Insee Conjoncture Martinique ·
Juin 2024 · n° 29
Bilan économique 2023 - Martinique En 2023, des signes de ralentissement de l’économie martiniquaise après deux années
de reprise
En 2023, l’emploi salarié augmente moins vite que les années précédentes et les créations d’entreprises reculent. Toutefois, le chômage diminue, en particulier chez les jeunes et les moins diplômés. Le recours à l’intérim s’intensifie sur un an. Les prix des produits alimentaires augmentent alors que l’inflation ralentit. Le secteur agricole souffre des conditions météorologiques peu favorables diminuant les rendements. Le tourisme confirme sa reprise, en particulier grâce aux croisiéristes et aux touristes de plaisance.
Ce bilan économique fait partie des 17 bilans économiques régionaux 2023 publiés par l'Insee.
Transport maritime - En Martinique, l’activité maritime progresse en 2023 Bilan économique 2023
Lauriane Vaillant (Grand port maritime de la Martinique)
En 2023, 3,3 millions de tonnes de marchandises sont chargées et déchargées au Grand Port Maritime de La Martinique (GPMLM), en hausse de 11 % sur un an. Les activités de vracs progressent, essentiellement portées par la reprise de l’import de pétrole brut. L’activité conteneur, après avoir connu en 2022 son plus haut niveau depuis dix ans (192 000 EVP), affiche une baisse de 3 % avec un peu plus de 187 000 EVP. Le secteur passager (inter-îles et croisière) revient peu à peu au niveau d’avant crise. Le trafic maritime est particulièrement soutenu.
Les vracs progressent fortement, tirés par le dynamisme des vracs pétroliers
L’ensemble des vracs augmente de plus de 300 000 tonnes (+22 %) atteignant 1,64 millions de tonnes et dépassant la moyenne de la période 2013-2019 établie à 1,59 millions de tonnes (figure 1). La reprise de l’import de pétrole brut est en grande partie responsable de ces bons résultats (+57 % soit 472 618 tonnes), avec une escale de pétrolier tous les deux mois et des volumes de pétrole brut bien plus importants que l’année dernière (figure 2). Cela s’explique par la reprise d’activité de la raffinerie, pénalisée l’année dernière par les travaux sur les bacs de stockage. Ces éléments sont confirmés par l’accroissement de l’export des produits raffinés vers les DFA (+47 %) et la faible progression de l’import de produits raffinés (+3 %).
Les imports EDF, qui ont connu un record en 2022 grâce à la mise en service d’un nouveau pipe (depuis février 2022), continuent sur cette belle lancée avec une croissance de 13 % par rapport à l’année dernière (+26 600 tonnes) et dépassent les 233 000 tonnes pour les centrales de Bellefontaine et de la Pointe des Carrières. Cette augmentation est en partie due à la hausse de la consommation électrique. À noter un effet de calendrier avec un navire prévu en décembre 2022 mais arrivé en janvier 2023, qui contribue aussi à cette hausse.
Concernant les vracs de bitume liquide, cette année on observe deux approvisionnements d’un total de 4 000 tonnes (soit +54 %), à l’appontement SCIC, alors qu’il n’y en eu qu’un seul en 2022 et en 2021. Après des années difficiles, les vracs liquides atteignent en 2023 un tonnage de 1,29 millions de tonnes soit le meilleur résultat depuis 2016.
tableauFigure 1 – Évolution du transit portuaire en Martinique
Produits | 2022 | 2023 | Évolution 2022 – 2023 (en %) |
---|---|---|---|
Liquides en vrac | 986 847 | 1 288 184 | 30,5 |
dont pétrole brut (SARA) | 300 681 | 472 618 | 57,2 |
dont produits raffinés (SARA) | 479 250 | 582 051 | 21,5 |
dont import EDF (Bellefontaine+FDF) | 206 916 | 233 515 | 12,9 |
Solides en vrac | 353 137 | 352 097 | -0,3 |
dont céréales | 50 219 | 44 653 | -11,1 |
dont engrais | 15 241 | 14 990 | -1,6 |
dont clinker (et gypse) | 114 855 | 119 942 | 4,4 |
dont biomasse | 163 112 | 154 198 | -5,5 |
dont autres solides en vracs | 9 709 | 18 313 | 88,6 |
Total vracs | 1 339 984 | 1 640 281 | 22,4 |
Marchandises diverses | 1 657 805 | 1 672 830 | 0,9 |
dont marchandises en conteneurs | 1 085 941 | 1 095 689 | 0,9 |
dont tares des conteneurs | 387 695 | 379 449 | -2,1 |
dont véhicules automobiles | 25 218 | 28 282 | 12,1 |
dont RO-RO (tonnage net marchandises) | 94 225 | 97 249 | 3,2 |
dont tares Ro-Ro et ferry | 64 725 | 72 162 | 11,5 |
Total marchandises | 2 997 788 | 3 313 111 | 10,5 |
- Source : Grand port maritime de la Martinique.
tableauFigure 2 – Évolution du trafic pétrolier de 2013 à 2023
Année | Pétrole brut | Produits raffinés | Total des produits pétroliers |
---|---|---|---|
2013 | 477 | 736 | 1 213 |
2014 | 637 | 940 | 1 577 |
2015 | 709 | 934 | 1 643 |
2016 | 627 | 857 | 1 484 |
2017 | 462 | 735 | 1 197 |
2018 | 383 | 709 | 1 091 |
2019 | 453 | 658 | 1 111 |
2020 | 285 | 592 | 877 |
2021 | 151 | 698 | 849 |
2022 | 301 | 686 | 987 |
2023 | 473 | 816 | 1 288 |
- Source : Grand port maritime de la Martinique.
graphiqueFigure 2 – Évolution du trafic pétrolier de 2013 à 2023

- Source : Grand port maritime de la Martinique.
Le trafic des vracs solides reste stable
Malgré le déclin des imports de céréales, de biomasse et d’engrais, le trafic de vracs solides est stable, avec un total de 352 000 tonnes de marchandises (figure 3). Cela s’explique en partie par la très forte progression des autres vracs solides (+89 %) correspondant en majorité au nouveau trafic de l’appontement Reynoird au Robert (import de ferraille et export de gravillons, sable…) qui totalise plus de 12 000 tonnes de marchandises. Suite à une forte baisse des approvisionnements en 2022, l’import de clinker (principal composant des ciments) repart à la hausse (+4 %) avec près de 120 000 tonnes. Cette tendance souligne la reprise de l’activité qui toutefois ne retrouve pas son niveau de 2019.
Les céréales (nourritures animales, blé et soja) baissent de 11 % principalement à cause de la diminution de l’import de blé en vrac à la SCIC (-24 %) liée à l’arrivée d’un nouveau concurrent qui importe du blé en conteneurs. La biomasse, première activité de vracs solides ayant atteint son meilleur niveau en 2022 avec plus de 163 100 tonnes, faiblit de 5,5 % (soit -8 900 tonnes) en raison de l’augmentation de l’utilisation de la biomasse locale disponible en Martinique. L’engrais à destination de l’agriculture locale diminue de 2 %.
tableauFigure 3 – Évolution des vracs solides de 2013 à 2023
Année | Clinker | Céréales | Engrais | Autres solides en vrac | Biomasse | Ensemble |
---|---|---|---|---|---|---|
2013 | 137 671 | 53 598 | 19 814 | 6 774 | 0 | 217 857 |
2014 | 143 116 | 51 687 | 23 267 | 21 639 | 0 | 239 709 |
2015 | 147 987 | 53 997 | 20 163 | 14 122 | 0 | 236 269 |
2016 | 131 397 | 53 510 | 23 043 | 12 201 | 0 | 220 151 |
2017 | 144 627 | 52 283 | 16 149 | 24 915 | 0 | 237 974 |
2018 | 123 000 | 50 919 | 18 275 | 13 467 | 52 385 | 258 046 |
2019 | 144 600 | 51 119 | 16 524 | 18 791 | 153 948 | 384 982 |
2020 | 104 788 | 47 553 | 17 526 | 11 444 | 155 602 | 336 913 |
2021 | 152 721 | 51 756 | 15 368 | 12 148 | 150 628 | 382 621 |
2022 | 114 855 | 50 219 | 15 241 | 9 707 | 163 113 | 353 135 |
2023 | 119 942 | 44 653 | 14 990 | 18 313 | 154 198 | 352 097 |
- Source : Grand port maritime de la Martinique.
graphiqueFigure 3 – Évolution des vracs solides de 2013 à 2023

- Source : Grand port maritime de la Martinique.
Le trafic roulier reprend
Avec un total de 1,67 millions de tonnes, le tonnage des marchandises diverses progresse de 15 000 tonnes par rapport à 2022, soit une hausse de 1 % (figure 4). Cette évolution est portée par l’import de véhicules automobiles qui augmente de 12 % en tonnage et de 9 % en nombre. Cet essor pourrait s’expliquer, en nombre, par la légère hausse des ventes de véhicules particuliers, et en tonnage par l’augmentation du nombre de tracteurs. La montée de l’utilisation de véhicules électriques et hybrides en Martinique peut également justifier cet élan, avec des véhicules plus lourds.
Aussi, les échanges de marchandises en ro-ro avec la Guadeloupe augmentent (+3 %) et dépassent les 97 000 tonnes, malgré la panne en décembre du navire principal effectuant la traversée. Le tonnage des marchandises en conteneur progresse légèrement. Le tonnage mensuel augmente au cours de l’année 2023 mais la moyenne mensuelle de 91 300t reste néanmoins inférieure au tonnage moyen réalisé en 2019 (près de 100 000 tonnes par mois). La légère progression du tonnage conteneurisé provient du transbordement.
tableauFigure 4 – Évolution du tonnage des vracs et des marchandises diverses (dont conteneurs)
Année | Vracs | Marchandises diverses | Ensemble |
---|---|---|---|
2013 | 1 431 | 1 466 | 2 897 |
2014 | 1 817 | 1 759 | 3 576 |
2015 | 1 879 | 1 526 | 3 405 |
2016 | 1 704 | 1 429 | 3 133 |
2017 | 1 435 | 1 561 | 2 996 |
2018 | 1 350 | 1 711 | 3 061 |
2019 | 1 496 | 1 718 | 3 214 |
2020 | 1 214 | 1 485 | 2 699 |
2021 | 1 231 | 1 533 | 2 764 |
2022 | 1 340 | 1 658 | 2 998 |
2023 | 1 640 | 1 673 | 3 313 |
- Source : Grand port maritime de la Martinique.
graphiqueFigure 4 – Évolution du tonnage des vracs et des marchandises diverses (dont conteneurs)

- Source : Grand port maritime de la Martinique.
Le trafic de conteneurs est en baisse
Après une année exceptionnelle en 2022 avec plus de 192 000 EVP, le total de conteneurs sur l’année 2023 recule (-4 883 EVP) avec une moyenne d’environ 15 600 EVP par mois (figure 5). Le trafic domestique de conteneurs se replie de 4 % alors que le transbordement progresse fortement (+5 557 EVP soit +25 %) et dépasse cette année les 27 700 EVP. Le nombre de conteneurs pleins diminue de 3 % par rapport à l’année dernière (soit -3 757 EVP). Aussi, on note un léger retrait pour les conteneurs vides (-1 126 EVP soit -1,5 %).
L’export de bananes fléchit assez notablement (-1 153 EVP soit -8 %) en raison des conditions météorologiques et des maladies fongiques sur les bananeraies telle que la cercosporiose. Le trafic de conteneurs roulés à l’hydrobase faiblit de 4 % (-83 EVP), expliqué en partie par la panne du navire roulier principal en décembre.
tableauFigure 5 – Évolution du trafic de conteneurs
Année | Domestique | Transbordement | Ensemble |
---|---|---|---|
2013 | 128 688 | 19 301 | 147 989 |
2014 | 135 760 | 36 129 | 171 889 |
2015 | 142 047 | 17 184 | 159 231 |
2016 | 143 578 | 9 875 | 153 453 |
2017 | 140 460 | 20 127 | 160 587 |
2018 | 141 224 | 31 298 | 172 522 |
2019 | 148 668 | 29 609 | 178 277 |
2020 | 148 972 | 15 523 | 164 495 |
2021 | 153 209 | 18 514 | 171 723 |
2022 | 169 291 | 22 842 | 192 133 |
2023 | 159 479 | 27 773 | 187 252 |
- Source : Grand port maritime de la Martinique.
graphiqueFigure 5 – Évolution du trafic de conteneurs

- Source : Grand port maritime de la Martinique.
L’activité croisière retrouve son niveau d’avant la crise de la Covid-19
L’année 2023, qui regroupe la fin de la saison 2022-2023 et le début de la saison 2023-2024, totalise 173 escales avec près de 682 000 mouvements de passagers (entrées et/ou sorties) soit environ 405 000 passagers (figure 6). Le mois de décembre se démarque avec près de 92 000 passagers.
Le trafic passager inter-îles revient progressivement au même niveau de trafic qu’avant la pandémie (+54 % par rapport à 2022), avec 477 escales en 2023, en lien notamment avec une période de grandes vacances scolaires (juillet-août) très active permettant d’approcher les 45 000 passagers (figure 7). Cette belle reprise ne permets pas de retrouver le niveau de 2019.
Après des chutes sévères en 2020 et 2021, le nombre d’escales retrouve un niveau plus soutenu pour cet indicateur-clef de l’activité portuaire avec 1 631 escales en 2023, en hausse de 17 % (figure 8). Le nombre d'escales progresse en lien avec la reprise de la croisière mais aussi l’intensification des escales inter-îles (+29 %) et l’accroissement des escales marchandises (+4 %). Les escales de petits navires à marchandises ou « pacotilleurs » diminuent quant à elles de 12 %.
tableauFigure 6 – Évolution de la croisière en Martinique
Année | Escales (en nombre) | Passagers uniques (en milliers de passagers) | Passagers entrées/sorties (en milliers de passagers) |
---|---|---|---|
2012 | 105 | 110 | 195 |
2013 | 110 | 154 | 254 |
2014 | 145 | 235 | 411 |
2015 | 170 | 308 | 548 |
2016 | 190 | 379 | 654 |
2017 | 225 | 500 | 898 |
2018 | 216 | 504 | 889 |
2019 | 169 | 395 | 671 |
2020 | 100 | 242 | 406 |
2021 | 0 | 0 | 0 |
2022 | 53 | 95 | 168 |
2023 | 173 | 405 | 682 |
- Source : Grand port maritime de la Martinique.
graphiqueFigure 6 – Évolution de la croisière en Martinique

- Source : Grand port maritime de la Martinique.
tableauFigure 7 – Évolution de l’activité de croisière inter-îles en Martinique
Année | Passagers inter-îles |
---|---|
2013 | 115 936 |
2014 | 114 296 |
2015 | 116 419 |
2016 | 102 374 |
2017 | 115 700 |
2018 | 140 952 |
2019 | 166 161 |
2020 | 47 586 |
2021 | 29 965 |
2022 | 104 463 |
2023 | 160 870 |
- Source : Grand port maritime de la Martinique.
graphiqueFigure 7 – Évolution de l’activité de croisière inter-îles en Martinique

- Source : Grand port maritime de la Martinique.
tableauFigure 8 – Évolution des escales de 2013 à 2023
Année | Marchandises | Croisière | Inter-iles de passagers | Autres | Ensemble |
---|---|---|---|---|---|
2013 | 709 | 110 | 392 | 242 | 1 453 |
2014 | 699 | 145 | 395 | 245 | 1 484 |
2015 | 600 | 170 | 493 | 243 | 1 506 |
2016 | 662 | 189 | 625 | 138 | 1 614 |
2017 | 682 | 225 | 619 | 259 | 1 785 |
2018 | 784 | 216 | 607 | 316 | 1 923 |
2019 | 693 | 169 | 712 | 323 | 1 897 |
2020 | 712 | 100 | 173 | 135 | 1 120 |
2021 | 711 | 0 | 162 | 249 | 1 122 |
2022 | 805 | 53 | 369 | 162 | 1 389 |
2023 | 839 | 173 | 477 | 142 | 1 631 |
- Source : Grand port maritime de la Martinique.
graphiqueFigure 8 – Évolution des escales de 2013 à 2023

- Source : Grand port maritime de la Martinique.
Pour comprendre
Le GPMLM (Grand Port Maritime de la Martinique) est la porte d’entrée principale des marchandises en Martinique (plus de 95 %). Les différents secteurs d’activité portuaire sont codifiés selon les directives du ministère des transports dont dépendent tous les ports français en matière de statistiques.
Les marchandises en vracs sont les marchandises transportées en grande quantité sur des navires spécialisés dédiés à cette activité. On distingue les vracs liquides, essentiellement des produits pétroliers y compris le méthane car le gaz est transporté sous forme liquéfiée, des vracs solides, transportés généralement par des cargos-vraquiers ou des navires polyvalents (minerais, céréales…).
Les marchandises dites diverses comprennent les marchandises à l’intérieur des conteneurs transportés sur des navires porte-conteneurs, et les marchandises transportées sur des navires dits roll on/ roll off (ro-ro), de type « ferry », dont les moyens de déchargement et chargement sont généralement des unités routières comme des camions avec ou sans remorques ; les véhicules d’importations sont le plus généralement des marchandises débarquées de navires spécialisés et manutentionnées en ro-ro.
Les passagers sont de 2 types : les voyageurs qui vont d’une île vers une autre et les croisiéristes qui embarquent ou débarquent d’un paquebot. Les croisiéristes sont également de 2 types : ceux qui commencent ou finissent une croisière à Fort-de-France (croisière « basée ») et ceux qui sont en escale à la journée (dits aussi en transit) ayant embarqué dans un autre port.
Définitions
Clinker : constituant du ciment en forme de nodules durs et cristallisés.
EVP (Équivalent Vingt Pieds) : unité de mesure pour exprimer une capacité de transport, multiple du volume standard occupé par un conteneur qui regroupe à la fois les 20 pieds et les 40 pieds. Un conteneur de 20 pieds mesure 2,6 mètres (8,5 pieds) de haut par 2,4 m de large (8 pieds) et 6,1 m (20 pieds) de long pour une capacité d’environ 38 m³.
Ro-Ro ou roulier : cette appellation vient de l'anglais « Roll-On, Roll-Off » signifiant littéralement « roule dedans, roule dehors ». Les Ro-Ro, sont des navires utilisés pour transporter des véhicules, chargés grâce à une ou plusieurs rampes d'accès. On les dénomme ainsi pour les distinguer des navires habituels où les produits sont chargés à la verticale par des grues « lo-lo » (lift-on, lift-off).
Transbordement : déchargement et rechargement de marchandises d’un navire sur l’autre dans un délai court.