Insee Analyses Guadeloupe ·
Mars 2022 · n° 56
Une amélioration sensible de l’activité économique guadeloupéenne Comptes définitifs 2018
Après 3 ans d’un ralentissement progressif, marqué notamment par les conséquences du passage de l’ouragan Maria en 2017, la croissance économique de la Guadeloupe rebondit en 2018 en valeur (+ 2,5 %). En volume, son évolution est plus heurtée, (+ 1,7 %), l’inflation oscillant entre – 0,1 % et + 1,2 % entre 2014 et 2018. La croissance en volume du produit intérieur brut (PIB) est ainsi de seulement 0,2 point inférieur à celle de la France. Elle est soutenue par la hausse de la demande finale, consommation finale et investissements en tête. Elle est néanmoins gênée par le déficit des échanges extérieurs qui se creuse, en raison du renchérissement du prix de l’énergie importée et des conditions climatiques qui ont perturbé la production agricole et agroalimentaire.
- La consommation finale contribue à l’accélération de la croissance
- La hausse du pouvoir d’achat stimule la consommation
- L’investissement renforce la croissance
- La rentabilité des entreprises est globalement stable, mais diffère selon les branches d’activité
- Le rebond de la croissance se solde par une détérioration de la balance commerciale
- Le tourisme en Guadeloupe bénéficie d’un contexte favorable
En 2018, la croissance du Produit Intérieur Brut (PIB) de la Guadeloupe s’élève à 2,5 % en valeur et à + 1,7 % en volume, déduction faite de l’effet prix. Elle se rapproche du rythme de croissance en volume de la France (+ 1,9 %), alors qu’elle s’en éloignait en 2017 (respectivement + 0,7 % pour la première et + 2,3 % pour la seconde). Le Pib s’élève à 9 milliards d’euros (figure 1).
Ce résultat est dû à une nette amélioration de la production, qui augmente en valeur de + 3,7 % en 2018 (après + 0,7 en 2017 et – 0,1 % en 2016), notamment dans les services marchands (+ 3,4 % après + 1 %) (figure 2). Ils représentent 28,6 % de la production et contribuent pour 1 point (après + 0,3 en 2017) à la hausse de la production totale. A production industrielle augmente de + 8 % (après – 2 %) et , bien qu’elle ne pèse que 13,3 % dans le total, elle contribue elle aussi pour 1 point (après – 0,3 en 2017) à la hausse de la production, à l’instar des services marchands, qui profitent des débouchés que leur procure l’embellie de l’économie.
La consommation intermédiaire de l’ensemble des branches (biens et services transformés ou entièrement consommés au cours du processus de production) augmente de + 5 % en valeur (après + 0,1 % en 2017), davantage que la production, sans toutefois nuire à la croissance de la valeur ajoutée. En effet, elle suit la même dynamique de la production des branches.
Poussée par la hausse des prix des matières premières et de l’énergie, la consommation intermédiaire de la branche agricole est en hausse (+ 2,4 % après – 7,6 % en 2017), alors que sa production diminue (– 2,7 % après – 2,8 %). De même, la hausse de la consommation intermédiaire du transport aérien (+ 7,2 % après + 8,2 % en 2017) est plus rapide que celle de sa production (+ 2,2 % après + 3,3 % en 2017). En conséquence, la valeur ajoutée de ces deux branches chute respectivement de – 8,4 % et – 9,8 %. La valeur ajoutée de l’industrie agroalimentaire est également en baisse (– 13,5 %). Dans toutes les autres branches la valeur ajoutée s’est nettement améliorée.
C’est notamment le cas de la branche construction, dont la production se redresse enfin (+ 8,7 %), de même que sa consommation intermédiaire (+ 10,8 %), après avoir toutes deux diminué continuellement depuis 2014.
Le secteur du BTP profite du démarrage de plusieurs gros chantiers, attestant le regain des investissements des agents privés (+ 9,4 % après + 5,9 %) et publics (+ 2,7 % après – 4,4 %) et de la consommation finale des ménages en produits de construction (travaux d’entretiens et réparations), qui augmente de 10 % (après – 5,5 %).
tableauFigure 1 – Les principaux agrégats de la demande en Guadeloupe
2007 | 2008 | 2009 | 2010 | 2011 | 2012 | 2013 | 2014 | 2015 | 2016 | 2017 | 2018 | Évolution 2018/2017 | |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Produit Intérieur Brut | 7 446 | 7 824 | 7 468 | 7 800 | 8 068 | 8 224 | 8 246 | 8 416 | 8 573 | 8 712 | 8 803 | 9 025 | 2,5 |
Consommation finale | 7 772 | 8 316 | 7 795 | 8 122 | 8 403 | 8 550 | 8 592 | 8 731 | 8 864 | 8 896 | 9 072 | 9 293 | 2,4 |
- dont ménages | 4 608 | 5 012 | 4 398 | 4 553 | 4 682 | 4 754 | 4 753 | 4 810 | 4 825 | 4 805 | 4 857 | 4 987 | 2,7 |
- dont APU* | 3 164 | 3 303 | 3 397 | 3 569 | 3 721 | 3 796 | 3 839 | 3 921 | 4 039 | 4 091 | 4 215 | 4 306 | 2,2 |
Investissements** | 1 632 | 1 703 | 1 444 | 1 644 | 1 705 | 1 619 | 1 589 | 1 551 | 1 483 | 1 418 | 1 457 | 1 562 | 7,2 |
Variations de stocks | 75 | 43 | 13 | -55 | -50 | -19 | 25 | -36 | -22 | 22 | 14 | 27 | |
Importations | 2 891 | 3 059 | 2 479 | 2 685 | 2 862 | 2 817 | 2 936 | 2 795 | 2 802 | 2 735 | 2 996 | 3 170 | 5,8 |
Exportations | 858 | 821 | 695 | 774 | 872 | 891 | 976 | 965 | 1 050 | 1 111 | 1 256 | 1 313 | 4,5 |
- * Administrations publiques (yc Institut Sans But Lucratif au Service des Ménages).
- ** inclus Formation Brute de Capital Fixe et Acquisition d'Objets de Valeur.
- Source : Insee, comptes régionaux définitifs de la Guadeloupe, base 2014.
La consommation finale contribue à l’accélération de la croissance
La consommation finale progresse de 2,4 % en valeur. Compte tenu de l’inflation, qui augmente de + 1,2 %, elle augmente en volume de 1,5 %, ce qui équivaut à une contribution d’1,5 point à la croissance du PIB en volume en 2018. La consommation des ménages s’accélère, passant à 1,6 % après + 0,3 % en 2017, alors qu’elle était quasi nulle depuis 2015.
L’augmentation de la consommation de biens manufacturés (6,5 %) en valeur est le principal contributeur (+ 1,6 point) à cette embellie. Les achats de véhicules automobiles (+ 7,9 %), de textile et de cuir (+ 7,8 %), produits essentiellement importés, sont ceux qui augmentent le plus, ce qui est cohérent avec la dégradation du solde extérieur constaté. L’augmentation de la consommation de biens issus de l’industrie extractive, l’énergie, l’eau et la gestion des déchets contribue quant à elle de 1 point à l’évolution de la consommation des ménages en valeur, au travers notamment de la consommation d’électricité (+ 12,6 %). A cela s’ajoute le renchérissement du prix du carburant (+ 8,2 %), suite aux réductions de production à l’initiative de l’alliance OPEP+, pour contrer la baisse continue des prix du baril. Le prix spot (instantané) du Brent est ainsi passé de 110 $USD fin 2012 à moins de 40 $USD début 2016 pour finir à 60 $USD le baril en fin 2018.
La dépense publique hors investissement, qui représente 46 % de la consommation finale en volume, ralentit. Elle augmente ainsi de 1,3 % en 2018, après + 1,7 % en 2017. Elle continue néanmoins à soutenir nettement la croissance réelle (+ 0,6 point), plus basse de seulement 0,2 point que sa contribution moyenne (+ 0,8 point) sur les 5 dernières années. À titre de comparaison, la consommation finale des ménages a contribué sur la même période de + 0,3 point en moyenne seulement.
La hausse de la consommation des administrations publiques est plus forte dans la santé et l’action sociale (4,3 %) que dans les autres services rendus par les administrations. C’est en particulier le cas dans l’hébergement médico-social et l’action sociale sans hébergement (8,5 %) . Cette différence de comportement peut s’expliquer par l’accroissement des besoins dans ce domaine, du fait de la part croissante des personnes de plus de 65 ans au sein de la population guadeloupéenne.
tableauFigure 2 – Contributions à la production des branches d’activité
2015 | 2016 | 2017 | 2018 | |
---|---|---|---|---|
Services non marchands | 0,7 | 0,6 | 0,9 | 0,6 |
Services marchands | 0,6 | -0,3 | 0,3 | 1,0 |
Transport | 0,3 | 0,2 | 0,3 | 0,2 |
Commerce | 0,5 | 0,1 | 0,1 | 0,4 |
Construction | -0,8 | -0,4 | -0,6 | 0,6 |
Industrie | -0,2 | -0,4 | -0,3 | 1,0 |
Agriculture | 0,0 | 0,1 | -0,1 | -0,1 |
Production | 1,2 | -0,1 | 0,7 | 3,7 |
- Source : Insee, comptes régionaux définitifs de la Guadeloupe, base 2014.
La hausse du pouvoir d’achat stimule la consommation
Si la consommation finale des ménages en volume contribue davantage à la croissance au sein des deux composantes de la consommation finale, c’est grâce à une amélioration continue du pouvoir d’achat par personne, qui progresse de + 0,8 % en moyenne par an depuis 5 ans (figure 3).
En effet, après avoir baissé de 0,2 % en 2016, le revenu disponible brut (RDB) des ménages guadeloupéens augmente consécutivement de 0,9 % en 2017 et 1,0 % en 2018. La rémunération des salariés progresse de 3,4 % en un an (après + 2,2 % en 2017). Elle est la principale contributrice au RDB avec + 2,7 points (après + 1,7 point). Les revenus de la propriété (résultats des entreprises individuelles et intérêts reçus et versés notamment) diminuent de – 4,3 % (après – 0,3 %), et pèsent sur la croissance du RDB de – 1 point (après – 0,2). Comme les revenus de la propriété, le solde net des transferts courants des ménages (prestations sociales nettes des cotisations) pèse lui aussi sur le RDB et freine sa croissance de – 0,7 point (après – 0,6 en 2017).
Parallèlement, l’indice des prix à la consommation (inflation) poursuit sa hausse (+ 1,2 % après 0,8 % en 2017), du fait notamment de celle des prix du pétrole. Le pouvoir d’achat des ménages, qui correspond au RDB corrigé de l’inflation, baisse par conséquent de – 0,2 %, après avoir été stable depuis 2016.
Pourtant, compte tenu de la baisse de la population ( – 0,9 %), le pouvoir d’achat par habitant, augmente de + 0,6 % en 2018, un peu moins qu’en 2016 et 2017, où il avait augmenté de + 0,9 %. La consommation des ménages en volume (+ 1,5 %) augmente donc plus vite que le pouvoir d’achat total et par habitant. Par conséquent, le taux d’épargne des ménages diminue, passant de 25,7 % à 24,4 % (figure 4).
tableauFigure 3 – Évolution du PIB guadeloupéen en volume et contribution de chacune des composantes de la demande
Consommation finale | Investissements | Solde du commerce extérieur | Variations de stock | PIB Guadeloupe nominal | PIB Guadeloupe réel | PIB France entière | |
---|---|---|---|---|---|---|---|
2012 | 0,6 | -1,4 | 1,4 | 0,4 | 1,9 | 1,1 | 0,3 |
2013 | 0,0 | -0,4 | -0,5 | 0,6 | 0,3 | -0,3 | 0,6 |
2014 | 1,6 | -0,5 | 1,3 | -0,7 | 2,1 | 1,8 | 1,0 |
2015 | 1,4 | -0,8 | 0,5 | 0,2 | 1,9 | 1,2 | 1,1 |
2016 | 0,5 | -0,8 | 1,3 | 0,4 | 1,6 | 1,4 | 1,1 |
2017 | 0,9 | 0,2 | -0,3 | -0,2 | 1,0 | 0,7 | 2,3 |
2018 | 1,5 | 1,0 | -0,9 | 0,2 | 2,5 | 1,7 | 1,9 |
- Source : Insee, comptes régionaux définitifs de la Guadeloupe, base 2014.
graphiqueFigure 3 – Évolution du PIB guadeloupéen en volume et contribution de chacune des composantes de la demande
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- Source : Insee, comptes régionaux définitifs de la Guadeloupe, base 2014.
L’investissement renforce la croissance
La hausse de la consommation des ménages, en stimulant la croissance, encourage les entreprises à investir. Ainsi, en 2018, la formation brute de capital fixe (FBCF) globale contribue d’1 point à la croissance du PIB en volume. Elle augmente de + 5,7 % (après + 1,4 % en 2017), tandis que sacoissance ralentit en France entière (+ 2,8 % après + 4,7 %).
Cette embellie est due aux investissements publics comme privés. L’investissement des entreprises augmente de 18 % en valeur, après + 6,9 % en 2017. Le projet Royal Key dans la baie du Moule, la construction de l’hôtel Transatlantique à proximité du Mémorial Acte de Pointe-à-Pitre et la rénovation du Club Med à Sainte-Anne illustrent cette dynamique. Parallèlement, l’investissement public se redresse grâce à la commande publique qui augmente de + 2,7 % en valeur, après des baisses successives en 2017 et 2016 (respectivement de – 4,4 % et – 26,0 %). Cette hausse coïncide avec le début des travaux d’extension de l’aéroport à l’initiative de Guadeloupe Pôle Caraïbes et le démarrage de la construction du nouveau centre hospitalier universitaire (CHU) aux Abymes. Ces deux chantiers ont un impact sur le nombre de créations d’entreprises également. Celui-ci est en hausse de 12 %, avec près d’un tiers de ces nouvelles entreprises implantées dans les communes de Cap Excellence.
L’investissement des ménages, en revanche, est en retrait de 1,6 % en valeur, après avoir augmenté de + 4,6 % en 2017. Cette inflexion est cohérente avec la baisse des permis de construire, leur nombre diminue pour la deuxième année consécutive (– 0,7 %).
tableauFigure 4 – Consommation, revenu et épargne des ménages
Consommation des ménages | Revenu Disponible Brut | Taux d'épargne GP (en %) | |
---|---|---|---|
2012 | 4 754 | 6 137 | 22,5 |
2013 | 4 753 | 6 242 | 23,9 |
2014 | 4 810 | 6 474 | 25,7 |
2015 | 4 825 | 6 491 | 25,7 |
2016 | 4 805 | 6 479 | 25,8 |
2017 | 4 857 | 6 535 | 25,7 |
2018 | 4 987 | 6 597 | 24,4 |
- Source : Insee, comptes régionaux définitifs de la Guadeloupe, base 2014.
graphiqueFigure 4 – Consommation, revenu et épargne des ménages
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- Source : Insee, comptes régionaux définitifs de la Guadeloupe, base 2014.
tableauFigure 5 – Investissement par secteurs institutionnels
Investissement en niveau (millions d'€) | Investissement base 100 en 2011 | |||||||
---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Sociétés financières et non financières | Ménages yc Entrepreneurs Individuels | Administrations yc Instituts sans but lucratif au service des ménages | Total investissement | Sociétés financières et non financières | Ménages yc Entrepreneurs Individuels | Administrations yc Instituts sans but lucratif au service des ménages | Total Investissement | |
1996 | 468 | 318 | 239 | 1 025 | 69,7 | 62,1 | 45,7 | 60,1 |
1997 | 580 | 319 | 196 | 1 095 | 86,4 | 62,3 | 37,6 | 64,2 |
1998 | 632 | 272 | 229 | 1 132 | 94,1 | 53,2 | 43,8 | 66,4 |
1999 | 607 | 246 | 211 | 1 064 | 90,4 | 48,2 | 40,4 | 62,4 |
2000 | 706 | 259 | 234 | 1 198 | 105,1 | 50,6 | 44,7 | 70,3 |
2001 | 707 | 285 | 241 | 1 232 | 105,2 | 55,7 | 46,1 | 72,3 |
2002 | 674 | 300 | 283 | 1 257 | 100,3 | 58,7 | 54,2 | 73,7 |
2003 | 833 | 289 | 296 | 1 418 | 124,0 | 56,5 | 56,6 | 83,1 |
2004 | 838 | 257 | 316 | 1 411 | 124,8 | 50,3 | 60,6 | 82,8 |
2005 | 844 | 335 | 315 | 1 494 | 125,6 | 65,5 | 60,4 | 87,6 |
2006 | 788 | 315 | 423 | 1 526 | 117,4 | 61,6 | 80,9 | 89,5 |
2007 | 875 | 359 | 398 | 1 632 | 130,3 | 70,1 | 76,3 | 95,7 |
2008 | 811 | 386 | 506 | 1 703 | 120,8 | 75,4 | 96,9 | 99,9 |
2009 | 659 | 383 | 402 | 1 443 | 98,1 | 74,8 | 77,0 | 84,6 |
2010 | 720 | 494 | 429 | 1 644 | 107,2 | 96,7 | 82,2 | 96,4 |
2011 | 672 | 511 | 522 | 1 705 | 100,0 | 100,0 | 100,0 | 100,0 |
2012 | 594 | 495 | 530 | 1 619 | 88,5 | 96,8 | 101,4 | 94,9 |
2013 | 536 | 472 | 577 | 1 585 | 79,8 | 92,2 | 110,6 | 92,9 |
2014 | 469 | 474 | 587 | 1 529 | 69,8 | 92,7 | 112,3 | 89,7 |
2015 | 480 | 404 | 576 | 1 460 | 71,5 | 79,0 | 110,3 | 85,6 |
2016 | 541 | 433 | 426 | 1 400 | 80,5 | 84,7 | 81,6 | 82,1 |
2017 | 578 | 453 | 408 | 1 438 | 86,0 | 88,5 | 78,0 | 84,3 |
2018 | 682 | 445 | 419 | 1 546 | 101,5 | 87,1 | 80,1 | 90,6 |
- Investissement (hors acquisition objets de valeur) en millions d’euros courants et en base 100 en 2011.
- Lecture : En 2018 les sociétés financières et non financières ont investi 682 M€ (après 578 M€), ce montant comparé à leur niveau d’investissement en 2011 correspond à 101,5 % de celui-ci.
- Source : Insee, comptes régionaux définitifs de la Guadeloupe, base 2014.
graphiqueFigure 5 – Investissement par secteurs institutionnels
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- Investissement (hors acquisition objets de valeur) en millions d’euros courants et en base 100 en 2011.
- Lecture : En 2018 les sociétés financières et non financières ont investi 682 M€ (après 578 M€), ce montant comparé à leur niveau d’investissement en 2011 correspond à 101,5 % de celui-ci.
- Source : Insee, comptes régionaux définitifs de la Guadeloupe, base 2014.
La rentabilité des entreprises est globalement stable, mais diffère selon les branches d’activité
Les entreprises non financières ont pu accroître leurs efforts d’investissement depuis 2014 parce qu’elles ont pu maintenir leurs marges sur la période. Cette année encore le taux de marge des entreprises non financières dépasse les 30 % en progressant très légèrement (32,5 % après 32,2 %).
L’excédent brut d’exploitation (EBE) bénéficie d’une accélération importante de 5,6 % de la valeur ajoutée des entreprises non financières en 2018, alors qu’elle stagnait en 2017 (+ 0,2 %), mais pâtit à l’inverse d’une accélération presque aussi importante des rémunérations versées (+ 5,1 % après + 1,3 %) et des taxes nettes sur la production (+ 4,1 % après – 13,8 % en 2017).
Cependant, l’apparente stabilité du taux de rentabilité global masque des contrastes entre les branches d’activité. D’un côté des branches comme l’industrie extractive, l’énergie, l’eau et la gestion des déchets ou le commerce, dont la valeur ajoutée progresse (respectivement 10,6 % et 6,9 %), plus rapidement que la masse salariale (respectivement 2,3 % et 2,7 %). De l’autre côté, l’industrie agroalimentaire, dont la valeur ajoutée baisse (– 13,5 %), alors que sa masse salariale est en hausse (+ 5,3 % hors sucre et rhum) . C’est également le cas du transport et l’entreposage (transport aérien et maritime notamment), où malgré la hausse de la production (+ 2,2 % en valeur), la valeur ajoutée est en baisse de – 9,8 %, subissant de plein fouet la hausse du cours du prix du pétrole qui renchérit les coûts de production (+ 7,2 %).
Toutefois dans l’ensemble, les marges dégagées permettent dès lors aux entreprises non financières d’investir davantage en 2018. Le taux d’investissement des entreprises passe ainsi de 17,3 % en 2017 à 19,1 % en 2018.
Le rebond de la croissance se solde par une détérioration de la balance commerciale
En accroissant la demande de biens et services importés, la hausse de l’investissement, comme la hausse de la consommation des ménages, tend à creuser le déficit commercial de la Guadeloupe.
Le déficit de la balance commerciale entrave de – 0,9 point (après – 0,3) la croissance en volume du PIB. En 2018, le déficit des échanges extérieurs en volume se creuse de + 4,7 %, plus encore qu’en 2017 (+ 1,5 %). Il provient du ralentissement beaucoup plus fort du volume des exportations (+ 3,2 % en 2018 après + 11 % en 2017) que celui des importations (+ 4,1 % après + 5,3 %). Le taux de couverture des échanges extérieurs réel baisse d’1 point, passant de 43 % à 42 %, pour la première fois en 10 ans .
La tendance de fond ces dernières années était une amélioration de la balance commerciale. Elle était liée d’une part aux bons résultats du tourisme et d’autre part à la stagnation de la demande de biens et services importés dans un contexte d’investissement à l’arrêt. En 2018, l’amélioration de la situation économique via notamment les composantes de la demande locale, induit une forte importation de produits manufacturés notamment (+ 8,6 % après + 5,2 %), stimulée par la reprise dans le secteur de la construction, le regain de la consommation finale des ménages et des investissements publics et privés.
À l’inverse, la forte baisse de la production de produits agricoles (– 2,7 %) et agro-alimentaires (– 12 %), concomitante aux pertes de récoltes liées au passage de l’ouragan Maria en septembre 2017, entraîne une chute des exportations desdits produits (respectivement – 34 % et – 22 %). Ainsi, à titre de comparaison, les pertes de récoltes des producteurs de bananes guadeloupéens, 2017 et 2018 cumulées, ont été de l’ordre d’une année de production. En outre, les prix de vente ont baissé en moyenne de 12 % en 2017, ce qui réduit les recettes.
Dans le même temps, la fin de l’Organisation Commune du Marché du sucre au 1er octobre 2017 a entraîné la disparition des quotas de production, auparavant assortis d’une protection tarifaire et d’un marché garanti.
Malgré une aide nationale supplémentaire accordée pour trois ans aux industries domiennes du sucre, les cours du sucre ont été divisés par deux en 2018, du fait de la concurrence des gros pays exportateurs (Brésil et Inde), ce qui a contraint la sucrerie Gardel à orienter davantage sa production vers les sucres de bouche, à plus forte valeur ajoutée.
Enfin, la hausse des cours du pétrole a également incité à substituer le déstockage à la réexpédition habituelle de produits pétroliers et a par conséquent fait baisser de 29 % les exportations de produits pétroliers en 2018. Ceci a participé à la baisse de 20 % des exportations dans l’industrie extractive, l’énergie, l’eau et la gestion des déchets.
Le tourisme en Guadeloupe bénéficie d’un contexte favorable
La détérioration de la balance commerciale est toutefois limitée, grâce à des initiatives et des investissements dans le tourisme notamment, permettant de maintenir les dépenses des touristes dans l’archipel à un niveau élevé. Ces dernières ont ainsi augmenté de + 6,7 % (après + 6,9 % en 2017).
La Guadeloupe continue en effet à bénéficier de la libéralisation du marché aérien, permettant l’émergence de compagnies aériennes low-cost, en témoigne l’arrivée de la compagnie Level en juillet 2018. En outre, la montée en gamme de l’offre d’hébergement, au travers de la rénovation d’hôtels de luxe par exemple et l’arrivée de la onzième Route du Rhum stimulent le tourisme. En hausse de 7,2 %, le nombre de nuitées dans les hôtels guadeloupéens atteint son plus haut niveau depuis 2010, avec 1 283 000 nuitées, grâce notamment au succès des hôtels 4 et 5 étoiles dont la fréquentation a plus que doublé. Ces bons résultats vont de pair avec l’augmentation importante de 5,5 % de l’emploi salarié dans l’hôtellerie-restauration en 2018, ce qui participe à la progression du pouvoir d’achat des ménages.
Soutenu par le dynamisme des compagnies low-cost, l’aéroport Pôle Caraïbes enregistre un nouveau record de passagers, de 2 359 779 hors transit, en hausse de 4,6 % (après 4,5 % en 2017). Par ailleurs, l’activité touristique bénéficie également du repositionnement dans les Caraïbes en début d’année, des navires de croisière, consécutif aux dégâts infligés à Saint-Martin par l’ouragan Irma au dernier trimestre 2017 et des efforts d’aménagement de la darse de Pointe à Pitre, préfigurant le projet Karukera Bay. Le nombre de croisiéristes a ainsi bondi de 20,6 % en 2018.
Dans l’ensemble, les dépenses des touristes contribuent à 0,4 point en valeur à la croissance, , comme en 2017. Leur poids augmente chaque année depuis 2010, où il était de 3,5 % du PIB (hors effet indirect et induit) pour atteindre 5,9 % en 2018.
Pour comprendre
La comptabilité nationale vise une description la plus pertinente possible du fonctionnement de l’économie. Des changements de base réguliers sont opérés pour tenir compte de l’évolution du fonctionnement de l’économie, et des sources statistiques (enquêtes ou données administratives notamment) qui permettent de le décrire. En 2015, les comptes nationaux sont passés en base 2010, notamment pour mettre en œuvre la nouvelle version du Système européen de comptes, le SEC 2010, modifiant en particulier le champ des dépenses comptabilisées en investissement pour y inclure les dépenses en R&D et en systèmes d’armes. En 2017, ils sont passés en base 2014 pour comptabiliser le trafic de stupéfiants et caler les échanges extérieurs de services sur les données de la balance des paiements. En 2019, les comptes régionaux Antilles-Guyane sont à leur tour passés en base 2014. Ce changement comprend toutes les recommandations du SEC 2010 sauf celles qui relèvent de la prérogative nationale, tels les systèmes d’armes, ou qui n’ont pas un impact significatif sur l’économie de la région Antilles-Guyane tel que le travail à façon. L’existence de statistiques spécifiques, notamment sur le commerce extérieur, permet l’élaboration de comptes régionaux en Guadeloupe, Guyane et Martinique selon les méthodes et concepts du système de comptabilité nationale. Les comptes des DOM sont en base 2014. La production de ces comptes régionaux n’est donc pas une régionalisation des comptes nationaux comme dans les régions métropolitaines. Les comptes régionaux annuels donnent une fois par an une description globale et détaillée de l’économie régionale. Cette description porte sur les ressources et emplois de biens et de services, l’activité des branches, les comptes des secteurs institutionnels et les tableaux entrées-sorties (TES) ainsi que les tableaux économiques d’ensemble (TEE).
Définitions
Taux de marge (EBE/VA) : ratio qui rapporte l’excédent brut d’exploitation ou le revenu mixte à la valeur ajoutée.
Taux de couverture : ratio qui rapporte la valeur de l’ensemble des exportations à celle des importations.
Produit intérieur brut (PIB) : mesure de la richesse produite sur un territoire donné, grâce à la somme des valeurs ajoutées des biens et services produits sur le territoire. Les PIB mentionnés dans cette publication sont mesurés en valeur (ou à prix courants).
Revenu disponible brut des ménages (RDBM) : revenu dont disposent les ménages pour consommer ou investir, après opérations de redistribution. Il comprend l’ensemble des revenus d’activité (rémunérations salariales y compris cotisations légalement à la charge des employeurs, revenu mixte des non-salariés), des revenus de la propriété (intérêts, dividendes, revenus d’assurance-vie…) et des revenus fonciers (y compris les revenus locatifs imputés aux ménages propriétaires du logement qu’ils occupent). On y ajoute principalement les prestations sociales en espèces reçues par les ménages et on en retranche les cotisations sociales et les impôts versés.
Valeur ajoutée (VA) : solde du compte de production. La valeur ajoutée est égale à la valeur de la production diminuée de la consommation intermédiaire.
Consommation intermédiaire : valeur des biens et services utilisés pour assurer la production.
Coefficients techniques : rapport des consommations intermédiaires à la production effective de la branche. À court terme ils sont considérés comme stables. Cela signifie qu’on considère que d’une année sur l’autre, il faut par exemple toujours 4 roues pour fabriquer une voiture. Connaissant le rapport roues/voitures, les coefficients techniques permettent de déduire l’une des deux grandeurs en fonction de l’autre à partir du coefficient de l’année précédente.
Excédent brut d’exploitation (EBE) : solde du compte d’exploitation pour les sociétés. Il est égal à la valeur ajoutée, diminuée de la rémunération des salariés et des impôts nets des subventions sur la production et augmentée des subventions d’exploitation.
Taux d’investissement : ratio qui rapporte l’investissement corporel brut hors apport à la valeur ajoutée (VA).
Taux d’épargne : ratio qui rapporte l’épargne des ménages au revenu disponible brut.
Taux d’emploi : le taux d’emploi d’une classe d’individus est calculé en rapportant le nombre d’individus de la classe ayant un emploi au nombre total d’individus dans la classe.
Pour en savoir plus
Ouvrir dans un nouvel ongletRapport annuel 2018 de l’IEDOM – Guadeloupe – juin 2019
« Guadeloupe - Bilan économique 2018 - La trajectoire positive de l’économie se confirme », Insee Conjoncture Guadeloupe n° 5, juin 2019
« Les comptes économiques des DOM », consultables sur Ouvrir dans un nouvel ongletwww.cerom-outremer.fr/guadeloupe et sur www.insee.fr
« Fréquentation hôtelière au 4ᵉ trimestre 2018 : Une fin d’année dynamique », Insee Flash Guadeloupe n° 121, juin 2019
Louis J., « La croissance mise à mal par la crise sanitaire. Comptes économiques rapides de la Guadeloupe en 2020 », Insee Analyses Guadeloupe n° 53, octobre 2021