Insee Première ·
Février 2025 · n° 2039
En dix ans, les bureaux et services publics ont consommé autant d’espace naturel,
agricole ou forestier que l’industrie
En France hors Mayotte, près d’un quart des espaces naturels, agricoles ou forestiers consommés entre début 2012 et fin 2021 l’ont été pour l’activité économique. La consommation d’espace est mesurée à partir des changements d’usage des parcelles cadastrales, et ne tient pas compte des renaturations. Elle est nettement plus concentrée dans un nombre restreint de communes que celle liée à l’habitat.
L’industrie et les activités de bureaux et de services publics représentent, chacune, près de 30 % de la consommation d’espace économique. Le secteur du commerce est, lui, de moins en moins consommateur d’espace. Le nombre d’emplois salariés supplémentaires par hectare consommé progresse dans plusieurs secteurs, notamment les bureaux et services publics ainsi que l’hébergement-restauration.
- Près d'un quart de la consommation d'espace entre 2012 et 2021 est dû à l'activité économique
- La consommation d’espace économique est nettement plus concentrée que celle liée à l’habitat
- Les secteurs de l’industrie et des bureaux et services publics sont les plus consommateurs d’espace
- Une consommation d’espace économique du bassin de la Seine orientée vers la logistique
- Le secteur du commerce, de moins en moins consommateur d’espace
- Un nombre d’emplois salariés supplémentaires par hectare consommé en hausse dans le tertiaire
- Près de 320 emplois franciliens supplémentaires par hectare consommé dans les bureaux et services publics
Près d'un quart de la consommation d'espace entre 2012 et 2021 est dû à l'activité économique
La loi « Climat et résilience » prévoit de diminuer de moitié la consommation d’espace entre 2022 et 2031 par rapport à la décennie précédente. Or, entre début 2012 et fin 2021, plus de 227 000 hectares (0,4 % du territoire national) d’espaces naturels, agricoles ou forestiers ont été consommés en France hors Mayotte ; l’espace urbanisé a ainsi augmenté de 6,3 %. Le développement de l’habitat représente à lui seul 63 % de ces changements d’usage, et l’activité économique 23 %. Les surfaces ont été consommées à la fois pour l’un et pour l’autre dans 2 % des cas, notamment les parcelles sur lesquelles sont implantés une maison et un local d’activité (ferme, atelier de réparation, etc.). Les infrastructures (routes et chemin de fer) représentent quant à elles 7 % de la consommation d’espace. Enfin, l’usage de 5 % de la surface consommée entre début 2012 et fin 2021 n’est pas connu (méthodes).
En Île-de-France, l’activité économique est le premier motif de consommation d’espace (44 %, contre 37 % pour l’habitat) (figure 1). Dans les Hauts-de-France, la part liée à l’activité économique est également élevée (34 %), ainsi que dans le Grand Est (28 %) et en Centre-Val de Loire (27 %). À l’opposé, elle est la plus faible en Martinique (9 %) et en Guadeloupe (9 %), où l’habitat explique plus de 82 % de la consommation d’espace.
tableauFigure 1 – Consommation d’espace et poids de l’activité économique de 2012 à 2021, par région
Région | Consommation d’espace de 2012 à 2021 (en hectares) |
Poids de l’activité (en %) |
---|---|---|
Guadeloupe | 1 885 | 9,3 |
Martinique | 1 367 | 8,9 |
Guyane | 1 172 | 24,3 |
La Réunion | 2 581 | 17,8 |
Île-de-France | 9 226 | 43,7 |
Centre-Val de Loire | 13 236 | 26,6 |
Bourgogne-Franche-Comté | 10 356 | 23,7 |
Normandie | 16 815 | 18,6 |
Hauts-de-France | 14 965 | 33,9 |
Grand Est | 14 753 | 28,3 |
Pays de la Loire | 18 315 | 23,3 |
Bretagne | 16 756 | 20,4 |
Nouvelle-Aquitaine | 36 271 | 19,1 |
Occitanie | 25 970 | 19,6 |
Auvergne-Rhône-Alpes | 28 064 | 22,0 |
Provence-Alpes-Côte d'Azur | 13 253 | 23,0 |
Corse | 2 186 | 12,0 |
- Lecture : Entre 2012 et 2021, en Provence-Alpes-Côte d'Azur, 23,0 % des 13 253 hectares consommés étaient destinés à l’activité économique.
- Champ : France, hors Mayotte.
- Source : Cerema, fichiers fonciers de début 2012 à fin 2021.
graphiqueFigure 1 – Consommation d’espace et poids de l’activité économique de 2012 à 2021, par région

- Lecture : Entre 2012 et 2021, en Provence-Alpes-Côte d'Azur, 23,0 % des 13 253 hectares consommés étaient destinés à l’activité économique.
- Champ : France, hors Mayotte.
- Source : Cerema, fichiers fonciers de début 2012 à fin 2021.
La consommation d’espace économique est nettement plus concentrée que celle liée à l’habitat
Après une baisse au début des années 2010, la consommation d’espace économique s’est stabilisée à partir de 2015, entre 4 700 et 5 500 hectares par an, soit à peu près la moitié de la superficie de Paris. Au niveau régional, le repli est surtout marqué en Guadeloupe (-77 % entre la moyenne annuelle de la période 2017-2021 et celle durant les cinq années précédentes) mais aussi dans les Pays de la Loire (-27 %), en Corse (-22 %) et en Provence-Alpes-Côte d’Azur (-18 %). En revanche, elle s’est intensifiée en Guyane (+151 %) et en Martinique (+76 %).
Du fait de l’existence d’importantes zones d’activités, le niveau de concentration de la consommation d’espace pour l’activité économique est très élevé. Les 10 % de communes les plus consommatrices représentent 80 % de la consommation pour l’économie entre 2012 et 2021, contre seulement 51 % pour les 10 % de communes les plus consommatrices pour l’habitat.
Dans les régions Grand Est, Bourgogne-Franche-Comté et Hauts-de-France, la consommation d‘espace économique est concentrée dans un nombre restreint de communes. C’est moins le cas en Pays de la Loire et en Bretagne, où l’implantation des établissements économiques est nettement plus dispersée.
Les secteurs de l’industrie et des bureaux et services publics sont les plus consommateurs d’espace
La consommation d’espace du secteur industriel représente 29 % de l’ensemble de la consommation d’espace économique entre 2012 et 2021 (figure 2). Cette part peut être mise en regard avec le poids de l’industrie dans l’économie (13 % de l’emploi salarié fin 2011). Les bureaux et services publics, qui ont consommé une part équivalente (28 %), concentraient, quant à eux, plus de la moitié de l’emploi salarié fin 2011. Le commerce représente près d’un cinquième de la consommation. Les secteurs des transports et de l’entreposage (9 %) et de la construction (8 %) sont un peu plus consommateurs que le secteur de l’hébergement-restauration (6 %). Ces trois derniers secteurs représentaient, fin 2011, un peu plus de 15 % des emplois salariés.
tableauFigure 2 – Répartition de la consommation d’espace économique de 2012 à 2021 et de l’emploi salarié fin 2011, par secteur d’activité1
Secteur d’activité1 | Poids dans la consommation d’espace économique | Part des emplois salariés |
---|---|---|
Agriculture | 0,5 | 0,9 |
Hébergement-restauration | 5,8 | 4,0 |
Construction | 7,8 | 6,1 |
Transports et entreposage | 9,1 | 5,5 |
Commerce | 19,6 | 12,7 |
Bureaux et services publics | 28,2 | 57,4 |
Industrie | 29,0 | 13,4 |
- 1. Méthodes.
- Lecture : Entre 2012 et 2021, 29,0 % de la consommation d’espace économique est liée à l’industrie. Elle représentait 13,4 % de l’emploi salarié fin 2011.
- Champ : France, hors Mayotte.
- Sources : Cerema, fichiers fonciers de début 2012 à fin 2021 ; Insee, démographie des établissements et estimations d’emplois fin 2011.
graphiqueFigure 2 – Répartition de la consommation d’espace économique de 2012 à 2021 et de l’emploi salarié fin 2011, par secteur d’activité1

- 1. Méthodes.
- Lecture : Entre 2012 et 2021, 29,0 % de la consommation d’espace économique est liée à l’industrie. Elle représentait 13,4 % de l’emploi salarié fin 2011.
- Champ : France, hors Mayotte.
- Sources : Cerema, fichiers fonciers de début 2012 à fin 2021 ; Insee, démographie des établissements et estimations d’emplois fin 2011.
Une consommation d’espace économique du bassin de la Seine orientée vers la logistique
Dans 31 départements, la consommation d’espace économique est spécialisée dans l’industrie : il s’agit du secteur ayant l’écart le plus élevé entre sa part dans la consommation d’espace économique du département et sa part dans la consommation d’espace économique nationale (29 %) (figure 3). Dans l’Hexagone, cette spécialisation est notable dans le centre, de la Saône-et-Loire au Loir-et-Cher, mais aussi aux confins nord-est et sud-ouest. Dans les DOM, elle est forte en Guyane, notamment avec l'activité aérospatiale.
tableauFigure 3 – Secteur d’activité1 surreprésenté dans la consommation d’espace économique de 2012 à 2021, par département
Code de département | Libellé du département | Secteur d’activité1 surreprésenté dans la consommation d’espace économique |
---|---|---|
01 | Ain | Industrie |
02 | Aisne | Industrie |
03 | Allier | Construction |
04 | Alpes-de-Haute-Provence | Industrie |
05 | Hautes-Alpes | Hébergement-restauration |
06 | Alpes-Maritimes | Bureaux et services publics |
07 | Ardèche | Bureaux et services publics |
08 | Ardennes | Industrie |
09 | Ariège | Construction |
10 | Aube | Commerce |
11 | Aude | Industrie |
12 | Aveyron | Construction |
13 | Bouches-du-Rhône | Transports et entreposage |
14 | Calvados | Bureaux et services publics |
15 | Cantal | Industrie |
16 | Charente | Industrie |
17 | Charente-Maritime | Bureaux et services publics |
18 | Cher | Industrie |
19 | Corrèze | Commerce |
21 | Côte-d'Or | Industrie |
22 | Côtes-d'Armor | Commerce |
23 | Creuse | Industrie |
24 | Dordogne | Hébergement-restauration |
25 | Doubs | Industrie |
26 | Drôme | Industrie |
27 | Eure | Transports et entreposage |
28 | Eure-et-Loir | Transports et entreposage |
29 | Finistère | Bureaux-Services publics |
2A | Corse-du-Sud | Hébergement-restauration |
2B | Haute-Corse | Hébergement-restauration |
30 | Gard | Commerce |
31 | Haute-Garonne | Bureaux et services publics |
32 | Gers | Construction |
33 | Gironde | Industrie |
34 | Hérault | Bureaux et services publics |
35 | Ille-et-Vilaine | Bureaux et services publics |
36 | Indre | Industrie |
37 | Indre-et-Loire | Bureaux et services publics |
38 | Isère | Bureaux et services publics |
39 | Jura | Hébergement-restauration |
40 | Landes | Industrie |
41 | Loir-et-Cher | Industrie |
42 | Loire | Construction |
43 | Haute-Loire | Industrie |
44 | Loire-Atlantique | Bureaux et services publics |
45 | Loiret | Transports et entreposage |
46 | Lot | Hébergement-restauration |
47 | Lot-et-Garonne | Commerce |
48 | Lozère | Hébergement-restauration |
49 | Maine-et-Loire | Construction |
50 | Manche | Construction |
51 | Marne | Transports et entreposage |
52 | Haute-Marne | Bureaux et services publics |
53 | Mayenne | Construction |
54 | Meurthe-et-Moselle | Commerce |
55 | Meuse | Bureaux et services publics |
56 | Morbihan | Hébergement-restauration |
57 | Moselle | Industrie |
58 | Nièvre | Industrie |
59 | Nord | Bureaux et services publics |
60 | Oise | Industrie |
61 | Orne | Bureaux et services publics |
62 | Pas-de-Calais | Transports et entreposage |
63 | Puy-de-Dôme | Transports et entreposage |
64 | Pyrénées-Atlantiques | Industrie |
65 | Hautes-Pyrénées | Industrie |
66 | Pyrénées-Orientales | Hébergement-restauration |
67 | Bas-Rhin | Bureaux et services publics |
68 | Haut-Rhin | Industrie |
69 | Rhône | Transports et entreposage |
70 | Haute-Saône | Commerce |
71 | Saône-et-Loire | Industrie |
72 | Sarthe | Bureaux et services publics |
73 | Savoie | Hébergement-restauration |
74 | Haute-Savoie | Hébergement-restauration |
75 | Paris | /// |
76 | Seine-Maritime | Transports et entreposage |
77 | Seine-et-Marne | Transports et entreposage |
78 | Yvelines | Transports et entreposage |
79 | Deux-Sèvres | Commerce |
80 | Somme | Industrie |
81 | Tarn | Industrie |
82 | Tarn-et-Garonne | Commerce |
83 | Var | Construction |
84 | Vaucluse | Bureaux et services publics |
85 | Vendée | Hébergement-restauration |
86 | Vienne | Industrie |
87 | Haute-Vienne | Bureaux et services publics |
88 | Vosges | Industrie |
89 | Yonne | Industrie |
90 | Territoire de Belfort | Transports et entreposage |
91 | Essonne | Bureaux et services publics |
92 | Hauts-de-Seine | Industrie |
93 | Seine-Saint-Denis | Transports et entreposage |
94 | Val-de-Marne | Bureaux et services publics |
95 | Val-d'Oise | Commerce |
971 | Guadeloupe | Commerce |
972 | Martinique | Bureaux et services publics |
973 | Guyane | Industrie |
974 | La Réunion | Commerce |
- /// : absence de résultat due à la nature des choses.
- 1. Méthodes.
- Note : Déjà très fortement urbanisé, il n’y pas de consommation d’espace à Paris de 2012 à 2021 selon le Cerema.
- Lecture : Entre 2012 et 2021, le secteur des bureaux et services publics est le plus surreprésenté dans la consommation d’espace économique du département de Loire-Atlantique.
- Champ : France, hors Mayotte.
- Sources : Cerema, fichiers fonciers de début 2012 à fin 2021 ; Insee, démographie des établissements.
graphiqueFigure 3 – Secteur d’activité1 surreprésenté dans la consommation d’espace économique de 2012 à 2021, par département

- 1. Méthodes.
- Note : Déjà très fortement urbanisé, il n’y pas de consommation d’espace à Paris de 2012 à 2021 selon le Cerema.
- Lecture : Entre 2012 et 2021, le secteur des bureaux et services publics est le plus surreprésenté dans la consommation d’espace économique du département de Loire-Atlantique.
- Champ : France, hors Mayotte.
- Sources : Cerema, fichiers fonciers de début 2012 à fin 2021 ; Insee, démographie des établissements.
Dans la Seine-Saint-Denis, la Seine-et-Marne et les Yvelines comme les départements voisins de la Normandie et du Centre-Val de Loire, la consommation d’espace économique est davantage spécialisée dans les activités de transports et d’entreposage, en lien probablement avec les nouveaux modes de consommation qui se développent et les besoins logistiques associés pour fournir les grandes villes comme Paris.
Dans plusieurs départements du nord-ouest de la France métropolitaine, la consommation d’espace économique est spécialisée dans le développement des activités de bureaux et des services publics, que ce soit en Bretagne (Finistère et Ille-et-Vilaine), dans les Pays de la Loire (Loire-Atlantique et Sarthe) mais aussi du Calvados à l'Indre-et-Loire. C’est également le cas dans plusieurs départements ayant une grande ville métropole (Nord, Bas-Rhin, Haute-Garonne, Hérault, Alpes-Maritimes) ainsi qu’en Île-de-France (Essonne et Val-de-Marne).
La consommation d’espace économique est spécialisée dans le commerce pour douze départements, notamment dans le sud-ouest, dans le Grand Est et en outremer. Dans les zones à vocation touristique comme la Corse, la Savoie, les Hautes-Alpes ou sur le littoral de la Vendée et du Morbihan, la consommation d’espace économique est spécialisée dans l'hébergement-restauration ainsi que dans des départements plus ruraux comme le Lot ou la Lozère.
Le secteur du commerce, de moins en moins consommateur d’espace
Probablement en lien avec l’intensification du commerce électronique puis la régulation plus stricte des autorisations d’aménagement commercial à la fin des années 2010, le secteur du commerce induit une part de plus en plus faible de la consommation d’espace économique [Ouvrir dans un nouvel ongletFrance Stratégie et al., 2021]. Ainsi, en 2012, il consommait 1 170 hectares par an d’espace naturel, agricole ou forestier, soit un niveau proche de l’industrie (1 260 hectares) ou des bureaux et services publics (1 340 hectares). En 2021, le commerce n’en consomme plus que 770 hectares alors que la consommation d’espace de l’industrie et celle des bureaux et services publics ont augmenté (respectivement 1 440 et 1 360 hectares).
Ces évolutions par secteur peuvent être mises en regard d’une utilisation plus ou moins efficiente de la surface consommée. Pour les activités commerciales, la surface de plancher de locaux professionnels mis en chantier pour chaque hectare consommé est passée d’environ 4 000 m² (soit 0,4 hectare) en moyenne chaque année sur la période 2012-2014, à 4 900 m² en moyenne sur la période 2019-2021.
L’augmentation de la surface de plancher par hectare consommé a été la plus forte dans les activités logistiques, où elle est passée de 7 300 m² en moyenne de 2012 à 2014, à plus de 13 000 m² en moyenne de 2019 à 2021. Dans une moindre mesure, le secteur de l’hébergement-restauration (2 300 m² en moyenne de 2012 à 2014 puis 3 100 m² en 2019-2021) améliore également son efficacité des surfaces consommées au regard de ce critère.
Quant au secteur industriel, probablement du fait de ses spécificités comme la présence de machines toujours volumineuses ou encore le besoin de larges accès viabilisés dédiés, il ne connaît pas d’évolution notable sur la période (environ 1 900 m² par hectare consommé en moyenne chaque année).
Enfin, la surface de plancher de locaux mis en chantier par hectare consommé diminue pour les bureaux et services publics : 5 700 m² en moyenne sur la période 2019-2021, contre près de 6 800 m² de 2012 à 2014. Les locaux nouvellement construits sont plus ouverts sur l’extérieur (terrasses, jardins) et avec un nombre plus limité d’étages.
Un nombre d’emplois salariés supplémentaires par hectare consommé en hausse dans le tertiaire
En parallèle de la consommation d’espace, l’emploi salarié a augmenté entre fin 2011 et fin 2021, notamment dans les activités tertiaires. Ainsi, dans les activités de bureaux et services publics, à chaque hectare consommé entre 2012 et 2021 correspondent en moyenne 107 emplois salariés supplémentaires. Le secteur de l’hébergement-restauration a aussi vu ses effectifs croître de 64 emplois salariés par hectare consommé, tandis que le gain est plus mesuré pour le commerce et les transports et l’entreposage (respectivement 28 et 16 emplois salariés). À l’opposé, la consommation d’espace pour l’industrie s’accompagne d’une baisse de l’emploi industriel. Le secteur a bien créé des emplois sur la période, mais le nombre reste inférieur aux destructions d’emplois et ces créations ont pu l’être sur des territoires distincts de ceux où des établissements ont réduit leurs effectifs. En outre, la reconversion de bâtiments industriels peut s’avérer plus complexe et plus coûteuse que celle des bureaux, compte-tenu par exemple de la présence de biens corporels de type machines ou matériels ou encore de l’adaptation aux nouvelles normes environnementales. À noter toutefois que les changements d’usage des parcelles déjà consommées ne sont pas pris en compte, par exemple des friches industrielles qui ont pu être revalorisées pour d’autres utilisations.
Au fil des années, le nombre d’emplois supplémentaires par hectare consommé progresse globalement, malgré un léger repli en fin de période avec la crise sanitaire. La hausse est particulièrement forte pour les bureaux et services publics et l’hébergement‑restauration, avec plus de 100 emplois supplémentaires par hectare consommé depuis 2018, contre 58 pour les bureaux et services publics et 22 pour l’hébergement‑restauration en moyenne sur la période 2012-2014 (figure 4). La hausse des prix du foncier en milieu dense ou touristique pourrait expliquer en partie une forme de rationalisation de la consommation d’espace pour les nouveaux besoins de ces secteurs [Bertrand, 2024]. Dans le commerce et le secteur des transports et de l’entreposage, l’emploi salarié ne progresse, en moyenne sur trois ans, qu’à partir de la période 2014-2016. Depuis, la consommation d’espace entraîne aussi dans ces secteurs un nombre d’emplois salariés supplémentaires plus élevé, malgré un repli récent pour les transports et l’entreposage.
tableauFigure 4 – Nombre d’emplois salariés supplémentaires par hectare consommé selon le secteur d’activité1
Secteur d’activité1 | 2013 | 2014 | 2015 | 2016 | 2017 | 2018 | 2019 | 2020 | Moyenne sur la période 2012-2021 |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Industrie | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 9 | 11 | 10 | /// |
Commerce | 0 | 4 | 12 | 26 | 25 | 41 | 62 | 86 | 28 |
Transports et entreposage | 0 | 0 | 7 | 23 | 37 | 42 | 35 | 27 | 16 |
Hébergement-restauration | 22 | 25 | 39 | 75 | 90 | 154 | 122 | 121 | 64 |
Bureaux et services publics | 58 | 100 | 105 | 140 | 111 | 107 | 106 | 153 | 107 |
- /// : absence de résultat due à la nature des choses.
- 1. Méthodes.
- Notes : Les valeurs correspondent à des moyennes mobiles calculées sur trois ans. Compte tenu de la crise sanitaire, les variations d’emplois salariés entre fin 2019 et fin 2020 et entre fin 2020 et fin 2021 sont toutes deux calculées en retenant la moitié de la variation entre fin 2019 et fin 2021. Pour un secteur donné, si une valeur lissée est négative, elle est alors mise à zéro, ce qui correspond à une absence d’emplois supplémentaires pour cette année dans ce secteur.
- Lecture : En 2012, 2013 et 2014, le secteur de l’hébergement-restauration avait en moyenne 22 emplois salariés supplémentaires par hectare consommé. Dans ce secteur, ce taux est en moyenne de 121 emplois salariés supplémentaires par hectare consommé en 2019, 2020 et 2021.
- Champ : France, hors Mayotte.
- Sources : Cerema, fichiers fonciers de 2012 à 2021 ; Insee, démographie des établissements et estimations d’emplois de fin 2011 à fin 2021.
graphiqueFigure 4 – Nombre d’emplois salariés supplémentaires par hectare consommé selon le secteur d’activité1

- 1. Méthodes.
- Notes : Les valeurs correspondent à des moyennes mobiles calculées sur trois ans. Compte tenu de la crise sanitaire, les variations d’emplois salariés entre fin 2019 et fin 2020 et entre fin 2020 et fin 2021 sont toutes deux calculées en retenant la moitié de la variation entre fin 2019 et fin 2021. Pour un secteur donné, si une valeur lissée est négative, elle est alors mise à zéro, ce qui correspond à une absence d’emplois supplémentaires pour cette année dans ce secteur.
- Lecture : En 2012, 2013 et 2014, le secteur de l’hébergement-restauration avait en moyenne 22 emplois salariés supplémentaires par hectare consommé. Dans ce secteur, ce taux est en moyenne de 121 emplois salariés supplémentaires par hectare consommé en 2019, 2020 et 2021.
- Champ : France, hors Mayotte.
- Sources : Cerema, fichiers fonciers de 2012 à 2021 ; Insee, démographie des établissements et estimations d’emplois de fin 2011 à fin 2021.
Près de 320 emplois franciliens supplémentaires par hectare consommé dans les bureaux et services publics
Dans le secteur du commerce, après la Corse (90 emplois salariés), le nombre d’emplois salariés supplémentaires est le plus élevé pour un hectare consommé en Île-de-France (62) et en Provence-Alpes-Côte d’Azur (65). Les ratios sont aussi les plus élevés dans ces deux dernières régions pour les bureaux et services publics (respectivement 318 et 144 emplois salariés supplémentaires par hectare consommé) et pour le secteur de l’hébergement-restauration (114 et 101). En Auvergne-Rhône-Alpes, le ratio est également soutenu dans ces deux secteurs (80 emplois dans l’hébergement-restauration et 129 emplois dans les bureaux et services publics). Il est plus faible dans certaines régions du nord-ouest : à un hectare consommé pour des bureaux et services publics correspondent 30 emplois salariés supplémentaires en Normandie et 29 emplois salariés supplémentaires en Centre-Val de Loire. Cette région a aussi les ratios les plus faibles dans l’hébergement-restauration (21 emplois) et le commerce (5 emplois).
Méthodes
La mesure de la consommation d’espace
La Ouvrir dans un nouvel ongletloi « Climat et résilience » de 2021 apporte une définition générale des processus d’artificialisation et de désartificialisation et précise que « la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers est entendue comme la création ou l’extension effective d’espaces urbanisés sur le territoire concerné ». La loi prévoit une première étape de réduction de 50 % du rythme de consommation d’espace d’ici à 2031. Celle‑ci est calculée par le Ouvrir dans un nouvel ongletCentre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema) à partir des fichiers fonciers selon une méthode de calcul détaillée sur le Ouvrir dans un nouvel ongletportail de l’artificialisation des sols.
Les flux de consommation correspondent au changement d’usage de parcelles cadastrales pouvant inclure des portions de sols non artificialisés. Par exemple, si une parcelle agricole est transformée en propriété sans subdivision fiscale, on considérera comme « consommée » l’intégralité de l’opération (maison, jardin, parking et nouvelle voirie). A contrario, en cas de subdivision fiscale d’une parcelle, seules les subdivisions dont l’usage déclaré correspond à de la consommation d’espace seront comptées. Par ailleurs, cette source ne permet pas de mesurer une « déconsommation d’espace », la renaturation, ni de tenir compte d’un potentiel nouveau changement d’usage de parcelles déjà consommées.
La sectorisation de la consommation d’espace économique
Depuis 2009, le Cerema produit des flux de consommation d’espace ventilés selon leur usage : l’habitat, l’activité, l’usage mixte (activité et habitat), mais aussi le chemin de fer et les routes (depuis l'été 2023), et enfin les cas où l'usage ne peut pas être défini.
Afin de pouvoir rapprocher la consommation d’espace économique à l’emploi ou aux surfaces mises en chantier, il est nécessaire de pouvoir la ventiler selon qu'elle est liée à l’activité industrielle, au secteur de la logistique ou plutôt aux commerces ou aux services. En effet la surface au sol nécessaire à l’implantation d’un établissement varie fortement selon le secteur d’activité.
L’Insee a développé une méthode utilisant l’information disponible dans les fichiers fonciers mais aussi avec les données de démographie des établissements économiques. Six secteurs (agriculture, industrie, construction, commerce, transports et entreposage, hébergement-restauration) correspondent ainsi à des regroupements connus des 9 premières sections de la NAF. Les 12 dernières sections ont été regroupées dans un septième secteur nommé « bureaux et services publics ».
Les parcelles n’ayant pas pu être sectorisées représentent 10,9 % de la surface des espaces naturels, agricoles et forestiers consommés pour l’activité économique en France hors Mayotte de début 2012 à fin 2021. Ce taux varie entre 6 % et 24 % selon les régions.
Seules les parcelles ayant au moins un bâtiment agricole sont considérées comme consommées pour l’agriculture, sinon les terrains agricoles sont considérés comme étant non consommés. Or, si ces bâtiments sont utilisés à des fins d’exploitation, ils sont exonérés de taxe foncière et ne sont donc pas présents dans les fichiers fonciers. La consommation d’espace pour l’agriculture est donc probablement sous-estimée. À l’inverse, les parcelles consommées pour la construction sont sans doute surestimées ; elles sont associées ici à des entreprises du secteur mais aussi à certains gros chantiers publics qui peuvent avoir un usage final différent de la construction.
Définitions
La consommation d’espace correspond au changement d’usage de parcelles cadastrales naturelles, agricoles ou forestières, pouvant toutefois conserver des portions de sols non artificialisés, en espaces urbanisés.
Dans cette étude, la consommation économique d’un département est dite spécialisée dans le secteur d’activité dont l’écart est le plus élevé entre sa part dans la consommation d’espace économique du département et sa part dans la consommation d’espace économique nationale.
La surface de plancher d’un projet de construction est la somme de toutes les surfaces closes et couvertes, en incluant tous les étages. Il s’agit d’un concept différent de l’emprise au sol qui correspond à la surface que le bâtiment occupe au sol, annexes comprises (garage, bassin de piscine, etc.). La surface de plancher est rapportée, dans cette étude, à la surface consommée pour chaque secteur et par année. Elle est commentée en moyenne mobile sur trois années.
Pour en savoir plus
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Bertrand P., « Des prix immobiliers plus élevés dans les zones denses et touristiques », Insee Première no 2025, novembre 2024.
Bocquet M., « Ouvrir dans un nouvel ongletAnalyse de la consommation d’espaces – Période du 1er janvier 2009 au 1er janvier 2023 », Rapport d’étude du Cerema, mai 2024.
de L’Estoile é., Salin M., « Ouvrir dans un nouvel ongletQuantifier l’utilisation du foncier bâti par les secteurs économiques français pour évaluer leur vulnérabilité au Zéro Artificialisation Nette », Document de travail de la Banque de France no 941, janvier 2024.
Pégaz-Blanc O., Khamallah A., « Le besoin en résidences principales, premier facteur de transformation des espaces naturels, agricoles et forestiers pour l’habitat », Insee Première no 1976, décembre 2023.
Arambourou H., Bouvart C., Tessé S., Rostand J., « Ouvrir dans un nouvel ongletL’artificialisation des sols : un phénomène difficile à maîtriser », Note d'analyse no 128, France Stratégie, novembre 2023.
« Ouvrir dans un nouvel ongletLe foncier économique en Hauts-de-France », DREAL Hauts-de-France, septembre 2021.
« Ouvrir dans un nouvel ongletLa consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers en Île-de-France - une performance notable qui s’est régulièrement améliorée ces dernières années », DRIEAT, mars 2021.
« Ouvrir dans un nouvel ongletPour un développement durable du commerce en ligne », Rapport au gouvernement, France Stratégie, Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) et Inspection générale des finances, février 2021.