Tourisme dans l’Arc jurassien : une offre d’hébergement différente de part et d’autre de la frontière

Pour renforcer son développement économique, l’Arc jurassien, territoire situé de part et d’autre des 230 km de frontière entre la Bourgogne-Franche-Comté et la Suisse, cherche à mieux valoriser ses atouts touristiques. L’accueil de touristes est en effet un levier fort de développement local : par leurs dépenses, les touristes génèrent des emplois dans l’hôtellerie, la restauration ou encore le commerce et les transports provoquant un effet d’entraînement sur le reste de l’économie.

L’Arc jurassien bénéficie de la présence de nombreux lieux touristiques. Le massif du Jura, colonne vertébrale de ce territoire, offre ainsi plusieurs espaces naturels remarquables, gouffres, sources ainsi que de nombreux lacs. Plus loin de la frontière, les principales villes comptent des musées, des châteaux ou des sites de loisirs renommés. Parmi les lieux très fréquentés, qui dépassent les 200 000 visiteurs par an, figurent le château de Chillon au bord du lac Léman, les cascades du Hérisson dans le département du Jura, le musée dédié à Chaplin en Suisse, la citadelle de Besançon ou encore le musée olympique à Lausanne (figure 1).

Le développement du tourisme dans l’Arc jurassien suscite plusieurs projets, en cours ou à l’étude, qui associent les versants français et suisse. La gestion commune des domaines skiables de part et d’autre du Haut-Jura est ainsi envisagée avec la perspective des Jeux olympiques de la jeunesse qui se dérouleront à Lausanne en 2020. Des sentiers pédestres thématiques s’organisent, comme la route du sel qui va de Salins-les-Bains à Berne en passant par Arc-et-Senans. Ce tourisme de plein air pourrait encore se développer avec le futur parc naturel régional du Doubs horloger qui s’ajoutera aux Parcs naturels régionaux du Jura en France et du Doubs en Suisse. L’horlogerie, activité traditionnelle très présente dans ce territoire franco-suisse, constitue aussi une ressource pour un tourisme « industriel » qui bénéficie déjà du musée international de l’horlogerie de la Chaux-de-Fonds (Suisse) et du musée du temps de Besançon. Plusieurs spécialités gastronomiques comme le comté, la saucisse de Morteau ou l’absinthe sont également évoquées comme supports de promotion touristique.

L’Arc jurassien dispose d’une offre en hôtels et campings assez complémentaire de part et d’autre de la frontière, pour accompagner ces projets et accueillir les touristes. Près de 740 hôtels sont présents dans l’Arc pour une capacité totale de 20 000 chambres (figure 2). En 2017, ils ont enregistré 3 millions d’arrivées et 5,3 millions de nuitées. Les deux tiers de l’offre hôtelière et la moitié de sa fréquentation se concentrent en Suisse, et notamment dans le canton de Vaud (figure 3 et figure 4).

En effet, ce canton compte à lui seul la moitié de la capacité totale, avec près de 300 hôtels dont 200 dans les districts qui bordent le lac Léman (Lausanne, Aigle, Riviera-Pays d’Enhaut, Morges et Nyon) et plus de 10 000 chambres. Dans cette zone très urbanisée qui bénéficie d’une image de marque appréciée à l’international, les hôtels sont plus grands que dans le reste du territoire (36 chambres en moyenne contre 15) et la fréquentation étrangère importante. Hors canton de Vaud, l’offre hôtelière de l’Arc jurassien est assez équilibrée entre les versants français et suisse qui comptent respectivement 260 et 200 hôtels. Toutefois en termes de capacité, le versant français domine avec 6 800 chambres contre seulement 3 000 dans la partie suisse, les hôtels français étant plus grands que les hôtels suisses (26 chambres en moyenne contre 15).

La capacité hôtelière française est très concentrée dans les principales agglomérations : Besançon, Belfort, Montbéliard, Dole ou Lons-le-Saunier. Elle se compose pour partie d’hôtels de chaîne qui s’adressent à une clientèle d’affaires. De fait, elle se situe assez loin de la frontière, dans les pôles d’emplois denses. La zone qui borde la frontière ne compte que 135 hôtels, souvent des petites structures (15 chambres en moyenne) pour un total de 2 000 chambres.

Dans la partie suisse, hors canton de Vaud, l’offre hôtelière est davantage répartie sur l’ensemble du territoire. Les cantons de Neuchâtel, du Jura ainsi que le district nord de Berne comptent chacun une soixantaine d’hôtels.

C’est dans la partie suisse que les séjours hôteliers sont les plus longs, 2 jours en moyenne contre 1,4 jour dans la partie française. Très implantée au bord du lac Léman ou dans les zones de montagne, l’hôtellerie suisse attire davantage une clientèle de loisirs que l’hôtellerie française, plus urbaine et donc davantage orientée vers une clientèle d’affaires plus pressée. Les séjours varient ainsi de 2,5 jours dans le district de l’Aigle (canton de Vaud) à 1,4 jour dans le département du Doubs.

Ainsi, le canton de Vaud, fort d’une offre abondante et de la moitié de la fréquentation hôtelière, cumule un taux de remplissage élevé et une durée de séjour assez longue (2,1 jours). Le département du Doubs constitue l’autre zone géographique du tourisme hôtelier : il représente 25 % des arrivées et seulement 20 % des nuitées, du fait de séjours plus courts, l’offre étant pour l’essentiel localisée en ville.

Seulement 2 % des arrivées et des nuitées se situent dans le canton suisse du Jura qui dispose pourtant de près de 70 établissements. Mais ils sont de petite taille (12 chambres en moyenne), enregistrent un faible taux de remplissage et les durées des séjours y sont relativement courtes (1,6 jour en moyenne).

La clientèle étrangère représente 41 % des nuitées de l’Arc jurassien. Elle est davantage présente dans les hôtels suisses, où la moitié des clients sont étrangers, avec une grande variation selon les cantons : de 55 % dans le canton de Vaud à 16 % dans celui du Jura. Côté français, la situation est plus homogène avec 20 % de clientèle étrangère en moyenne (figure 5).

Les Français constituent la première clientèle étrangère des hôtels suisses : ils représentent 18 % des nuitées étrangères (figure 6). C’est dans les cantons du Jura et de Neuchâtel, que cette part est la plus forte. Viennent ensuite les Allemands très présents dans le district de Berne où ils représentent la première nationalité étrangère. Les États-Unis occupent la troisième position, suivis du Royaume-Uni, 93 % d’entre eux séjournant dans le canton de Vaud.

En France, la clientèle étrangère est aussi marquée par sa proximité géographique puisque les Allemands arrivent en tête, suivis des Suisses puis des Belges.

Près de 160 campings totalisant 14 000 emplacements pour les touristes sont implantés dans l’Arc jurassien. À l’inverse des hôtels, les deux tiers sont localisés sur le versant français (figure 7). Le département du Jura regroupe à lui seul plus du tiers des campings et la moitié des emplacements de l’ensemble de l’Arc jurassien. Il compte ainsi une soixantaine de campings, souvent de grandes structures (120 emplacements en moyenne), localisées en bordure de ses nombreux lacs et rivières. Dans l’Arc jurassien suisse, l’offre, moins importante, se concentre autour des lacs de Neuchâtel, de Bienne et du Léman.

Les campings de l’arc jurassien ont enregistré, près de 600 000 arrivées et plus de 2 millions de nuitées en 2017, l’essentiel de cette fréquentation étant le fait des campings français, et la moitié dans le département du Jura (figure 8). À l’opposé, avec une dizaine de campings, comme dans le canton de Neuchâtel, le canton suisse du Jura représente moins de 2 % des nuitées, ses campings étant de petite taille (27 emplacements en moyenne). La durée des séjours est plus élevée côté français, 4 jours contre 3 jours côté suisse où elle est assez homogène, un peu plus courte toutefois dans le canton du Jura.

À l’inverse des hôtels, c’est du côté français que la clientèle étrangère est la plus fréquente : elle représente la moitié des nuitées des campings contre seulement 17 % côté suisse. Les Néerlandais dominent très nettement dans la partie française (figure 9). En Suisse, comme dans les hôtels, les Français arrivent en tête de la clientèle étrangère, suivis des Allemands.

L’activité de ces campings est très saisonnière, surtout dans les campings français dont les trois quarts des nuitées se déroulent pendant les mois de juillet et d’août. Elle est un peu moins marquée dans les campings suisses qui offrent davantage d’emplacements locatifs.

À côté des hôtels et des campings, de nombreuses autres formes d’hébergements touristiques sont disponibles. Dans l’Arc jurassien français, une quarantaine de structures d’hébergements collectifs (villages vacances, auberges de jeunesse ou résidences de tourisme) ont enregistré 478 000 nuitées en 2017, ce qui équivaut à 14 % des nuitées enregistrées dans les hôtels et campings de l’Arc jurassien français. S’ajoutent aussi des hébergements individuels « ordinaires » loués temporairement. Ainsi, la plateforme Airbnb affiche 53 800 arrivées en 2017, ce qui équivaudrait à 3 % des arrivées dans les hôtels et campings.

L’Arc jurassien suisse détient lui aussi un éventail étendu d’hébergements autres que les hôtels ou campings. La statistique suisse permet de quantifier leur nombre et leur fréquentation à l’échelle de la « grande région lémanique » qui comprend le canton de Vaud et celui également très touristique du Valais (hors Arc jurassien). À titre indicatif, 15 400 logements de vacances y sont exploités commercialement par location ou sous-location à des tiers et totalisent 3,1 millions de nuitées en 2017.