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Insee Analyses Hauts-de-France · Février 2022 · n° 134
Insee Analyses Hauts-de-FranceUne géographie des activités dominantes en Hauts‑de‑France

Mickaël Bréfort , Cyril Gicquiaux (Insee)

Les Hauts‑de‑France regroupent 2 118 500 emplois en 2018. Les fonctions « transversales » y sont bien implantées. Elles incluent notamment les activités de logistique qui bénéficient du positionnement géographique favorable de la région et représentent près d’un emploi sur dix. Les aires d’attraction des villes de Douai, Lens-Liévin, Saint-Omer, Saint-Quentin, Cambrai et Soissons se distinguent ainsi par une orientation marquée vers ces activités. D’un poids comparable au niveau national, les fonctions « productives » regroupent près d’un emploi sur cinq. En particulier, les métiers de la fabrication sont largement présents dans les aires de Valenciennes, Maubeuge et Dunkerque. À l’inverse, les fonctions « métropolitaines » sont sous-représentées dans la région (un emploi sur cinq) et concentrées dans l’aire de Lille. Enfin, les fonctions « présentielles » concentrent près de 2 emplois sur 5, soit un peu plus qu’en France métropolitaine. Avec les préfectures de département, les aires d’Arras, Amiens, Beauvais et Laon sont ainsi plus orientées vers l’administration publique ; celles de Calais, Béthune et Abbeville le sont davantage vers les services à la population.

Insee Analyses Hauts-de-France
No 134
Paru le :Paru le03/02/2022

Quatre familles de métiers

Les métiers exercés par les actifs ont profondément évolué ces dernières décennies et, de manière concomitante, la géographie des activités s’est elle aussi largement renouvelée. Afin de mieux analyser cette recomposition du tissu productif et des emplois, une approche « fonctionnelle » des métiers distingue 15 “” réparties en quatre grandes familles : productives (3 fonctions), transversales (2), présentielles (5) et métropolitaines (5). L’analyse de l’emploi selon les fonctions exercées permet d’étudier les professions des actifs selon leur rôle dans le processus économique. Elle apporte ainsi un éclairage complémentaire aux approches classiques de l’emploi par secteur d’activité économique ou encore selon la nomenclature des Professions et Catégories socioprofessionnelles (PCS).

Un poids important des fonctions transversales, notamment de la logistique

En 2018, la région Hauts‑de‑France comptabilise 2 118 500 emplois. Elle se caractérise par une surreprésentation des emplois dans les fonctions dites « transversales », qui regroupent les professions de transport-logistique d’une part (flux de personnes et de marchandises) et d’entretien-réparation d’autre part (nettoyage, maintenance). Ces fonctions rassemblent 371 000 emplois, soit 17,5 % du total régional, contre 15 % au niveau national (figure 1). Région de France métropolitaine où cette part est la plus élevée, les Hauts‑de‑France devancent la Normandie et le Centre-Val-de-Loire (17 % chacun), grâce notamment à l’importance des métiers de la logistique. Ceux-ci représentent environ 202 700 emplois, soit près d’un emploi sur dix de la région (9,5 % contre 8 % au niveau national). Ce poids important s’explique par un positionnement géographique très favorable au développement de ces activités, avec au sud de la région l’Île-de-France et au nord-est la frontière avec la Belgique, plaçant ainsi la région à un carrefour stratégique de l’Europe. La région jouit par ailleurs d’une ouverture maritime sur la Manche et la Mer du Nord, avec de grandes infrastructures portuaires (Calais, Boulogne et Dunkerque), d’un réseau autoroutier très dense et de grandes plateformes multimodales (Dourges). En offrant une alternative au transport routier de marchandises entre le bassin francilien de la Seine et le bassin franco-belge de l’Escaut, le canal Seine-Nord-Europe devrait constituer une opportunité supplémentaire de développement de la logistique dans la région.

Figure 1Poids de l’emploi par grande famille de fonctions en 2018 et positionnement des Hauts‑de‑France par rapport aux autres régions

en %
Poids de l’emploi par grande famille de fonctions en 2018 et positionnement des Hauts‑de‑France par rapport aux autres régions (en %)
Famille de fonctions Hauts‑de‑France France métropolitaine
Fonctions présentielles 43 41
dont Santé et action sociale 11 10
Fonctions métropolitaines 21,5 27
dont Gestion 12 13
Fonctions productives 18 17
dont Fabrication 10,5 8,5
Fonctions transversales 17,5 15
dont Logistique 10 8
  • Source : Insee, recensement de la population 2018, exploitation complémentaire (lieu de travail).

Figure 1Poids de l’emploi par grande famille de fonctions en 2018 et positionnement des Hauts‑de‑France par rapport aux autres régions

  • Note de lecture : En 2018, les emplois dans les fonctions présentielles représentent 43 % de l’emploi dans les Hauts‑de‑France, contre 41 % au niveau national. Cette part positionne la région au 5ᵉ rang des 13 régions de France métropolitaine. Pour chaque grande famille, la fonction regroupant le plus d’emplois a été représentée plus foncée sur la figure. Les métiers de la fabrication, qui comptent parmi les fonctions productives, concentrent ainsi 10,5 % de l’emploi des Hauts‑de‑France, contre seulement 8,5 % au niveau national.
  • Source : Insee, recensement de la population 2018, exploitation complémentaire (lieu de travail).

Les métiers de la fabrication encore bien représentés

Les emplois dans les fonctions productives, c’est-à-dire ceux produisant des biens matériels ou mettant en œuvre concrètement des processus techniques (agriculture, fabrication, BTP), totalisent 384 350 emplois, soit 18 % de l’emploi régional, un poids légèrement supérieur au niveau national (17 %). Regroupant un emploi sur dix (10,5 % contre 8,5 % en France métropolitaine), soit environ 217 900 emplois, les métiers de la fabrication restent bien représentés dans la région, notamment dans certains territoires comme le Valenciennois. En effet, le tissu productif des Hauts‑de‑France s’appuie encore sur des filières industrielles de réalisation plutôt que de conception, en lien notamment avec son histoire et un moindre niveau de qualification des actifs. Le poids toujours important de ces activités dans la région alimente également celles relevant de la logistique, qui interviennent en aval et en amont des processus de production. A contrario, les métiers de l’agriculture ne représentent plus que 2 % de l’emploi régional, une proportion proche, mais néanmoins, inférieure au niveau national (2,5 %).

Des fonctions métropolitaines sous-représentées

Les emplois liés aux fonctions dites « métropolitaines » sont sous-représentés dans la région. Ceux-ci correspondent aux métiers à forte valeur ajoutée dans les domaines de la gestion, la conception-recherche, les prestations intellectuelles, le commerce inter-entreprise et les services de culture-loisirs. Le développement de ce type d’emplois, notamment dans les centres urbains, traduit la recomposition d’un tissu productif industriel vers une économie de production immatérielle (information, finance, numérique, culture…). Avec 454 650 emplois dans ces fonctions, soit 21,5 % de l’emploi régional, les Hauts‑de‑France se situent au 10e rang, devant la Normandie (20,5 %), la Bourgogne-Franche-Comté (20 %) et la Corse (18,5 %), mais loin derrière l’Île-de-France (39,5 %), Auvergne-Rhône-Alpes (26,5 %) et Provence-Alpes-Côte-d’Azur (25 %) et 5,5 points de moins qu’au niveau national (27 %).

Enfin, les fonctions dites « présentielles », qui regroupent des métiers répondant localement aux besoins de la population, représentent 4 emplois sur 10 de la région (43 % contre 41 % au niveau national), soit près de 908 750 emplois. Au service des habitants, ces emplois sont logiquement distribués sur le territoire proportionnellement à la répartition de la population. Ainsi, les Hauts‑de‑France concentrent 9 % de la population de France métropolitaine, et 8,5 % de l’emploi national dans ces activités.

Cette approche par métiers permet de dessiner une géographie des activités dominantes à l’échelle de la région, mais également de ses territoires. Dans les Hauts‑de‑France, les 19 principales des villes rassemblent trois habitants sur quatre et huit emplois sur dix de la région. Elles présentent six profils-types (Pour comprendre), selon le poids relatif de l’emploi au sein des différentes fonctions (figure 2).

Figure 2Typologie des principales aires d’attraction des villes selon le poids de l’emploi par fonction

Typologie des principales aires d’attraction des villes selon le poids de l’emploi par fonction
Aire d’attraction des villes Libellé Surreprésentation dans la …
068 Boulogne-sur-Mer Fonctions de fabrication
078 Compiègne Fonctions de fabrication
048 Dunkerque Fonctions de fabrication
077 Maubeuge Fonctions de fabrication
038 Valenciennes Fonctions de fabrication
108 Cambrai Fonctions de fabrication et de logistique
059 Douai Fonctions de fabrication et de logistique
096 Saint-Omer Fonctions de fabrication et de logistique
094 Saint-Quentin Fonctions de fabrication et de logistique
042 Lens – Liévin Fonctions de logistique et de santé-action sociale
128 Soissons Fonctions de logistique et de santé-action sociale
004 Lille Fonctions métropolitaines
001 Paris Fonctions métropolitaines
035 Amiens Fonctions de gestion et d'administration publique
069 Arras Fonctions de gestion et d'administration publique
076 Beauvais Fonctions de gestion et d'administration publique
136 Laon Fonctions de gestion et d'administration publique
164 Abbeville Fonctions présentielles
125 Béthune Fonctions présentielles
073 Calais Fonctions présentielles
  • Note : L’aire d’attraction de Paris présente dans sa globalité une orientation « métropolitaine » qui est de loin la plus marquée au niveau national. Regroupant 7 % de l’emploi des Hauts‑de‑France, elle déborde largement dans le sud de la région. Cependant, prise isolément, la partie régionale de cette aire présente une orientation plus prononcée vers les activités de logistique et de transport que vers les fonctions métropolitaines.
  • Source : Insee, recensement de la population 2018, exploitation complémentaire (lieu de travail).

Figure 2Typologie des principales aires d’attraction des villes selon le poids de l’emploi par fonction

  • Note : L’aire d’attraction de Paris présente dans sa globalité une orientation « métropolitaine » qui est de loin la plus marquée au niveau national. Regroupant 7 % de l’emploi des Hauts‑de‑France, elle déborde largement dans le sud de la région. Cependant, prise isolément, la partie régionale de cette aire présente une orientation plus prononcée vers les activités de logistique et de transport que vers les fonctions métropolitaines.
  • Source : Insee, recensement de la population 2018, exploitation complémentaire (lieu de travail).

Les fonctions métropolitaines concentrées dans l’aire de Lille

Comme les autres grandes aires métropolitaines de France, l’aire de Lille se distingue nettement par la forte prépondérance d’emplois dits « stratégiques » ou à forte valeur ajoutée. En effet, trois emplois sur dix de l’aire lilloise appartiennent à l’une des cinq fonctions métropolitaines, soit 8,5 points de plus qu’en moyenne régionale (21,5 %). Parmi les autres métropoles françaises, l’aire lilloise est en position médiane (encadré 1), au même niveau que Rennes. Cette concentration des fonctions métropolitaines s’explique notamment par des effets d’agglomération de ces activités, favorisés par un rayonnement régional, voire national, d’une partie d’entre elles et par la présence d’une main d’œuvre très qualifiée. Au sein des fonctions métropolitaines, ce sont les emplois de la gestion qui prédominent dans l’aire lilloise.

À l’inverse, l’aire amiénoise, deuxième plus grand pôle d’emploi régional, ne concentre qu’un peu plus de deux emplois sur dix dans les fonctions métropolitaines, une proportion inférieure à celle observée dans l’aire de Compiègne (24 %).

Les métiers de la fabrication encore très présents dans plusieurs aires de la région

En lien avec les mouvements de désindustrialisation et de tertiarisation de l’économie, les fonctions productives ont perdu beaucoup d’emplois au cours des 30 dernières années (encadré 2). Pour autant, ces emplois restent bien représentés dans certaines aires de la région. Ainsi, parmi les 82 aires de France métropolitaine regroupant plus de 50 000 emplois, Valenciennes se classe en 4e position avec 14 % d’emplois dans la fabrication, derrière Montbéliard (21 %), Saint-Nazaire et Cholet (16,5 % chacun), et devant Dunkerque (14 %, en 5e position), Compiègne (13 %, 7e) et Boulogne-sur-Mer (11,5 %, 14e), trois autres aires de la région présentant une orientation productive marquée. De plus petite taille, l’aire de Maubeuge bénéficie néanmoins d’une proportion d’emplois dans la fabrication supérieure à celle de Valenciennes (16 %).

Dans l’aire de Valenciennes, la fabrication de matériel de transport, automobile ou ferroviaire, est bien implantée (Toyota, PSA, Alstom) tandis que la métallurgie est le principal pourvoyeur d’emplois de l’aire dunkerquoise (Arcelor Mittal). À Boulogne-sur-Mer, les métiers de la fabrication sont davantage tournés vers l’industrie agroalimentaire (Novandie, Findus), ainsi que dans les produits informatiques, électroniques et optiques (SBE France). Dans l’aire de Maubeuge, la fabrication rassemble à la fois des établissements de l’industrie automobile (site MCA de Renault) ou spécialisés dans les équipements pour les centrales nucléaires (Framatome). Enfin, l’industrie occupe une place importante dans l’aire de Compiègne, notamment dans la fabrication de pièces pour automobiles (Plastic Omnium), la transformation du verre (Saint-Gobain) et l’industrie chimique (Colgate-Palmolive, Chanel). À Compiègne, au-delà de l’orientation industrielle de l’aire, la fonction métropolitaine est également très affirmée, avec en particulier une concentration importante d’emplois dans la conception-recherche, des centres de R&D associés aux établissements industriels y étant notamment implantés. Celle-ci représente 2,8 % de l’emploi de l’aire, ce qui la positionne juste derrière Lille (3,1 %).

De la fabrication, mais aussi de la logistique à Saint-Omer, Douai, Cambrai et Saint-Quentin

Les aires de Saint-Omer, Douai, Cambrai et Saint-Quentin présentent une double orientation, à la fois dans les métiers de la fabrication et dans ceux de la logistique. À Saint-Omer, la fabrication représente encore 13 % de l’emploi de l’aire (10,5 % en région), avec une concentration d’emplois au sein du plus grand établissement de l’Audomarois, la cristallerie Arc International (entre 4 000 et 5 000 salariés). Mais le poids des emplois de la logistique y est plus important encore (14 % contre 9,5 % en région), avec près de la moitié relevant du transport-entreposage.

L’empreinte industrielle est également marquée dans l’aire de Douai avec 12,5 % de l’emploi dans la fabrication, particulièrement dans l’automobile avec le site de Renault de Cuincy qui figure parmi les cinq plus grands établissements industriels de la région (entre 3 000 et 4 000 salariés). À Cambrai, la fabrication rassemble 12 % de l’emploi, dans les activités liées à l’industrie chimique (Stoelzle Masnières) et à l’agroalimentaire (Candia). À Saint-Quentin, la fabrication (11 % de l’emploi) est notamment tournée vers l’industrie du deux-roues (MBK) et l’agroalimentaire (la sucrerie Tereos). Tout comme Saint-Omer, ces trois aires offrent beaucoup d’emplois dans la logistique : 13 % à Douai, 11,5 % à Saint-Quentin et 10 % à Cambrai. Cela s’explique notamment par leur positionnement géographique, ces aires étant situées à des carrefours d’échanges ouverts aux transports multimodaux (proximité de l’A1 et des réseaux ferrés et fluviaux). L’orientation productive de ces territoires favorise également l’implantation de grands établissements relevant de la logistique, comme Amazon France Logistique et Kiabi Logistique dans l’aire de Douai ou encore les transports Blondel et Citra à Saint-Quentin.

La logistique est très présente également dans les aires d’attraction de Lens-Liévin et de Soissons (11 % de l’emploi chacune). Leur positionnement stratégique à proximité de la métropole lilloise ou de l’Île-de-France est propice au développement de ces activités. La plate-forme multimodale Delta 3 de Dourges, dans l’aire de Lens-Liévin, propose ainsi plus de 330 000 mètres carrés de stockage ainsi qu’un centre de services Euralogistic fournissant formations et bureaux pour les métiers de la logistique. Dans ces deux aires, les métiers de la santé et de l’action sociale sont nombreux (respectivement 12,5 % et 12 % de l’emploi) en lien avec la présence de centres hospitaliers dans chacune des villes-centre de ces deux aires, mais également d’un hôpital et d’une clinique à Hénin-Beaumont, ou encore d’associations médico-sociales comme l’AMSAM à Soissons.

Des fonctions d’administration publique dans les préfectures

Hormis Lille, les fonctions métropolitaines représentent au moins un emploi sur cinq dans les aires d’Arras (22 %), Amiens (21 %) et Beauvais (21 %), avec là encore une forte proportion d’emplois dans la gestion. Ces trois aires, ainsi que celle de Laon, se caractérisent surtout par une surreprésentation de la fonction d’administration publique, de 10,5 % (Beauvais) à 14,5 % (Laon) de l’emploi total de l’aire contre 9 % en moyenne régionale. Leur statut d’ancienne capitale régionale (Amiens) et de préfectures de département (Arras, Beauvais, Laon) explique cette forte concentration des emplois publics.

Un profil plus présentiel dans les aires de Béthune, Calais et Abbeville

Enfin, trois aires sont davantage orientées vers les fonctions présentielles. Ces métiers de services à la population représentent près d’un emploi sur deux dans les aires de Béthune (49,5 %), Calais (48 %) et Abbeville (47,5 %), contre 43 % dans la région et 41 % en France métropolitaine.

Dans l’aire de Béthune, ces emplois relèvent notamment de la santé et de l’action sociale (13 %), mais aussi de l’administration publique (11,5 %), et ce davantage qu’en moyenne régionale (respectivement 11 % et 9 %). À Calais, il s’agit surtout des métiers relevant de la distribution (9,5 % contre 7,5 % en région) et des services de proximité (12,5 % contre 10 %). Le tourisme sur le littoral de la Côte d’Opale a également soutenu le développement des activités d’hébergement-restauration. À Abbeville, pour répondre notamment aux besoins d’une population plus âgée, les professions de santé et du secteur social sont nettement surreprésentées. Les activités médico-sociales (hôpital, clinique, maison de retraite) rassemblent 13,5 % de l’emploi de l’aire, soit la plus forte proportion parmi les principales aires de la région, et 2,5 points au-dessus du niveau régional (11 %).

Encadré 1 - Avec 3 emplois sur 10 dans les fonctions métropolitaines, Lille est en position médiane parmi les métropoles françaises

Les fonctions métropolitaines sont largement localisées dans l’agglomération parisienne et dans les grandes métropoles régionales. En effet, les 11 plus grandes aires françaises (dont Lille), toutes peuplées d’au moins 700 000 habitants, concentrent à elles seules 57,5 % des emplois dans les fonctions métropolitaines (dont 33 % dans l’aire de Paris) alors qu’elles ne représentent que 44 % de l’emploi total de France métropolitaine (dont 23 % dans l’aire de Paris). Le constat est identique dans les Hauts‑de‑France, où l’aire de Lille rassemble 41 % des fonctions métropolitaines pour 29 % de l’emploi régional.

À l’échelle nationale, Lille se situe en position médiane, à un niveau comparable aux aires de Rennes et Montpellier (30 % de l’emploi dans les fonctions métropolitaines), mais loin derrière Paris (39 %) et 3 à 4 points derrière les aires lyonnaises, nantaises et toulousaines (figure 3).

Le poids relatif des cinq types de fonctions métropolitaines diffère sensiblement d’une métropole à une autre. Dans l’aire lilloise, les fonctions de conception-recherche (3,1 %) et de prestations intellectuelles (4,8 %) sont sous-représentées. À l’inverse, si les emplois de « gestion » prédominent dans l’ensemble des métropoles, ils ont un poids particulièrement marqué dans l’aire lilloise, la plaçant en 4ᵉ position après Paris et juste derrière Lyon et Nantes (15,5 % contre 18 % à Paris et 16 % à Lyon et Nantes). Ils correspondent aux métiers de l’administration des entreprises (cadres administratifs et financiers, secrétaires et employés administratifs) ou encore de la banque et de l’assurance. Leur poids important dans l’aire lilloise s’explique notamment par la présence de nombreux sièges sociaux d’entreprises, par exemple de la grande distribution ou de la vente par correspondance (Auchan, Leroy Merlin, La Redoute), ou encore des activités financières et d’assurances (Cofidis).

Figure 3Part des fonctions métropolitaines dans l’emploi total dans les 11 plus grandes aires d’attraction des villes en 2018 (en%)

Part des fonctions métropolitaines dans l’emploi total dans les 11 plus grandes aires d’attraction des villes en 2018 (en%)
Ensemble Conception recherche Culture-loisirs Prestations intellectuelles Commerce interentreprises Gestion
Paris 38,6 4,9 4,1 6,9 4,9 17,8
Lyon 34,1 4,5 2,4 5,8 5,7 15,7
Nantes 33,8 4,2 2,6 5,9 5,3 15,8
Toulouse 33,3 6,9 2,4 6,1 4,4 13,5
Grenoble 31,5 7,4 2,3 5,4 4,0 12,4
Lille 30,1 3,1 2,2 4,8 4,5 15,5
Rennes 30,1 3,8 2,3 5,6 4,6 13,8
Montpellier 29,9 4,0 3,0 5,3 4,0 13,6
Bordeaux 29,6 3,4 2,4 5,0 4,7 14,1
Strasbourg 29,2 3,4 2,3 4,7 4,5 14,3
Marseille - Aix-en-Provence 29,1 3,5 2,5 4,9 4,1 14,1
Total des 11 plus grandes aires 35,2 4,6 3,3 6,2 4,8 16,3
France métropolitaine 26,8 2,9 2,5 4,3 3,9 13,2
  • Source : Insee, recensement de la population 2018, exploitation complémentaire (lieu de travail).

Encadré 2 - En 30 ans, une recomposition forte de l’emploi marquée par un net repli des fonctions productives

Au cours des dernières décennies, les mutations de l’appareil productif ont bouleversé la répartition de l’emploi par fonction. Ainsi, le mouvement de désindustrialisation s’est traduit par un repli massif des fonctions productives (fabrication, BTP et agriculture). Ce repli a été plus marqué dans les Hauts‑de‑France, région historiquement plus industrialisée. Les fonctions productives représentent ainsi 18 % de l’emploi en 2018, contre près 29,5 % en 1990, soit un recul de 11,5 points (contre respectivement 17 % et 26,5 % au niveau national, en recul de 9,5 points, figure 4). De manière symétrique, la tertiarisation de l’économie a conduit au développement très important des emplois dans les fonctions présentielles (+ 10 points dans la région contre + 7 points en France métropolitaine), notamment dans les métiers des secteurs de la santé et de l’action sociale (+ 5 points contre 4 points) et les services de proximité (+ 3,5 points contre + 2,5 points). Enfin, ces mutations de l’économie et les progrès technologiques ont également largement soutenu le développement des fonctions métropolitaines (respectivement + 4 points dans les Hauts‑de‑France et + 5 points en France métropolitaine entre 1990 et 2018), en particulier dans les métiers offrant des prestations intellectuelles, ceux orientés vers la culture et les loisirs ou encore la conception-recherche.

Figure 4 Evolution de la part de l’emploi par grande famille de fonction entre 1990 et 2018 (en %)

Evolution de la part de l’emploi par grande famille de fonction entre 1990 et 2018 (en %)
Hauts‑de‑France France métropolitaine
Fonctions présentielles 10,0 7,0
Fonctions métropolitaines 4,0 5,0
Fonctions transversales -2,5 -2,5
Fonctions productives -11,5 -9,5
  • Source : Insee, recensement de la population 2018, exploitation complémentaire (lieu de travail).

Figure 4 Evolution de la part de l’emploi par grande famille de fonction entre 1990 et 2018 (en %)

  • Source : Insee, recensement de la population 2018, exploitation complémentaire (lieu de travail).
Publication rédigée par :Mickaël Bréfort , Cyril Gicquiaux (Insee)

Pour comprendre

Dans les Hauts‑de‑France, 19 aires d’attraction régionales regroupent chacune au moins 15 000 emplois et 50 000 habitants. Il s’agit des aires de Lille, Amiens, Valenciennes, Lens–Liévin, Dunkerque, Arras, Douai, Beauvais, Compiègne, Boulogne-sur-Mer, Calais, Saint-Quentin, Maubeuge (Partie française), Saint-Omer, Cambrai, Béthune, Laon, Soissons, Abbeville.

Une typologie de ces principales aires d’attraction des villes a été construite selon une méthode de classification ascendante hiérarchique (CAH) sur les résultats d’une analyse en composantes principales (ACP) portant sur le poids de l’emploi des 15 fonctions.

Définitions

Emploi fonctionnel : les emplois sont répartis en 15 fonctions définies par regroupement des professions identifiées dans la nomenclature des Professions et Catégories socioprofessionnelles (PCS). Ils sont comptabilisés au lieu de travail d’après les déclarations des actifs en emploi de l’enquête de recensement.

Ces fonctions sont synthétisées en 4 grandes catégories : productives, transversales, métropolitaines et présentielles. Le détail du regroupement est précisé dans l’Insee Première n°1856 (Pour en savoir plus).

Aire d’attraction d’une ville : ensemble de communes, d’un seul tenant et sans enclave, constitué d’un pôle de population et d’emploi et d’une couronne qui rassemble les communes dont au moins 15 % des actifs occupés travaillent dans le pôle. Les pôles doivent a minima regrouper 1 000 habitants et 1 500 emplois.

Pour en savoir plus

Élise Bernert, « Les fonctions de décision, de conception et de gestion plus présentes dans les grandes métropoles régionales », Insee Première n°1856, avril 2021.

David Desrivierre, Sophie Éblé, Élisabeth Vilain, « Des fonctions productives et logistiques très présentes dans les aires urbaines », Insee Analyses Hauts‑de‑France, n°66, décembre 2017

Bailleul Y., Braun G., Gamblin V., Lefèvre L., « 31 000 emplois directs dans les infrastructures portuaires », Insee Analyses Hauts‑de‑France n°132, décembre 2021

Mickaël Bréfort, Cyril, Gicquiaux, « Plus de neuf habitants sur dix vivent dans une aire d’attraction des villes », Insee Analyses Hauts‑de‑France, n°113, octobre 2020