Poitou-Charentes, un carrefour pour les étudiants et les diplômés du supérieur

Nicolas Boudrot, Marc Joubert (Insee)

En 2012, 332 000 picto-charentais adultes possèdent un diplôme du supérieur ou poursuivent des études, soit 23 % des résidents de Poitou-Charentes. Cette proportion régionale est plus faible qu’en Province (-4 points). Avec 53 % de natifs d’autres régions et de l’étranger parmi les résidents diplômés du supérieur et/ou étudiants, et 52 % de départs des natifs, le Poitou-Charentes constitue un carrefour du savoir à l’ouest de la France. Ainsi, l’attractivité de Poitou-Charentes progresse dans le temps mais moins que la moyenne des régions. L’arrivée de natifs de l’étranger joue un rôle notable dans ces équilibres. La mobilité des diplômés tout au long de la vie résulte de l’attractivité régionale en matière d’études supérieures, d’emploi puis d’aménités propices pour les actifs comme pour l’installation des retraités. Au final, le taux de diplômés des résidents résulte d’une part de la mobilité des diplômés et d’autre part, de la force de la reproduction sociale.

Insee Analyses Poitou-Charentes
No 22
Paru le :Paru le22/09/2015
Nicolas Boudrot, Marc Joubert (Insee)
Insee Analyses Poitou-Charentes No 22- Septembre 2015

En 2012, 280 000 résidents de Poitou-Charentes sont diplômés du supérieur () et 52 000 en cours d’études supérieures, soit au total 332 000 personnes. Parmi celles-ci, 56 000 sont âgées de 18 à 24 ans. Elles représentent 17 % de la population des diplômés et/ou étudiants, proche du niveau métropolitain (18 %). Pourtant, seulement 23 % des picto-charentais adultes sont diplômés du supérieur ou étudiants (figure 1). Ce taux régional est inférieur au niveau de la France de province (27 %) et place la région au 17rang, juste devant la Picardie, la Basse-Normandie et la Champagne-Ardenne. À l’inverse, les régions Île-de-France (42 %), Midi-Pyrénées et Rhône-Alpes (32 %) sont celles qui comptent la plus grande part de diplômés du supérieur.

Figure_1Seulement un quart de diplômés et étudiants du supérieur en Poitou-Charentes - Les diplômés du supérieur et étudiants parmi la population résidente en 2012

  • Source : Insee, Recensement de la population 2012

Plus de la moitié des résidents diplômés ou étudiants de Poitou-Charentes sont nés hors de la région

Parmi les 332 000 résidents diplômés du supérieur ou en cours d’étude en Poitou-Charentes, près de 147 000 sont nés dans une autre région, et 29 100 à l’étranger : 53 % des diplômés résidents du Poitou-Charentes sont originaires d’autres régions ou de l’étranger (figure 2). Bien moins qu’en Languedoc-Roussillon (61,7 %), en Provence-Alpes-Côte d’Azur (56,3 %), en Centre-Val-de-Loire (55,4 %), en Midi-Pyrénées (54,7 %) et en Aquitaine (53,1 %), le Poitou-Charentes figure ainsi au 6e rang des régions. Il reste au 6e rang en ne tenant pas compte des diplômés étrangers. Avec 55 000 personnes, les régions limitrophes contribuent pour un peu moins d’un tiers aux arrivées de diplômés ou d’étudiants dans la région (figure 3). Une proportion légèrement inférieure aux arrivées de l’Île-de-France et de l’étranger (méthodologie).

Figure_255 000 arrivées en provenance des quatre régions limitrophes - Où sont nés les habitants diplômés du Poitou-Charentes ?

  • Lecture : parmi les diplômés et étudiants résidents en France, 4,9 % résident en Aquitaine (cercle extérieur), et seulement 3,7 % y sont nés (cercle intérieur). En 2012, on comptait 14 400 personnes nées en Aquitaine et résidant en Poitou-Charentes (largeur des arcs non proportionnelle à la taille des segments de cercle).
  • Source : Insee, Recensement de la population 2012

Figure_3aDes échanges importants avec les régions limitrophes, et avec l’Île-de-France - Les diplômés du supérieur résidant en Poitou-Charentes parmi les diplômés natifs des autres régions en 2012

  • Lecture : en 2012, parmi les diplômés adultes résidant en Poitou-Charentes, 5 000 sont nés en Limousin soit 3,5 % des diplômés natifs du Limousin.
  • L’épaisseur de la flèche est proportionnelle à l’importance du contingent.
  • Source : Insee, Recensement de la population 2012

Figure_3bDes échanges importants avec les régions limitrophes, et avec l’Île-de-France - Les natifs de la région Poitou-Charentes diplômés du supérieur parmi les résidents de même niveau de diplôme en 2012

  • Lecture : en 2012, parmi les diplômés adultes nés en Poitou-Charentes, 6 200 résident en Limousin soit 4 % des diplômés résidant en Limousin.
  • L’épaisseur de la flèche est proportionnelle à l’importance du contingent.
  • Source : Insee, Recensement de la population 2012

La moitié des étudiants ou diplômés natifs du Poitou-Charentes vivent hors de leur région de naissance

Près de 325 000 natifs du Poitou-Charentes sont titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur ou sont actuellement en étude. Parmi eux, 169 000 vivent dans une autre région française : ainsi 52,1 % des natifs du Poitou-Charentes, diplômés ou étudiants du supérieur, n’y résident plus (figure 4). La région Poitou-Charentes figure au 7e rang des régions dont les natifs diplômés ou en cours d’étude sont le plus fréquemment partis, Limousin, Champagne-Ardenne et Bourgogne étant le trio de tête. En 1990, 57,3 % des diplômés nés en Poitou-Charentes avaient quitté leur région de naissance. Cette baisse relative des départs est partagée par les régions du sud-ouest, dessinant une progression de leur attractivité en matière d’emploi pour les diplômés. Le Poitou-Charentes est la région métropolitaine qui a connu la plus forte baisse en proportion des départs, passant du 4e au 7e rang.

En 2012, 68 700 diplômés du supérieur ou étudiants nés en Poitou-Charentes résident dans l’une des quatre régions limitrophes, soit 41 % des départs. Les échanges à proximité sont d’ailleurs équilibrés, à l’exception de ceux opérés avec l’Aquitaine. Avec cette dernière, les départs (28 100) sont deux fois plus nombreux que les arrivées (14 400). Au-delà, l’Île-de-France et Midi-Pyrénées restent les principales régions de destination (respectivement 43 100 et 10 400 départs). Les échanges avec le Limousin sont relativement équilibrés, avec 6 200 arrivées en Poitou-Charentes pour 5 000 départs vers le Limousin (encadré : les mobilités des diplômés en ALPC).

L’importance des départs des diplômés du supérieur pour un pays étranger n’est pas connue à l’échelle des régions : dans une approche limitée aux seules personnes résidant actuellement en France, ces derniers ne sont pas comptabilisés (champ de l’étude).

Figure_468 700 étudiants et diplômés nés en Poitou-Charentes résident dans les quatre régions limitrophes - Où habitent les diplômés nés en Poitou-Charentes ?

  • Lecture : parmi les diplômés et étudiants résidents en France, 4,9 % résident en Aquitaine (cercle extérieur), et seulement 3,7 % y sont nés (cercle intérieur). En 2012, on comptait 28 100 personnes nées en Poitou-Charentes et résidant en Aquitaine (largeur des arcs non proportionnelle à la taille des segments de cercle).
  • Source : Insee, Recensement de la population 2012

Les personnes mobiles sont plus souvent diplômées

Parmi les 18 à 24 ans, nés en Poitou-Charentes, la proportion de diplômés ou d’étudiants a presque doublé entre 1990 (22,3 %) et 2012 (43,6 %). Néanmoins, cette progression est moins vive qu’en France de province et l’écart s’accroît de -2,3 points à -3,0 points. Au sein de cette classe d’âge, les écarts en terme de proportion de diplômés et d’étudiants divergent entre ceux qui arrivent dans la région (50,9 %), ceux qui en partent (61,2 %), et ceux qui restent (36,6 %). Ces différences révèlent tant les opportunités d’étude, que la recherche d’emploi lié à une filière d’étude courte ou longue.

L’évolution du taux de diplômés de la tranche d’âge des plus de 64 ans reflète aussi la progression du niveau de qualification dans la vie active. Ainsi, en 1990, 2,8 % des personnes de plus de 64 ans nées en Poitou-Charentes étaient diplômées contre 8,8 % en 2012. Malgré cette évolution favorable, le retrait s’est accentué par rapport à la France de province (-0,5 point d’écart en 1990 contre -1,9 points en 2012).

Les opportunités et les contraintes de la vie active, ont joué entièrement pour les plus de 64 ans, alors que ce n’est pas encore le cas pour les 18 à 24 ans. Les opportunités professionnelles ont contribué à augmenter la proportion de départ et d’arrivée pour cette classe d’âge ; de même les opportunités de formation ont modifié le taux de diplômés. Au sein de la classe d’âge des plus de 64 ans, ceux qui ont quitté la région sont plus souvent diplômés du supérieur (16,2 %) que ceux qui y sont arrivés (14,8 %) mais surtout que les stables -natifs et résidents en 2012- (5,3 %). Toutefois, ce dernier groupe rassemble à la fois ceux qui n’ont jamais quitté la région comme ceux qui sont revenus dans leur région de naissance après une mobilité. Entre 2003 et 2008, ces retours concernaient 17 % des arrivants dans la région.

Au final, l’arrivée de diplômés nés à l’étranger équilibre les échanges

Au jeu des arrivées et des départs de diplômés du supérieur tout au long de la vie, le Poitou-Charentes est quasiment à l’équilibre. D’une part, il accueille 147 000 personnes diplômées ou en cours d’étude nés dans une autre région française, et d’autre part, il a vu partir 169 000 diplômés natifs de Poitou-Charentes vers d’autres régions françaises. Mais l’accueil de 29 100 résidents diplômés ou étudiants du supérieur nés à l’étranger rétablit l’équilibre. Parmi ceux-ci, 42 % sont nés dans un autre pays d’Europe (dont presque la moitié au Royaume-Uni), 40 % en Afrique, 12 % en Asie, et 6 % en Amérique.

Les 18 à 24 ans, aux âges des études supérieures, enregistrent plus d’arrivées que de départs : 25 900 arrivent tandis que 20 000 partent, soit un solde positif de 5 900 personnes diplômées ou en cours d’étude. La prise en compte des personnes nées à l’étranger contribue à ce solde à hauteur de 3 400 personnes en 2012. Environ 51 % des 18 à 24 ans nés à l’étranger sont étudiants ou diplômés du supérieur.

La tranche d’âge des 25 à 44 ans enregistre de nombreux départs et arrivées pour un déficit de 15 000 diplômés vis à vis des autres régions françaises. Celle des 45 à 64 ans est aussi déficitaire (-7 400), mais les flux sont moins importants. Les 20 800 arrivées de natifs de l’étranger sur ces deux tranches d’âge permettent de diminuer le déficit global à -1 600. Cette tendance concerne des personnes en pleine vie active et peut être mise en lien avec les caractéristiques structurelles de l’économie régionale, qui offre moins de postes de cadres que dans les régions disposant de métropoles.

Comme pour les actifs, le solde des diplômés du supérieur est déficitaire sur la tranche d’âge des plus de 64 ans au jeu des migrations entre régions (-2 800). Il devient excédentaire grâce à l’arrivée de 4 900 diplômés nés à l’étranger, notamment britanniques.

Une progression de l’attractivité à tout âge depuis 1990

En comparant la situation à celle de 1990, le Poitou-Charentes a accru son attractivité à tout âge. En 1990, le solde était déficitaire pour les 18 à 24 ans, d’environ 4 900 personnes (malgré 1 400 natifs de l’étranger) alors qu’il est désormais excédentaire ; pour les 25 à 64 ans le déficit d’environ 14 100 personnes (malgré 7 000 natifs de l’étranger) est aujourd’hui très faible ; et pour les plus de 64 ans le solde négatif d’environ 1 000 personnes (malgré 400 natifs de l’étranger) est positif en 2012. Ce constat reflète l’amélioration de l’offre et de l’attraction des pôles d’enseignement supérieur du Poitou-Charentes (dont la création en 1993 puis la montée en charge de l’Université de La Rochelle), ainsi que de l’attractivité professionnelle au-delà de l’évolution générale de la structure des emplois.

Les arrivées de personnes diplômées ou en cours d’études nées à l’étranger ont bondi de 8 700 en 1990 à 29 000 en 2012. Elles ont fortement contribué à réduire le déficit de la tranche d’âge des 25 à 64 ans.

La démographie des diplômés du supérieur influencée par la reproduction sociale

Depuis 1990, la part des diplômés ou étudiants du supérieur nés dans la région a triplé de 9 % à 23 % des adultes. Cette augmentation provient de la plus forte propension des jeunes à poursuivre des études longues. Ainsi, les jeunes affichent le taux de diplômés ou étudiants du supérieur le plus élevé : 43,6 % pour les 18 à 24 ans, 28 % pour les 25 à 64 ans contre 9 % pour les plus de 64 ans. Cependant, ce taux reste plus faible qu’en moyenne nationale. L’écart pour chaque tranche d’âge s’établit entre 2 et 3 points en défaveur du Poitou-Charentes. Il résulte d’un taux de poursuite post-bac plus faible qu’au niveau national malgré une plus grande réussite au bac.

Cette moindre proportion en Poitou-Charentes est à relier à un effet de composition des catégories sociales, susceptible de se prolonger de génération en génération : moins de diplômés parmi les adultes résidents de 1990 en âge d’avoir des enfants et par suite, moins de diplômés parmi les jeunes natifs d’aujourd’hui. Cette relation proportionnelle tend à pérenniser la hiérarchie des régions en matière de taux de diplômés (figure 5).

Figure_5La proportion de diplômés natifs d’une région en 2012 est reliée à la proportion de diplômés résidents en 1990 (génération de 25 ans à 34 ans) - Part des résidents diplômés du supérieur en 1990 en fonction de la part des natifs diplômés du supérieur en 2012 (hors Île-de-France)

  • Lecture : la taille des bulles est proportionnelle au nombre de résidant de chaque région âgés de 25 ans à 34 ans en 2012 et titulaire d'un diplôme du supérieur.
  • Source : Insee, Recensement de la population 2012

Les mobilités des diplômés en ALPC (Aquitaine, Limousin et Poitou-Charentes)

ALPC compte 1,2 millions de résidents diplômés ou en cours d’étude supérieure, soit 8,1 % des diplômés résidents en France. ALPC se positionne ainsi au 4rang des régions de résidence de diplômés derrière l’Île-de-France, Auvergne-Rhône-Alpes et Languedoc-Roussillon - Midi-Pyrénées. Parmi les résidents âgés de plus de 18 ans, 26 % de la population est soit diplômée du supérieur, soit en cours d’étude, un peu moins qu’en France de province (27 %).

La nouvelle région est attractive pour les diplômés, puisque 398 000 y sont nés et en sont partis tandis que 568 000 s’y sont installés, soit un solde positif de 170 000 en 2012 (y compris les 121 000 diplômés nés à l’étranger et résidents dans la région). ALPC est attractive pour toutes les régions du nord de la France, hormis l’Île-de-France. La nouvelle région affiche un déficit de 5 500 diplômés ou étudiants du supérieur vis à vis de l’Île-de-France (124 300 arrivées contre 129 800 départs). De même, les régions du sud attirent plus les diplômés d’ALPC. Ainsi Languedoc-Roussillon - Midi-Pyrénées bénéficie de 83 400 départs d’ALPC contre 54 700 arrivées en ALPC. De même, Provence-Alpes-Côte d’Azur attire 28 200 arrivants d’ALPC contre 17 600 partants vers ALPC.

Sources

Méthodologie

Les mobilités inter régionales sont mesurées à partir du recensement de la population. La méthode retenue compare les régions de naissance et les régions de résidence déclarées. Ainsi, une personne ne résidant pas dans sa région de naissance sera comptabilisée comme ayant connu une migration inter régionale. Cette mesure en stock se distingue d’une approche en flux, qui mesure sur une période donnée le nombre de mobilités résidentielles. En effet, la méthode retenue ne permet pas de reconstituer les étapes d’un parcours de mobilité : une personne ayant vécu une partie de sa vie en dehors de sa région de naissance, et revenue depuis, ne sera pas considérée comme migrante. Réciproquement, une personne ayant connu plusieurs mobilités l’amenant à vivre dans différentes régions ne sera comptabilisée qu’une seule fois, du point de vue de sa région de naissance et de son actuelle région de résidence. L’approche en stock, de nature cumulative, permet en revanche d’appréhender les conséquences démographiques sur l’ensemble d’une population. Ainsi, au fil du cycle de vie, la proportion de natifs d’une région ayant migré au cours de leur vie apparaît plus élevée avec l’âge, dans la mesure où s’ajoutent les mobilités de trois périodes charnières : au moment des études, lors de la vie professionnelle, lors de la retraite.

Champ de l’étude

L’ étude porte sur les adultes âgés de 18 ans ou plus et résidant en France. Les natifs d’une région française résidant aujourd’hui à l’étranger ne sont donc pas pris en compte. En 2012, près de 1,2 millions de personnes âgées de 18 ans ou plus étaient inscrites au registre mondial des Français établis hors de France. L’enquête sur l’expatriation des Français estime à 85 % la part des titulaires d’un niveau de formation supérieur au baccalauréat.

Définitions

Les diplômes de l’enseignement supérieur correspondent aux titres de niveau post-baccalauréat, délivrés par les universités, les instituts universitaires de technologie, les instituts universitaires de formation des maîtres, les sections de techniciens supérieurs, les écoles d’ingénieurs, les écoles de commerce, gestion, vente et comptabilité, les écoles para médicales et sociales, etc.

L’étude prend en compte toutes les personnes disposant d’un diplôme du supérieur, ainsi que les adultes inscrits dans un établissement de l’enseignement supérieur et titulaires au moins d’un diplôme de niveau baccalauréat.

Pour en savoir plus

Lacour C., « Les diplômés du supérieur en Aquitaine : la région profite de son attractivité», Insee Analyses Aquitaine n° 13, septembre 2015.

Garçon N., Mallemanche C., Prévot P., « Le Limousin attire des étudiants mais perd des diplômés », Insee Analyses Limousin n° 15, septembre 2015.

Degorre A., « Région de naissance, région de résidence : les mobilités des diplômés du supérieur », Insee Première, n° 1557, juin 2015