Insee Analyses Grand Est · Avril 2023 · n° 157

163 bassins de vie dans le Grand Est

Le bassin de vie est le plus petit territoire sur lequel les habitants ont accès aux équipements et services les plus courants. Chaque bassin de vie est composé d’une ou plusieurs communes pôles de services, qui offrent un large éventail d’équipements nécessaires à une bonne qualité de vie, et de sa zone d’influence. On compte 1 705 bassins de vie en France en 2022, et 163 dont le pôle est situé dans le Grand Est (figure 1). Leur taille est très variable : le bassin de vie du Val d’Ajol dans les Vosges, avec deux communes, compte 4 100 habitants, et celui de Strasbourg, avec 37 communes, dépasse le demi-million d’habitants. Le bassin de vie de Reims, avec 131 communes, totalise 288 000 habitants.

La France compte 65 bassins de vie urbains denses, dont sept situés dans le Grand Est : ceux de Strasbourg, Nancy, Reims, Metz, Mulhouse, Troyes et Saint-Louis. Ils rassemblent plus d’un tiers de la population. La plupart sont, par construction, très étendus (figure 2), car ils comportent un nombre important de communes assurant le rôle de pôles de services. Les bassins de Strasbourg et de Saint-Louis regroupent toutefois moins de communes que les bassins de taille similaire, en lien avec leur proximité avec la frontière.

En moyenne, les 46 bassins de vie urbains de densité intermédiaire sont près de trois fois plus petits (261 km² par rapport à 742 km² pour les bassins de vie urbains denses) et près de sept fois moins peuplés (40 000 habitants contre 272 000 habitants) ; ils regroupent près d’un tiers de la population des bassins de vie du Grand Est. Il s’agit en grande partie des bassins organisés autour de grandes villes ou de villes moyennes comme Thionville, Colmar, Charleville-Mézières. Il y a aussi de petits bassins de vie accolés à ceux des grandes agglomérations, comme le bassin de Molsheim près de Strasbourg ou ceux de Dombasle-sur-Meurthe ou de Ludres près de Nancy. Enfin, ce type de bassins se situe également aux frontières nord de la région, par exemple Longwy et Villerupt à la frontière avec le Luxembourg.

Parmi les 163 bassins du Grand Est, deux sur trois sont ruraux (trois sur quatre en France). Ces bassins couvrent 70 % de la superficie de la région, mais rassemblent seulement un tiers de la population. On distingue des bassins de vie ruraux périurbains et non périurbains. Les premiers sont moins étendus et plus denses (335 km² en moyenne et 59 habitants au km²) que les seconds (386 km² et 37 habitants au km²).

Les bassins de vie ruraux non périurbains sont plus vastes, les communes disposant de l’équipement nécessaire pour être pôle de services étant nettement moins nombreuses et donc plus espacées. On trouve parmi eux les bassins de vie de Neufchâteau (1 470 km²) dans les Vosges, de Sainte-Menehould (1 215 km²) et de Vitry-le-François (1 051 km²) dans la Marne, et de Vouziers (1 016 km²) dans les Ardennes qui sont parmi les plus étendus.

Au sein de la région, la répartition des équipements les plus courants est proche de celle des habitants (figure 3). Ainsi, les bassins de vie urbains denses qui regroupent 34 % de la population, possèdent 33 % des équipements de la gamme de proximité et 37 % de ceux de la gamme intermédiaire.

Toutefois, une différence nette entre types de bassins de vie existe pour les équipements de la gamme supérieure. Les bassins de vie ruraux n’en possèdent que 24 % pour 33 % de la population. Ces équipements, sont en effet plus nombreux en proportion dans les bassins de vie urbains denses (41 %). La moindre présence d’équipements de la gamme supérieure affecte à la fois les bassins de vie ruraux périurbains et non périurbains, contraignant leurs habitants à se déplacer vers d’autres bassins.

Rares sont les équipements de la gamme de proximité qui manquent dans les bassins de vie ruraux. Si la totalité d’entre eux dispose de boulangeries, d’écoles élémentaires, de pharmacies ou de coiffeurs, quelques-uns ne disposent pas de boucherie/charcuterie ou d’entreprise du bâtiment. Par contre, l’absence d’un ou plusieurs équipements de la gamme intermédiaire est plus fréquente. Tous les bassins de vie ruraux possèdent un collège et presque tous ont au moins une station-service et un supermarché. Cependant un cinquième des bassins de vie ruraux ne dispose pas de sage-femme et un tiers n’a pas de service d’aide aux personnes âgées. De même, certains commerces comme les magasins de chaussures ou ceux de matériel médical et orthopédique sont absents dans un tiers des bassins de vie ruraux du Grand Est.

Enfin, les équipements de la gamme supérieure sont peu présents dans les bassins de vie ruraux (figure 4). À titre d’exemple, on trouve des spécialistes en pneumologie dans moins d’un bassin rural sur dix, et des spécialistes en pédiatrie dans un sur six. Il existe néanmoins des nuances selon leur caractère périurbain ou non : ainsi, 36 % des bassins de vie ruraux périurbains disposent d’un lycée, soit 11 points de moins que les non périurbains. Les premiers offrent une diversité de commerces plus importante, alors que les seconds possèdent une plus grande variété d’équipements culturels. En effet, 51 % des bassins de vie périurbains ont un hypermarché, contre 38 % des non périurbains ; les proportions sont de 31 % et 46 % pour les cinémas.

Les bassins de vie urbains denses de Reims, Nancy, Metz, Strasbourg et Mulhouse disposent de tous les équipements. Le bassin de vie de Troyes n’a pas de structures psychiatriques en ambulatoire dans la gamme supérieure. Celui de Saint-Louis ne compte que 37 types d’équipements sur les 47 de cette gamme. En revanche, il en possède 34 sur 35 de la gamme intermédiaire.

Dans les bassins de vie urbains de densité intermédiaire, on trouve la quasi-totalité des équipements de proximité, 91 % des équipements de la gamme intermédiaire et 57 % des équipements de la gamme supérieure. Les différences sont plus marquées pour les bassins de vie ruraux : si pratiquement tous les équipements de proximité sont présents, ils ne sont plus que 82 % dans la gamme intermédiaire et 30 % dans la gamme supérieure. Dans les bassins de vie ruraux du Grand Est, cette inégalité se retrouve autant dans le périurbain que dans le non périurbain.

Le nombre d’équipements par habitant est plus élevé dans les bassins de vie ruraux non périurbains, que dans les bassins ruraux périurbains (respectivement 300 et 292 équipements pour 10 000 habitants). Mais de fortes disparités existent selon les domaines et les équipements.

Dans le domaine de la santé, le taux par habitant est un peu plus important pour les médecins généralistes, les masseurs-kinésithérapeutes ou les chirurgiens-dentistes dans les bassins de vie urbains denses ; au contraire, il est plus faible dans les bassins de vie ruraux non périurbains. Les premiers comptent 11 généralistes pour 10 000 habitants, et les seconds 8. Cependant, dans les bassins de vie ruraux, la proportion par habitant de pharmacies et d’infirmiers est plus élevée qu’en moyenne. De même, ces bassins possèdent des taux d’équipements par habitant plus importants dans le domaine de la prise en charge du handicap et de la vieillesse, notamment pour les soins à domicile. Les écarts les plus importants avec l’urbain, concernent les médecins spécialisés (pédiatres, psychiatres, pneumologues…) : les bassins de vie ruraux ont un cardiologue pour 25 000 habitants, contre 1 pour 9 000 dans les bassins de vie urbains.

Dans le domaine des commerces, en lien avec l’usage de la voiture, les stations-services sont deux fois plus fréquentes dans les bassins de vie ruraux non périurbains que dans les bassins urbains denses (respectivement 2,2 et 1,1 pour 10 000 habitants). Les bassins de vie ruraux comptent également plus souvent des boulangeries et des boucheries. En revanche, certains commerces sont plus nombreux dans l’urbain : les magasins d’optique ou les hypermarchés dans l’urbain intermédiaire, et les commerces d’habillement ou de parfumerie dans l’urbain dense.

Enfin, dans les domaines des sports, des loisirs et de la culture, les bassins de vie ruraux sont mieux équipés en moyenne, notamment en bibliothèques (4,0 pour 10 000 habitants, contre 1,6 dans les bassins de vie urbain), ainsi qu’en terrains de tennis, boulodromes et bassins de natation. Mais les bassins de vie urbains ont des taux d’équipement en salles de sport spécialisées et en lieux de spectacles plus élevés par habitant : ils comptent en effet 1,9 lieu de spectacles pour 100 000 habitants contre 0,8 dans le rural.

Pour les équipements de la gamme de proximité, les temps d’accès moyens varient du simple au double selon que le bassin de vie est de type urbain dense (3,0 min) ou de type rural non périurbain (5,9 min, figure 5). Les temps d’accès moyens les plus longs concernent des bassins de vie ruraux non périurbains comme ceux de Fayl-Billot et Bourbonne-les-Bains dans la Haute-Marne, ou Sainte-Menehould dans la Marne. Ce sont des bassins de vie mono-pôle.

Pour la gamme intermédiaire, les temps d’accès sont plus importants que pour la gamme de proximité, et l’écart des temps d’accès moyens entre l’urbain dense et le rural non périurbain augmente (5,9 min contre 11,9 min). Rares sont les bassins de vie ruraux dont les habitants bénéficient de meilleurs temps d’accès, à part quelques exceptions, comme ceux de Geispolsheim et de Sélestat dans le Bas-Rhin.

Enfin, pour accéder aux équipements de la gamme supérieure, les habitants des bassins ruraux doivent faire des trajets beaucoup plus longs que les habitants des bassins urbains : les temps d’accès varient du simple à près du triple entre l’urbain dense (8,6 min) et le rural non périurbain (23,3 min). Les temps d’accès aux équipements de la gamme supérieure sont les plus courts pour les bassins de vie des plus grandes villes de la région. À noter que les bassins de vie de Chaumont et de Bar-le-Duc sont légèrement en retrait par rapport aux autres villes où siège une préfecture. Avec des équipements moins présents et un éloignement important des principaux pôles de la région, quelques bassins de vie de Haute-Marne (Bourbonne-les-Bains, Fayl-Billot), de la Meuse (Montmédy, Stenay) ou de l’Aube (Bar-sur-Seine, Arcis-sur-Aube) enregistrent les temps d’accès les plus élevés.

Entre 2013 et 2021, de nouveaux équipements se sont implantés aussi bien en milieu rural qu’en milieu urbain, y compris dans les zones les plus rurales, dans lesquelles la population n’a pas augmenté voire a diminué.

Dans le commerce, le nombre de supermarchés progresse partout, mais la hausse dans les bassins urbains denses de la région est près de deux fois supérieure à la progression moyenne. Ces bassins urbains sont les seuls à gagner des boulangeries par rapport à 2013 ; le nombre de boulangeries recule en effet dans les autres types de bassins de vie, en particulier dans les ruraux non périurbains qui en perdent une sur douze. Le repli est plus important et généralisé pour les librairies/papeteries ; les bassins de vie du Grand Est en ont perdu une sur six en huit ans.

Dans le domaine de la santé, les médecins généralistes sont, eux aussi, moins nombreux dans tous les types de bassins de vie. En particulier dans les ruraux non périurbains, qui ont perdu un généraliste sur sept depuis 2013. À l’inverse, de très nombreux infirmiers se sont installés sur la période, le gain va de 40 % dans les zones rurales non périurbaines à plus de 50 % dans les zones urbaines denses.