Insee
Insee Analyses Normandie · Juin 2025 · n° 144
Insee Analyses NormandieAttractivité démographique : la Normandie séduit davantage de nouveaux arrivants qu’elle ne connaît de départs

Flavien Alleaume, Babacar Diop, Catherine Pesin (Insee)

En 2021, la Normandie a attiré davantage de nouveaux habitants venus d’autres régions qu’elle n’en a vu partir. Son solde migratoire, encore négatif en 2015, s’est ainsi nettement redressé ces dernières années. Malgré ce regain d’attractivité, l’impact des migrations résidentielles sur la démographie régionale demeure modeste : le solde annuel représente un apport limité, équivalent à 1 ‰ de la population normande. Comme pour l’ensemble des départements métropolitains, l’accès au littoral constitue un facteur d’attractivité, notamment pour les retraités, et la Normandie ne fait pas exception. La proximité de l’Île-de-France joue également un rôle favorable : le solde migratoire entre les deux régions, est excédentaire de 8 000 personnes. En revanche, la région perd des étudiants au profit d’autres territoires. Plus largement, d’autres critères identifiés à l’échelle nationale, tels que le climat, la densité de population ou encore la situation de l’emploi, contribuent à expliquer la position relative de la Normandie en matière d’attractivité résidentielle.

Insee Analyses Normandie
No 144
Paru le :Paru le20/06/2025

L’excédent migratoire normand tiré en grande partie par les arrivées en provenance d’Île-de-France

Forte d’un excédentaire depuis 2020 [Mura, Panchout, 2025 ; pour en savoir plus (1)], la Normandie attire désormais plus de nouveaux habitants qu’elle n’en voit partir vers les autres régions de France métropolitaine. En 2021, 52 500 personnes venues d’autres régions métropolitaines se sont installées en Normandie, tandis que 49 300 habitants ont quitté la région. Ce mouvement se traduit par un solde migratoire positif de +3 200 habitants, contrastant avec la situation de 2015, où la Normandie affichait un déficit migratoire de 2 800 habitants. Cette amélioration s’explique à la fois par une hausse des arrivées (+2 600 habitants) et une baisse des départs (-3 400 habitants) par rapport à 2015.

Toutes les tranches d’âge contribuent au solde migratoire positif, à l’exception des 15 à 24 ans, dont le déficit atteint 3 100 habitants en 2021. À elle seule, cette classe d’âge représente plus d’un quart (27,5 %) des mobilités résidentielles, ce qui en fait un enjeu central pour l’attractivité régionale.

En 2021, la Normandie affiche un solde migratoire excédentaire de 7 800 personnes âgées de 15 ans ou plus avec l’Île-de-France (figure 1). Cet excédent s’est nettement accru par rapport à 2015, où il s’élevait à +4 200 habitants. Il résulte principalement des arrivées d’actifs (+5 100 personnes) et des retraités (+3 000), en dépit d’un déficit notable chez les étudiants (-1 100). L’Île-de-France constitue ainsi la première région de provenance des nouveaux arrivants en Normandie : 40 % des de 15 ans ou plus vers la région en proviennent. Le solde migratoire avec les Hauts-de-France est également favorable à la Normandie, avec un gain de 1 200 habitants. En revanche, les échanges avec les autres régions du bassin parisien, ainsi qu’avec la Corse et Provence-Alpes-Côte d’Azur, sont globalement équilibrés. À l’inverse, la Normandie enregistre des soldes migratoires déficitaires avec plusieurs régions du sud et de l’ouest de la France : Auvergne-Rhône-Alpes (-900 habitants), Occitanie (-1 300 habitants), Pays de la Loire (-1 400 habitants), Nouvelle-Aquitaine (-1 600 habitants) et Bretagne (-2 100 habitants). Ces déficits concernent l’ensemble des catégories de la population : actifs, retraités, étudiants et autres inactifs. S’agissant des étudiants, les départs dépassent les arrivées dans la quasi-totalité des échanges migratoires avec les autres régions métropolitaines.

Figure 1Solde migratoire entre la Normandie et les autres régions de France métropolitaine par catégorie socio-professionnelle

Solde migratoire entre la Normandie et les autres régions de France métropolitaine par catégorie socio-professionnelle
Dont actifs Dont étudiants Dont retraités Dont autres inactifs Solde total
Île-de-France 5091 -1145 2996 910 7852
Hauts-de-France 848 -250 377 174 1149
Centre-Val de Loire 162 69 94 -4 321
Bourgogne-Franche-Comté 27 -33 26 9 29
Grand Est 57 -154 72 22 -5
Corse -37 1 -13 0 -49
Provence-Alpes-Côte d'Azur -162 46 -56 -46 -218
Auvergne-Rhône-Alpes -450 -374 15 -57 -868
Pays de la Loire -890 -144 -177 -185 -1396
Occitanie -651 -233 -286 -164 -1333
Nouvelle-Aquitaine -869 -231 -324 -177 -1602
Bretagne -943 -394 -559 -158 -2055
  • Champ : Personnes âgées de 15 ans ou plus.
  • Source : Insee, Recensement de la population 2021.

Figure 1Solde migratoire entre la Normandie et les autres régions de France métropolitaine par catégorie socio-professionnelle

  • Champ : Personnes âgées de 15 ans ou plus.
  • Source : Insee, Recensement de la population 2021.

Le littoral normand, principal levier de l’attractivité régionale

Le littoral normand constitue l’un des principaux leviers de l’attractivité régionale, en particulier dans les départements de la Manche et du Calvados. Dans la Manche, les migrations résidentielles d’actifs et de retraités se traduisent en 2021 par un solde migratoire positif de 1 600 personnes en provenance d’autres régions (+830 actifs et +780 retraités ; figure 2). Cet apport représente un impact migratoire significatif : +5,3 ‰ pour les retraités et +3,8 ‰ pour les actifs. Par rapport à 2015, cet excédent a plus que doublé, soulignant une dynamique migratoire en nette progression.

Un dynamisme comparable s’observe dans le Calvados, réputé pour ses plages et stations balnéaires, avec une attractivité encore plus marquée auprès des retraités : en 2021, le solde migratoire de cette population atteint +790 personnes. Cette dynamique s’est accentuée ces dernières années : entre 2015 et 2021, l’impact migratoire des retraités dans le Calvados est passé de 2,7 ‰ à 4,4 ‰.

L’attractivité des zones littorales ne constitue pas une spécificité normande. Une modélisation économétrique prenant en compte plusieurs facteurs explicatifs des migrations au niveau national confirme cet effet (pour comprendre) : « toutes choses égales par ailleurs », l' d’un département littoral est supérieur de 2 points pour les actifs et de 5 points pour les retraités, comparé à un département non côtier. Certaines zones littorales se distinguent particulièrement par leur attractivité auprès des retraités, avec un impact migratoire atteignant 14 ‰ en Charente-Maritime et dans le Morbihan, 12 ‰ en Vendée et dans les Pyrénées-Orientales et 11 ‰ en Corse-du-Sud. Bien que l’attractivité soit également marquée pour les actifs dans ces départements, leur impact migratoire reste systématiquement inférieur à celui des retraités.

Figure 2aImpact migratoire par département en 2021 dû aux échanges avec l’extérieur de la région

(en ‰)
Impact migratoire par département en 2021 dû aux échanges avec l’extérieur de la région ((en ‰))
Code département Département Impact migratoire pour les actifs
01 Ain 4,2
02 Aisne -1,4
03 Allier 0,7
04 Alpes-de-Haute-Provence 3,0
05 Hautes-Alpes 3,3
06 Alpes-Maritimes 0,5
07 Ardèche 7,1
08 Ardennes -1,3
09 Ariège 6,6
10 Aube 1,2
11 Aude 9,1
12 Aveyron 7,3
13 Bouches-du-Rhône 0,6
14 Calvados 1,6
15 Cantal 7,1
16 Charente 6,3
17 Charente-Maritime 10,8
18 Cher 2,1
19 Corrèze 7,3
21 Côte-d'Or -1,6
22 Côtes d'Armor 9,6
23 Creuse 12,6
24 Dordogne 10,1
25 Doubs 0,4
26 Drôme 5,0
27 Eure 5,0
28 Eure-et-Loir 4,9
29 Finistère 4,8
2A Corse-du-Sud 9,4
2B Haute-Corse 6,5
30 Gard 4,8
31 Haute-Garonne 3,7
32 Gers 6,8
33 Gironde 7,6
34 Hérault 5,4
35 Ille-et-Vilaine 5,5
36 Indre 3,3
37 Indre-et-Loire 0,7
38 Isère -0,6
39 Jura 2,6
40 Landes 10,0
41 Loir-et-Cher 2,3
42 Loire 0,2
43 Haute-Loire 2,8
44 Loire-Atlantique 6,9
45 Loiret 0,7
46 Lot 13,7
47 Lot-et-Garonne 5,8
48 Lozère 2,9
49 Maine-et-Loire 1,9
50 Manche 3,8
51 Marne -3,7
52 Haute-Marne 1,2
53 Mayenne 3,5
54 Meurthe-et-Moselle -4,4
55 Meuse -1,2
56 Morbihan 11,8
57 Moselle -0,5
58 Nièvre 4,4
59 Nord -5,1
60 Oise 2,2
61 Orne 2,2
62 Pas-de-Calais -3,1
63 Puy-de-Dôme 1,9
64 Pyrénées-Atlantiques 8,3
65 Hautes-Pyrénées 1,3
66 Pyrénées-Orientales 7,2
67 Bas-Rhin -1,3
68 Haut-Rhin 0,8
69 Rhône 0,6
70 Haute-Saône 0,1
71 Saône-et-Loire 4,9
72 Sarthe 1,9
73 Savoie 1,1
74 Haute-Savoie 6,8
75 Paris -12,2
76 Seine-Maritime -1,2
77 Seine-et-Marne -9,8
78 Yvelines -11,9
79 Deux-Sèvres 10,2
80 Somme -3,6
81 Tarn 4,8
82 Tarn-et-Garonne 3,7
83 Var 4,0
84 Vaucluse 1,4
85 Vendée 10,2
86 Vienne 1,2
87 Haute-Vienne 1,4
88 Vosges -1,0
89 Yonne 4,2
90 Territoire de Belfort -3,1
91 Essonne -10,5
92 Hauts-de-Seine -9,6
93 Seine-St-Denis -7,1
94 Val-de-Marne -8,8
95 Val-d'Oise -11,6
  • Champ : Actifs et retraités.
  • Source : Insee, Recensement de la population 2021.

Figure 2aImpact migratoire par département en 2021 dû aux échanges avec l’extérieur de la région

  • Champ : Actifs et retraités.
  • Source : Insee, Recensement de la population 2021.

La situation géographique de la Normandie au sein du bassin parisien renforce son attractivité

Au-delà de l’attractivité de son littoral, la position géographique de la Normandie constitue un atout majeur. Située en périphérie de l’Île-de-France, la région bénéficie d’avantages territoriaux notables : des prix immobiliers plus abordables que dans la région parisienne, associés à une bonne accessibilité grâce à un réseau de transports performant. Parmi les départements normands, l’Eure tire particulièrement parti de cette situation. En 2021, son solde migratoire pour les actifs atteint +1 360 personnes. Entre 2015 et 2021, l’impact migratoire des actifs y a doublé, passant de 2,3 ‰ à 5,0 ‰, traduisant une nette intensification de l’attractivité résidentielle du territoire.

À l’échelle nationale, l’attractivité des territoires varie selon le profil de la population observée, en lien étroit avec les caractéristiques locales. Les départements les plus densément peuplés présentent souvent des soldes migratoires déficitaires, tant pour les retraités que pour les actifs. C’est notamment le cas des départements franciliens, où l’impact migratoire est fortement négatif : entre -15 et -19 ‰ pour les retraités, et entre -8 et -12 ‰ pour les actifs. Ce phénomène s’observe dans d’autres territoires urbains denses comme le Nord (-3 ‰ pour les retraités et -5 ‰ pour les actifs), le Pas-de-Calais (-2 ‰ et -3 ‰), ou encore le Bas-Rhin (-1 ‰ pour les deux catégories). S’agissant de la Seine-Maritime, très peuplée et relativement dense, le département présente un impact migratoire proche de l’équilibre chez les retraités (0,3 ‰ ; +80 retraités) et modérément déficitaire chez les actifs (-1,2 ‰ ; -670 personnes).

À l’inverse, les départements affichant une dynamique migratoire favorable sont le plus souvent des territoires moyennement, voire faiblement denses. En Normandie, le département de l’Orne illustre cette tendance. Peu peuplé, il enregistre en 2021 un solde migratoire globalement excédentaire (+350 habitants), principalement porté par les arrivées de retraités (+300) et d’actifs (+260). Toutefois, cette dynamique positive est contrebalancée par un déficit marqué chez les étudiants, dont le solde migratoire est négatif (-260), limitant ainsi le gain démographique global.

La température, un facteur déterminant des choix résidentiels

Les conditions météorologiques observées sur le long terme apparaissent comme un facteur explicatif des mobilités résidentielles. À l’échelle nationale, les 20 départements ayant enregistré les températures moyennes annuelles les plus élevées au cours des 30 dernières années affichent un impact migratoire moyen de 6,9 ‰ chez les actifs. En comparaison, cet impact migratoire n’est que de 1,5 ‰ dans les 20 départements les plus froids. En revanche, l’impact de la pluviométrie semble jouer un rôle bien moins significatif dans les dynamiques migratoires.

Dans ce contexte, le climat océanique de la Normandie – plus frais et plus humide – peut constituer aujourd’hui un frein à une attractivité démographique plus marquée. Toutefois, dans le contexte actuel de changement rapide du climat, ces paramètres peuvent évoluer rapidement.

Contrairement aux actifs et retraités, les étudiants privilégient les grands pôles urbains

En 2021, près de 9 300 étudiants normands ont quitté la région. Parmi eux, 70 % se dirigent vers des régions limitrophes et 30 % vers l’Île-de-France à elle seule. À l’inverse, la Normandie a accueilli 6 600 étudiants en provenance d’autres régions, dont les trois quarts se sont installés dans les principales agglomérations de Caen, de Rouen ou du Havre. Ces flux restent relativement stables depuis 2015 : l’impact migratoire des étudiants évolue légèrement, de -25 ‰ en 2015 à -23 ‰ en 2021. Ces taux rendent compte d'une attractivité limitée pour la Normandie pour cette population. D’autres régions du bassin parisien, telles que le Centre-Val de Loire ou la Bourgogne-Franche-Comté, connaissent des dynamiques, et subissent d'importants départs d'étudiants, notamment vers l’Île-de-France, dont la proximité géographique constitue un frein à leur attractivité.

La densité de population et la richesse de l’offre de formation constituent des facteurs clés de l’attractivité des grands pôles urbains dotés d’établissements universitaires. Ces éléments favorisent l’afflux d’étudiants vers les régions les mieux pourvues en infrastructures d’enseignement supérieur. En Normandie, trois pôles universitaires sont recensés (figure 3). À l’échelle régionale, seule la Métropole Rouen Normandie présente un solde migratoire étudiant positif, avec davantage d’arrivées interrégionales que de départs.

Figure 3Principaux diplômes et formations préparés dans les établissements publics sous tutelle du ministère en charge de l’enseignement supérieur pour l’année universitaire 2022-23

Principaux diplômes et formations préparés dans les établissements publics sous tutelle du ministère en charge de l’enseignement supérieur pour l’année universitaire 2022-23
Régions Impact migratoire des étudiants (en  ‰) Étendue de l’offre universitaire en nombre de diplômes et de formations différents proposés Nombre de spécialités CPGE proposées Volume de formation en années universitaires dispensées (pour 1 000 habitants âgés de 18 à 26 ans) Nombre d’établissements universitaires Lieux de formation tournés vers l’innovation (selon les critères de la DGESIP)
Total Niveau licence (y compris BUT) Niveau master Niveau doctorat
Île-de-France 22,0 972 366 567 86 36 4,18 15 30
Occitanie 9,3 707 271 405 66 32 4,68 7 56
Auvergne-Rhône-Alpes 9,0 756 289 429 75 33 4,95 7 36
Grand Est -1,8 693 274 395 62 31 5,55 3 37
Hauts-de-France -3,2 591 245 321 60 30 3,99 5 39
Nouvelle-Aquitaine -6,6 585 233 316 63 30 4,73 6 10
Pays de la Loire -7,2 447 175 245 50 24 4,41 3 21
Bretagne -11,7 496 193 267 65 28 5,69 4 21
Provence-Alpes-Côte d'Azur -18,2 584 263 295 50 30 4,67 4 20
Bourgogne-Franche-Comté -22,1 431 173 228 56 27 6,00 2 18
Normandie -23,0 441 170 240 56 26 5,36 3 3
Corse -43,7 97 52 35 19 5 6,02 1 10
Centre-Val de Loire -43,8 288 109 156 44 22 3,92 2 5
Rang Normandie 11 10 11 10 8 10 5 8 13
  • Champ : Population âgée de 15 à 29 ans titulaire du baccalauréat au minimum et inscrite dans un établissement d’enseignement supérieur.
  • Sources : Insee, Recensement de la population 2021, SISE (système d'information sur le suivi de l'étudiant).

Une offre de formation supérieure moins étoffée pour les étudiants normands

Les choix de mobilité géographique des étudiants semblent plus influencés par la diversité des formations proposées que par leur volume. Or, si la Normandie bénéficie d’un nombre relativement élevé d’années de formation universitaire – indicateur tenant à la fois du nombre de cursus disponibles et de leur durée – elle se distingue moins par la variété des parcours offerts. Sur ce critère quantitatif, la région se classe toutefois au 5e rang des régions métropolitaines en nombre d’années de formation universitaire rapporté à la population des 18-26 ans.

Cependant, malgré ce volume global de formation élevé et une présence de l’enseignement supérieur répartie sur l’ensemble du territoire, y compris dans les zones les plus éloignées des grands pôles universitaires de Rouen, Caen et du Havre, l’offre normande demeure moins diversifiée que celle de la plupart des autres régions, et ce, à tous les niveaux de formation. Par ailleurs, la Normandie se distingue par une forte présence des bachelors universitaires de technologie (BUT) dans son offre de formation post-bac [Hurard et al., 2025 ; pour en savoir plus (2)], une configuration qui, à l’échelle nationale, s’accompagne souvent d’une attractivité moindre auprès des étudiants.

Le caractère innovant des formations proposées constitue également un levier important dans les choix d’orientation des étudiants. La direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle (DGESIP) répertorie, sur la base de candidatures volontaires des établissements, les lieux de formations tournés vers l’innovation : apprentissage collaboratif, mise à disposition de lieux ouverts, modulables et intégrant les technologies numériques pour les étudiants. À ce titre, la Normandie apparaît comme la région de France métropolitaine la moins bien dotée en formations orientées vers l’innovation. Néanmoins, depuis fin 2021, Normandie Université figure parmi les cinq établissements pilotes retenus pour expérimenter les Pôles universitaires d’innovation (PUI), un dispositif porté par le ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche. Ce programme vise à renforcer les synergies locales entre formation, recherche et innovation et à soutenir le développement de startups à l’échelle des territoires.

D’autres facteurs semblent également influencer le choix de mobilité des étudiants. Ainsi, bien que l’offre de formation de la région Pays de la Loire soit comparable à celle de la Normandie en termes de diversité, elle bénéficie d’une attractivité nettement plus forte auprès des étudiants. Cela suggère que les décisions d’orientation ne reposent pas uniquement sur les caractéristiques de l’offre de formation, mais aussi sur d’autres éléments perçus comme attractifs : cadre de vie, image du territoire, dynamisme culturel et économique, etc.

Le territoire normand présente des disparités en matière d’attractivité résidentielle

Entre 2015 et 2021, l’amélioration du solde migratoire interrégional a profité à l’ensemble du territoire normand, à l’exception de la communauté urbaine Le Havre Seine Métropole. La progression est particulièrement marquée pour la Métropole Rouen Normandie et la communauté urbaine de Caen la Mer. Toutefois, malgré ce regain d’attractivité, l’impact migratoire global demeure modeste – autour de 1 ‰ – et les effets des migrations résidentielles restent limités pour l’ensemble des EPCI (Établissements publics de coopération intercommunale) de la région.

Comme en France métropolitaine, les territoires affichant les impacts migratoires les plus élevés en Normandie sont généralement à la fois peu densément peuplés et situés en bord de mer (figure 4). Le pouvoir d’attraction du littoral s’exprime notamment autour de Granville et le long de la Côte Fleurie, tant auprès des actifs que des retraités. Par ailleurs, les EPCI situés à la frontière des régions voisines enregistrent presque tous un excédent migratoire. En particulier les deux EPCI qui jouxtent l’Île-de-France totalisent un solde positif de +860 habitants en 2021. Parmi les nouveaux arrivants dans ces EPCI, 7 habitants sur 10 sont originaires de l’Île-de-France et deux actifs en emploi sur trois y travaillent toujours. Le coût du logement peut expliquer l’attrait de ces territoires : le prix moyen à l’achat y oscille entre 2 100 € et 2 200 € par m², contre 2 350 € et 2 650 € de l’autre côté de la frontière régionale, et plus de 5 000 € aux abords de Paris. La Normandie apparaît ainsi comme une alternative résidentielle pour les actifs franciliens en quête d’un cadre de vie plus accessible, tout en restant à portée de leur emploi en Île-de-France.

Figure 4Impact migratoire en 2021 dû aux échanges extérieurs avec la région

Impact migratoire en 2021 dû aux échanges extérieurs avec la région
Code EPCI EPCI Impact migratoire (en ‰)
200010700 Communauté d'agglomération Caux Seine Agglo -2,90
200023414 Métropole Rouen Normandie -0,15
200035103 Communauté de communes de la Vallée de la Haute Sarthe 4,24
200035111 Communauté de communes des Sources de l'Orne 8,06
200035814 Communauté d'agglomération Flers Agglo -1,79
200036069 Communauté de communes du Pays de Mortagne au Perche 3,18
200040277 Communauté d'agglomération Agglo du Pays de Dreux 0,15
200042604 Communauté de communes de Granville, Terre et Mer 5,00
200042729 Communauté de communes de la Baie du Cotentin 4,39
200043354 Communauté de communes de Villedieu Intercom 4,39
200065563 Communauté de communes Normandie-Cabourg-Pays d'Auge 6,35
200065589 Communauté de communes Val ès Dunes 0,96
200065597 Communauté urbaine Caen la Mer -0,76
200065787 Communauté de communes de Pont-Audemer / Val de Risle -0,24
200066017 Communauté de communes Lieuvin Pays d'Auge 2,95
200066389 Communauté d'agglomération Saint-Lô Agglo 1,57
200066405 Communauté de communes Roumois Seine -3,95
200066413 Communauté de communes Intercom Bernay Terres de Normandie 3,17
200066462 Communauté de communes Interco Normandie Sud Eure 4,83
200066710 Communauté de communes Cingal-Suisse Normande -3,06
200066728 Communauté de communes Vallées de l'Orne et de l'Odon -0,30
200066801 Communauté de communes Isigny-Omaha Intercom 4,46
200066827 Communauté de communes du Pays de Honfleur-Beuzeville 2,91
200067023 Communauté de communes Coutances Mer et Bocage 4,34
200067031 Communauté de communes Côte Ouest Centre Manche 4,36
200067205 Communauté d'agglomération du Cotentin 1,11
200068435 Communauté de communes Cœur du Perche 4,87
200068443 Communauté de communes Andaine - Passais 9,45
200068450 Communauté de communes Terres d'Argentan Interco -3,90
200068468 Communauté de communes des Pays de L'Aigle 3,32
200068534 Communauté de communes Terroir de Caux -1,96
200068799 Communauté de communes Intercom de la Vire au Noireau 2,99
200068856 Communauté de communes des Hauts du Perche 8,25
200069425 Communauté d'agglomération Mont-Saint-Michel-Normandie 4,61
200069458 Communauté de communes des Vallées d'Auge et du Merlerault 6,20
200069516 Communauté de communes Seulles Terre et Mer 0,10
200069524 Communauté de communes Pré-Bocage Intercom 0,94
200069532 Communauté d'agglomération Lisieux Normandie 4,25
200069722 Communauté de communes interrégionale Aumale - Blangy-sur-Bresle 11,12
200069730 Communauté de communes des 4 rivières 4,77
200069821 Communauté d'agglomération Fécamp Caux Littoral Agglomération 1,91
200069839 Communauté de communes de la Côte d'Albâtre 1,13
200069847 Communauté de communes Plateau de Caux -0,51
200070068 Communauté de communes Communauté Bray-Eawy -3,24
200070142 Communauté de communes Lyons Andelle -0,06
200070449 Communauté de communes Inter-Caux-Vexin -2,73
200071454 Communauté d'agglomération Evreux Portes de Normandie 1,43
200071504 Communauté de communes des Collines du Perche Normand 2,44
200071520 Communauté de communes Domfront Tinchebray Interco 1,18
200071652 Communauté de communes du Pays Fertois et du Bocage Carrougien 2,99
200071843 Communauté de communes du Vexin Normand 11,43
200072312 Communauté d'agglomération Seine Normandie Agglomération 5,97
200072676 Communauté de communes Maine Saosnois -4,37
200084952 Communauté urbaine Le Havre Seine Métropole -3,66
200089456 Communauté d'agglomération Seine-Eure 0,82
241400415 Communauté de communes Cœur Côte Fleurie 11,27
241400514 Communauté de communes du Pays de Falaise 1,47
241400555 Communauté de communes de Bayeux Intercom 2,61
241400860 Communauté de communes Cœur de Nacre 8,73
241400878 Communauté de communes Terre d'Auge 3,44
242700276 Communauté de communes du Pays de Conches 0,36
242700607 Communauté de communes du Pays du Neubourg -1,44
246100390 Communauté de communes du Val d'Orne 2,66
246100663 Communauté urbaine d'Alençon -1,30
247600505 Communauté de communes Campagne-de-Caux -3,80
247600588 Communauté de communes des Villes Sœurs -1,73
247600604 Communauté de communes de Londinières 8,06
247600620 Communauté de communes Yvetot Normandie -1,29
247600646 Communauté de communes Caux - Austreberthe -3,88
247600729 Communauté de communes Falaises du Talou 1,67
247600786 Communauté d'agglomération de la Région Dieppoise 3,44
  • Champ : Migrations résidentielles entre les EPCI normands et l’extérieur de la Normandie.
  • Source : Insee, Recensement de la population 2021.

Figure 4Impact migratoire en 2021 dû aux échanges extérieurs avec la région

  • Champ : Migrations résidentielles entre les EPCI normands et l’extérieur de la Normandie.
  • Source : Insee, Recensement de la population 2021.

Encadré - Le dynamisme économique des territoires, moteur de la mobilité des actifs ?

Le dynamisme économique des territoires, et en particulier la situation de leur marché du travail, semble influencer la mobilité résidentielle des actifs. Dans la moitié nord de la France, plusieurs départements affichant un taux de chômage inférieur à la moyenne nationale présentent, sur la même période, un solde migratoire positif pour les actifs (figure 5). C’est notamment le cas de la Mayenne (5,3 % de taux de chômage), de la Vendée (5,8 %), ou encore des départements bretons (entre 5,8 % et 6,8 %). À l’inverse, certains départements connaissant une moindre attractivité migratoire se caractérisant par un taux de chômage plus élevé, comme le Nord (9,8 %), la Somme (9,2 %) ou le Pas-de-Calais (8,9 %).

Les départements normands illustrent également ce lien entre situation de l’emploi et attractivité migratoire. La Manche, qui affiche le solde migratoire le plus positif de la région pour les actifs, est aussi le département pour lequel le taux de chômage est le plus faible (5,5 % en 2021). À l’inverse, la Seine-Maritime cumule un déficit migratoire chez les actifs et le taux de chômage le plus élevé de Normandie (8,6 %). Les trois autres départements – Calvados, Orne et Eure – présentent des situations intermédiaires, à la fois en termes de chômage et de dynamique migratoire.

Cependant, le lien entre insertion professionnelle et attractivité migratoire ne se vérifie pas partout de manière homogène, dans le sud de la France notamment, où certains départements enregistrent un solde migratoire positif malgré un chômage élevé. C’est le cas des Pyrénées-Orientales (12,3 %), de l’Aude (10,7 %) ou encore de l’Ardèche (8,6 %). Dans ces territoires, d’autres facteurs semblent jouer un rôle plus déterminant dans les choix de résidence.

Figure 5Impact migratoire des actifs et taux de chômage dans les départements de la moitié nord de la France hors Île-de-France

Impact migratoire des actifs et taux de chômage dans les départements de la moitié nord de la France hors Île-de-France - Lecture : En 2021, le taux de chômage dans la Manche s’élève à 5,5% et l’impact migratoire est de 3,8‰. Le département se situe dans la tendance des départements du nord de la France d’une corrélation négative entre ces deux variables.
Département Taux de chômage 2021 (en %) Impact migratoire externe des actifs (en ‰)
Aisne 11,0 -1,4
Ardennes 9,5 -1,3
Aube 10,0 1,2
Calvados 7,1 1,6
Cher 7,8 2,1
Côte-d'Or 5,9 -1,6
Côtes-d'Armor 6,8 9,6
Doubs 7,2 0,4
Eure 7,8 5,0
Eure-et-Loir 7,0 4,9
Finistère 6,7 4,8
Ille-et-Vilaine 5,8 5,5
Indre 7,6 3,3
Indre-et-Loire 6,9 0,7
Jura 5,4 2,6
Loir-et-Cher 6,4 2,3
Loire-Atlantique 6,4 6,9
Loiret 7,3 0,7
Maine-et-Loire 7,0 1,9
Manche 5,5 3,8
Marne 7,5 -3,7
Haute-Marne 6,7 1,2
Mayenne 5,3 3,5
Meurthe-et-Moselle 7,5 -4,4
Meuse 7,5 -1,2
Morbihan 6,5 11,8
Moselle 7,8 -0,5
Nièvre 6,6 4,4
Nord 9,8 -5,1
Oise 7,8 2,2
Orne 7,1 2,2
Pas-de-Calais 8,9 -3,1
Bas-Rhin 6,7 -1,3
Haut-Rhin 7,8 0,8
Haute-Saône 6,7 0,1
Saône-et-Loire 6,6 4,9
Sarthe 7,7 1,9
Seine-Maritime 8,6 -1,2
Somme 9,2 -3,6
Vendée 5,8 10,2
Vosges 8,0 -1,0
Yonne 7,1 4,2
Territoire de Belfort 8,9 -3,1
  • Lecture : En 2021, le taux de chômage dans la Manche s’élève à 5,5% et l’impact migratoire est de 3,8‰. Le département se situe dans la tendance des départements du nord de la France d’une corrélation négative entre ces deux variables.
  • Champ : Population des actifs en Bretagne, Pays de la Loire, Centre-Val de Loire, Bourgogne-Franche-Comté, Grand Est, Hauts-de-France, Normandie.
  • Sources : Insee, Recensement de la population 2021, Taux de chômage localisés 2021.

Figure 5Impact migratoire des actifs et taux de chômage dans les départements de la moitié nord de la France hors Île-de-France

  • Lecture : En 2021, le taux de chômage dans la Manche s’élève à 5,5% et l’impact migratoire est de 3,8‰. Le département se situe dans la tendance des départements du nord de la France d’une corrélation négative entre ces deux variables.
  • Champ : Population des actifs en Bretagne, Pays de la Loire, Centre-Val de Loire, Bourgogne-Franche-Comté, Grand Est, Hauts-de-France, Normandie.
  • Sources : Insee, Recensement de la population 2021, Taux de chômage localisés 2021.
Publication rédigée par :Flavien Alleaume, Babacar Diop, Catherine Pesin (Insee)

Pour comprendre

Les modèles économétriques évoqués dans cette étude ont pour visée de comprendre les relations qui existent entre l’impact migratoire externe (les migrations vers / en provenance de l’extérieur de la région) et des variables explicatives pré-identifiées. L’intérêt de la démarche est de pouvoir mesurer l’influence d’une variable spécifique, « toutes choses égales par ailleurs », c’est-à-dire en tenant compte de l’impact des autres variables également explicatives.

Sources

Les données sur les migrations résidentielles sont issues du recensement de la population 2015 (correspondant aux enquêtes annuelles de recensement 2013 à 2017) et 2021 (enquêtes annuelles de recensement 2018 à 2023), à partir de la question « Où habitiez-vous un an auparavant ? ». Le recensement de la population permet également de mesurer la population active au lieu de résidence et au lieu de travail.

Le prix moyen au m² à l’achat par EPCI a été estimé par le Cerema (Centre d’études et d’expertises sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement). Il s’agit d’un indicateur composite mêlant à la fois les prix des appartements et des maisons, dans le neuf et dans l’ancien.

Définitions

Le solde migratoire est la différence entre le nombre d’installations et le nombre de départs sur une zone géographique lors des migrations résidentielles.

Les migrations résidentielles correspondent aux personnes ayant changé de logement entre deux 1er janvier successifs, à l’exception des enfants de moins d’un an. Seules les migrations internes à la France sont comptabilisées, les migrations avec l’étranger ne sont pas intégrées au calcul.

L’impact migratoire, exprimé en pour mille (‰), est le solde d’entrées sur le territoire pour 1 000 personnes présentes avant les migrations résidentielles.

Pour en savoir plus

(1) Mura B., Panchout J., « Avec 3,34 millions d’habitants au 1ᵉʳ janvier 2025, la population normande retrouve son niveau de 2015 », Insee Analyses Normandie no 140, avril 2025.

(2) Gosselin S., Hurard C., Panchout J., « Plus de 7000 bacheliers normands sur 26 000 souhaitent poursuivre leurs études en dehors de la région », Insee Analyses Normandie no 138, février 2025.

(3) Alleaume F., Horvais A-S., Jerrari K., Pesin C., « L’attractivité de la Normandie, entre influences francilienne et littorale », Insee Analyses Normandie no 129, octobre 2024.