Insee
Insee Première · Octobre 2023 · n° 1968
Insee PremièrePauvreté et territoires : davantage de jeunes et de locataires du parc social dans les grandes villes, plus de retraités parmi les pauvres dans le rural

Mathilde Gerardin (Insee)

Six profils de ménages pauvres rendent compte de la pluralité des situations de pauvreté. Ils se différencient selon la situation vis-à-vis de l’emploi, l’âge et le statut d’occupation du logement. Ils résident tous en majorité dans l’urbain, avec des répartitions géographiques différentes sur le territoire. Les ménages retraités pauvres habitent davantage dans le rural que l'ensemble des ménages pauvres. Ils représentent 27 % des ménages pauvres, mais seulement 18 % des personnes pauvres, car ils sont le plus souvent composés d'une personne seule. Les ménages insérés dans l’emploi mais percevant de faibles revenus du travail (18 % des ménages pauvres) sont en majeure partie des familles avec enfants et sont surreprésentés dans le quart nord-ouest et dans les anciennes régions Rhône-Alpes et Franche-Comté. Les moins de 30 ans non insérés dans l’emploi (11 %) résident en majorité seuls et sont relativement plus nombreux au sein des grandes villes étudiantes. Parmi les autres ménages pauvres non insérés dans l’emploi, les propriétaires (10 %) sont surreprésentés dans le rural et une part relativement élevée de leur revenu provient d’indemnités de chômage. Les locataires ont des revenus dépendant en grande partie des prestations sociales. Ceux du parc privé (17 %) sont surreprésentés autour de l’arc méditerranéen ; ceux du parc social (17 %), essentiellement des familles avec enfants, résident à 90 % dans l’urbain et sont relativement plus présents dans la moitié Nord.

La pauvreté monétaire en six profils sociodémographiques : une répartition inégale sur le territoire
Publication rédigée par :Mathilde Gerardin (Insee)

Des taux de pauvreté très disparates d’un territoire à l’autre

En 2020, un peu plus de 9 millions de personnes vivant dans un ménage en France métropolitaine sont en situation de pauvreté monétaire, d’après le dispositif géré par l’Insee sur les revenus localisés sociaux et fiscaux (Filosofi), soit 14,4 % de la population (source). Ces personnes vivent dans un ménage dont le est inférieur au . Selon cette source, la seule qui permet d’étudier les inégalités entre territoires mais qui ne couvre pas l’ensemble des revenus, ce seuil s’établit en 2020 à 1 120 euros par mois et par unité de consommation, soit un revenu disponible de 1 120 euros pour une personne vivant seule, 1 680 euros pour un couple sans enfant, et 2 350 euros pour un couple avec deux enfants de moins de 14 ans.

La pauvreté présente de fortes disparités selon les territoires. À l’échelle régionale, elle est plus présente dans les Hauts-de-France, dans les régions du sud de la France métropolitaine (Occitanie, Provence‑Alpes‑Côte d’Azur et Corse) et en Outre‑mer (figure 1) ; elle est moins fréquente à l’ouest du pays (Pays de la Loire, Bretagne). Au sein des régions, les disparités peuvent également être fortes entre départements. Ainsi, en Île-de-France, la part de personnes pauvres est la plus élevée de l’Hexagone en Seine‑Saint‑Denis (27,6 %), alors qu’elle est parmi les plus faibles dans les Yvelines (9,7 %). À l’échelle locale, la pauvreté est plus fréquente dans les territoires  : c’est particulièrement le cas dans les intercommunalités de Creil, Béziers, Maubeuge, Roissy, Lens‑Liévin, Perpignan, Nîmes ou Valenciennes, où plus d’une personne sur cinq est en situation de pauvreté.

Figure 1 – Taux de pauvreté par intercommunalité en 2020

Figure 1 – Taux de pauvreté par intercommunalité en 2020
Les données de cette carte sont disponibles dans le fichier en téléchargement.

Figure 1 – Taux de pauvreté par intercommunalité en 2020

  • Notes : Les données sont diffusées à l’échelle des intercommunalités, sauf pour la Métropole du Grand Paris (établissement public territorial) et pour la Guadeloupe, la Guyane et Mayotte (département). Les taux de pauvreté de la Guadeloupe, Guyane et Mayotte sont de 2017.
  • Lecture : En 2020, le taux de pauvreté au sein de la métropole de Toulouse s’élève à 15,9 %.
  • Champ : France, personnes appartenant à des ménages fiscaux en logement ordinaire dont le revenu disponible est positif ou nul.
  • Sources : Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-CCMSA, fichier localisé social et fiscal (Filosofi) 2020 ; Insee, enquête Budget de famille 2017 (pour la Guadeloupe, la Guyane et Mayotte).

Six profils de ménages pauvres

La pauvreté monétaire peut être liée à une variété de situations professionnelles et personnelles : faiblesse voire absence des revenus d’activité, faiblesse du niveau de retraite, montant des prestations sociales perçues, personne vivant seule, charges familiales, etc. Pour rendre compte de cette diversité, les ménages pauvres sont répartis dans cette étude en six catégories en fonction de leur situation sur le marché du travail, de leur âge et de leur statut d’occupation du logement (méthodes). Ces six profils de ménages pauvres ont été définis dans le cadre d’un travail partenarial avec la Délégation interministérielle à la prévention et à la lutte contre la pauvreté, dans le but d’analyser les disparités des situations de pauvreté selon les territoires.

La composition des ménages est une autre dimension comptant pour beaucoup dans la pauvreté, à la fois par la mutualisation possible des revenus, les économies d’échelle (notamment pour le logement), et par le nombre de personnes, en particulier le nombre d’enfants, intervenant dans le calcul du niveau de vie. Au sein de chacun des profils, la composition du ménage est donc mobilisée pour analyser les situations de pauvreté.

La situation vis-à-vis de l’emploi est le premier critère de différenciation retenu, en distinguant les retraités, les adultes insérés sur le marché du travail, et ceux d’âge actif qui ne le sont pas. Les ménages retraités (profil 1) représentent 27 % des ménages pauvres (figure 2). Il s’agit du profil le plus représenté parmi les ménages pauvres, ce qui s’explique en partie par le poids des retraités dans l’ensemble de la population. En proportion des personnes pauvres, le poids de ce profil est bien moins élevé (18 %). En effet, 64 % des ménages retraités pauvres sont constitués de personnes vivant seules, essentiellement des femmes de plus de 75 ans. Les personnes retraitées sont moins souvent pauvres : c’est le cas de 10,6 % d’entre elles, contre 14,4 % pour l’ensemble de la population.

Figure 2a – Répartition des ménages et des personnes en situation de pauvreté monétaire selon les six profils de pauvreté

en %
Figure 2a – Répartition des ménages et des personnes en situation de pauvreté monétaire selon les six profils de pauvreté (en %) - Lecture : Le profil des retraités pauvres représente 27,3 % des ménages pauvres et 18,5 % des personnes pauvres.
Profil de ménages pauvres Part dans les ménages pauvres Part dans les personnes pauvres
Profil 1 - Retraités 27,3 18,5
Profil 2 - Insérés sur le marché du travail 18,3 25,1
Profil 3 - Non insérés de moins de 30 ans 10,5 7,8
Profil 4 - Non insérés propriétaires 9,8 10,2
Profil 5 - Non insérés locataires du privé 16,9 16,7
Profil 6 - Non insérés locataires du social 17,2 21,7
Ensemble 100,0 100,0
  • Note : Certains profils de pauvreté ont des poids sensiblement différents au sein des ménages pauvres et des personnes pauvres.
  • Lecture : Le profil des retraités pauvres représente 27,3 % des ménages pauvres et 18,5 % des personnes pauvres.
  • Champ : France métropolitaine, La Réunion, Martinique ; personnes appartenant à des ménages fiscaux en logement ordinaire dont le revenu disponible est positif ou nul.
  • Source : Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-CCMSA, fichier localisé social et fiscal (Filosofi) 2020.

Figure 2a – Répartition des ménages en situation de pauvreté monétaire selon les six profils de pauvreté

  • Note : Certains profils de pauvreté ont des poids sensiblement différents au sein des ménages pauvres et des personnes pauvres.
  • Lecture : Le profil des retraités pauvres représente 27,3 % des ménages pauvres.
  • Champ : France métropolitaine, La Réunion, Martinique ; personnes appartenant à des ménages fiscaux en logement ordinaire dont le revenu disponible est positif ou nul.
  • Source : Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-CCMSA, fichier localisé social et fiscal (Filosofi) 2020.

Le profil des ménages « insérés sur le marché du travail » (profil 2) correspond dans cette étude aux ménages percevant des revenus du travail (salarié ou non salarié) égaux à au moins 0,5 Smic par adulte. Ce profil représente 18 % des ménages pauvres, mais 25 % des personnes pauvres du fait de nombreuses familles avec enfants, ce qui engendre des charges familiales élevées. Avec près de 40 % de couples avec enfants, dont une part importante de familles de trois enfants ou plus, cette catégorie regroupe ainsi près du tiers des enfants en situation de pauvreté.

Si les revenus du travail perçus sont inférieurs à 0,5 Smic par adulte, les ménages pauvres d’âge actif sont qualifiés de « non insérés dans l’emploi ». Parmi eux, les ménages de moins de 30 ans (profil 3) représentent un peu plus d’un ménage pauvre sur dix, essentiellement des personnes vivant seules. Cette population regroupe les étudiants déclarant leurs revenus indépendamment de leurs parents et les jeunes sans emploi ou en phase d’insertion professionnelle, qui font généralement face à des situations d’emploi intermittent ou peu rémunéré.

Au sein des ménages pauvres de plus de 30 ans (hors retraités) non insérés sur le marché du travail, le statut d’occupation du logement conduit à distinguer les trois derniers profils : les propriétaires (profil 4 ; 10 % des ménages et des personnes pauvres), les locataires du parc privé (profil 5 ; 17 % des ménages et des personnes pauvres) et les locataires du parc social (profil 6 ; 17 % des ménages pauvres et 22 % des personnes pauvres). Cette approche permet d’aller au-delà de la seule dimension des revenus et de traduire des écarts de conditions de vie. En effet, le statut d’occupation du logement, fortement lié au lieu de résidence, est à l’origine de différences dans les dépenses de logement, dans l’accès aux transports, à l’emploi ou aux équipements. Par exemple, les locataires dans le parc privé doivent faire face au paiement d’un loyer au prix du marché, même s’ils peuvent bénéficier d’aides au logement, alors que les locataires du parc social bénéficient d’un loyer généralement inférieur au prix du marché. Quant aux propriétaires, ils ne paient pas de loyer mais peuvent avoir à faire face à des charges de remboursement d’emprunts ou à des travaux d’entretien et de rénovation de leur logement. Le profil des locataires du parc social comprend près d’un tiers de familles monoparentales et rassemble ainsi le plus d’enfants (environ 30 % des enfants pauvres) après le profil des ménages insérés dans l’emploi (profil 2). Le profil des locataires du privé regroupe 19 % des enfants pauvres, vivant avec un ou deux parents. Celui des propriétaires recouvre plutôt des personnes vivant en couple, avec au plus deux enfants.

Les ménages pauvres insérés dans l’emploi ou à la retraite ont des revenus plus élevés

La moitié des ménages pauvres insérés sur le marché du travail ont un niveau de vie supérieur à 998 euros mensuels, soit le niveau de vie médian le plus élevé des six profils de pauvreté décrits. L’ pour ce profil est de 11 %, contre 20 % pour l’ensemble des ménages pauvres. Les revenus de ce profil dépendent très majoritairement de l’activité professionnelle, salariée ou non, et relativement peu de prestations sociales, en dehors du volet familial. Les retraités pauvres constituent le deuxième profil ayant le niveau de vie médian le plus élevé (945 euros mensuels). Leur revenu disponible repose à hauteur de 79 % sur les pensions, retraites et rentes, et 40 % d’entre eux sont propriétaires et donc sans loyer à payer.

Parmi les ménages pauvres de plus de 30 ans non insérés dans l’emploi, les locataires du parc social ont un niveau de vie médian légèrement plus élevé que ceux du parc privé (848 euros contre 807 euros). Ces deux profils sont très dépendants des transferts sociaux. 67 % du revenu disponible des locataires du parc social et 59 % de celui des locataires du parc privé sont composés de prestations sociales ; en particulier, les minimas sociaux représentent environ 30 % du revenu disponible de ces deux profils. Le niveau de vie médian des ménages pauvres propriétaires non insérés dans l’emploi est plus faible (729 euros) que celui des locataires. C’est pour ces ménages propriétaires que l’intensité de la pauvreté est la plus élevée (35 %). La moitié de leur revenu disponible repose sur des revenus d’activité (revenu du travail pour 30 % et indemnités de chômage pour 20 %), traduisant une alternance de périodes en emploi et sans emploi pour ce profil rassemblant par ailleurs une part relativement plus élevée d’indépendants.

Le niveau de vie médian des ménages pauvres de moins de 30 ans non insérés dans l’emploi est de 798 euros, certains de ces jeunes pouvant cependant être aidés par leurs parents. Le revenu de ces ménages, en majorité locataires du parc privé, dépend relativement plus des prestations logement que le reste des ménages pauvres (18 % de leur revenu disponible).

Les ménages pauvres résident en grande majorité dans l’urbain, en particulier les jeunes et les locataires du parc social

La pauvreté monétaire est plus fréquente dans les espaces les plus denses : 73 % des ménages pauvres vivent dans une , contre 67 % des ménages non pauvres (figure 3). Cependant, cette concentration des ménages pauvres en milieu urbain est d’intensité variable selon les profils. Elle est très nette pour les ménages non insérés sur le marché du travail ayant moins de 30 ans (profil 3) ou ayant plus de 30 ans et locataires du parc social (profil 6). À l’inverse, les profils de retraités (profil 1) et de propriétaires (profil 4) se retrouvent davantage dans que les autres. Les différences de niveaux de vie entre urbain et rural s’accompagnent de différences dans les structures des dépenses, entraînant ainsi des conditions de vie différentes. Par exemple, vivre dans le rural diminue le coût du logement, peut permettre des formes d’auto-consommation mais peut aussi occasionner des coûts de transport plus élevés [Ouvrir dans un nouvel ongletLe Hir, Bono, 2023].

Figure 3 – Lieu de résidence selon le profil de pauvreté

en %
Figure 3 – Lieu de résidence selon le profil de pauvreté (en %) - Lecture : 32,9 % des ménages appartenant au profil des retraités pauvres résident dans une commune urbaine dense.
Profil de ménages pauvres Urbain dense Urbain intermédiaire Rural périurbain Rural non périurbain
Ensemble des ménages non pauvres 37,3 29,4 19,4 13,9
Ensemble des ménages pauvres 44,1 29,3 12,5 14,0
Profil 1 - Retraités 32,9 31,0 16,1 20,0
Profil 2 - Insérés sur le marché du travail 43,9 27,6 14,9 13,6
Profil 3 - Non insérés de moins de 30 ans 61,1 25,6 6,6 6,8
Profil 4 - Non insérés propriétaires 29,2 27,4 20,1 23,3
Profil 5 - Non insérés locataires du privé 45,7 28,6 11,8 13,8
Profil 6 - Non insérés locataires du social 58,7 32,5 4,4 4,4
  • Lecture : 32,9 % des ménages appartenant au profil des retraités pauvres résident dans une commune urbaine dense.
  • Champ : France métropolitaine, La Réunion, Martinique ; personnes appartenant à des ménages fiscaux en logement ordinaire dont le revenu disponible est positif ou nul.
  • Source : Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-CCMSA, fichier localisé social et fiscal (Filosofi) 2020.

Figure 3 – Lieu de résidence selon le profil de pauvreté

  • Lecture : 32,9 % des ménages appartenant au profil des retraités pauvres résident dans une commune urbaine dense.
  • Champ : France métropolitaine, La Réunion, Martinique ; personnes appartenant à des ménages fiscaux en logement ordinaire dont le revenu disponible est positif ou nul.
  • Source : Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-CCMSA, fichier localisé social et fiscal (Filosofi) 2020.

87 % des ménages pauvres non insérés dans l’emploi de moins de 30 ans (profil 3) résident dans une commune urbaine ; c’est le cas pour 91 % des ménages non insérés dans l’emploi et locataires du parc social (profil 6). Plus précisément, environ trois ménages sur cinq appartenant à ces deux profils vivent dans une commune urbaine dense.

En effet, les ménages pauvres de moins de 30 ans étant pour la plupart des personnes vivant seules, ils occupent des petits logements situés principalement dans les grandes villes, celles-ci centralisant la plupart des équipements et services auxquels recourent ces ménages, notamment les lieux de formation. Les grandes villes étudiantes (Toulouse, Poitiers, Rennes ou Nancy notamment) ont ainsi la part la plus élevée de ménages pauvres appartenant à ce profil. Les ménages pauvres locataires du parc social sont également présents principalement dans l’urbain dense, car les HLM sont essentiellement situés dans ces territoires. Plus précisément, ils sont surreprésentés dans les territoires denses le long de la façade de la Manche, et dans le Nord et l’Est (figure 4), tandis que les ménages pauvres non insérés dans l’emploi et locataires du parc privé sont proportionnellement plus nombreux dans le Sud, autour de l’arc méditerranéen. Cette géographie coïncide assez naturellement avec celle des logements sociaux : par exemple, 24 % des logements de la Marne sont des logements sociaux, contre tout juste 10 % dans l’Hérault.

Figure 4a – Part des ménages retraités parmi les ménages pauvres en 2020

Figure 4a – Part des ménages retraités parmi les ménages pauvres en 2020
Les données de cette carte sont disponibles dans le fichier en téléchargement.

Figure 4a – Part des ménages retraités parmi les ménages pauvres en 2020

  • Notes : Les données sont diffusées à l’échelle des intercommunalités, sauf pour la Métropole du Grand Paris (établissement public territorial).
  • Lecture : Plus de 40 % des ménages pauvres de la communauté de communes du Périgord Nontronnais sont des ménages retraités.
  • Champ : France métropolitaine, La Réunion, Martinique ; personnes appartenant à des ménages fiscaux en logement ordinaire dont le revenu disponible est positif ou nul.
  • Source : Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-CCMSA, fichier localisé social et fiscal (Filosofi) 2020.

Les ménages pauvres insérés dans l’emploi sont surreprésentés dans le quart Nord-Ouest et dans les anciennes régions Rhône-Alpes et Franche-Comté

Les ménages pauvres insérés sur le marché du travail (profil 2) résident à 72 % dans une commune urbaine, soit une proportion proche de celle de l’ensemble des ménages pauvres. Les ménages de ce profil sont surreprésentés le long d’un axe allant de Nantes à Reims et au nord de celui-ci ainsi qu’à l’est de Lyon. Dans ces territoires, ce profil est relativement plus présent aux alentours des grandes villes qu’en leur sein. C’est par exemple le cas à Lyon, où la métropole compte 19 % de ménages pauvres appartenant à ce profil, alors que cette proportion dépasse 25 % dans la quasi-totalité des intercommunalités alentours.

Les ménages pauvres retraités ou non insérés dans l’emploi et propriétaires de leur logement résident plus fréquemment dans le rural

43 % des ménages pauvres non insérés dans l’emploi et propriétaires de leur logement résident dans le rural, contre 27 % pour l’ensemble des ménages pauvres. Dans le détail, 23 % des ménages de ce profil résident dans le (jusqu’à 40 % dans les régions les plus rurales comme la Nouvelle-Aquitaine, la Bretagne, la Bourgogne‑Franche‑Comté et la Corse) et 20 % dans le . Ces ménages sont surreprésentés dans le centre de la Bretagne, dans le Sud autour de Rodez et dans le Massif central, notamment au nord de celui-ci, sur l’axe allant de Limoges à Nevers où environ 80 % de l’ensemble des ménages sont propriétaires de leur résidence principale. Ce profil est aussi surreprésenté dans certains territoires, comme dans le Pays de Gex ou le Verdon, bien que le pourcentage de ménages propriétaires n’y soit pas particulièrement élevé.

Les retraités pauvres résident également plus fréquemment dans une commune rurale, à 36 %, avec 20 % d’entre eux vivant dans une commune rurale non périurbaine ; cette part avoisine 40 % en Nouvelle‑Aquitaine et est plus élevée encore dans les départements les plus ruraux (Creuse, Lozère). Les ménages retraités pauvres à l’ouest et au sud du Massif central ainsi qu’en Corse sont surreprésentés du fait de la forte présence de personnes de 65 ans ou plus dans ces territoires.

Publication rédigée par :Mathilde Gerardin (Insee)

Méthodes

Les six profils de ménages pauvres ont été définis dans le cadre d’un travail partenarial avec la Délégation interministérielle à la prévention et à la lutte contre la pauvreté, qui vise à analyser les disparités des situations de pauvreté selon les territoires. Les ménages en situation de pauvreté monétaire sont répartis en six catégories, selon l’insertion dans l’emploi, l’âge et les conditions d’occupation du logement. Sont considérés comme « retraités », les ménages dont la personne de référence a plus de 75 ans, ou entre 50 et 74 ans avec des revenus déclarés principalement issus des pensions, retraites et rentes. Pour être qualifié d’« inséré sur le marché du travail », un ménage doit percevoir des salaires, traitements ou revenus d’activité non salariaux au moins égaux à 0,5 Smic par adulte (14 623 euros nets annuels pour 35 heures par semaine en 2020).

Cette étude nationale ainsi que les études régionales associées fournissent des éléments de diagnostic pour la nouvelle génération de pactes des solidarités, déclinaisons locales du Pacte des solidarités. Les six profils permettent d’aiguiller les politiques publiques de lutte contre la pauvreté, l’exclusion sociale ou la précarité. Par exemple, la lutte contre le non-recours aux droits, et en particulier à la prime d’activité, est un enjeu pour les ménages pauvres mais insérés dans l’emploi ; le contrat d’engagement jeune cible les moins de 30 ans non insérés dans l’emploi ; les actions de lutte contre la précarité énergétique et de rénovation du bâtiment ciblent les propriétaires ayant des faibles revenus ; les dispositifs de soutien à la parentalité et solutions de garde d’enfants, comme les crèches à vocation d’insertion professionnelle, ciblent les familles nombreuses et monoparentales, fréquemment locataires du parc social.

Source

La source Filosofi est issue d’un rapprochement de fichiers administratifs exhaustifs d’origine fiscale (comme les déclarations d’impôt sur le revenu et de taxe d’habitation) et sociale (comme les fichiers détaillant les versements de prestations sociales effectués par la Caisse nationale des allocations familiales et d’autres organismes). Cette source est mobilisée pour mesurer les revenus, la pauvreté et les inégalités en France métropolitaine, en Martinique et à La Réunion à un niveau géographique fin. Filosofi ne couvre toutefois pas certains revenus (revenus exonérés d’impôt ou aides exceptionnelles par exemple).

Publication rédigée par :Mathilde Gerardin (Insee)

Définitions

Le niveau de vie est égal au revenu disponible du ménage divisé par le nombre d’unités de consommation (UC). Le niveau de vie est donc le même pour tous les individus d’un même ménage. Le niveau de vie correspond à ce qu’Eurostat nomme « revenu disponible équivalent ». Les unités de consommation sont généralement calculées selon l’échelle d’équivalence dite de l’OCDE modifiée qui attribue 1 UC au premier adulte du ménage, 0,5 UC aux autres personnes de 14 ans ou plus et 0,3 UC aux enfants de moins de 14 ans. Cette échelle est utilisée dans cette publication.

Un individu (ou un ménage) est considéré comme pauvre lorsqu’il vit dans un ménage dont le niveau de vie est inférieur au seuil de pauvreté. En France et en Europe, le seuil est le plus souvent fixé à 60 % du niveau de vie médian. Ce seuil est utilisé pour cette publication.

L'intensité de la pauvreté permet d’apprécier à quel point le niveau de vie de la population pauvre est éloigné du seuil de pauvreté. Comme Eurostat, l’Insee mesure cet indicateur comme l'écart relatif entre le niveau de vie médian de la population pauvre et le seuil de pauvreté. Plus cet indicateur est élevé et plus la pauvreté est dite intense, au sens où le niveau de vie des plus pauvres est très inférieur au seuil de pauvreté. Formellement, il est calculé de la manière suivante : (seuil de pauvreté - niveau de vie médian de la population pauvre) / seuil de pauvreté.

En s’appuyant sur la distribution de la population selon le découpage du territoire en carreaux de 1 km de côté, la grille communale de densité permet de classer les communes en fonction du nombre d’habitants et de la répartition de ces habitants sur leur territoire. Plus la population est concentrée et nombreuse, plus la commune est considérée comme dense. Dans sa version à trois niveaux, la grille communale de densité définit trois types de communes : les communes urbaines densément peuplées, les communes urbaines de densité intermédiaire et les communes rurales. Au sein du rural, le croisement avec la proximité d’un pôle d’emploi via le zonage en aires d’attraction des villes permet de distinguer les communes rurales périurbaines, situées dans une aire d’attraction des villes de plus de 50 000 habitants, des communes rurales non périurbaines, situées hors d’une aire d’attraction des villes ou dans une aire de moins de 50 000 habitants.

Pour en savoir plus

Publications régionales associées.

Guillaneuf J., Picard S., Rousset A., « Après 75 ans, des niveaux de vie moins élevés mais un taux de pauvreté inférieur à la moyenne de la population », Insee Première n° 1940, mars 2023.

Le Hir B., Bono P.-H., « Ouvrir dans un nouvel ongletDépenses de logement et de transport : quels arbitrages ? », La note d’analyse n° 117, France Stratégie, février 2023.

Garnero M., Guillaneuf J., « En 2020, une mesure de la pauvreté compliquée par la crise sanitaire », Insee Analyses n° 77, octobre 2022.

Audoux L., Prévot P., « La grande pauvreté bien plus fréquente et beaucoup plus intense dans les DOM », Insee Focus n° 270, juillet 2022.

Flachère M., Lardellier R., « Un travailleur sur dix reste pauvre malgré les autres ressources de son ménage », Insee Analyses Occitanie n° 116, juin 2022.