souvent le cas dans les 1er et 3e arrondissements.

Les multipropriétaires implantés à Marseille : souvent des familles aisées vivant dans la région

Les ménages multipropriétaires implantés à Marseille résident surtout dans la région : c’est le cas de plus de huit sur dix contre sept sur dix pour les multipropriétaires implantés à Nice et six sur dix pour ceux qui sont implantés dans la région. Les ménages multipropriétaires implantés à Marseille sont plus souvent des familles (34 %) tandis que leurs homologues niçois ou régionaux sont plus souvent des couples retraités. Dans la moitié des cas (50 %), les ménages multipropriétaires implantés à Marseille vivent principalement de revenus issus d’une activité salariée (45 % pour les multipropriétaires implantés à Nice et 46 % pour ceux implantés dans la région) et dans 35 % des cas, de pensions de retraite (39 % pour les multipropriétaires implantés à Nice ou dans la région). Les multipropriétaires implantés à Marseille sont plus souvent que les monopropriétaires de logements marseillais (32 % contre 8 %), mais un peu moins que les multipropriétaires implantés à Nice (36 %).

Les ménages propriétaires de cinq logements ou plus sont majoritairement aisés et salariés. Les familles sont plus présentes (40 %) que pour l’ensemble des multipropriétaires implantés à Marseille.

Les locataires des détenteurs d’au moins dix biens immobiliers ont un niveau de vie plus faible

Les ménages locataires des multipropriétaires marseillais sont pour moitié des personnes vivant seules (51 % contre 44 % parmi l’ensemble des ménages marseillais dans le parc privé). La surface de leur logement est relativement faible au regard de celle de l’ensemble des biens marseillais du parc privé (respectivement 51 m² et 65 m² en moyenne).

Par ailleurs, à Marseille, un peu plus de trois ménages locataires sur dix ont un niveau de vie inférieur au seuil de pauvreté. Cette part monte à 38 % (+6 points par rapport à l’ensemble) quand le ménage propriétaire détient dix biens ou plus. En effet, les biens loués par les propriétaires d’au moins dix logements sont plus petits et situés majoritairement dans les quartiers pauvres du centre et du nord de la ville. Leurs propriétaires résident également dans plus de la moitié des cas à Marseille (52 %), surtout dans les quartiers sud ou est (dans les 8e, 12e et 9e arrondissements), mais aussi à Paris, Aix-en-Provence ou Allauch.

Les propriétaires de logements vacants habitent moins souvent que les propriétaires de biens loués dans l‘arrondissement de leur bien, mais aussi fréquemment Marseille (un peu plus de la moitié y réside). Comme les biens loués, les logements vacants sont plus fréquents dans les arrondissements du centre-ville (1er au 6e arrondissement) ainsi que dans les quartiers au nord de la ville (15e et 16e arrondissements).

Encadré - Transformer du vacant dégradé en logements sociaux 

Suite aux effondrements de la rue d’Aubagne en novembre 2018, la Société Publique Locale d’Aménagement d’Intérêt National Aix Marseille Provence (SPLA-IN AMP) a été créée à l’initiative de la Métropole Aix-Marseille-Provence, de la Ville de Marseille et de l’État pour former un outil opérationnel au service de la requalification de l’habitat privé dégradé.

Elle a pour objet de mener à bien toute opération d'aménagement et notamment celles nécessaires au traitement de l'habitat dégradé sur le territoire de la Métropole AMP. Dans un premier temps, la SPLA-IN AMP a vocation à intervenir sur le centre-ville de Marseille dans le cadre d’une stratégie définie à l’échelle du projet partenarial d’aménagement (PPA) et du nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) Grand Centre-Ville de Marseille. Au travers de concessions d’aménagement signées avec la Métropole et l’établissement public d’aménagement Euroméditerranée (EPAEM), elle y assure la conduite des opérations d’aménagement permettant la restructuration de quatre îlots d’habitat dégradé situés dans les 1er et 3e arrondissements.

La stratégie d’intervention pour ces projets de requalification urbaine vise ainsi la mise en place de dispositifs tant incitatifs que coercitifs alliant :

  • l’accompagnement des propriétaires privés et des syndicats de copropriétaires pour la réhabilitation de leurs logements et immeubles ;
  • le recyclage de l’habitat privé dégradé, à travers l’acquisition d’immeubles, dégradés ou appartenant aux îlots à restructurer ;
  • la conduite de travaux d’aménagement d’espaces publics de proximité.
Publication rédigée par :Argouarc’h J., Durieux S. (Insee)
Publication rédigée par :Argouarc’h J., Durieux S. (Insee)

Sources

Cette étude s’appuie sur la source « Fidelimmo », une base de données sur les patrimoines immobiliers en 2017, constituée en rapprochant trois sources : les fichiers démographiques sur les logements et les individus (Fidéli)  ; les fichiers fonciers, dits « fichiers Majic » de la direction générale des Finances publiques et le registre du commerce et des sociétés (RCS). Elle porte sur l’ensemble des biens immobiliers situés en France et des ménages résidant en France. L’étude porte sur les logements de type habitation du parc privé possédés par des personnes physiques et/ou par l’intermédiaire d’une SCI à l’exclusion de ceux détenus par des particuliers vivant à l’étranger ou par des sociétés autres que des SCI. Au niveau national, ce champ couvre environ 86 % du parc privé de logements (77 % du parc total de logements).

Les données sur l’ensemble du parc de logements proviennent du recensement de la population 2017.

Définitions

La multipropriété est entendue comme la détention de droits de propriété sur plusieurs biens immobiliers, que ce droit soit total ou partiel. Un ménage multipropriétaire est un ménage dont les membres possèdent à eux tous au moins deux logements, en pleine propriété ou en nue-propriété, en nom propre ou par l’intermédiaire d’une société civile immobilière. Un logement peut être possédé par plusieurs ménages.

Un logement vacant est un logement d’habitation ayant des éléments de confort minimum (installation électrique, eau courante, équipements sanitaires…) mais qui est vide de meubles, ou avec un mobilier insuffisant pour en permettre l’habitation.

Une résidence secondaire est dans cette étude un logement pour lequel un ménage acquitte une taxe d’habitation à titre secondaire. Au sens fiscal, une résidence secondaire est un « local meublé, affecté à l’habitation et non occupé en permanence » et soumis à la taxe d’habitation.

Un ménage propriétaire est dit implanté à Marseille si ses membres détiennent, en tant que personnes physiques ou via une SCI, au moins un bien immobilier situé à Marseille.

Un ménage aisé est un ménage dont le niveau de vie est supérieur à 180 % du niveau de vie médian français, soit 3 109 euros mensuels par unité de consommation. En 2017, 10,6 % des ménages français sont aisés.

Pour en savoir plus

(1) Argouarc’h J., Durieux S., « Trois logements de particuliers sur quatre détenus par des ménages multipropriétaires », Insee Analyses Provence-Alpes-Côte d’Azur n° 125, mars 2024.

(2) André M., Arnold C., Meslin O., « 24 % des ménages détiennent 68 % des logements possédés par des particuliers », Insee Références, « France, Portrait Social », novembre 2021.

(3) André M., Meslin O., « Et pour quelques appartements de plus : Étude de la propriété immobilière des ménages et du profil redistributif de la taxe foncière », Insee, Documents de travail n° 2021-04, novembre 2021.

(4) Rapport Nicol « Ouvrir dans un nouvel ongletLa requalification du parc immobilier privé à Marseille », mai 2015.