Les grandes entreprises pèsent plus dans le Nord et les petites dans le Sud
La nouvelle définition de l’entreprise permet de mieux appréhender l’économie des territoires. Si les grandes entreprises ont un poids important dans toutes les régions, c’est particulièrement le cas en Île-de-France, au sein de grandes villes, et dans quelques bastions industriels historiques. Les entreprises de taille intermédiaire pèsent plus fortement dans les régions septentrionales. Les petites et moyennes entreprises, dont le poids dans l’emploi local est important, couvrent un large spectre du champ économique, des activités de proximité aux industries de biens de consommation. Elles comptent particulièrement dans les départements insulaires. Les microentreprises sont tournées d’abord vers l’économie locale et le tourisme ; elles pèsent davantage dans le Sud et dans les départements d’outre-mer.
- 229 grandes entreprises emploient un tiers des salariés
- L’Île-de-France, capitale des grandes entreprises
- Les entreprises de taille intermédiaire pèsent plus au nord de la Loire
- Les PME, entre activités de proximité et industrie
- Des microentreprises plus présentes dans le Sud et les DOM
- La nouvelle définition de l’entreprise
229 grandes entreprises emploient un tiers des salariés
L’entreprise est désormais définie selon des critères économiques et non plus, seulement, juridiques (encadré). En 2010, selon une première approche de la nouvelle définition, 3 millions d’entreprises relevant du secteur marchand non agricole sont implantées en France. Elles emploient au total 15,7 millions de salariés. Cela correspond à 13 millions de salariés en équivalent temps plein hors intérimaires. Plus de la moitié d’entre eux travaillent dans cinq régions : Île-de-France (26 %), Rhône-Alpes (10 %), Provence-Alpes- Côte d’Azur (7 %), Pays de la Loire (6 %) et Nord - Pas-de-Calais (6 %).
Les entreprises sont officiellement classées en quatre catégories de taille, en tenant compte non seulement des effectifs employés, mais aussi du chiffre d’affaires et du bilan de l’entreprise. On distingue ainsi 229 grandes entreprises, qui emploient à elles seules 31 % des salariés, 4 600 entreprises de taille intermédiaire (22 % des salariés), 136 000 petites et moyennes entreprises (27 %) et 2,9 millions de microentreprises (19 %). Les grandes entreprises et celles de taille intermédiaire, notamment celles qui sont organisées en groupe, sont le plus souvent implantées dans plusieurs départements, voire plusieurs régions. En moyenne, une grande entreprise est implantée dans dix-huit des vingt-six régions françaises, contre un peu moins de six pour les entreprises de taille intermédiaire et une pour les autres catégories. La nouvelle définition de l’entreprise dessine une vision plus réaliste du système productif, qui apparaît plus concentré que ne le suggérait l’ancienne approche. Selon les territoires, cette concentration est plus ou moins forte, l’emploi local pouvant être, par exemple, plus ou moins dépendant de quelques grandes entreprises ou, à l’autre bout de l’échelle, plus ou moins dynamisé par une multitude de microentreprises.
L’Île-de-France, capitale des grandes entreprises
Les grandes entreprises sont plus particulièrement implantées dans les grandes agglomérations, mais aussi dans quelques places fortes de l’industrie. C’est en Île-de-France que les grandes entreprises pèsent le plus dans l’emploi (carte 1a). Dans le secteur marchand non agricole, 39 % des salariés franciliens travaillent pour de grandes entreprises, et davantage encore dans la seule couronne parisienne, contre 28 % des salariés dans le reste de la France (tableau). Cette spécificité renvoie notamment à la concentration de sièges sociaux, comme dans le quartier de la Défense. Elle s’explique aussi par la place dans la région des banques et des assurances, souvent de taille très importante, et l’implantation de grandes entreprises informatiques et de conseil. Les activités liées aux infrastructures de transports, du ferroviaire à l’aérien, sont également très présentes. De plus, les grandes entreprises industrielles ont un poids important en Île-de-France, que ce soit à travers leurs usines (secteur automobile notamment), ou leurs centres administratifs ou de recherche et développement (industrie pharmaceutique par exemple).
Les grandes entreprises sont implantées dans les principaux pôles industriels : l’agglomération de Clermont-Ferrand dans le secteur du pneumatique, l’agglomération toulousaine avec l’aéronautique, une partie de la Franche-Comté avec la mécanique et l’automobile, la Lorraine sidérurgique ou encore la Haute-Normandie grâce à la construction automobile. De plus, à travers certaines activités telles que la banque ou l’assurance, les grandes entreprises sont présentes dans l’ensemble des grandes agglomérations, couvrant ainsi tout le territoire.
graphiquecarte 1 – Les grandes entreprises pèsent plus dans le Nord et les petites dans le Sud
tableauTableau – Un tiers de l’emploi salarié dans les grandes entreprises
Nombre de salariés en équivalent temps plein | |||||
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Micro- entreprises | Petites et moyennes entreprises* | Entreprises de taille intermediaire | Grandes entreprises | Effectif total | |
Alsace | 71 | 114 | 100 | 105 | 391 |
Aquitaine | 138 | 171 | 126 | 161 | 595 |
Auvergne | 50 | 69 | 40 | 71 | 230 |
Basse-Normandie | 54 | 77 | 57 | 73 | 261 |
Bourgogne | 60 | 88 | 72 | 83 | 303 |
Bretagne | 119 | 169 | 136 | 153 | 577 |
Centre | 89 | 138 | 113 | 142 | 482 |
Champagne-Ardenne | 45 | 72 | 61 | 64 | 242 |
Corse | 22 | 21 | 2 | 8 | 54 |
Franche-Comté | 41 | 65 | 41 | 61 | 207 |
Guadeloupe | 16 | 15 | 8 | 9 | 47 |
Guyane | 6 | 6 | 2 | 4 | 18 |
Haute-Normandie | 59 | 98 | 87 | 116 | 360 |
Île-de-France | 524 | 765 | 770 | 1 332 | 3 391 |
Languedoc-Roussillon | 116 | 116 | 69 | 98 | 399 |
Limousin | 27 | 35 | 24 | 31 | 117 |
Lorraine | 73 | 109 | 84 | 119 | 385 |
Martinique | 16 | 16 | 11 | 9 | 51 |
Midi-Pyrénées | 116 | 148 | 108 | 164 | 536 |
Nord - Pas-de-Calais | 115 | 197 | 168 | 245 | 724 |
Pays de la Loire | 129 | 224 | 194 | 193 | 740 |
Picardie | 58 | 90 | 81 | 87 | 317 |
Poitou-Charentes | 67 | 101 | 63 | 79 | 309 |
Provence-Alpes-Côte d’Azur | 240 | 248 | 160 | 270 | 918 |
Réunion | 28 | 33 | 16 | 17 | 94 |
Rhône-Alpes | 266 | 386 | 306 | 377 | 1 336 |
Total | 2 545 | 3 572 | 2 901 | 4 068 | 13 086 |
- * Hors microentreprises.
- Champ : salariés des entreprises marchandes hors agriculture et hors intérimaires.
- Sources : Insee, Ésane, Lifi et Clap 2010.
Les entreprises de taille intermédiaire pèsent plus au nord de la Loire
Les 4 600 entreprises de taille intermédiaire (ETI) localisées en France emploient 22 % des salariés marchands non agricoles. Leur implantation, plus dense au nord de la Loire, marque une opposition nord-sud plus nette que pour les grandes entreprises (carte 1b). Elles pèsent plus de 25 % de l’emploi dans les Pays de la Loire, en Picardie, Alsace et Champagne-Ardenne, autant de régions où l’industrie occupe une place importante. Dans les Pays de la Loire, on trouve notamment de grands établissements de construction navale ou de l’agroalimentaire. Les ETI représentent également une part importante de l’emploi en Haute-Normandie, en Bourgogne et en Bretagne.
En Île-de-France, les ETI drainent de nombreux emplois dans la publicité, les études de marché, l’information et la communication. En Rhône-Alpes, elles se démarquent davantage dans la chimie. Au sud de la Loire, les ETI pèsent dans les filières agroalimentaires d’Aquitaine. Elles sont aussi présentes dans des activités industrielles telles que la pâte à papier, la pharmacie, la chimie, l’industrie du caoutchouc ou encore la fabrication d’équipements électriques. On les trouve également dans la location immobilière.
Grandes entreprises et ETI sont très internationalisées. Les établissements sous contrôle de groupes étrangers emploient près d’un septième des salariés des grandes entreprises et le tiers des salariés des ETI. Symétriquement, toutes les grandes entreprises et le tiers des ETI à contrôle français possèdent des implantations à l’étranger. Les ETI à capitaux étrangers pèsent fortement en Alsace et en Picardie. Elles y représentent respectivement 13 et 10 % des salariés de l’ensemble des entreprises contre 7 % au niveau national (carte 2). Il s’agit le plus souvent d’implantations de très grands groupes étrangers qui, sur le territoire français, correspondent à des entreprises de taille intermédiaire. Les ETI sous contrôle français pèsent fortement en Martinique et dans les Pays de la Loire. Elles sont également importantes en Bretagne, avec de nombreuses coopératives agricoles.
graphiquecarte 2 – Le poids des entreprises sous contrôle étranger
Les PME, entre activités de proximité et industrie
Les 136 000 petites et moyennes entreprises (PME) emploient 27 % des salariés du secteur marchand non agricole. Leur poids dans l’emploi local varie moins sur le territoire que les autres catégories (carte 1c). Ces entreprises répondent en partie à une demande locale, qui prend d’autant plus d’importance dans les territoires dont l’activité est peu tournée vers l’extérieur. Les PME pèsent ainsi près de 40 % de l’emploi en Corse et plus de 30 % dans les DOM, en Poitou-Charentes et en Franche-Comté. Sur l’ensemble du territoire, les PME sont des acteurs importants dans la construction, le commerce de gros et de détail et la réparation automobile (graphique). Mais elles sont également actives dans de nombreux pans de l’industrie, tels que le textile et l’habillement. Elles sont plus présentes dans la fabrication de produits métalliques en Basse-Normandie, la construction et le commerce dans le Sud-Ouest.
graphiqueGraphique – Les salariés des microentreprises dans les services
Des microentreprises plus présentes dans le Sud et les DOM
Les 2,9 millions de microentreprises emploient 19 % des salariés, avec un poids économique plus marqué dans le sud-est de la France et dans l’ensemble des départements d’outre-mer. Ces petites structures cumulent 41 % des salariés en Corse, près de 30 % dans les DOM et en Languedoc-Roussillon, 26 % en Provence-Alpes-Côte d’Azur (carte 1d). Les microentreprises sont très présentes dans les activités touristiques, telles que l’hôtellerie et la restauration, en particulier sur le littoral méditerranéen et dans les massifs montagneux.
De manière générale, les microentreprises sont davantage tournées vers l’économie locale. Elles œuvrent dans la construction, surtout dans le bâtiment et moins dans le génie civil. Elles sont aussi des acteurs importants dans le commerce de détail, la réparation automobile, ainsi que les services à la personne. Boulangeries, bars-tabacs, pharmacies, salons de coiffure, garages... sont autant de microentreprises que nous fréquentons au quotidien.
La nouvelle définition de l’entreprise
La nouvelle définition de l’entreprise issue du décret n° 2008-1354, pris en application de la loi de modernisation de l’économie, dépasse l’approche juridique de l’entreprise au profit d’une approche économique. Désormais l’entreprise cesse d’être assimilée à l’unité légale. Elle est définie comme « la plus petite combinaison d’unités légales qui constitue une unité organisationnelle de production de biens et services jouissant d’une certaine autonomie de décision, notamment pour l’affectation de ses ressources courantes ». Ainsi, on peut avoir une filiale dédiée à la fabrication de biens et une autre dédiée à leur commercialisation ; ces deux unités légales, filiales d’un même groupe, doivent être réunies (combinées) pour constituer une entreprise au sens économique du terme. Dans cette étude, un groupe de sociétés est systématiquement considéré comme une entreprise. Ceci constitue une approximation en particulier pour les plus grands groupes. Des travaux de profilage sont en cours pour identifier les entreprises des groupes.
De plus, le décret définit quatre catégories de taille d’entreprise :
- les microentreprises occupent moins de 10 personnes et ont un chiffre d’affaires annuel ou un total de bilan n’excédant pas 2 millions d’euros ;
- les petites et moyennes entreprises (PME) occupent moins de 250 personnes et ont un chiffre d’affaires annuel n’excédant pas 50 millions d’euros ou un total de bilan n’excédant pas 43 millions d’euros. Dans l’étude, on entend par PME les PME hors microentreprises, même si ces dernières sont, par définition, des PME ;
- les entreprises de taille intermédiaire (ETI) n’appartiennent pas à la catégorie des PME, occupent moins de 5 000 personnes et ont un chiffre d’affaires annuel n’excédant pas 1,5 milliard d’euros ou un total de bilan n’excédant pas 2 milliards d’euros ;
- les grandes entreprises sont les entreprises non classées dans les catégories précédentes.
Une entreprise est affectée à une catégorie selon son activité sur le territoire français, y compris pour les groupes internationaux.
Selon l’ancienne approche, prenant en compte les unités légales et leurs seuls effectifs, les grandes entreprises emploient 15 % des salariés en France. Selon cette nouvelle approche, leur poids est de quasiment un tiers (graphique). Leur poids apparaît particulièrement renforcé en Île-de-France et dans le Nord - Pas-de- Calais (+ 18 points). Celui des PME apparaît très amoindri dans les départements d’outre-mer (de − 14 à − 20 points selon les départements), en Champagne-Ardenne (− 12 points) et en Bretagne (− 11 points). L’impact est plus faible pour la Corse et le Languedoc-Roussillon.
graphiqueGraphique – Avec la nouvelle définition, l’emploi apparaît renforcé dans les grandes entreprises
Sources
Les résultats sont issus de trois sources : le dispositif d’Élaboration des statistiques annuelles d’entreprises (Ésane), qui produit des statistiques structurelles d’entreprise sur les entreprises marchandes à l’exception du secteur agricole, à partir de données administratives et d’enquêtes auprès d’un échantillon d’entreprises ; Connaissance locale de l’appareil productif (Clap) qui localise les effectifs salariés ; le système d’information Liaisons financières (Lifi) qui identifie les groupes de sociétés opérant en France et détermine leur contour.
Définitions
L’effectif des entreprises considéré ici est l’effectif salarié hors intérimaires en 2010. Il est exprimé en équivalent temps plein (ETP) : les postes à temps partiel sont pris en compte au prorata de leur volume horaire de travail rapporté à celui d’un poste à temps complet. Ils sont localisés précisément dans chaque établissement des entreprises, ce qui permet une analyse géographique du tissu productif. L’activité principale est également celle de l’établissement.
Pour en savoir plus
Ouvrir dans un nouvel ongletDécret n° 2008-1354 du 18 décembre 2008 relatif aux critères permettant de déterminer la catégorie d’appartenance d’une entreprise pour les besoins de l’analyse statistique et économique, Journal officiel, 20 décembre 2008.
Hecquet V., « Quatre nouvelles catégories d’entreprise - Une meilleure vision du tissu productif », Insee Première n° 1321, novembre 2010.
Beguin J.-M., Hecquet V, Lemasson J., « Un tissu productif plus concentré qu’il ne semblait », Insee Première n° 1399, mars 2012.
Topiol A., Héricher C., « Les groupes français à l’étranger. En 2010, 4,7 millions de salariés dont près de 2 millions dans l’industrie », Insee Première n° 1439, mars 2013.
Des publications régionales sur les entreprises sont disponibles sur le site insee.fr.