Dans le Tarn, une croissance démographique tirée par l’influence toulousaine

Magali Flachère

Après une stagnation dans les années 80 et 90, la population du Tarn progresse plus fortement sur la période 2006-2011. Mais ce récent dynamisme démographique est contrasté sur ce territoire caractérisé par un maillage de villes moyennes, bien reliées entre elles ou à la capitale régionale. La croissance démographique s’étend ainsi le long des principaux axes de communication, notamment sur celui reliant Albi à Toulouse. L’est du département, plus montagneux, poursuit son déclin. Le nord connaît un regain de croissance sur la période récente. Le poids des ouvriers, historiquement élevé, diminue de façon continue depuis 30 ans au profit des autres catégories socioprofessionnelles.

Insee Analyses Midi-Pyrénées
No 9
Paru le :Paru le12/12/2014
Magali Flachère
Insee Analyses Midi-Pyrénées No 9- Décembre 2014

Au 1er janvier 2011, le Tarn compte 377 675 habitants et reste ainsi le deuxième département le plus peuplé de Midi-Pyrénées, loin cependant derrière la Haute-Garonne. Après une longue période de stabilité, la croissance de la population s’accélère à l’aube des années 2000 (figure 1). Ainsi, sur la période récente 2006-2011, la croissance démographique est nettement plus forte que sur la tendance de long terme 1982-2011 : + 2 500 habitants en moyenne par an contre + 1 300. Le rythme d’accroissement annuel depuis 2006 devient supérieur à celui de la France métropolitaine (+ 0,7 % contre + 0,5 %) mais demeure cependant en deçà de celui de Midi-Pyrénées (+ 0,9 %).

La croissance démographique du Tarn accélère depuis une dizaine d’années

Figure1Évolution de la population entre 1962 et 2011 par territoire

Évolution de la population entre 1962 et 2011 par territoire
France métropolitaine Midi-Pyrénées Tarn Ouest Centre Montagne Nord
1962 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0
1968 107,1 106,0 103,9 107,5 106,4 101,0 96,4
1975 113,3 110,0 105,8 112,6 116,4 96,6 87,2
1982 117,0 112,8 106,2 117,0 118,8 93,7 80,9
1990 121,9 117,9 107,2 122,4 122,3 90,1 75,3
1999 126,0 123,8 107,5 127,5 122,1 86,1 71,7
2006 132,3 134,7 114,3 142,8 125,5 87,8 73,3
2011 135,9 140,9 118,2 151,0 129,3 87,3 74,3
  • Sources : Insee, recensements de la population

Figure1Évolution de la population entre 1962 et 2011 par territoire

  • Sources : Insee, recensements de la population

Un solde naturel à l’équilibre

Hormis en Haute-Garonne et dans le Tarn-et-Garonne, les décès sont généralement plus nombreux que les naissances dans les autres départements de la région, en raison du caractère âgé des populations. Dans le Tarn, le solde naturel est néanmoins à l’équilibre sur la période 2006-2011, prolongeant la tendance de long terme (figure 2). Ainsi, l’essor démographique du Tarn est uniquement le fait de l’arrivée de nouveaux habitants sur son territoire : la variation de population due au solde migratoire est de + 0,7 % sur 2006-2011, en nette progression par rapport à la tendance de long terme (+ 0,4 %). Cette évolution récente est proche de la moyenne régionale, mais n’atteint pas celle des départements plus ruraux et plus attractifs, tels que le Gers, l’Ariège ou le Lot. Dans ces départements, la croissance démographique est néanmoins ralentie par un solde naturel négatif.

Un essor démographique lié uniquement aux apports migratoires

Figure2Population et évolution de la population et des soldes naturels et migratoires entre 1982 et 2011

Population et évolution de la population et des soldes naturels et migratoires entre 1982 et 2011
Population Évolution annuelle 2006-2011 (en %) Évolution annuelle 1982-2011 (en %)
2011 2006 1982 Total due au solde naturel due au solde migratoire Total due au solde naturel due au solde migratoire
Tarn 377 675 365 335 339 345 0,7 0,0 0,7 0,4 -0,1 0,4
Nord 38 168 37 688 41 586 0,3 -0,5 0,7 -0,3 -0,6 0,3
Aire d'influence de Carmaux 17 282 17 460 20 780 -0,2 -0,4 0,2 -0,6 -0,5 -0,1
Ouest 167 761 158 659 129 913 1,1 0,2 1,0 0,9 0,0 0,9
Aire d'influence d'Albi 97 198 94 119 81 067 0,6 0,0 0,6 0,6 0,0 0,6
Aire d'influence de Gaillac 16 902 15 336 12 571 2,0 0,1 1,9 1,0 -0,2 1,3
Aire d'influence de Lavaur 12 410 11 784 9 297 1,0 0,2 0,8 1,0 -0,1 1,1
Saint-Sulpice 8 213 7 378 3 877 2,2 1,1 1,1 2,6 0,4 2,2
Rabastens 5 083 4 747 3 806 1,4 0,0 1,4 1,0 -0,2 1,3
Centre 106 590 103 453 97 898 0,6 0,2 0,4 0,3 0,2 0,1
Aire d'influence de Castres 67 615 66 960 63 518 0,2 0,3 -0,1 0,2 0,3 -0,1
Aire d'influence de Graulhet 12 498 12 675 14 002 -0,3 0,2 -0,5 -0,4 0,1 -0,5
Réalmont 3 285 3 179 2 538 0,7 0,0 0,7 0,9 -0,2 1,1
Puylaurens 3 235 2 891 2 778 2,3 0,0 2,2 0,5 -0,3 0,8
Montagne 65 156 65 535 69 948 -0,1 -0,4 0,3 -0,2 -0,3 0,0
Aire d'influence de Mazamet 25 681 25 957 28 719 -0,2 -0,3 0,1 -0,4 -0,1 -0,3
Labruguière 6 320 5 834 5 541 1,6 0,0 1,6 0,5 0,0 0,4
Aire d'influence de Lacaune 3 009 3 309 3 699 -1,9 -0,6 -1,3 -0,7 -0,1 -0,6
France métropolitaine 63 069 637 61 399 733 54 334 871 0,5 0,4 0,1 0,5 0,4 0,1
Midi-Pyrénées 2 903 420 2 776 822 2 325 319 0,9 0,2 0,7 0,8 0,1 0,7
  • Sources : Insee, recensements de la population et état civil

L’ouest du département sous influence toulousaine

Le dynamisme démographique du Tarn est particulièrement fort le long de l’axe Albi-Toulouse : l’autoroute A68, achevée dans les années 1990, ainsi que la ligne ferroviaire permettent le développement des villes situées entre ces deux grandes aires urbaines (figure 3). L’aire urbaine de Toulouse, très attractive, déborde d’ailleurs largement des limites de la Haute-Garonne, en englobant la périphérie ouest du Tarn, de Rabastens à Cuq-Toulza. Bien qu’engagé depuis 30 ans, le dynamisme de ce territoire est particulièrement fort sur la période récente. En témoigne notamment la nette croissance de la commune de Saint-Sulpice, qui gagne 170 habitants par an (+ 2,2 %) entre 2006 et 2011. Non loin, celle de Rabastens augmente de 1,4 % par an sur la même période.

Figure3Entre 2006 et 2011, la croissance s’intensifie sous l’influence toulousaineEntre 2006 et 2011

figure4Entre 1982 et 2011

  • Sources : Insee, recensements de la population 2011, 2006 et 1982

À la frontière de l’aire urbaine toulousaine, l’aire de Lavaur suit la tendance des villes reliées à la capitale régionale : + 1 % par an depuis 2006 ; c’est autant que sur la période de long terme.

Plus éloignée de Toulouse, mais plus proche d’Albi, l’aire de Gaillac progresse elle de 1,9 % par an.

À l’extrémité de l’axe, Albi, chef lieu du département avec ses 49 200 habitants, continue doucement de s’agrandir, au rythme d’une petite centaine d’ habitants par an depuis 2006 (+ 0,2 %). En revanche, les communes dans son aire d’influence sont plus dynamiques. Ainsi dans sa couronne, à laquelle appartiennent notamment Lescure-d’Albigeois et Marssac-sur-Tarn, le rythme passe à 340 habitants par an (+ 1,5 %).

Croissance contrastée au sein du département

L’aire urbaine de Castres s’est accrue depuis 2006 uniquement grâce au dynamisme de certaines communes sous l’influence de la ville-centre (+ 2,1 % à Soual , + 2,0 % à Viviers-lès-Montagnes). La ville-centre perd elle des habitants (un peu moins de 200 habitants par an depuis 2006), tout comme, dans une moindre mesure, les villes de Sémalens et Navès.

Entre Castres et Toulouse, la croissance est plus homogène. Puylaurens attire et dépasse désormais la barre des 3 000 habitants. Sa croissance de 2,3 % par an depuis 2006 est une des plus fortes du département.

La nationale 112 dessert tout le centre du département, et relie notamment Castres à Albi. Les communes de Réalmont et Lautrec profitent ainsi de la proximité de ces deux grandes aires urbaines et leur population croît de respectivement 0,7 % et 0,9 % par an depuis 2006.

À l’est, le territoire se vide encore

Au sud-est du département, la densité démographique se réduit : le Sidobre au nord-est de Castres, le Massif central entourant Lacaune et la Montagne noire au sud de Mazamet font de cette partie du département un territoire montagneux où les villes sont quelque peu isolées. L’est est particulièrement en déclin. L’aire d’influence de Lacaune perd ainsi 0,7 % par an d’habitants depuis 1982 ; le rythme de cette baisse s’est accru sur la période récente (- 1,9 % par an depuis 2006). En effet, la ville-centre perd beaucoup d’habitants sur cette période (- 2 %), autant en raison d’un déficit naturel que de départs.

À l’extrême sud, l’aire d’influence de Mazamet perd un peu plus d’une centaine d’habitants par an entre 1982 et 2011, soit une baisse de 0,4 % par an. La commune, de tradition manufacturière, a subi les crises du textile et de la mégisserie dans les années 70. Le déclin est cependant moindre sur la période récente en raison d’arrivées supérieures aux départs qui tendent à compenser le fort déficit naturel.

Regain de croissance au nord

Le nord du département est un territoire peu peuplé et vallonné qui abrite la forêt domaniale de Grésigne et des villages médiévaux (Penne, Castelnau-de-Montmiral, Cordes-sur-Ciel, etc.). La croissance démographique connaît un regain depuis 2006, alors même que la tendance de long terme est négative. En dehors de l’aire de Carmaux, le solde naturel reste négatif sur 2006-2011 mais le territoire gagne des habitants grâce à de nombreuses arrivées. Ainsi la population de la commune de Monestiés croît fortement depuis 2006 (+ 1,6 %) après avoir stagné depuis 1982, grâce à un solde migratoire qui a doublé (+ 2,7 %).

Carmaux, ancienne ville minière, a connu une forte crise économique en raison du déclin puis de la cessation de l’industrie charbonnière. Sur la période récente, le solde migratoire devient positif dans l’aire ce qui ralentit la perte d’habitants (- 40 habitants par an). Depuis 1982, son aire perd 120 habitants par an, en raison à la fois d’un déficit naturel et d’un déficit migratoire.

Moins d’ouvriers et plus de cadres

Avec son riche passé industriel (le charbon à Carmaux, le cuir à Graulhet et Mazamet), le Tarn a longtemps abrité une population d’ouvriers. En raison du déclin de ces activités, elle ne représente plus que 23,6 % de la population active en 2011, contre 35,1 % en 1982 (figure 5). C’est encore 3 points de plus que pour la région Midi-Pyrénées. Les employés suivent eux une évolution inverse, en représentant 30,6 % de la population active du département, soit 7 points de plus qu’en 1982.

Figure5Des tarnais plus diplômés qu'auparavant - évolution de la structure de la population tarnaise

Des tarnais plus diplômés qu'auparavant - évolution de la structure de la population tarnaise
Effectif dans le Tarn en Répartition (%)
Tarn Midi-Pyrénées France métropolitaine
2011 2011 2006 1982 2011 2011
Population selon l'âge
Moinse de 18 ans 76 452 20,2 20,2 24,2 20,3 21,9
18-24 ans 25 394 6,7 6,9 9,9 8,4 8,6
25-39 ans 60 884 16,1 17,4 19,3 18,2 19,0
40-59 ans 104 517 27,8 28,0 24,4 27,3 27,0
60-74 ans 62 735 16,6 15,7 14,3 15,2 14,4
75 ans ou plus 47 694 12,6 11,8 7,9 10,6 9,1
Population par situation principale
Actifs ayant un emploi 144 785 38,4 38,6 37,6 41,3 41,4
Chômeurs 20 897 5,5 5,0 3,7 5,5 5,8
Retraités ou préretraités 104 208 27,6 26,6 17,6 24,1 21,7
Élèves, étudiants, stagiaires 24 329 6,4 7,0 7,0 7,7 7,7
Moins de 14 ans 59 222 15,7 15,3 18,5 15,7 17,2
Femmes ou hommes au foyer 11 074 2,9 3,8 15,6 2,6 3,0
Autres inactifs 13 159 3,5 3,7 3,1 3,2
Population active par CSP
Agriculteurs exploitants 5 591 3,4 4,3 11,6 3,1 1,6
Artisans, commerçants, chefs entreprise 12 777 7,8 7,5 10,1 7,0 5,9
Cadres, professions intellectuelles sup. 17 626 10,8 9,7 4,9 15,7 15,7
Professions intermédiaires 38 937 23,8 23,1 14,4 25,1 24,6
Employés 49 981 30,6 30,0 23,9 28,7 29,0
Ouvriers 38 640 23,6 25,4 35,1 20,4 23,2
Population par mode de cohabitation
Couples avec au moins un enfant 159 898 42,3 44,1 /// 42,2 45,6
Familles monoparentales 34 500 9,1 8,4 /// 9,3 9,9
Couples sans enfant 106 506 28,3 27,8 /// 25,9 23,6
Personnes seules 53 647 14,2 13,1 /// 15,8 14,9
Autres ménages (colocataires...) 13 026 3,4 4,0 /// 4,3 3,7
Communautés 10 124 2,7 2,6 /// 2,5 2,3
Population des plus de 15 ans ayant terminé leurs études, par niveau de diplôme
Sans diplôme 107 865 36,7 41,9 72,1 31,7 33,6
CAP, BEP 72 959 24,8 24,6 14,2 23,0 23,7
Bac 49 779 16,9 15,1 8,0 17,6 16,7
Bac+2 35 818 12,2 10,1 5,7 13,6 12,4
2e ou 3e cycle universitaire, grande école 27 576 9,4 8,3 14,1 13,6
  • Sources : Insee, recensements de la population

L’évolution des cadres et professions intellectuelles supérieures est marquée dans le Tarn. Ils occupent en 2011 une part plus importante que dans la plupart des départements de la région : 10,8 %, soit 5,9 points de plus qu’en 1982.

Parallèlement à cette montée en qualification, les Tarnais sont plus diplômés qu’auparavant : la proportion des bac+2 et des diplômés du 2e ou 3e cycle universitaire passe à 21,6 % en 2011 (contre 18,4 % en 2006 et 5,7 % en 1982). Ce chiffre reste inférieur à la moyenne métropolitaine mais l’écart se réduit sensiblement.

La population tarnaise est âgée : 43,5 ans en moyenne en 2011 contre 40,0 en France métropolitaine. Comme partout ailleurs, la population vieillit : en 1982, les Tarnais avaient 38,6 ans en moyenne. Même si ce vieillissement est plus rapide qu’à l’échelle nationale (+ 4,9 points contre + 4,6), l’âge moyen des habitants du Tarn reste un des plus faibles de la région.

Sources

Depuis la mise en place des enquêtes annuelles de recensement (2004), il est possible, pour la 1ère fois cette année, de comparer directement les résultats de deux millésimes de recensement. Ainsi, dans cette étude, des comparaisons ont pu être faites entre les années 2006 et 2011 pour lesquelles les résultats s'appuient sur deux cycles de cinq années d'enquête disjoints : 2004 à 2008 d'une part, 2009 à 2013 d'autre part (cf. La nouvelle méthode de recensement sur insee.fr).

Définitions

Le solde migratoire apparent est estimé par différence entre la variation totale de la population et le solde naturel. Il peut être différent du solde migratoire mesuré à partir de la question du bulletin individuel du recensement sur le lieu de résidence antérieur du fait des imprécisions tenant aux défauts de comparabilité entre deux recensements (évolutions de concepts de population et qualité inégale). Il est qualifié de solde migratoire « apparent », afin que l'utilisateur garde en mémoire la marge d'incertitude qui s'y attache.

Pour en savoir plus

« Midi-Pyrénées, 3e région métropolitaine pour sa croissance démographique », Insee Analyses Midi-Pyrénées n° 3, juillet 2014.

« 30 ans d’évolution démographique en Midi-Pyrénées - 580 000 habitants supplémentaires », 6 pages n° 155, janvier 2014, Insee Midi-Pyrénées.

« Dans le sillage de Toulouse, les villes moyennes proches renforcent leur attractivité », 6 pages n° 154, décembre 2013, Insee Midi-Pyrénées.