Insee Analyses Bretagne · Décembre 2025 · n° 137

Entre 2017 et 2022, la hausse de la valeur ajoutée permet aux plus grands hôtels et campings d’investir

La période 2017-2022 a été particulièrement structurante pour l’hôtellerie et l’hôtellerie de plein air. Les mesures sanitaires au moment de la pandémie de Covid-19 ont directement affecté l’activité des deux secteurs, fragilisant plus ou moins fortement la trésorerie des entreprises. Par ailleurs, la fréquentation des hébergements proposés par les particuliers via les principales plateformes en ligne augmente fortement, en alternative, concurrence ou complément (selon les territoires) des hôtels et des campings (encadré 1).

Dans ce contexte, décrire les évolutions récentes des parcs en hôtels et campings et de leurs fréquentations, et analyser la santé économique et financière des entreprises bretonnes de ces deux secteurs permet d’actualiser les connaissances de ce segment de l’hébergement touristique breton (encadré 2).

En 2022, selon l’enquête de fréquentation dans les hébergements touristiques, 795 hôtels bretons sont ouverts tout ou partie de l’année et 612 campings accueillent les touristes d’avril à septembre (sources). Ils offrent respectivement une capacité totale de 24 600 chambres (6 % de l’ensemble de France métropolitaine hors Île-de-France) et 62 000 emplacements, qu’ils soient nus ou équipés (10 %).

Par rapport à 2017, le nombre de chambres offertes par les hôtels bretons s’est légèrement réduit (-4 %), tandis que la fréquentation est restée stable (+1 %). En conséquence, le taux d’occupation moyen des hôtels bretons augmente, atteignant 59 % en 2022, soit 2 points de plus qu’en 2017.

Pour l’hôtellerie de plein air, le nombre d’emplacements est resté stable (-1 %), alors que la fréquentation a beaucoup augmenté (+20 %), plus encore qu’en moyenne en France hors Île-de-France (+10 %). Les campings bretons enregistrent un taux d’occupation moyen de 43 % en 2022, 9 points de plus qu’en 2017.

L’hôtellerie bretonne présente une offre très largement orientée vers le milieu de gamme et le milieu de gamme-supérieur. En 2022, 22 % des chambres sont proposées par des établissements 2 étoiles et 43 % par des 3 étoiles, des proportions toutes deux un peu supérieures aux moyennes observées en France hors Île-de-France (21 % et 40 % respectivement) (figure 1). L’offre bretonne a évolué depuis 2017, selon les mêmes tendances que celles observées au niveau national. La légère baisse de la capacité hôtelière est essentiellement imputable à la diminution de l’offre des hôtels 1 ou 2 étoiles (-22 % en Bretagne). Les chambres d’hôtels 3 étoiles ou 4 et 5 étoiles sont quant à elles plus nombreuses (respectivement +3 % et +13 %).

Cette transformation de l’offre hôtelière bretonne va de pair avec l’évolution de la fréquentation : ainsi, en cinq ans, les nuitées dans les hôtels 4 et 5 étoiles ont également augmenté de 13 %, pour atteindre presque un quart de l’ensemble de la fréquentation hôtelière en 2022. La fréquentation des 3 étoiles est également en hausse (+8 %). À l’inverse, le nombre de nuitées passées dans les hôtels 1 ou 2 étoiles recule de 15 %.

En Bretagne, l’offre hôtelière est principalement située au sein d’un croissant à l’est de la région, de Saint-Malo à Lorient en passant par Rennes. Les Destinations Touristiques de Cap Fréhel - Saint-Malo - Baie du Mont-Saint-Michel, Rennes et les Portes de Bretagne et Bretagne Sud - Golfe du Morbihan regroupent en effet 14 600 chambres, soit 59 % du total régional (figure 2). Ces trois zones totalisent par ailleurs 4,8 millions de nuitées en 2022, soit 61 % de la fréquentation des hôtels bretons (figure 3).

En 2022, l’offre hôtelière est en baisse dans six des dix Destinations Touristiques bretonnes par rapport à 2017. Pour Bretagne Sud - Golfe du Morbihan, Quimper - Cornouaille et Baie de Saint-Brieuc - Paimpol - Les Caps, la baisse de l’offre concerne les hôtels 1 ou 2 étoiles mais également, dans une moindre mesure, les hôtels 3 étoiles. Dans la Destination Touristique Brest terres océanes, seule la capacité hôtelière des 1 ou 2 étoiles diminue (-44 %). Dans les zones de Rennes, Saint-Malo et de la Côte de Granit Rose, la baisse du nombre de chambres des hôtels 1 ou 2 étoiles est compensée par la hausse des catégories supérieures.

Pour l’hôtellerie de plein air, l’offre est surtout située sur le littoral, et plus particulièrement sur le littoral sud de la région. Les Destinations Touristiques de Bretagne Sud - Golfe du Morbihan et de Quimper - Cornouaille totalisent en effet à elles seules 53 % des emplacements bretons. Au cours de la saison estivale 2022, 55 % des nuitées des campeurs en Bretagne y sont enregistrées.

Dans ces deux Destinations Touristiques comme au niveau régional, le nombre d’emplacements est stable mais les mutations de l’offre sont notables en cinq ans. En particulier, le nombre d’emplacements nus a reculé de 12 % et celui des emplacements équipés a augmenté de 28 %, pour atteindre un peu plus du tiers du parc régional en 2022 (figure 4). Cette proportion est toujours inférieure à la moyenne nationale hors Île-de-France, bien que l’écart se resserre.

La hausse du nombre d’emplacements équipés est par ailleurs associée à la montée en gamme de l’offre bretonne de plein air. En effet, la capacité totale des campings 4 et 5 étoiles a augmenté de 17 % et ces derniers concentrent en 2022 près des deux tiers des emplacements équipés de la région. Les touristes sont au rendez-vous de cette montée en gamme : la fréquentation des campings bretons 4 ou 5 étoiles augmente, plus encore que leur capacité (+32 % de nuitées).

À l’inverse, la capacité totale des campings économiques et de milieu de gamme – proposant principalement des emplacements nus – diminue de 20 %. Pour autant, les touristes plébiscitent toujours autant ces emplacements : en 2022, la fréquentation des 1 ou 2 étoiles est stable par rapport à 2017 (-1 %). Pour les campings 3 étoiles, leur capacité baisse de 7 % et leur fréquentation augmente de 10 %.

Finalement, l’hôtellerie de plein air bretonne propose en 2022 une offre variée : il y a 25 % d’emplacements 1 ou 2 étoiles, 30 % de 3 étoiles et 36 % de 4 ou 5 étoiles, une répartition plus homogène qu’en France de province (respectivement 16 %, 32 % et 44 %).

En 2022, 846 entreprises relevant du secteur de l’hôtellerie et 406 entreprises relevant du secteur privé de l’hôtellerie de plein air (hors campings municipaux) ont leur activité intégralement ou quasi intégralement localisée en Bretagne (figure 5). La plupart des hôtels et campings privés de la région appartiennent à ces entreprises (respectivement 80 % et 84 %) (pour comprendre).

Les entreprises bretonnes de l’hôtellerie sont majoritairement des petites structures de moins de 3 salariés en équivalent temps plein (ETP, comprenant les emplois saisonniers). Les plus grandes entreprises (10 salariés ou plus) représentent quant à elles 14 % des entreprises hôtelières régionales. Elles emploient près des trois quarts des effectifs du secteur en Bretagne et relèvent très souvent d’un groupe de sociétés.

Un quart des entreprises bretonnes du camping n’emploie pas de salarié en 2022, un tiers en emploie 2 ou plus. Seules 20 % des entreprises bretonnes du camping appartient à un groupe de sociétés contre 24 % dans le secteur hôtelier.

En 2022, les entreprises bretonnes de l’hôtellerie cumulent 710 millions d’euros de chiffre d’affaires (CA). Les plus grandes d’entre elles concentrent le marché : 119 entreprises, soit 14 % de l’ensemble, comptent 10 salariés ou plus et réalisent 67 % de ce CA régional. On compte parmi elles le groupe Raulic, propriétaire entre autres du Grand Hôtel des Thermes et de l’Hôtel Le Nouveau Monde à Saint-Malo, le groupe Valdys (Thalasso à Douarnenez et Roscoff) et le groupe Vircatem (hôtels Balthazar et Mgallery by Sofitel à Rennes).

Entre 2017 et 2022, les prix dans l’hôtellerie sont en hausse de 15 % au niveau national. Cette augmentation des prix contribue pour l’essentiel à la hausse du CA d’une partie des entreprises bretonnes « pérennes » (pour lesquelles il est possible d’étudier les évolutions des caractéristiques économiques). C’est le cas en particulier pour les entreprises hôtelières pérennes de 10 salariés ou plus, dont le CA augmente en moyenne de 19 % en euros courants et pour celles de 3 à moins de 10 salariés (+18 %). Quant aux plus petites entreprises pérennes, leur CA stagne (+0,3 %) malgré la hausse moyenne des prix, probablement en lien avec la baisse de la fréquentation des hôtels bretons 1 ou 2 étoiles, en moyenne plus petits (25 chambres contre 39 pour les 3, 4 et 5 étoiles).

En Bretagne en 2022, la moitié du chiffre d’affaires des entreprises de l’hôtellerie permet de créer de la richesse, servant à rémunérer le personnel et le capital ou à investir. Le taux de valeur ajoutée atteint en effet 50 %, un niveau supérieur à celui observé pour l’ensemble des entreprises mono ou quasi-monorégionales implantées en France hors Île-de-France (47 %) (figure 6). L’autre moitié du chiffre d’affaires breton est quant à elle destinée à s’acquitter des consommations intermédiaires (factures d’énergie, frais de marketing, d’entretien, de blanchisserie, etc.).

Les plus grandes entreprises dégagent par ailleurs davantage de richesse de leur chiffre d’affaires que celles de plus petite taille : en Bretagne, le taux de valeur ajoutée des entreprises de 10 salariés ou plus atteint 51 %, contre 50 % pour celles de 3 à moins de 10 salariés et 42 % pour celles de moins de 3 salariés.

Par rapport à 2017, la richesse créée par les plus grandes entreprises pérennes a augmenté de 27 %, une hausse plus élevée que celle de leur CA (+19 %). Ces entreprises hôtelières ont donc généré davantage de richesse de leur activité en 2022 qu’en 2017 : leur taux de valeur ajoutée a augmenté de 3 points. Ce supplément de richesse produite bénéficie plus aux entreprises qu’aux salariés. En effet, entre les deux années, leur taux de marge, soit la part de richesse restant à disposition des entreprises pour rémunérer le capital et investir, augmente de 15 %, tandis que leur part des frais de personnel baisse de 4 %.

En 2022, 3 % des entreprises hôtelières bretonnes réalisent 1 million d’euros ou plus d’investissements corporels (c’est-à-dire d’investissements en biens durables, n’incluant pas les investissements financiers notamment). Il s’agit pour les deux tiers d’entre elles d’entreprises de 10 salariés ou plus. Ces entreprises qui investissent le plus concentrent 70 % des 136 millions d’euros investis par le secteur. Rapportés aux 355 millions d’euros de valeur ajoutée, cela donne un taux d’investissement de l’ensemble des entreprises hôtelières bretonnes de 38 % pour l’année 2022. Cette moyenne sur un an recouvre toutefois des situations très variables selon les entreprises, les investissements s’appréciant mieux sur un cycle de plusieurs années.

Dans le secteur de l’hôtellerie de plein air, les entreprises bretonnes pérennes enregistrent une hausse moyenne de 38 % de leur chiffre d’affaires entre 2017 et 2022. L’augmentation de CA est très fréquente : 71 % des entreprises pérennes du secteur sont concernées par une hausse de 15 % ou plus. Cela s’explique en partie par la nette hausse de la fréquentation des campings bretons entre ces deux années.

En 2022, les 406 entreprises bretonnes de l’hôtellerie de plein air totalisent 212 millions d’euros de CA. Le Domaine des Ormes à Dol-de-Bretagne, la Société du Camping de La Plage et des Dunes (campings L’Océan Breton à Plobannalec-Lesconil et La Plage à Penmarc’h), Les Mouettes à Carantec ou encore Mané Guernehué à Baden comptent parmi les plus grandes entreprises régionales de l’hôtellerie de plein air.

Comme dans l’hôtellerie, l’hôtellerie de plein air bretonne génère légèrement plus de richesse à partir de son CA que la moyenne des entreprises mono ou quasi-monorégionales de l’hôtellerie de plein air implantées en France hors Île-de-France. Par rapport à 2017, si le CA des entreprises pérennes du secteur a nettement augmenté (+38 %), ces dernières en dégagent néanmoins à peine plus de richesse : la valeur ajoutée de ces entreprises augmente dans les mêmes proportions que le CA (+42 %) et leur taux de valeur ajoutée est alors en hausse de 1 point. Cette situation s’observe en particulier pour les entreprises bretonnes de l’hôtellerie de plein air de 2 salariés ou plus, pour lesquelles le CA moyen augmente de 53 % et la valeur ajoutée moyenne de 55 %.

En 2022, la valeur ajoutée de l’hôtellerie de plein air atteint 110 millions d’euros. La moitié de cette richesse produite permet de rémunérer le personnel et l’autre moitié reste à disposition des entreprises, notamment pour investir. En 2022, 4 % des entreprises bretonnes de l’hôtellerie de plein air réalisent 500 000 euros ou plus d’investissements corporels ; il s’agit dans huit cas sur dix d’une entreprise de 2 salariés ou plus. Ces entreprises qui investissent le plus représentent près de la moitié des 50 millions d’euros d’investissements corporels réalisés le secteur en 2022.