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Insee Analyses Grand Est · Octobre 2025 · n° 202
Insee Analyses Grand EstAccès au très haut débit dans le Grand Est : une fracture numérique qui se résorbe

Baptiste Descamps, Vincent Monchâtre (Insee)

Fin 2024, le Grand Est est mieux équipé en très haut débit que le reste du pays : plus de neuf locaux sur dix sont éligibles à la fibre optique. Depuis 2020, la fracture numérique s’est résorbée, et les communes rurales à habitat dispersé sont presque aussi bien couvertes en connexion fixe que les grands centres urbains. Toutefois, la situation est plus contrastée pour la couverture mobile : malgré la quasi-disparition des zones blanches pour la 4G, le déploiement de la 5G dans le Grand Est est en retard sur le reste du pays, en particulier dans les communes de densité intermédiaire.

Insee Analyses Grand Est
No 202
Paru le :Paru le09/10/2025
Insee - Accès au très haut débit dans le Grand Est : une fracture numérique qui se résorbe
Publication rédigée par :Baptiste Descamps, Vincent Monchâtre (Insee)

Le Grand Est bien couvert pour le fixe, mais en retard pour la 5G

Après l’épidémie de Covid-19, le développement du télétravail, des échanges en visioconférence et l’augmentation exponentielle de la quantité de données échangées imposent de disposer de réseaux Internet fixe et mobile rapides. Afin d’assurer un développement continu, tant en qualité (remplacement du réseau cuivre par la fibre) qu’en quantité (couverture de l’ensemble du territoire, y compris les zones les plus reculées), l’extension de la couverture numérique a fait l’objet de nombreuses politiques publiques ces dernières années (encadré).

À domicile, au travail, dans les espaces publics ou en extérieur, l’accès à Internet peut s’effectuer par connexion fixe, essentiellement par des réseaux filaires comme la fibre optique, ou par des appareils mobiles, via des antennes relais interconnectées comme la 4G ou la 5G (quatrième et cinquième génération de réseau de téléphonie mobile).

Les technologies de l’information et de la communication progressent à un rythme très soutenu. Ainsi, alors que seuls 70 % des étaient éligibles à un supérieur à 30 Mégabits par seconde (Mb/s) fin 2020, l’entièreté du Grand Est est couverte pour ce niveau de débit en 2024 (seuls 141 locaux, soit 1 sur 25 000, ne sont pas éligibles). Le déploiement de la fibre optique a rendu possible l’accès à un débit fixe de meilleure qualité.

Ainsi, fin 2020, le Grand Est était la quatrième région la mieux équipée pour le très haut débit fixe : 62 % des locaux étaient éligibles à un débit d’au moins 100 Mb/s, soit 2 points de plus que la moyenne de France métropolitaine. Fin 2024, le taux d’éligibilité atteint 93 % dans le Grand Est (figure 1), encore en avance sur le reste du pays (91 %).

Ces dernières années, la couverture mobile a grandement progressé : les zones blanches 4G ont presque disparu, et le nombre de a été multiplié par 8. Toutefois, la région accuse un léger retard dans le déploiement de ce réseau : fin 2020, il n’y avait que 1,2 système 5G pour 10 000 habitants, soit 0,2 de moins qu’à l’échelle nationale ; le Grand Est se plaçait alors au 8e rang des régions. Ce retard s’est accentué : avec 10,4 systèmes 5G pour 10 000 habitants fin 2024, le Grand Est est désormais à l’avant-dernier rang, entre l’Île-de-France et les Hauts-de-France (respectivement 10,3 et 10,6) et très loin derrière la Corse : 23,7 systèmes pour 10 000 habitants.

Figure 1aCouverture fixe et mobile, par régionEn 2024

Couverture fixe et mobile, par région - Lecture : En 2024, le Grand Est compte 10,4 systèmes 5G pour 10 000 habitants et 93 % de ses locaux sont éligibles à un débit fixe supérieur à 100 Mb/s.
Région Part des locaux éligibles à 100 Mb/s en 2024 (en %) Nombre de systèmes 5G pour 10 000 habitants en 2024
Île-de-France 96,0 10,3
Centre-Val de Loire 94,5 11,9
Bourgogne-Franche-Comté 93,4 13,5
Normandie 89,3 11,2
Hauts-de-France 96,3 10,6
Grand Est 93,0 10,4
Pays de la Loire 94,8 11,6
Bretagne 69,7 12,1
Nouvelle-Aquitaine 89,8 13,3
Occitanie 91,7 13,4
Auvergne-Rhône-Alpes 85,0 14,1
Provence-Alpes-Côte d'Azur 91,7 15,0
Corse 82,5 23,7
France Métropolitaine 90,7 12,2
  • Note : La Corse (82,5 ; 23,7) et la Bretagne (69,7 ; 12,1) sont trop excentrées pour figurer sur le graphique.
  • Lecture : En 2024, le Grand Est compte 10,4 systèmes 5G pour 10 000 habitants et 93 % de ses locaux sont éligibles à un débit fixe supérieur à 100 Mb/s.
  • Sources : Arcep, couverture territoriale en très haut débit et observatoire des déploiements 5G ; Insee, Fidéli.

Figure 1aCouverture fixe et mobile, par régionEn 2024

  • Note : La Corse (82,5 ; 23,7) et la Bretagne (69,7 ; 12,1) sont trop excentrées pour figurer sur le graphique.
  • Lecture : En 2024, le Grand Est compte 10,4 systèmes 5G pour 10 000 habitants et 93 % de ses locaux sont éligibles à un débit fixe supérieur à 100 Mb/s.
  • Sources : Arcep, couverture territoriale en très haut débit et observatoire des déploiements 5G ; Insee, Fidéli.

Une région bien couverte par le très haut débit fixe

En 2020, la fracture numérique était fortement marquée au sein du Grand Est : alors que neuf locaux sur dix étaient éligibles à un débit supérieur à 100 Mb/s dans les grands centres urbains, c’était le cas de deux locaux sur trois dans les centres urbains intermédiaires et les ceintures urbaines. Dans les petites villes et les communes rurales, moins de la moitié des locaux étaient couverts par ce type de débit.

Les politiques publiques visant à homogénéiser l’accès au numérique sur l’ensemble du territoire ont permis aux communes rurales de rattraper leur retard en 2022, puis de dépasser les communes urbaines de densité intermédiaire (figure 2).

Alors qu’en 2020, le taux de locaux éligibles à un débit supérieur à 100 Mb/s variait de 30 % dans la Haute-Marne à 76 % dans le Haut-Rhin, tous les départements ont un taux supérieur à 90 % fin 2024. Ce taux a augmenté de 60 points dans les départements qui étaient les plus en retard, contre 17 dans ceux déjà bien couverts en 2020. Quatre ans après, tous les départements ont une couverture supérieure à la moyenne nationale, à l’exception de la Meurthe-et-Moselle (90 % de locaux éligibles, contre 91 %).

Figure 2Évolution de la couverture fixe selon le type de commune

(en %)
Évolution de la couverture fixe selon le type de commune ((en %)) - Lecture : La part de locaux éligibles à un débit d’au moins 100 Mb/s dans les bourgs ruraux est passée de 44,4 % au 4e trimestre 2020 à 93,1 % au 4e trimestre 2024.
Année - Trimestre Grands centres urbains Centres urbains intermédiaires Petites villes Ceintures urbaines Bourgs ruraux Rural à habitat dispersé Rural à habitat très dispersé
2020-T4 88,8 65,7 45,3 62,8 44,4 40,6 32,4
2021-T1 nd nd nd nd nd nd nd
2021-T2 91,7 73,6 60,1 71,1 56,9 54,7 44,4
2021-T3 91,7 76,2 62,9 74,8 58,8 58,3 46,5
2021-T4 92,4 78,2 68,7 77,8 65,2 67,4 60,8
2022-T1 94,4 79,6 73,5 80,8 74,0 74,8 69,3
2022-T2 94,5 81,3 75,6 79,2 76,4 78,0 75,8
2022-T3 95,0 83,8 80,5 84,3 81,8 82,8 82,3
2022-T4 94,8 85,3 84,6 84,4 85,0 85,5 84,2
2023-T1 94,9 86,5 88,7 85,6 87,8 88,5 89,2
2023-T2 94,9 87,2 90,3 86,7 91,7 92,3 92,1
2023-T3 nd nd nd nd nd nd nd
2023-T4 95,4 87,5 91,2 87,8 92,4 92,8 93,1
2024-T1 95,5 87,8 91,4 88,8 92,8 93,0 93,4
2024-T2 95,8 88,6 92,2 89,3 93,0 93,5 93,7
2024-T3 95,6 88,8 92,3 89,3 93,1 93,6 93,7
2024-T4 95,7 89,3 92,4 89,7 93,1 93,6 93,7
  • nd : non disponible.
  • Lecture : La part de locaux éligibles à un débit d’au moins 100 Mb/s dans les bourgs ruraux est passée de 44,4 % au 4e trimestre 2020 à 93,1 % au 4e trimestre 2024.
  • Source : Arcep, couverture territoriale en très haut débit.

Figure 2Évolution de la couverture fixe selon le type de commune

  • Lecture : La part de locaux éligibles à un débit d’au moins 100 Mb/s dans les bourgs ruraux est passée de 44,4 % au 4e trimestre 2020 à 93,1 % au 4e trimestre 2024.
  • Source : Arcep, couverture territoriale en très haut débit.

Le déploiement du très haut débit fixe à rythme variable

Dans le Grand Est, la part des locaux éligibles au très haut débit (supérieur à 100 Mb/s) dépasse 90 % dans plus de huit communes sur dix, contre sept communes sur dix en France Métropolitaine. En lien avec le déploiement de la fibre optique, l’accès à une connexion rapide s’est fait progressivement : en 2020, seul un quart des communes du Grand Est avait un taux de couverture fixe supérieur à 90 % (figure 3). Une commune sur cinq a dépassé ce seuil en 2021, et une sur quatre en 2022. Le développement du très haut débit a ensuite connu un ralentissement en 2023, avant de s’arrêter en 2024 (12 %, puis 2 % des communes ont dépassé le taux d’éligibilité de 90 %).

Le rythme du déploiement varie selon le type de commune. En 2020, le taux de locaux éligibles au très haut débit fixe était supérieur à 90 % dans plus de la moitié des grands centres urbains, et seuls 6 % d’entre eux restent sous ce seuil quatre ans plus tard. Dans l’urbain de densité intermédiaire, la part des communes bien couvertes est passée de 28 % à 80 % sur la période. Le milieu rural illustre ainsi l’effort de déploiement du très haut débit sur l’ensemble du territoire régional : en retard en 2020 (25 % des communes rurales affichaient un taux de couverture supérieur à 90 %), il est maintenant devant l’urbain de densité intermédiaire, avec 84 % de communes bien couvertes.

Figure 3Déploiement progressif du très haut débit par commune

  • Note : Les données sont dans le fichier de données à télécharger.
  • Lecture : Dans les communes bleues, plus de 9 locaux sur 10 sont éligibles à un débit supérieur à 100 Mb/s. Plus le bleu est foncé, plus le déploiement du très haut débit est ancien.
  • Source : Arcep, couverture territoriale en très haut débit.

Les zones blanches pour la 4G ont presque disparu

Le déploiement de la 4G en France a commencé en 2016 et est aujourd’hui presque achevé. En 2019, les zones pas ou peu couvertes –  – s’étendaient encore sur un septième de la région. Ces zones se trouvant dans des territoires peu peuplés, cela ne concernait que 2 % de la population régionale (contre 1 % en France métropolitaine). L’ouest du Grand Est était davantage touché (6 % de la population dans les Ardennes, 9 % dans la Meuse et 13 % en Haute-Marne).

En 2024, ces zones peu ou mal couvertes ont presque disparu : elles ne représentent que 3 % de la surface régionale, et moins d’un habitant sur mille. À l’inverse, 89 % de la surface régionale est couverte par les quatre opérateurs de télécommunications à la fois, soit 27 points de plus qu’en 2020.

Les territoires les moins denses et les plus denses sont mieux couverts en 5G

Dans le Grand Est, c’est dans les communes rurales à habitat très dispersé que la couverture 5G est la plus développée, avec 13 systèmes 5G pour 10 000 habitants, au-dessus de la moyenne nationale (12 pour 10 000 habitants). Cela s’explique en partie par une population très faible dans ces territoires, ce qui permet un bon taux de couverture pour un nombre de systèmes réduit. Même s’ils sont moins bien couverts que l’ensemble du pays, les grands centres urbains et les ceintures urbaines du Grand Est disposent toutefois d’une meilleure couverture que la moyenne régionale (10 pour 10 000 habitants). La commune de Verdun comporte même 20 systèmes 5G pour 10 000 habitants (figure 4). Au contraire, avec un taux de 9 pour 10 000, les bourgs ruraux et les petites villes ont la moins bonne couverture 5G.

Vivre près d’un système ne garantit pas forcément un bon accès à la 5G. En effet, certains systèmes sont installés pour couvrir les principaux axes de communication, et leurs antennes sont orientées afin de donner un accès sur une bande de terrain très réduite et non pas pour les populations vivant à proximité de ces axes de transport. De plus, les centres urbains et les territoires ruraux ne disposent pas des mêmes systèmes 5G : dans les espaces denses, les antennes utilisent une bande de fréquence plus élevée, ce qui permet un meilleur débit, mais une portée moindre, compensée par une densité de systèmes plus importante. À l’inverse, les systèmes des espaces ruraux utilisent une bande de fréquence basse, au débit plus limité, mais sur une zone plus étendue.

Figure 4Densité des systèmes 5G par rapport à la population fin 2024

  • Note : Données lissées non diffusables.
  • Sources : Arcep, observatoire des déploiements 5G ; Insee, Fidéli.

Encadré - Les politiques de déploiement du très haut débit

Le Plan France Très Haut Débit est une stratégie adoptée le 28 février 2013 par le gouvernement français et qui vise à couvrir l’intégralité du territoire en très haut débit. Il se décompose en plusieurs étapes :

  • d’ici 2020, garantir à tous un accès au bon haut débit (supérieur à 8 Mb/s) ou au très haut débit ;
  • d’ici 2022, doter tous les territoires d’infrastructures numériques de pointe en donnant accès à tous au très haut débit (supérieur à 30 Mb/s) ;
  • d’ici 2025, généraliser la fibre optique sur l’ensemble du territoire.

Les objectifs pour 2020 et 2022 ont été globalement atteints (plus de 99,9 % de locaux éligibles au niveau de débit fixé en fin d’année). Au quatrième trimestre 2024, la couverture par fibre optique s’avère encore incomplète : 91 % des locaux y sont éligibles dans le Grand Est, 1 point de plus qu’en France métropolitaine.

L’accord New Deal mobile, conclu en janvier 2018 entre le gouvernement et les quatre principaux opérateurs de téléphonie, visait à généraliser la 4G sur l’ensemble des réseaux mobiles avant fin 2020 pour la majorité du territoire, et avant fin 2022 pour certains sites du programme « zones blanches et centres-bourgs ». Ces objectifs sont aujourd’hui remplis, et le New Deal mobile impose désormais de densifier le réseau 4G, en exigeant un nouveau standard de « bonne couverture » (définition Arcep : appels et SMS à l’extérieur des bâtiments et, dans certains cas, à l’intérieur également), en particulier le long des axes routiers.

En parallèle, le déploiement de la 5G est réglementé par l’attribution de bandes de fréquence à chaque opérateur, qui s’accompagne d’obligations sur le nombre de sites installés, dont un quart en zone peu dense ou industrielle. En 2024, les opérateurs sont en avance sur le calendrier qui leur est imposé.

Publication rédigée par :Baptiste Descamps, Vincent Monchâtre (Insee)

Pour comprendre

Interprétation des indicateurs : les indicateurs relatifs au numérique fixe concernent les locaux éligibles, à savoir des logements ou locaux à usage professionnel, susceptibles de bénéficier d’une connexion sous réserve d’effectuer une démarche auprès d’un fournisseur d’accès internet pour être raccordés au réseau. Ces chiffres correspondent donc à une couverture potentielle et non pas à une couverture effective.

En aucun cas, ces indicateurs ne peuvent être transposés en population couverte, en raison de la différence de densité d’occupation des locaux : l’éligibilité de la moitié des locaux au très haut débit, ne signifie pas que la moitié de la population l’est.

Concernant le numérique mobile, la population couverte en 4G est estimée en dénombrant la population résidant dans la zone couverte.

Les données sur la 5G ne comportent pas de zone de couverture mais uniquement la localisation des systèmes, sans indication sur leur orientation ni leur portée. On ne peut donc estimer la population couverte pour cette technologie de la même manière que pour la 4G.

Publication rédigée par :Baptiste Descamps, Vincent Monchâtre (Insee)

Sources

Cette étude est basée sur des données publiques collectées auprès des quatre principaux opérateurs de téléphonie : Bouygues Telecom, Free, Orange et SFR. Elles sont fournies par l’Arcep (Autorité de régulation des communications électroniques et des postes) qui mesure par ailleurs la qualité des services par des tests sur le terrain.

Définitions

Débit : quantité de données numériques pouvant être transportée sur un support, tel que le fil de cuivre ou la fibre optique, exprimée en bits par seconde. Par convention, la limite basse du bon haut débit est fixée à 8 Mb/s, celle du très haut débit à 30 Mb/s et celle du très haut débit par la fibre à 100 Mb/s.

Locaux : logements et locaux à usage professionnel (établissements employeurs). Un local est dit éligible, ou raccordable concernant la fibre, quand les liaisons établies permettent la prise d’un abonnement auprès d’un fournisseur d’accès.

Zone blanche : territoire privé d’accès numérique.

Zone grise : territoire avec un accès numérique partiel (couvert par au moins un des quatre grands opérateurs téléphoniques).

Un système 5G désigne une antenne ou un groupe d’antennes localisées au même endroit permettant à un opérateur de couvrir une bande de fréquence pour la 5G (5e génération de téléphonie mobile).

Pour en savoir plus

(1) Retrouvez davantage de données associées à cette publication en téléchargement.

(2) Nougaret A., Solard J., Viard-Guillot L., « Des pratiques numériques durablement transformées par la crise sanitaire », Insee Focus no 318, janvier 2024.

(3) Antoine P., Simon A., « Déploiement du très haut débit : les écarts se résorbent », Insee Analyses Auvergne-Rhône-Alpes no 98, février 2020.

(4) Monchatre V., « L’est du Grand Est mieux connecté que l’ouest », Insee Analyses Grand Est no 92, février 2019.