Insee Flash Grand Est · Septembre 2023 · n° 79

Les immigrés davantage présents dans les pôles et aux frontières du Grand Est

Le Grand Est compte 521 000 immigrés, soit 9,4 % de sa population en 2020. Après l’Île-de-France (20,1 %) et Provence-Alpes-Côte d’Azur (11,0 %), le Grand Est est au 3^e rang des régions métropolitaines avec Auvergne-Rhône-Alpes, la Corse et Occitanie. Les immigrés sont âgés de 46 ans en moyenne, cinq ans de plus que les non-immigrés. Ils sont beaucoup plus nombreux aux âges de la vie active (figure 1), trois quarts d’entre eux étant âgés de 15 à 64 ans. En effet, on ne naît pas immigré, mais on le devient à son arrivée en France, souvent durant la première moitié de la vie active. De plus, les immigrés ont plus souvent des enfants après leur migration, si bien que seuls 6,5 % des immigrés ont moins de 15 ans, soit trois fois moins que le reste de la population. Jeunes et seniors de plus de 64 ans sont en proportion un peu plus élevée dans le Grand Est qu’au plan national.

Les femmes sont légèrement majoritaires parmi les immigrés, notamment entre 15 et 64 ans. Avec le droit au regroupement familial, l’immigration n’est plus une immigration de main-d’œuvre essentiellement masculine comme il y a 50 ans. Cette féminisation des âges actifs, plus forte que chez les non-immigrés, est également liée aux migrations autonomes de femmes célibataires ou ayant laissé leur conjoint dans leur pays d’origine [Beauchemin et alii, 2013 ; pour en savoir plus (4)]. Chez les plus de 70 ans, la surreprésentation des femmes est au contraire atténuée chez les immigrés.

Entre 15 et 64 ans, près d’un immigré sur deux est en couple avec enfant, contre un non-immigré sur trois. La proportion de parents de famille monoparentale est également plus élevée chez les immigrés : 7 %, soit un point de plus que dans le reste de la population. Ils vivent plus rarement en couple sans enfant, les immigrées ayant davantage d’enfants que les femmes non-immigrées.

70 % des immigrés sont actifs, c’est-à-dire en emploi ou au chômage, soit près de cinq points de moins que les non-immigrés. Alors que pour les hommes les taux sont proches, les femmes immigrées sont davantage éloignées de l’activité. En effet, 19 % d’entre elles sont « au foyer », bien plus que parmi les femmes non-immigrées (5 %), tandis que la proportion d’hommes au foyer est très faible parmi les immigrés et les non-immigrés. La part des femmes au foyer est également plus élevée qu’au plan national, la situation étant plus fréquente pour les immigrés d’origine turque qui sont surreprésentés dans la région.

Le chômage touche davantage les immigrés : parmi les 15-64 ans, 15 % se déclarent chômeurs, contre 9 % des non-immigrés. Ces difficultés à s’insérer sur le marché de l’emploi peuvent s’expliquer par une moindre qualification ainsi que par d’autres facteurs : accès restreint à l’emploi public, éventuelles discriminations liées à l’origine ou au quartier de résidence, etc.

Moins nombreux dans les tranches d’âge élevées, les immigrés sont moins souvent retraités. La proportion d’étudiants parmi les immigrés est également plus faible : 7 % contre 10 % dans le reste de la population. Cependant, parmi les immigrés chinois, un sur trois est étudiant, et plus d’un sur dix pour les immigrés originaires de pays d’Afrique subsaharienne. Dans leur ensemble, les immigrés ont des niveaux de diplôme plus polarisés que les non-immigrés : il y a davantage de peu diplômés (61 % inférieur au Bac, contre 55 %) et de très diplômés (18 % niveau supérieur à Bac+3, contre 15 %). Parmi ces immigrés très diplômés, 17 % poursuivent leur cursus et sont encore étudiants, contre 7 % parmi les non-immigrés.

Deux tiers des immigrés vivent dans le Bas-Rhin, la Moselle et le Haut-Rhin (figure 2), trois départements dans lesquels réside un habitant de la région sur deux. Les immigrés optent souvent pour une résidence proche de la frontière avec les quatre pays voisins : Allemagne, Belgique, Luxembourg et Suisse. Ils habitent ainsi pour certains à proximité de leur pays d’origine (13 % des immigrés du Grand Est) ou de celui dans lequel ils peuvent travailler (plus de 40 000 travailleurs frontaliers sont immigrés). En Meurthe-et-Moselle, la proportion d’immigrés est dans la moyenne régionale, et elle est sensiblement inférieure dans les six autres départements.

Les immigrés sont particulièrement concentrés sur une faible partie du territoire : près de 90 % des immigrés vivent dans 10 % des communes, essentiellement frontalières. Beaucoup sont des communes urbaines, les immigrés s’installant de préférence dans les grands centres urbains. Les villes les plus peuplées sont par conséquent celles qui accueillent le plus d’immigrés, avec au premier rang Strasbourg et Mulhouse. La part de l’immigration est élevée dans l’ensemble de ces deux agglomérations, dépassant 15 % de la population, comme dans les EPCI (établissement public de coopération intercommunale) les plus attractifs pour la main-d’œuvre frontalière.

Le profil des immigrés est plus proche de celui des non-immigrés dans les territoires ruraux, avec davantage d’immigrés européens issus de vagues anciennes. Deux immigrés sur trois y ont un emploi, contre un sur deux en ville. Dans le rural, le taux d’emploi se rapproche davantage de celui des non-immigrés avec un écart de 5 points, contre 11 points dans l’urbain. Un immigré sur quatre a plus de 65 ans, contre un sur cinq dans l’urbain. Comme les non-immigrés, ils sont un peu plus nombreux à vivre en couple sans enfant qu’avec enfants. Le rural se distingue ainsi nettement de l’urbain, dans lequel le couple avec enfants est la forme dominante de cohabitation des immigrés.