Insee Analyses Grand Est · Novembre 2025 · n° 206

Plus d’un senior sur deux occupe un emploi en 2022

En 2022, 750 000 seniors âgés de 55 à 64 ans résident dans le Grand Est. Leur nombre a progressé de 7 % entre 2010 et 2022, ils représentent désormais 13 % de la population régionale. Ces seniors constituent 22 % de la population en âge de travailler (15 à 64 ans) contre 19 % douze ans plus tôt. Leur présence sur le marché du travail a également augmenté, sous l’effet notamment des réformes des retraites de ces dernières décennies (allongement de la durée de cotisation, décalage de l’âge légal de départ en retraite). Cette évolution se traduit par une hausse du taux d’emploi des seniors et un recul progressif des départs à la retraite, avec de fortes disparités selon les profils individuels et les territoires.

Dans le Grand Est, 435 000 seniors sont actifs selon le recensement de la population, soit 58 % des 55-64 ans. Le taux d’activité, supérieur à 90 % pour les 30-49 ans, commence légèrement à diminuer à partir de 50 ans. Il reste élevé jusqu’à 59 ans, où près de trois seniors sur quatre sont encore actifs, puis chute fortement à 60 et 62 ans (-18 points à chaque fois) pour tomber à 27 %. Ces ruptures d’activité coïncident avec les principaux pics de départ à la retraite : la part des retraités dans la population augmente de 18 points à 60 ans, puis de 25 points à 62 ans. Après cet âge, l’activité est moins fréquente, puis de moins en moins courante lorsque l’âge avance. Seuls 21 % des seniors âgés de 63 ans occupent ou recherchent encore un emploi ; à 65 ans, cette part tombe à 12 %, puis à seulement 3 % à 70 ans (figure 1). Ceci étant, le départ à la retraite ne marque pas toujours la fin de l’activité professionnelle. En 2022, 5 % des seniors retraités restent actifs (dont plus de 4 % en emploi). Cette proportion est en hausse de 1,2 point par rapport à 2010.

Dans le Grand Est, le taux de chômage des seniors au sens du recensement (source) s’établit à 10 %, un niveau similaire à celui des 30-49 ans. Il augmente légèrement à l’approche de la retraite pour atteindre 14 % à 61 ans. Si les seniors ne sont pas davantage exposés au chômage, leur retour à l’emploi est toutefois plus difficile : 65 % des seniors au chômage le sont depuis plus d’un an, contre 44 % des 30‑49 ans. Ces difficultés peuvent conduire certains d’entre eux à se retirer du marché du travail avant d’atteindre l’âge de la retraite.

Dans la région, 18 % des seniors ne sont ni en emploi, ni en retraite, comme les 30-49 ans. Cette proportion, qui reste sous les 17 % entre 43 et 51 ans, est supérieure à 20 % de 57 à 61 ans et chute fortement à 62 ans (11 %).

Le taux d’emploi des seniors est de 53 % dans le Grand Est, soit plus de 2 points au-dessous de celui de la France métropolitaine. Cette différence s’explique principalement par une proportion de retraités plus élevée dans la région (30 % contre 28 % au niveau national).

Les femmes sont davantage exposées à des périodes sans emploi avant la retraite : entre 55 et 64 ans, 22 % d’entre elles ne sont ni en emploi ni en retraite, contre 13 % des hommes. Cette part atteint même 27 % entre 58 et 61 ans, période charnière de la transition entre emploi et retraite, soit 10 points de plus que pour les hommes. Ces différences s’expliquent notamment par un départ à la retraite plus tardif chez les femmes : le pic de départ à la retraite des hommes se situe à 60 ans (+23 points de retraités entre 59 et 60 ans), tandis que le départ est plus fréquent à 62 ans pour les femmes (+30 points de retraitées entre 61 et 62 ans). À 61 ans, près de la moitié des hommes sont déjà retraités, contre seulement trois femmes sur dix.

Le taux d’emploi des seniors croît fortement avec le niveau de diplôme. Dans le Grand Est, il atteint 64 % pour les 55-64 ans titulaires d’un diplôme de niveau égal ou supérieur au baccalauréat, soit 13 points de plus que pour ceux ayant un CAP ou un BEP, et 26 points de plus que pour les seniors sans diplôme. Ces derniers sont également davantage exposés à des situations d’inactivité : 29 % ne sont ni en emploi ni à la retraite, une part qui s’élève à 36 % chez les 55‑59 ans.

Ces écarts sont liés aux différences de niveau de formation entre générations. Les seniors, nés entre 1950 et 1970, sont globalement moins diplômés : dans le Grand Est, seuls 36 % des 55‑64 ans détiennent un diplôme de niveau baccalauréat ou plus, contre 63 % des 30‑49 ans. À l’inverse, la part des seniors sans diplôme est 1,8 fois plus élevée.

L’influence du diplôme sur le chômage est moins marquée chez les seniors que chez les 30‑49 ans. Le taux de chômage des seniors sans diplôme s’établit à 15,5 %, soit 6,5 points de moins que chez les 30‑49 ans non diplômés. Cet écart est plus resserré pour les titulaires d’un CAP ou BEP (10 % contre 13 %) et très léger pour les bacheliers (8,7 % contre 9,1 %). Seuls les diplômés de l’enseignement supérieur font exception : leur taux de chômage est un peu plus élevé chez les seniors que chez les 30‑49 ans (5,9 % et 5,5 %).

Dans le Grand Est, les trois quarts des cadres et des agriculteurs de 55 à 64 ans travaillent, comme 70 % des artisans et commerçants du même âge. À l’inverse, moins de la moitié des ouvriers ou employés seniors ont un emploi. Ce constat s’explique par des départs à la retraite plus précoces, mais aussi par une exposition plus fréquente à des périodes sans emploi avant la retraite. Ainsi, 21 % des ouvriers et des employés seniors se trouvent dans cette situation, contre 10 % des professions intermédiaires, 6 % des cadres et seulement 3 % des agriculteurs.

La présence des seniors est par ailleurs plus marquée dans certaines professions : ils représentent un tiers des agriculteurs en activité, près d’un quart des artisans-commerçants et un cinquième des cadres, contre un sixième de l’ensemble des actifs occupés de la région.

Avec l’avancée en âge, les formes d’emploi des seniors se différencient progressivement de celles des autres actifs. Le temps partiel devient notamment plus fréquent : dans le Grand Est, un senior sur cinq travaille à temps partiel, contre moins d’un sur six chez les 30‑49 ans. Cela concerne surtout les femmes : 32 % sont à temps partiel, contre seulement 8 % des hommes du même âge.

Par ailleurs, la stabilité de l’emploi tend à reculer en fin de carrière : 82 % des seniors ont un emploi en contrat à durée indéterminée (CDI) entre 55 et 59 ans, mais cette proportion diminue avec l’âge. Entre 60 et 62 ans, elle est de 76 % et n’est plus que de 65 % entre 63 et 64 ans. Cette évolution s’accompagne d’une hausse des contrats à durée déterminée (CDD) qui concernent 4 % des 55-59 ans en emploi et 8 % des 62-64 ans.

Enfin, le travail indépendant est plus fréquent chez les seniors. Dans le Grand Est, 15 % des seniors en emploi sont des non-salariés (indépendants ou employeurs), contre 11 % chez les 30‑49 ans. L’écart est particulièrement important chez les hommes : près d’un senior sur cinq est non salarié, soit 5,5 points de plus que pour les 30‑49 ans.

Entre 2010 et 2022, la transition de l’emploi vers la retraite s’est globalement décalée de deux ans. En 2010, les deux tiers des seniors étaient à la retraite dès 60 ans. En 2022, cette proportion n’est atteinte qu’à 62 ans (figure 2). De même, en 2010, moins d’un senior sur deux était encore en emploi à 58 ans ; douze ans plus tard, le taux d’emploi des seniors de 58 ans est de plus de 70 %, et il ne passe au-dessous de 50 % qu’à partir de 60 ans.

Malgré ce recul de l’âge de départ à la retraite, près de 18 % des seniors ne sont ni en emploi ni en retraite, un taux globalement stable entre 2010 et 2022. Cependant, certaines catégories de population, notamment les personnes peu diplômées, les femmes, les ouvriers et les employés, restent davantage exposées aux situations d’inactivité ou de chômage avant la retraite. Entre 2010 et 2022, la part des « ni en emploi ni en retraite » a augmenté de 10 % à 13 % chez les hommes, tandis qu’elle a reculé de 25 % à 22 % chez les femmes, réduisant ainsi l’écart entre les sexes. Par contre, les différences liées au niveau de diplôme se sont accentuées. La part des seniors sans diplôme ni en emploi ni en retraite a augmenté de 3,5 points sur la période, contre moins d’un point pour les titulaires du baccalauréat, d’un CAP ou BEP, ou d’un diplôme de l’enseignement supérieur.

Dans le Grand Est, les conditions de fin de carrière des seniors varient sensiblement d’un département à l’autre. En 2022, le taux d’emploi des 55-64 ans s’élève à 56 % dans le Bas-Rhin, contre 48 % dans les Ardennes (figure 3). La proportion de retraités diffère également fortement : elle varie de 32 % à 34 % dans la Meuse, les Vosges et en Haute-Marne, contre 28 % dans le Bas-Rhin et le Haut-Rhin. Ces écarts se retrouvent dans la part des seniors ni en emploi ni en retraite, qui atteint un maximum de 22 % dans les Ardennes, contre près de 15 % dans le Bas-Rhin.

Les faibles taux d’emploi observés en Haute-Marne, dans les Vosges et dans la Meuse s’accompagnent d’une part élevée de retraités. Les Ardennes constituent une exception : malgré un faible taux d’emploi, la part de retraités y reste modérée (31 %), ce qui traduit la part importante de seniors ni en emploi ni en retraite dans ce département.

Entre 2010 et 2022, le taux d’emploi des seniors progresse dans l’ensemble des départements du Grand Est, sous l’effet des réformes successives des retraites. Il augmente fortement dans le Bas-Rhin et les Vosges (+16 points et +17 points), tandis que la hausse reste plus modérée en Haute-Marne et dans les Ardennes (+13 et +14 points), deux départements où les taux d’emploi étaient déjà les plus modestes de la région en 2010.

Sur la même période, la part des seniors ni en emploi ni en retraite évolue différemment selon les départements. Elle augmente dans les Ardennes, dans l’Aube et la Haute-Marne (de 1 à 2 points) ; à l’inverse, cette part recule dans le Bas-Rhin (-1 point) et en Moselle (-2,5 points).