Insee Analyses Normandie · Janvier 2023 · n° 110

81 200 emplois de cadres dans les fonctions à forte valeur ajoutée en Normandie

Les emplois de cadres et de chefs d’entreprise à contenu intellectuel, décisionnel ou technique élevé peuvent être considérés comme « stratégiques » du fait de leur contribution au rayonnement et au développement économique des métropoles. La présence de ces emplois hautement qualifiés et spécialisés, dans des secteurs à forte valeur ajoutée, semble favorable à l’innovation et au développement des entreprises (pour en savoir plus). En outre, la présence d’actifs au pouvoir d’achat élevé au sein des territoires stimule l’activité locale. Le contour de ces emplois peut être appréhendé en considérant les cadres et chefs d’entreprise exerçant des fonctions de conception-recherche, de gestion, de commerce interentreprises, de prestations intellectuelles ou de culture-loisirs (fonctions qualifiées de « métropolitaines ») .

En 2019, les cadres des fonctions métropolitaines regroupent 81 200 emplois en Normandie (comptabilisés au lieu de travail et occupés par des actifs résidant en Normandie ou dans d’autres régions), soit 6,4 % des emplois de la région (figure 1). Cette part apparaît plus faible qu’en moyenne nationale (8,4 % en France métropolitaine hors Île-de-France), à la fois dans l’ensemble de la région comme dans chacun des cinq départements normands. Le poids des cadres des fonctions métropolitaines dans l’emploi est, en Normandie, similaire à celui observé en Bourgogne-Franche-Comté (6,4 % des emplois) et proche de ceux constatés dans les autres régions voisines de l’Île-de-France (Grand Est, Centre-Val de Loire et Hauts-de-France avec un peu plus de 7 %).

La région francilienne se détache nettement des autres régions avec plus d’un emploi sur cinq appartenant à la catégorie des cadres des fonctions métropolitaines, une part deux fois plus importante que la deuxième région (Auvergne-Rhône-Alpes avec un emploi sur dix). L’influence de l’Île-de-France, en tant que pôle économique et d’emplois de niveau international, s’étend bien au-delà des limites régionales en attirant une main-d’œuvre qualifiée, laquelle provient particulièrement des régions limitrophes incluant la Normandie (encadré 1).

Compte tenu de leurs caractéristiques « métropolitaines », trois aires d’attraction des villes de Normandie se distinguent de la moyenne régionale pour la part des cadres des fonctions métropolitaines dans l’emploi total : Rouen, Caen et Le Havre (avec respectivement 8,2 %, 7,9 % et 6,6 %; figure 2). Cependant, malgré leur importance en nombre d’emplois, aucune d’elles n’atteint la moyenne nationale. En comparaison à des aires d’attraction des villes de taille similaire situées dans d’autres régions, le poids des cadres des fonctions métropolitaines apparaît souvent plus faible au sein des trois aires normandes (figure 3).

Cette faible présence des cadres des fonctions métropolitaines au sein de l’emploi normand résulte à la fois d’une moindre présence des emplois qualifiés et d’une sous-représentation des fonctions métropolitaines au sein de l’emploi régional, ces deux phénomènes contribuant à parts égales dans l’écart observé avec le niveau national. Les emplois de cadres représentent en effet 13 % des emplois normands contre 16 % pour l’ensemble de la France métropolitaine hors Île-de-France. En particulier, 31 % des emplois appartenant à l’une des fonctions métropolitaines sont de niveau cadre en Normandie contre 36 % d’entre eux au niveau national. Par ailleurs, les emplois des fonctions métropolitaines représentent 21 % des emplois en Normandie contre 23 % en France métropolitaine hors Île-de-France. Ce constat se vérifie pour chacune des cinq fonctions métropolitaines, avec un écart relatif important pour les fonctions de conception-recherche et de prestations intellectuelles (figure 4). En contrepartie, compte tenu des spécificités économiques de la Normandie, les fonctions dites « transversales » (correspondant aux fonctions de transport, logistique et d’entretien, réparation), et celles de « production » (comprenant la fonction de fabrication, le bâtiment-travaux publics et l’agriculture), sont fortement représentées dans la région.

L’emploi hautement qualifié a pourtant progressé de manière continue en Normandie au cours des dernières années. Depuis le début des années 1980, le poids des cadres des fonctions métropolitaines a plus que doublé en Normandie et on observe une dynamique particulièrement favorable depuis la fin des années 1990 (figure 6). L’écart s’est toutefois creusé avec le niveau national : le poids des cadres des fonctions métropolitaines passe de 3 % à 6 % de l’emploi en Normandie entre 1982 et 2019 contre 4 % à 8 % pour l’ensemble de France métropolitaine hors Île-de-France. Au cours de cette période, la part des cadres des fonctions métropolitaines dans l’emploi a progressé moins fortement en Normandie qu’au niveau national pour chacune des cinq fonctions métropolitaines. L’écart s’est particulièrement creusé pour les fonctions relatives aux prestations intellectuelles et à la conception et la recherche. Durant cette même période, la conception-recherche contribue à hauteur de 0,7 point dans l’augmentation de la part des cadres des fonctions métropolitaines pour la Normandie contre 1,3 point au niveau national (pour la prestation intellectuelle, 0,7 point contre 1,2 point).

Les actifs occupant des emplois de cadres des fonctions métropolitaines sont plus souvent des hommes en Normandie (64 %), comme au niveau national. Dans la région, les titulaires de ces emplois sont en revanche un peu moins jeunes (36 % d’entre eux ont moins de 25 ans contre 38 % pour l’ensemble de la France métropolitaine hors Île-de-France ; figure 8). Ils présentent des niveaux de diplôme moins élevés : 13 % n’ont pas le baccalauréat contre 10 % au niveau national ; 41 % possèdent un diplôme de niveau bac+5 contre 47 % au niveau national. Par ailleurs, les femmes occupant un emploi de cadres des fonctions métropolitaines sont davantage diplômées que les hommes : 92 % d’entre elles ont le bac ou plus contre 85 % de leurs homologues masculins ; cet écart apparaît plus marqué en Normandie qu’au niveau national (93 % contre 89 %).

En Normandie comme dans l’ensemble de la France métropolitaine hors Île-de-France, les cadres des fonctions métropolitaines bénéficient d’un salaire équivalent à ceux de l’ensemble des cadres : en moyenne, un peu moins de 3 900 euros nets par mois en équivalent temps plein. Toutefois, les niveaux de rémunération apparaissent très hétérogènes entre les cinq fonctions métropolitaines, variant de 2 800 euros nets mensuels en moyenne pour les cadres de la fonction de culture-loisirs à 4 200 euros pour ceux du commerce interentreprises.