Insee Analyses Guyane ·
Septembre 2025 · n° 78
L’économie guyanaise reste marquée par l’activité spatiale en retrait
En 2024, l’économie de la Guyane se contracte, avec une croissance en recul de 1,1 %. Comme en 2023, cette décroissance est due à une activité spatiale encore en transition, entraînant une baisse de 13,2 % en volume des exportations. Les autres composantes de la croissance régionale sont au contraire bien orientées. La consommation des ménages accélère avec une hausse de 2,6 % en volume, favorisée par le ralentissement de l’inflation qui persiste toutefois (+2,7 %) et soutenue par le dynamisme du marché du travail. Elle contribue à hauteur de 1,3 point à la croissance. La consommation des administrations publiques soutient également la croissance (+2,2 % en volume) à hauteur de 1,1 point. L’investissement augmente de 3,3 % en volume, porté par les investissements privés en hausse de 10,2 % en valeur, tandis que l’investissement public stagne. Les importations augmentent fortement (+6,2 % en volume), témoignant du dynamisme de l’économie régionale.
- Le PIB guyanais recule
- Hors activité spatiale, les exportations progressent
- La consommation des ménages soutient l’activité
- L’inflation décélère mais persiste
- La consommation publique augmente
- L’investissement est en hausse, porté par l’investissement privé
- Les importations traduisent une activité économique dynamique malgré un secteur spatial en transition
Le PIB guyanais recule
En 2024, le Produit intérieur brut (PIB) de la Guyane recule de 1,1 % en volume après une baisse de 3,0 % en 2023 (figure 1). Ce repli s’oppose à la croissance observée au niveau national (+1,2 %). Avec une population moyenne estimée à 292 100 habitants en 2024, le PIB par habitant guyanais s’élève à 17 400 euros. Cet indicateur, nettement plus faible que dans les autres régions ultramarines ou au niveau national, s’explique principalement par la structure démographique de la région, avec une forte proportion de jeunes, qui contribuent moins à la production de richesses que les adultes en âge de travailler (figure 2).
tableauFigure 1 – Figure 1 : Le produit intérieur brut (PIB) de la Guyane et ses principales composantes
Composante du PIB en 2024 | Évolution en volume aux prix de l’année précédente | PIB (en millions d’euros courants) | Évolution des prix | Évolution en valeur | Contribution à la croissance (en points) |
---|---|---|---|---|---|
Produit intérieur brut | -1,1 | 5 084,1 | 2,1 | 0,9 | -1,1 |
Consommation des ménages | 2,6 | 2 716,4 | 2,7 | 5,4 | 1,3 |
Consommation des administrations publiques | 2,2 | 2 721,7 | 2,6 | 4,8 | 1,1 |
Investissement | 3,3 | 1 719,3 | 2,4 | 5,7 | 1,1 |
Imports de biens et services | 6,2 | 3 236,4 | 1,5 | 7,8 | -3,7 |
Exports de biens et services | -13,2 | 704,5 | -6,3 | -18,7 | -2,3 |
Variations de stocks | nd | 458,7 | nd | nd | 1,3 |
- nd : non disponible.
- Lecture : En 2024, le PIB de la Guyane baisse de 1,1 % en volume (hors effet prix) par rapport à 2023.
- Source : Insee ; Cerom, Comptes rapides.
tableauFigure 2 – Taux de croissance du produit intérieur brut (PIB) en volume en Guyane
Année | Guyane | France |
---|---|---|
2014 | -0,8 | 1,0 |
2015 | 0,8 | 1,1 |
2016 | 3,6 | 0,9 |
2017 | 0,1 | 2,1 |
2018 | 3,0 | 1,6 |
2019 | 1,3 | 2,0 |
2020 | -3,4 | -7,4 |
2021 | 3,5 | 6,9 |
2022 | 1,1 | 2,7 |
2023 | -3,0 | 1,4 |
2024 | -1,1 | 1,2 |
- Sources : Insee, comptes économiques définitifs ; CEROM, comptes rapides.
graphiqueFigure 2 – Taux de croissance du produit intérieur brut (PIB) en volume en Guyane

- Sources : Insee, comptes économiques définitifs ; CEROM, comptes rapides.
Hors activité spatiale, les exportations progressent
Comme en 2023, l’activité spatiale reste très contenue en 2024 avec seulement trois tirs de fusée, dont le vol inaugural d’Ariane 6 en juillet. La composition de ces vols (deux lancements Vega et un Ariane en 2024, contre un lancement Vega et deux Ariane en 2023) engendre une nouvelle baisse des exportations de 13,2 %, après un recul déjà significatif de 24,5 % en 2023 (figure 3). Alors que les exportations liées au spatial représentaient près des deux tiers du total des exportations en 2019, elles n’en représentent plus que 20 % en 2024.
Hors activité spatiale, les exportations connaissent une hausse de 10,4 %, portées par une augmentation des exportations d’or et autres minerais (+70 % en volume). De même, les exportations de biens manufacturés augmentent de 8,9 %. Les exportations de produits de l’industrie agro-alimentaire connaissent également une forte hausse (+39 % en volume). Cependant elles contribuent peu à l’évolution du total des exportations, compte tenue de leur faible part (2 %).
Le nombre de touristes augmente fortement en 2024 (+10,8 %), atteignant 86 000 visiteurs. Leurs dépenses (comptabilisées en exportations de services) sont en hausse de 1,6 % en volume. Elles représentent près de 20 % des exportations guyanaises en valeur en 2024 (contre 9 % en 2019). Contrairement aux Antilles, la dépense moyenne par touriste de séjour diminue (‑5,6 %) pour atteindre 1 747 € par personne, ce qui reste toutefois bien supérieur à la dépense moyenne des touristes de séjour de Guadeloupe (1 059 €) et de Martinique (980 €). Cet écart s’explique par la part importante de tourisme d’affaires en Guyane.
tableauFigure 3 – Evolution des importations et des exportations en volume et du solde commercial en valeur de la Guyane
Année | Évolution des importations en volume | Évolution des exportations | Solde commercial (en millions d’euros courants) |
---|---|---|---|
2014 | 5,1 | -7,1 | -1230 |
2015 | -6,3 | 0,7 | -1055 |
2016 | 0,4 | -0,9 | -1064 |
2017 | 3,9 | 3,4 | -1181 |
2018 | 2,3 | 5,2 | -1190 |
2019 | -1,2 | -14,3 | -1364 |
2020 | -16,1 | -23,4 | -1347 |
2021 | 15,8 | 8,5 | -1758 |
2022 | 2,9 | -5,1 | -1763 |
2023 | -0,1 | -24,5 | -2135 |
2024 | 6,2 | -13,2 | -2532 |
- Sources : Insee, comptes économiques définitifs ; CEROM, comptes rapides.
graphiqueFigure 3 – Evolution des importations et des exportations en volume et du solde commercial en valeur de la Guyane

- Sources : Insee, comptes économiques définitifs ; CEROM, comptes rapides.
La consommation des ménages soutient l’activité
La consommation des ménages guyanais augmente de 2,6 % en volume, après une hausse plus modérée de 1,8 % en 2023 (figure 4). Elle représente 53 % du PIB. Principal moteur de la croissance, elle y contribue à hauteur de 1,3 point. Cependant, sa progression est freinée par l’inflation persistante (+3,0 % en 2024 comme en 2023) qui pèse sur le budget des ménages.
La consommation des ménages bénéficie en revanche de la résilience du marché du travail. Les créations d’emplois augmentent de 1,7 % sur un an, après une hausse de 2,9 % en 2023. L’emploi augmente particulièrement dans l’agriculture (+16,8 %, soit 100 emplois créés), la construction (+5,3 %, soit 250 emplois créés) et l’industrie (+2,6 %, soit 150 emplois créés). Le tertiaire connaît une hausse plus faible (+1,7 % dans le tertiaire marchand et +1,0 % dans le tertiaire non marchand). Cependant en raison de son poids élevé, il contribue fortement à la création d’emplois (850 emplois). Néanmoins, le taux de chômage au sens du BIT, s’établit à 17 %, contre 14 % en 2023.
Le crédit bancaire demeure un levier important pour la relance de la consommation des ménages. En 2024, les crédits à la consommation restent dynamiques (+6,6 % après +8,2 % en 2023), permettant à la consommation des ménages de garder une bonne orientation. Pourtant, le contexte monétaire est défavorable. En effet, le resserrement de la politique monétaire entraîne une hausse des taux d’intérêt. Pour les crédits à la consommation, ce taux s’élève à 6,62 % en moyenne en 2024 contre 5,63 % en 2023. Le nombre de dossiers de surendettement déposés à l’Institut d’émission des départements d’outremer (Iedom) est supérieur à l’année précédente, progressant de 24,9 % après une hausse de 15,9 % en 2023.
tableauFigure 4 – Evolution de la consommation des ménages et des administrations publiques en volume en Guyane
Année | Consommation des ménages | Consommation publique |
---|---|---|
2014 | 5,3 | 3,6 |
2015 | -1,6 | 0,4 |
2016 | 1,3 | 3,6 |
2017 | 1,4 | -0,2 |
2018 | 2,1 | 5,3 |
2019 | 1,2 | 0,1 |
2020 | -4,0 | 2,2 |
2021 | 5,3 | 1,0 |
2022 | 4,9 | -1,1 |
2023 | 1,8 | -1,2 |
2024 | 2,6 | 2,2 |
- Sources : Insee, comptes économiques définitifs ; CEROM, comptes rapides.
graphiqueFigure 4 – Evolution de la consommation des ménages et des administrations publiques en volume en Guyane

- Sources : Insee, comptes économiques définitifs ; CEROM, comptes rapides.
L’inflation décélère mais persiste
Le repli de l’activité économique intervient dans un contexte d’inflation persistante. En effet, en 2024, l’inflation reste soutenue (+3,0 %). Elle s’explique par l’augmentation des prix de l’électricité (+14,7 %) et de l’alimentation (+4,9 %). Les services connaissent une hausse des prix légèrement inférieure à la moyenne (2,8 %). Pour les produits manufacturés, la hausse est plus modérée, avec une augmentation de 0,7 % en 2024, après +1,5 % en 2023.
La consommation publique augmente
La consommation publique augmente de 2,2 % en volume en 2024 après une baisse de 1,2 % l’année précédente. Dans les services des administrations et de l’éducation, les dépenses de consommation augmentent de 0,8 % en volume après un repli de 2,8 % en 2023, tout comme le niveau de la masse salariale en volume (+0,4 % après -0,6 % en 2023). La dépense en santé progresse davantage (+ 5,8 % en volume).
L’investissement est en hausse, porté par l’investissement privé
L’investissement, qu’il soit public ou privé, constitue à la fois un moteur immédiat de l’activité et une base des performances économiques futures. Après avoir stagné en 2022 et 2023, l’investissement en Guyane augmente de 3,3 % en volume en 2024 (figure 5).
En particulier, l’investissement privé connaît une forte hausse (+10,2 % en valeur), porté par des projets comme la centrale photovoltaïque avec stockage lithium-ion et hydrogène de l’Ouest guyanais et le pôle scierie et énergie valorisant le bois immergé du lac de Petit-Saut. Les encours de crédits à l’investissement sont en hausse de 10,2 % , après une première accélération de 9,9 % en 2023.
En revanche, l’investissement public stagne, après une hausse de 10,1 % en valeur en 2023 en lien avec le Contrat de convergence et de transformation (CCT). Ce contrat, en vigueur depuis 2019, encadre la structuration des projets et l’investissement public. Il prévoit notamment des fonds pour les infrastructures scolaires et routières. Les projets de construction couvrent ainsi plusieurs grands axes, en particulier la construction et les extensions de collèges et lycées. La signature du nouveau CCT, qui conditionne la programmation pluriannuelle des investissements (PPI) de la Collectivité territoriale de la Guyane n’est intervenu qu’au cours de l’été 2024. Dans ce cadre, la Guyane met notamment en œuvre le chantier du lycée polyvalent Saint-Laurent IV dont l’ouverture est prévue pour la rentrée de septembre 2025 et le collège de Montesinéry-Tonnégrande ouvert en septembre 2024. La fin de la construction du nouvel Hôtel de police à Cayenne est quant à elle prévue pour fin 2025.
tableauFigure 5 – Montant des investissements privé et public et évolution de l’investissement total en volume en Guyane
Année | Investissement privé | Investissement public | Évolution investissement total (en %) |
---|---|---|---|
2019 | 862 | 584 | 6,3 |
2020 | 841 | 512 | -7,0 |
2021 | 903 | 611 | 8,2 |
2022 | 931 | 660 | 0,9 |
2023 | 900 | 727 | 0,1 |
2024 | 992 | 727 | 3,3 |
- Sources : Insee, comptes économiques définitifs ; CEROM, comptes rapides.
graphiqueFigure 5 – Montant des investissements privé et public et évolution de l’investissement total en volume en Guyane

- Sources : Insee, comptes économiques définitifs ; CEROM, comptes rapides.
Les importations traduisent une activité économique dynamique malgré un secteur spatial en transition
Les importations progressent de 6,2 % en volume après avoir stagné en 2023 (-0,1 %). Elles reflètent une activité économique dynamique, malgré le ralentissement du secteur spatial, qui se traduit par une demande intérieure à la hausse.
En valeur, les importations progressent de 7,8 %. Les biens manufacturés portent cette hausse, y contribuant à hauteur de 5,5 points. En particulier, les importations d’équipements mécaniques, de matériels électriques, électroniques et informatiques sont en forte hausse (+17,8 %), en lien avec une progression de la consommation des ménages et de l’investissement. Toutefois, les importations de matériel de transport, constituées à 90 % de véhicules automobiles, reculent de 7,8 % par rapport à 2023. Les importations de produits pétroliers raffinés sont les deuxièmes contributrices (+2,2 points) à l’évolution des importations en valeur et progressent de 22,8 %. Les importations de produits issus de l’industrie agro-alimentaire sont les troisièmes contributrices (+0,8 point) avec une augmentation de 6,9 %, en lien avec une consommation des ménages soutenue. À rebours de cette dynamique, les importations de produits agricoles reculent légèrement (-0,2 % en valeur) et celles de produits de la pêche et l’aquaculture plus fortement (-12,8 %).
Pour comprendre
Les comptes économiques rapides : une estimation précoce de la croissance
Produits par l’Insee, en partenariat avec l’AFD et l’Iedom dans le cadre du projet Cerom, les comptes rapides reposent sur une modélisation macroéconomique alimentée par les premières données disponibles de l’année écoulée. Il ne s’agit pas des comptes définitifs : les estimations pourront faire l’objet d’une révision à chaque campagne jusqu’à ce que la totalité des données de l’année soient connues.
Les comptes économiques sont en base 2020
Depuis 2024, les comptes économiques sont réalisés en base 2020. Les changements de base sont opérés régulièrement afin de tenir compte de l’évolution du fonctionnement de l'économie. La base 2014 intègre les modifications conceptuelles et méthodologiques introduites par la mise à jour du Système européen des comptes paru en 2010 (SEC 2010). En particulier, le champ des dépenses comptabilisées en investissements est élargi pour inclure les dépenses en recherche et développement, ainsi que les systèmes d’armes. Le trafic de stupéfiants et la production de la banque centrale sont également pris en compte. La base 2020 n’intègre pas de changement conceptuel pour les Antilles-Guyane mais corrige certaines méthodes et apporte des améliorations qualitatives telles que la refonte du traitement des données comptables des entreprises. Les indicateurs présentés sont issus de comptes régionaux annuels définitifs jusqu’en 2019, puis d’estimations issues du modèle Tablo pour les années 2020 à 2024.
Des comptes rapides issus d’une modélisation de l’économie
Le modèle Tablo utilisé pour construire les comptes rapides est un modèle macro-économique, de type keynésien, dit « quasi-comptable ». Il permet de projeter les comptes économiques d’une année donnée à partir d’hypothèses d’évolutions de l’offre et de la demande de biens et services. Aux Antilles-Guyane, ce modèle est construit avec 22 branches et 22 produits. Le modèle est basé sur le TES (Tableau des Entrées-Sorties) de la comptabilité nationale. En effet, ces relations comptables permettent d’assurer la cohérence du modèle en décrivant les équilibres nécessaires entre les ressources et les emplois pour chaque opération. La projection du compte se fait selon la méthode de Leontief, fondée sur les interactions entre branches, et celle de Keynes, fondée sur l’interaction revenu-consommation.
Définitions
Le Produit intérieur brut (PIB) mesure la richesse produite sur un territoire donné, grâce à la somme des valeurs ajoutées des biens et services produits sur le territoire. Il est publié en volume et en valeur.
L’évolution en volume ou en « euros constants » permet de mesurer l’évolution du PIB d’une année sur l’autre, indépendamment de l’évolution des prix. Elle décrit l’évolution des quantités produites et fournit la croissance de l’économie.
L’évolution du prix du PIB mesure l’évolution de tous les prix présents dans l’économie : prix à la consommation des ménages, prix à la consommation des administrations, prix de l’investissement et prix du commerce extérieur.
L’évolution globale (volume et prix) fournit l’évolution du PIB en valeur.
Les importations sont comptabilisées en négatif dans le calcul du PIB.
Les dépenses touristiques sont comptabilisées en exportations et hors billets d’avion.
Pour en savoir plus
(1) « Ouvrir dans un nouvel ongletLes comptes économiques de la Guyane », consultables sur les sites du CEROM et de l’Insee.
(2) Mathieu M. (Insee), « L’économie guyanaise se contracte en raison du ralentissement de l’activité spatiale », Insee Analyses Guyane no 72, septembre 2024.
(3) « Une économie dynamique mais sous tension », Insee Conjoncture Guyane no 34, juin 2025.
(4) Benhaddouche A., Kali L. (Insee), « En 2024, le tourisme dynamise l’activité en Guadeloupe », Insee Analyses Guadeloupe no 87, septembre 2025.
(5) Raimbaud B. (Insee), « La croissance martiniquaise est portée par le secteur public », Insee Analyses Martinique no 79, septembre 2025.