L’effort de recherche partagé entre public et privé

Jean-Manuel Alvarenga, Marie-Laure Kayali

En 2012, les dépenses intérieures de recherche et développement de l’Alsace s’élèvent à 952 millions d’euros. Elles représentent 1,7 % du PIB régional et sont pour 56 % le fait des entreprises. Pour les administrations, en l’absence d’établissements publics à caractère industriel et commercial, la dépense en Alsace est réalisée par les autres établissements publics. L’emploi de conception-recherche est proche des grandes structures universitaires, les deux tiers étant localisés dans les zones d'emploi de Strasbourg et de Mulhouse.

Jean-Manuel Alvarenga, Marie-Laure Kayali
Insee Flash Alsace No 6- Décembre 2015

L’Union Européenne a fixé un objectif de dépenses de recherche et développement à 3 % du produit intérieur brut (PIB) dans le cadre de la stratégie Europe 2020. Cet effort de recherche s’élève à 1,7 % du PIB en Alsace, la classant au 9e rang des actuelles régions, en dessous du niveau national (2,2 %). Seules les régions Midi-Pyrénées et Île-de-France dépassent l’objectif européen avec respectivement 4,8 % et 3,0 % de leur PIB. À l’opposé, Champagne-Ardenne est la région de métropole avec le plus faible effort de recherche (0,7 %). En Lorraine, il atteint 1,3 % du PIB.

Entre 2007 et 2012, l’effort de recherche a progressé dans la quasi-totalité des régions, un peu moins vite cependant en Alsace qu’en France (+ 0,2 point pour + 0,3 point).

Figure_1L’Alsace en 9e position des régions pour la part de son PIB consacré à la recherche en 2012

  • Note : pour des raisons de secret statistique, la Corse est regroupée avec Provence-Alpes-Côte d’Azur.
  • Source : MESR, enquête annuelle sur les moyens consacrés à la R&D dans les entreprises.

Le poids des entreprises moins important qu’au niveau national

En 2012, le montant total des dépenses intérieures de recherche et développement (DIRD) s’élève à 952 millions d’euros en Alsace, majoritairement du fait des entreprises à hauteur de 56 %. Le poids des entreprises est encore plus important au niveau national (65 %). L’Alsace se place au 17e rang des régions de France pour la part de sa dépense privée.

Les entreprises en Alsace consacrent 534 millions d’euros à la recherche en 2012, dont 350 millions dans le Bas-Rhin et 184 dans le Haut-Rhin.

Les entreprises se consacrent essentiellement au développement expérimental (52 % de la dépense) et à la recherche appliquée (37 %). La part de la dépense pour la recherche fondamentale, bien que plus faible (11 %), est nettement supérieure à la moyenne nationale (5 %), et classe la région en 2e position derrière l’Auvergne (27 %). Ces deux régions se démarquent par l’importance de la recherche fondamentale dans les secteurs de la pharmacie et de la chimie.

En Alsace, les dépenses sont concentrées dans un petit nombre de branches : la moitié étant réalisée par l’industrie pharmaceutique (21 %), la fabrication de machines et équipements (16 %) et l’industrie automobile (13 %). Au niveau national, cette concentration est moins importante, les trois principales branches concentrant seulement 36 % de la DIRD avec l’industrie automobile (15 %), la construction aéronautique et spatiale (11 %) et l’industrie pharmaceutique (10 %). Dans l’industrie, plus de la moitié de la dépense de R&D est réalisée dans des branches de moyenne-haute technologie et le tiers dans la haute technologie pour respectivement 40 % et 46 % au niveau national.

Les entreprises principalement implantées en Alsace financent la quasi-totalité de la recherche en autofinancement pour seulement 78 % de la dépense en France. La part de financement privé ne représente que 4 % de la dépense et le public 3 % pour respectivement 17 % et 6 % au niveau national. 400 entreprises bénéficient du crédit impôt-recherche pour un montant de 72 millions d’euros.

Figure 2Les trois premières branches de recherche en Alsace concentrent 50 % de la dépense pour seulement 36 % en France

Les trois premières branches de recherche en Alsace concentrent 50 % de la dépense pour seulement 36 % en France - Lecture : la branche de l’industrie pharmaceutique dépense 111 millions d’euros pour la recherche, pour une dépense globale de 534 millions pour les entreprises. De manière complémentaire, les administrations dépensent en Alsace 418 millions d’euros, pour 16 474 millions en France
Les cinq premières branches de recherche en Alsace En millions d'euros En % Les cinq premières branches de recherche en France En millions d'euros En %
Industrie pharmaceutique 111 21 Industrie automobile 4 481 15
Fabrication de machines et équipements n.c.a. 88 16 Construction aéronautique et spatiale 3 182 11
Industrie automobile 68 13 Industrie pharmaceutique 3 141 10
Fabrication d'équipements électriques 46 9 Activités informatiques et services d'information 2 015 7
Activités spécialisées, scientifiques et techniques 30 6 Activités spécialisées, scientifiques et techniques 1 779 6
Ensemble de cinq premières branches 343 64 Ensemble de cinq premières branches 14 598 49
Total 534 100 Total 30 071 100
  • Lecture : la branche de l’industrie pharmaceutique dépense 111 millions d’euros pour la recherche, pour une dépense globale de 534 millions pour les entreprises. De manière complémentaire, les administrations dépensent en Alsace 418 millions d’euros, pour 16 474 millions en France
  • Source : MESR, enquête annuelle sur les moyens consacrés à la R&D dans les entreprises.

La moitié de la dépense publique dans l’enseignement supérieur

En 2012, les dépenses de recherche publique s’élèvent à 418 millions d’euros, principalement effectuées dans l’enseignement supérieur (51 %) et dans les établissements publics à caractère scientifique et technologique (EPST) pour 34 %. La part des établissements publics à caractère industriel et commercial (EPIC), présents seulement dans cinq régions, est de 23 % en France. Ils sont absents en Alsace. Par contre, la part dans la dépense de recherche des autres administrations est très importante dans la région comparée à la France (respectivement 14 % et 5 %), en lien avec la présence d’un institut de recherche bi-national franco-allemand.

L’Alsace accueille treize écoles doctorales dont douze dans le Bas-Rhin qui totalisent 2 654 inscriptions. Un quart des thèses sont soutenues en médecine et santé, et 19 % en sciences humaines et en chimie. Cette dernière a un poids important en Alsace, la discipline ne représentant que 8 % des soutenances au niveau national. À l’opposé les soutenances en sciences et technologie de l’information et de la communication et en sciences agronomiques et écologie sont peu nombreuses pour un poids en France respectivement de 12 % et de 3 %. Plus de la moitié des publications scientifiques sont réalisées en collaboration internationale et 35 % en collaboration européenne ce qui classe l’Alsace respectivement au 3e et au 1er rang des régions. 15 % des publications alsaciennes sont qualifiées « à fort impact » ce qui place l’Alsace en tête des régions.

Cinq emplois de conception-recherche sur dix dans la zone d'emploi de Strasbourg

L’Alsace compte, en 2011, 19 600 emplois de conception-recherche, soit 2,6 % de l’ensemble des emplois de la région. C’est proche du niveau national (2,7 %) et place l’Alsace au 4e rang des régions derrière l’Île-de-France (4,7 %), Midi-Pyrénées (3,8 %) et Rhône-Alpes (3,2 %).

Ces emplois, proches des grandes structures universitaires, sont pour moitié concentrés dans la zone d'emploi de Strasbourg et pour 17 % dans celle de Mulhouse alors qu'elles représentent 59 % de l'emploi total de la région.

La grande majorité sont des emplois de cadres (66 %). Les trois professions les plus représentées sont celles des ingénieurs et cadres d’étude de recherche et de développement en informatique (24 % des emplois), des chercheurs de la recherche publique (13 %) et des techniciens de recherche-développement et des méthodes de fabrication en électricité, électromécanique et électronique (11 %).

Entre 2006 et 2011 en Alsace, les emplois de conception-recherche ont progressé de 5 % alors qu’ils sont restés globalement stables au niveau national (+ 0,4 %).

Le Bade-Wurtemberg, au 1er rang des régions européennes pour l’effort de recherche

Selon Eurostat, les dépenses intérieures en recherche et développement du Bade-Wurtemberg atteignent 19,5 milliards d’euros en 2011, ce qui représente 5,1 % du PIB (contre 3,1 % en 2001). Ainsi, le Bade-Wurtemberg devance nettement non seulement les autres länder, mais aussi les 98 autres régions européennes (NUTS 1). Depuis 2009, la progression des dépenses ainsi réalisées est de 19 %. Ce sont les entreprises qui y contribuent le plus (80,5 %) avec 15,7 milliards d’euros. La part du Bade-Wurtemberg dans l’ensemble du pays représente plus d’un quart (26 %). L’Allemagne (y compris les structures allemandes implantées à l’étranger) dépense 75,5 milliards d’euros en termes de recherche et développement et son effort de recherche est de 2,9 % contre 2,5 % dix ans auparavant. La dépense en recherche et développement des entreprises s’élève à 51,1 milliards d’euros, soit 67,5 %. Si on compare la dépense en recherche et développement par habitant tous secteurs confondus, elle est de 510 euros par habitant en Alsace en 2011 (France : 690 euros par habitant), de 1 810 dans le Bade-Wurtemberg, dont Stuttgart (2 580 euros/hab.) et de 590 en Rhénanie Palatinat (Allemagne : 920). En Suisse, elle s’élève à 1 930 euros par habitant en 2012, soit 15,5 milliards d’euros au total. Si on considère uniquement le secteur des entreprises, la dépense de l’Alsace s’élève à 280 euros/hab., celle du Bade-Wurtemberg à 1 460 et celle de Suisse du Nord-Ouest à 3 940.

Sources : Office statistique du Bade-Wurtemberg et Eurostat.

Pour en savoir plus

Bisault L., Kubrak C. et Testas A., « L'effort de recherche dans les régions - Midi-Pyrénées et l'Île-de-France en tête des régions françaises », Insee Première n° 1559, juin 2015.

Deltour A. et Pierre J-J., « Une innovation très présente malgré de faibles dépenses de recherche », Insee Analyses Lorraine n° 34, décembre 2015.

Recherche & développement, Tableaux de l'économie française, édition 2015, février 2015.

Dortet-Bernadet V. et Sicsic M., « Aides à la R&D pour les petites entreprises », Les entreprises en France, Insee références, édition 2014, novembre 2014.

Dixte C. et Testas A., « Ouvrir dans un nouvel ongletDépenses de recherche et développement en France en 2012 - Premières estimations pour 2013 », Note d'information 14.06 Ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, août 2014.