Insee Analyses Occitanie · Juillet 2023 · n° 136

Années Covid : baisse de l'espérance de vie, dégradation de la santé mentale et téléconsultations en hausse

La forte mortalité enregistrée ces dernières années, due en partie à la pandémie de Covid-19, efface les gains d’espérance de vie de la décennie précédente. En 2022 en Occitanie, les femmes ont une espérance de vie à la naissance de 85,3 ans et les hommes de 79,6 ans, soit le niveau atteint dès 2013 pour les femmes et dès 2014 pour les hommes (figure 1).

Dès 2020, la pandémie met un coup d’arrêt à l’augmentation de l’espérance de vie des habitants d’Occitanie. L’espérance de vie commence à décroître et cette baisse se poursuit en 2021 et en 2022, essentiellement en raison de la pandémie mais aussi des épisodes de canicule et de grippe survenus en 2022. Au niveau national, l’espérance de vie repart légèrement à la hausse dès 2021.

En Occitanie, l’espérance de vie des femmes baisse moins fortement que celle des hommes en 2020 et en 2021, mais autant en 2022 (-0,2 an). Depuis le début de la pandémie, l’espérance de vie des femmes a baissé de 0,4 an et celle des hommes de 0,7 an.

En 2022, 66 900 habitants d’Occitanie sont décédés, toutes causes confondues. Depuis l’apparition du Covid-19, le nombre de décès augmente fortement (+5 % en 2020, puis +3 % en 2021 et en 2022), amplifiant la tendance observée depuis 2015. Ces hausses s’expliquent par le vieillissement de la population mais aussi par l’évolution des conditions de mortalité, liée à des évènements sanitaires ou climatiques inhabituels. En 2020 et en 2021, la dégradation des conditions de mortalité est responsable d’un décès supplémentaire sur deux (53 %) par rapport à l’année précédente. En 2022, les conditions de mortalité expliquent 71 % des décès supplémentaires (figure 2).

En 2020, la surmortalité touche essentiellement les personnes âgées de 65 ans ou plus. En 2021 et 2022, le taux de mortalité est plus élevé qu’en 2019 pour toutes les classes d’âge.

En 2020, 6 % des décès enregistrés en Occitanie sont liés au Covid-19, alors qu’ils représentent 10 % des décès en France. Le Covid-19 est la 5^e cause de décès dans la région et la 3^e en France. L’épidémie a commencé plus tardivement en Occitanie : dans la région, les effets se ressentent surtout à partir d’octobre 2020 alors que les décès augmentent fortement dès le mois d’avril en Île-de-France et dans le Grand Est. L’augmentation du nombre de décès suit les différentes vagues de Covid mais aussi les épisodes de grippe et de canicule (figure 3).

En parallèle, la vaccination a débuté dès le mois d’avril 2021 pour les plus de 75 ans, conformément au calendrier des autorisations et aux recommandations de vaccination nationales. Fin 2022, les habitants de la région sont un peu moins vaccinés que ceux de l’ensemble de la France métropolitaine (88 % contre 91 %), en particulier les plus jeunes (86 % contre 90 %).

Au total, depuis le début de la crise sanitaire et jusqu’à la fin de l’année 2022, près de 9 000 décès liés au Covid-19 ont été enregistrés à l’hôpital en Occitanie. Sur cette période, le taux standardisé de mortalité par Covid-19 est de 128 décès pour 100 000 habitants en Occitanie, région où il est parmi les plus faibles avec la Bretagne, la Nouvelle-Aquitaine et les Pays de la Loire. Il est le plus élevé en Île-de-France (302 décès pour 100 000 habitants) et atteint 192 décès pour 100 000 habitants en France métropolitaine.

Les décès augmentent dans tous les départements d’Occitanie sur au moins une des trois années suivant le début de la pandémie de Covid-19. L’Hérault et les Pyrénées-Orientales se distinguent avec une hausse des décès observée sur les trois années, 2020, 2021 et 2022. La détérioration des conditions de mortalité en est la principale cause, devant le vieillissement de la population.

En 2020, les décès augmentent le plus dans le Gard et les Hautes-Pyrénées (+8 %), mais ces hausses restent trois fois plus faibles que dans les départements français les plus touchés par le Covid-19, la Seine-Saint-Denis (+24 %) et le Haut-Rhin (+23 %). En 2021, la hausse des décès la plus élevée est enregistrée dans le Tarn, la Lozère et les Pyrénées-Orientales (+6 %), ces départements étant dans les 15 premiers en France métropolitaine. En 2022, trois départements de la région affichent les plus fortes hausses du nombre de décès : le Tarn-et-Garonne (+8 %, premier ex æquo avec les Pyrénées-Atlantiques), les Pyrénées-Orientales et l’Ariège (+7 %).

L’isolement et l’appauvrissement des interactions sociales provoqués par les confinements, le télétravail et la limitation des activités de loisir (en particulier la pratique sportive) ont entraîné une augmentation du mal-être dans la population. Entre 2019 et 2020, une part croissante de la population a recours aux médicaments psychotropes (antidépresseurs, neuroleptiques, anxiolytiques et hypnotiques). En Occitanie, le nombre de nouveaux patients consommant des psychotropes passe de 207 000 à 231 000, soit une hausse de 11 % en une année. Il s’agit principalement de patients âgés de 65 à 74 ans (+19 %) et de 18 à 24 ans (+18 %). En 2021, seul le nombre de jeunes consommant pour la première fois des psychotropes continue d’augmenter fortement : +23 % pour les 18-24 ans et +44 % pour les moins de 18 ans (figure 4).

Cependant, les effectifs de ces classes d’âges nouvellement consommateurs de psychotropes restent faibles : moins de 17 000 personnes sur un total de 243 000 nouveaux consommateurs en 2022.

De même, entre 2019 et 2021, le nombre de passages aux urgences pour tentative de suicide augmente fortement pour les plus jeunes : +11 % pour les moins de 15 ans et +20 % pour les 15-24 ans, alors que ce nombre est relativement stable pour l’ensemble de la population (+1 %). L’augmentation est particulièrement marquée pour les jeunes femmes de moins de 25 ans. Les tentatives de suicide avec passage aux urgences sont 1,8 fois plus nombreuses pour les femmes que pour les hommes.

Les périodes de confinement successives et la réorganisation des établissements de santé pendant la crise sanitaire ont eu un impact sur l’accès aux soins. Le nombre de patients reçus dans les établissements de la région chute de plus de 9 % en 2020, alors qu’il était en constante augmentation chaque année (en moyenne +1 % par an depuis 2014). C’est près de 90 000 patients en moins dans les établissements d’Occitanie en 2020. En parallèle, l’hospitalisation à domicile se développe fortement (+34 % entre 2019 et 2020), compensant en partie la baisse observée des séjours en soins de suite et de réadaptation (-17 %).

Pour les soins de ville, les consultations de soins dentaires et d’ophtalmologie chutent lors des confinements sans effet de rattrapage les mois qui suivent les confinements stricts. En 2021, le niveau d’activité des chirurgiens-dentistes revient à un niveau proche de celui de 2019.

Dès le mois de mars 2020, la téléconsultation se développe fortement, en particulier pour les consultations de médecins généralistes et spécialistes. Lors du premier confinement en avril 2020, plus de 420 000 consultations sont réalisées à distance contre seulement 3 300 en janvier 2020. Le recours à la téléconsultation persiste durant toute la période de la pandémie avec des pics enregistrés à chaque vague de contamination.

Le recensement de la population sert de base aux estimations annuelles de population. Il en fixe les niveaux de référence pour les années où il est disponible. Pour les années 2021 et 2022, les estimations de population sont provisoires.

Les statistiques d’état civil sur les naissances et les décès sont issues d’une exploitation des informations transmises par les mairies à l’Insee.

Les causes médicales de décès des personnes résidentes et décédées en France en 2020 s’appuient sur la statistique nationale des causes de décès produite par le CépiDc-Inserm à partir du recueil exhaustif et de l’analyse des volets médicaux des certificats de décès.

Les décès liés au Covid enregistrés à l’hôpital proviennent de Santé publique France (SPF).

Les données sur la vaccination contre le Covid-19 sont issues de la plateforme DataVaccin d’Améli (Assurance maladie).

Le nombre de patients reçus dans les établissements d’Occitanie est issu du Programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI) de l’Agence technique de l’information sur l’hospitalisation (ATIH).

Les données sur les soins de ville (consultations de soins dentaires et d’ophtalmologie), les téléconsultations et la consommation de psychotropes proviennent de la base des remboursements du Système national des données de santé (SNDS).

Le nombre de passages aux urgences pour tentative de suicide est extrait des résumés de passages aux urgences (RPU) de l’Observatoire régional des urgences (ORU) Occitanie.

Le nombre de licenciés dans les fédérations sportives scolaires provient du recensement annuel des licences et clubs sportifs de l’Injep.